Brouillard total. J'entends de la musique, un air techno qui ne m'est pas inconnu, et divers bruits humains. Tels qu'ils soient. Indistinctement ; tout est embrouillé. Des projecteurs de toutes les couleurs imaginables et inimaginables balayent l'endroit ; ça sent l'alcool et le tabac. J'ai l'impression d'avoir été bourré et drogué, j'ai mal à la tête affreusement. Le tempo du son d'à côté retentit en moi, comme si mon coeur battait avec la musique; mais j'ai la sensation qu'elle me contrôle quasiment. Je n'ai quasiment plus d'équilibre ; j'ai la sensation de ne plus être en possession de mon corps, d'être là sans être là. D'ailleurs, je n'étais pas là ; je ne me voyais aucunement ; c'était vraiment très étrange. J'entends des grognements. Comme un souffle bestial. Profond et puissant. Cette ambiance floue de nightclub pas net est toujours là. Proche. Je cherche quelque chose?... Je ressens une sensation pokémonale, des impulsions, et une envie phénoménalement puissante. Je ne sais pas de quelle envie ; j'ai perdu le contrôle de mes mouvements. Je crois que je ne suis plus le crâne dans le nightclub, je pense être à côté. Il fait sombre ; la musique est étouffée. Soudain, je l'ai trouvée. La chose que je semblais chercher. Aucun bruit anormal ; peut être que le souffle et la violence deviennent plus âpres. Et là, hormis mon mal de crâne tout compte fait plus étrange que douloureux, j'ai l'impression d'être heureux. Je me sens incroyablement bien. Je ne me suis jamais senti aussi bien. Je n'ai jamais ressenti ceci auparavant. Je n'espère rien, à part que tout ceci soit faussement véritable. Tout... Tout est... bizarre, inattendu... Inopiné, étrangement flou, embrumé... Je suis... Défoncé... Dans tous les sens du terme... Ma... Tête... Que... Que se passe-t-il... Mon... Moi... Subconscient... Mal... Sauvage... Non... Je... Cette chose... Je... Ce n'est pas... C'est... Tellement... Pas... Coupable... Encore... Une fois... Que... Je... Moment... Envie... Se... Pourrait-il que je... L'aime?
- AAAAARRRRRRRRRGH!
J'ai extrêmement chaud, je hurle, j'ouvre les yeux, je m'assois. Je suis en face du Salamèche,
du Fragilady, du Polarhume. Ils semblaient attendre impatiemment que je me réveille.
- Wouah! Bah dis donc! Tout va bien? me demanda Fire, inquiet pour moi. T'étais vachement agité ; ça fait quinze minutes que t'es comme ça.
C'était horrible.
- Tu n'ouvrais pas les yeux, tu gesticulais de partout... enchaîna Lilas, qui avait l'air de ce remettre d'une certaine inquiétude. Ça t'arrive souvent?
Cet instant. Maintenant que j'y pense, c'était horrible. Terrifiant. Je devais avoir une sacré tronche, vu la leur. Je bafouillai:
- Ou... Oui... C'est la première fois qu'un truc pareil m'arrive... Qu'est-ce qu'il s'est passé?
Je recouvrai petit à petit mes esprits: en remarquant que notre habitacle bougeait, et que, par une ouverture grillagée j'apercevais les buildings de Volucité, je me souvins.
- T'étais encore en train de parler à ta voix quand le camion a été un peu secoué, t'es tombé et tu t'es cogné la tête. On est en route pour le commissariat, là. Si tu cherches un coupable, cherche un Polarhume, assura Fire en foudroyant le gosse du regard.
- Ce n'est pas sa faute! Le pauvre avait froid! défendit aussitôt Lilas.
- Oh? Il avait froid? geignit théâtralement Fire. C'est peut-être à cause de la glace qu'on est allé lui chercher pour ne pas qu'il ait chaud?
- Probablement, oui! cria Lilas. C'est pas sa faute, ce n'est qu'un bébé!
Bisou se mit à chialer. C'est pas vrai, déjà que je n'étais pas dans mes meilleurs jours... Fire gueula:
- ON N'A PAS QU'A FAIRE DU BABY-SITTING LORS D'UNE MISSION DE SAUVETAGE!
- QUELLE MISSION DE SAUVETAGE? TOUT CE QU'ON FAIT, C'EST SUIVRE UN POKEMON PAUMÉ!ON N'A PERSONNE A SAUVER, J'TE RAPPELLE!
- SI JUSTEMENT! hurla le chef.
- HA OUI? QUI?
- FRERE PLUME! lança-t-il en me pointant du doigt sans quitter Lilas du regard.
[...]
- Moi je veux embêter personne hein... murmurai-je en me tenant le crâne, encore sonné de mon expérience.
- IL EST COMPLETEMENT PAUMÉ COMME TU DIS, ET TOUT CE QU'IL A, C'EST UN POKEMON ZARBI AUTOUR DU COU, UNE VOIX DANS LA TÊTE, ET DES RÊVES CHELOUS! SI ÇA, C'EST PAS QUELQU'UN QU'A BESOIN D'AIDE!
Lilas ne bronchait pas. Bisou se calma soudain.
- On a créé cette équipe d'exploration et de sauvetage ensemble, alors on continue ensemble! poursuivit Fire. On était tous les deux d'accord pour venir en aide à ceux dans le besoin, et ce à n'importe quel prix! Alors arrête un peu de faire ton asociale depuis qu'on a rencontré Frère Plume, et tu fais comme moi: tu combats l'adversité pour mener à bien notre mission!
Elle baissa la tête, Bisou la regarda tristement. Personne ne bougea durant quelques secondes. Puis elle s'avança doucement, passa devant le meneur, fier de son discours, manqua de trébucher, parce qu'à l'arrière d'un camion, ça secoue un peu, et vint me voir:
- Je... Je suis désolée si je t'ai semblé froide et distante... C'est... C'est juste que... Je...
Elle releva d'un coup la tête, me regardant droit dans les yeux, fixant donc ma tête d'emplumé ahuri, et jura en serrant la feuille:
- Je te promets de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour t'aider! Car nous sommes une équipe de secours! Je te jure que je...
Puis le camion pila soudain. L'arrêt soudain nous projeta contre le fond du véhicule ; nous nous prîmes la porte. On entendit la portière avant claquer, des pas, et enfin quelqu'un ouvrit brusquement les portes, nous faisant nous écrouler sur le trottoir. Je relevai la tête, et aperçus un gars en uniforme, un flic quelconque. Il envoya un Ponchien ; le Pokémon Fidèle sortit en aboyant, et s'asseyant fièrement à côté du tas de vermine nuisible à une enquête policière que nous étions.
- Conduis-les en en garde à vue ; il y passeront quelques minutes, ça leur apprendra à traîner sur une scène de crime.
- De suite, maître! obéit le Pokémon.
Ce dernier se tourna vers nous et se mit sur ses pattes:
- Bon, vous me suivez?
Il reste plus que cinq minutes. Cinq petites minutes à attendre dans cette salle froide de commissariat. La description, c'est rapide: du carrelage blanc, des murs jaunes (ou jaunis), deux bureaux d'acier entourés de paravents vitrés devant nous, qui sommes assis sur de vulgaires chaises en plastoc longeant le mur. Fire, assis à ma gauche, patientait, bien qu'assez agacé que l'on perde du temps. A ma droite, Lilas avec Bisou sur elle, eux aussi patientaient tant bien que mal. Bien que je crus voir une once de culpabilité dans le regard de Lilas. M'enfin bon. Il nous reste que cinq minutes de garde à vue. J'aime pas ces lois-là.
- Et sinon, vous venez d'où?
Le Ponchien qui se tenait debout à nos côtés, fidèle au poste, voulait apparemment lancer une discussion.
- On est une équipe de secours, l'ami, grommela Fire.
L'autre sembla étonné:
- Sans blague?! Sérieusement?!
- Bah... Oui.
- Je peux voir vos badges?
Fire se sentit soudain plus fier, mit la patte dans la première poche du Sac à Trésor, et brandit un badge de rang...
- Normal? C'est pas beaucoup, lança le Ponchien.
- HÉ, HO, C'EST PAS FACILE, HEIN! UN PEU DE RESPECT! s'énerva le meneur d'équipe.
- Ouais, nan mais j'ai pas dit ça! Mais bonne nouvelle! Vous pouvez vous en aller!
Lilas fut surprise:
- Heu... Ah oui?
- Oui! Vous êtes une équipe de secours, alors ne perdez pas votre temps! sourit tout simplement le Pokémon du flic.
C'était un peu fort. Surtout pour le détenteur dudit badge, mais bon, je l'avais en travers de la gorge aussi.
- VOUS VOULEZ DIRE QU'ON S'EST FAIT CHIER A ATTENDRE COMME DES GLANDUS POUR RIEN, ALORS QU'IL SUFFISAIT DE VOUS MONTRER NOTRE BADGE?! vociféra le meneur.
- Oui.
[...]
- ON EST LIBRES! hurlai-je soudain.
Hélas. Je hurlai. Dans un commissariat. Et, encore une fois, j'oubliai que moi, on m'entendait.
Ça fait cinq minutes. Cinq longues minutes qu'on m'a cloué sur une chaise. On m'a fait monter trente étages ; ils avaient plus de place au rez-de-chaussée pour faire une salle d'interrogatoire, ils ont dû la faire au-dessus des locaux de l'entreprise du dessus, une entreprise en développement de publicité pour cotons-tiges qui s'étend sur 29 étages. Pour faire chier le monde, quoi. Ma chaise est aussi pourrie que les autres. Sauf que là, je suis alone dans une salle désormais sombre, au bout d'une table blanche en bois, éclairée par une ampoule blanche au centre du plafond, et avec à l'autre bout de cette table, en face de moi, assis sur une même chaise pourrie, mais dos à un miroir sur le mur, me sondant du regard depuis ces 300 secondes, un homme en tenue noire, cravate, cheveux très courts. Pas un flic normal, quoi.
- C'est clair que t'es dans la merde, souffla la Voix de la Raison.
Je t'ai rien demandé. Le type en face faisait vraiment flipper. Qu'est-ce qu'il me veut, merde?
- Tu sais ce qu'on te veut? demanda-t-il soudain avec une voix froide.
- Bah non, justement.
Il se leva alors doucement, faisant grincer sa chaise sur le sol, et se mit à faire les cents pas autour de la table:
- Tu parles. Tu traînais autour d'une scène de crime. Tu as une Compèt Ball accrochée à un ruban autour du cou.
- Et ?
Il déballa tout d'un coup:
- Et voilà ce que je pense: t'es un petit gars pas con, t'as volé un type et tu te retrouves dans cette histoire de meurtre.
C'était le pompon. Je bafouillai précipitamment:
- Heu, non, non, non, j'ai rien fait de mal moi! J'ai juste...
- Taratata ! Tu me laisses finir? coupa-t-il net en élevant la voix.
- J'te l'avais dit, t'es dans la merde, renchérit la Voix.
- Donc! Voilà ce que je te propose, continua le flic pas comme les autres, tu nous sers de témoin dans cette enquête, et on ne parlera plus de cette histoire de vol, hm?
- Ecoutez, j'ai rien volé du tout, je me suis trouvé là-bas par hasard, et je...
Qu'est-ce que je pouvais dire? Sérieusement? Que j'étais un être humain transformé en Pokémon? La bonne blague. Que la Ball que j'ai autour du cou, elle m'appartient, et que le Pokémon à l'intérieur a assez de puissance pour détruire tout ce qui bouge? Que je me suis fait enlever? Toujours aussi drôle. Que je... Soudain, l'idée.
- Je veux parler au chef de la Police Internationale.
Le flic en costard fut amusé:
- Tiens donc? Et pourquoi est-ce que je le ferais venir sous les réclames d'un Pokémon errant?
- Premièrement parce que je suis un Pokémon errant qui sait réclamer à voix haute, et deuxièmement parce que Beladonis est venu à ma rencontre. Donc je crois que vous vous êtes trompé sur mon compte ; et n'oubliez pas le chef.
Il faisait moins le malin, l'abruti. En entendant le nom de Beladonis, il déglutit, et commença à flipper, changeant d'expression du tout au tout. Il sortit en cachant son désarroi, en me précisant de patienter. Fier de mon coup, j'étais.
- Fais quand même gaffe. Je le sens pas, moi.
- Oh, ça va hein, rétorquai-je à la Voix, pour l'instant, c'est moi qui suis dans la mouise, je vois pas pourquoi tu t'inquiètes ; tu risques rien.
- Je m'inquiète pour toi, Chris.
J'eus un frisson.
- Oh... C'est sympa.
- Cherche pas, t'as une mission qui t'es confiée, c'est juste pour ça.
Je me disais aussi. Brusquement, la porte se rouvrit, le même flic que tout à l'heure la tenait ouverte. Un homme, d'environ soixante ans, un peu voûté, un imperméable usé beige, la chemise blanche et la cravate, les cheveux grisonnants et un regard fermé mais amusé, entra dans la pièce, me considéra, sourit, s'avança, puis me tendit la main:
- Enchanté, mon petit monsieur. Appelez-moi Columbo.
Je lui serrai la main avec mes deux griffes de patte droite :
- Comme le Pokémon?
Il sourit gentiment:
- Non, plutôt comme le plat cuisiné.
C'est un marrant, lui. Il fit signe à l'autre de se casser, ce qu'il fit aussitôt, puis Columbo s'assit en face de moi, à sa place.
- Vous êtes le chef de la Police Internationale?
Il leva les bras:
- C'est bien lui que tu as demandé, non?
J'acquiesçai.
- Alors le voilà, sourit-il. Tu voulais donc me voir?
- Oui. Beladonis est venu me voir. Vous savez, votre agent qui s'est fait enlevé à Verchamps, dans le Centre Pokémon.
Columbo hocha la tête nonchalamment:
- En effet, oui, c'est lui. Je crois me rappeler de cette affaire...
Un peu fort en chocolat.
- Vous croyez vous en rappeler?! Il est venu me dire que j'étais en danger, juste avant que des abrutis de connard de merde en cagoule débarquent dans le Centre, nous matraquent et nous enlèvent! Je me réveille dans une autre région du globe, métamorphosé comme par magie en Pokémon! ET VOUS CROYEZ VOUS EN RAPPELER?!
- Hé ho, doucement, mon gars, hm? calma le vieux en imper. Je suis pas le chef de la Police Internationale pour rien. Beladonis, c'est un de nos agents, effectivement. On l'a mis sur une affaire ; tout ce qu'on sait dessus, c'est ce qu'il nous a rapporté. C'est lui qui mène son enquête, c'est lui qui se met dans ses problèmes.
- Peut-être, mais comme vous l'avez dit, il vous fait parfois des rapports. Alors?
Columbo sourit:
- T'es un malin, mon gars. Mais je vais pas tout te déballer comme ça, car sache que c'est une affaire secrète, seuls les membres hauts-placés de la Police Internationale sont au courant. Les petits flics ne le sont pas, pas plus que ceux que tu vois dans ce commissariat. Donc il faut que tu m'aides en contrepartie, n'est-ce pas?
- Aucun problème, conclus-je. Vous me dites tout ce que Beladonis a daigné vous divulguer sur cette affaire, et je vous aide pour cette affaire de meurtre.
- Marché conclu, mon gars.
Il mit sa main dans une poche de sa veste, sortit un cigare, l'alluma avec un briquet, puis fouilla dans une poche extérieure, tout en fumant. J'aime pas le tabac, mais dans ces cas-là, faut faire un grand sourire et toussoter.
- Voilà toute l'affaire, mon gars, commença-t-il en dépliant de la paperasse sur la table sans même me demander si son truc fumant m'accomodait ou non. Y a trois mois, un de nos agents a disparu en enquêtant sur un homme.
Le chef me montra une photo de l'homme en question: le zarbi avec les cheveux rouges, les lunettes noires, la tenue bizarre et le Drattak.
- On a envoyé Beladonis sur ses traces, poursuivit-il. Il a découvert que l'homme côtoyait un certain Giovanni.
- Attendez... Vous voulez dire Giovanni, l'ancien leader de la Team Rocket?
- Faut croire. L' "ancien" leader, comme tu le dis. Cet homme entretenait des relations par téléphone, depuis des cabines, et appelait Giovanni. Il était très remonté envers l'ex-leader, et semblait vouloir négocier.
- Négocier quoi?
- Giovanni était apparemment dans l'organisation de quelque chose de louche, et cet individu voulait négocier pour trouver une alternative à cette organisation, ce plan. Puis Beladonis est parti.
- Hein? Comment ça, "parti"?
- Il est parti, c'est tout. En signalant qu'il poursuivait son enquête, que c'était vraiment quelque chose de gros, d'énorme, et qu'il lâcherait pas. En précisant également de penser à vérifier les dispositifs des plans d'urgence de niveau d'Alerte 10, soit le maximal.
Je voulus savoir ce que ce "niveau d'Alerte 10, soit le maximal" était ; il sembla soudain plus grave.
- C'est l'ultime recours aux situations extrêmes, il n'a d'ailleurs jamais été utilisé. Il y en a un par région ; il consiste à la faire déserter complètement, humains, Pokémon, tout ce qui est possible et inimaginable vers l'endroit viable le plus loin du danger mais le plus proche de la région. Comme tu l'entends, ce serait gravissime si nous devions l'enclencher.
Putain. En gros, "vérifier les plans d'Alerte 10, soit le niveau maximal", ça veut dire qu'on a de grandes chances d'être dans la merde. Columbo revint à l'affaire, et finit:
- Sa dernière trace de vie, c'est la petite visite qu'il t'a rendu, et on sait tous les deux comment ça s'est fini.
- Ouais. Ça m'avance pas plus que ça, je sais juste que c'est dangereux.
Columbo prit alors un papier entre ses mains, cigare à la bouche, et pointa quelques lignes:
- Il est aussi écrit que l'homme a un contact. Apparemment, il lui fournirait des informations sur cette organisation. Ils devraient se rencontrer très prochainement, si ce n'est pas déjà fait.
Je rétorquai:
- Mais, concernant Giovanni... Il est pas censé être surveillé? Après tout ce qu'il a fait, il devait être en prison ou un truc dans le genre?
- Il l'est, en prison. Bâtiment carcéral de Hoenn, cellule n°151, si tu veux tout savoir. C'est bien ça le problème dans cette enquête, le principal suspect qu'on a est en tôle, soupira Columbo. Il nous reste que le bonhomme aux cheveux rouges.
La vache. C'est quoi cette histoire de dingue encore?
- Bon, à toi, maintenant, sourit Columbo. T'es qui, d'où tu viens, et qu'est-ce que t'as vu.
Chiottes. Faut que je dise quoi au juste? Je raconte TOUT le bordel avec Solarius?
- Heu... Bah rien, normal quoi. Je suis Chris, fils de Lovis le Teigneux et de Cynthia, Maître de la Ligue Pokémon de Sinnoh. Je suis de Verchamps, j'étudie pour devenir Archéologue Pokémon, genre les légendes et les Pokémon légendaires qui vont avec. J'étais tranquillou au Centre Pokémon quand Beladonis m'a accosté.
- T'es sûr? T'as rien fait de spécial qui pourrait te mettre en danger?
Je repensais à ce que m'avais assuré Dialga, quand j'étais Là-Haut: "Je vais corriger ce paradoxe, faire comme si tes parents s'étaient rencontrés, hm?" et qu'il allait faire que ce soit ma grand-mère (et oui, je ne connais pas ma grand-mère, allez savoir pourquoi on ne me l'a jamais présentée) qui fasse rencontrer mes parents. Que la Sylphe serait en place, que mes Pokémon soient avec moi, et comme on a empêcher Blue de téléporter le météore, il est donc bien tombé, et ça signifie que tout ce qui s'est passé n'a jamais existé. Pour mon père, je suis parti un jour, rentré le lendemain, et je me suis fait kidnappé en l'appelant. Pour tout ceux qui n'étaient pas avec nous, ça s'est passé comme ça, grâce à Dialga, on se souvient de tout, et Genesect existe malgré tout. Mais autrement dit, il ne s'est jamais rien passé dans
ce présent. Personne ne sait que nous avons sauvé le monde, personne ne sait que un Pokémon comme Genesect existe, personne ne peut rien savoir. Donc je ne dois avoir aucun ennemi à cette époque, non?
- Ouais, je suis certain. Je vois pas ce qui pourrait me mettre en danger.
Columbo réfléchit:
- Tes parents ont une certaine notoriété, c'est peut-être après eux qu'on en a?
C'est vrai, ça! J'étais tellement habitué à ce que l'on veuille me zigouiller que j'étais certain d'être la cible... Mais si la cible, c'était mes parents?
- Pourquoi est-ce qu'ils m'auraient transformé en Arkéapti, alors?
- Je n'en sais rien. Si c'est de l'argent qu'ils voulaient, il t'auraient gardé et demandé une rançon.
Columbo mit les mains sur la table, le cigare entre l'index et le majeur, et certifia:
- Ce dont je suis certain, c'est qu'on t'a enlevé avec un de mes agents. Tes Pokémon ont été volés. Pas ceux du Centre entier. Tu t'es retrouvé libre, mais en Pokémon. Beladonis, on ne sait pas s'il est toujours prisonnier ou non. Tes Pokémon, on ne sait pas ce qu'ils sont devenus. Mais...
Il regarda la Compèt Ball que j'avais enlacée dans un ruban, ce dernier autour de mon cou:
- Ils t'ont laissé un Pokémon... Pourquoi est-ce qu'ils te l'ont laissé ? Quelle était précisément leur cible au Centre à Verchamps, ce matin-là ?
Après avoir prié pour ne pas qu'il me demande de le sortir, je lançai comme si c'était évident, mais surtout pour enchaîner sur autre chose:
- Beladonis, non?
- On n'en sait rien, mon gars, répondit le chef de la Police Internationale en faisant les cent pas autour de la table, comme l'autre précédemment. Leur cible, si c'était Beladonis, ça ne m'étonnerait pas qu'ils fassent partie de l'organisation. Si c'était toi, c'est peut-être pour apeurer tes parents, les toucher en plein coeur. Si c'était les Pokémon, dans ce cas vous vous serez trouvés au mauvais endroit, au mauvais moment, et juste un accident de passage. Mais les hics sont partout les mêmes: pourquoi t'ont-ils relâché, en Pokémon, et avec un de tes Pokémon?
Pitié, pitié, pitié, pit...
- Au fait, se redressa-t-il soudain, pointant mon buste avec son cigare, c'est quoi, comme Pokémon?
Merde.
- Oh, ça! Heu... Je... C'est un Pokémon banal, sans strictement aucune importance. Un Pokémon commun, vous voyez, genre de tous les jours.
- C'est-à-dire?
- Un Cheniti?
Pourquoi est-ce que je sors toujours cette excuse à la con pour désigner un Légendaire en ma compagnie? Ah oui, parce que pour moi, Genesect est un néo-légendaire, à la vue de son histoire, j'appelle ça une légende. Faudrait que je pense à l'écrire, tiens, ça pourrait rapporter. Columbo ne bougea point ; et il me sourit gentiment:
- Effectivement, dans ce cas, c'est réglé: un Cheniti devait être sans importance pour eux.
Ouf. C'est un abruti.
- Donc vous vous êtes retrouvé par hasard à Volucité, sur la Grand-Place, au moment du meurtre. Moi qui pensais tenir un coupable! rit-il, bien que je ne trouvais pas cela drôle. Vous n'avez rien remarqué d'anormal, dans les instants précédant la mort de la fillette?
Je pensai au mec aux cheveux rouges.
- Non, rien d'anormal, assurai-je.
Il se dirigea vers la chaise en face de moi, pensif:
- C'est une affaire étrange, vraiment très étrange. J'en parlerais à ma femme, elle me donnera son avis.
Qu'est-ce qu'il lui prend à me parler de sa femme?
- Ha oui? Bah c'est bien, si elle vous aide.
Il sourit et se rassit:
- Et vous? Vous avez un amour, dans votre vie?
J'aime pas cette question.
- Je crois pas, non. J'en ai peut-être aimé une, mais elle n'est plus.
Il sembla touché:
- Oh, je suis désolé... Accident?
MAIS EN QUOI ÇA LE REGARDE?!
- ... Heu, oui.
- De quoi?
- Un truc con. Elle menait un petit groupe de gens qui protestaient contre une certaine personne. Sans importance.
Il me sourit amicalement:
- Ah oui, je comprends. Je suppose qu'elle mettait les pieds dans une histoire trop compliquée pour elle?
- Ouais, on va dire ça. Mais elles et ses sœurs ne se laissent pas avoir. Quand je pense que...
MERDE. L'intuition de malade ; le frisson de timbré. Je coupai ma phrase:
- Heu, excusez-moi, mais... Vous auriez une photo de la personne tuée aujourd'hui?
Il mit sa main dans sa poche, cette fois-ci de pantalon, et en sortit une photo:
- Voilà. Regardez-la, mais surtout, ne me décrivez rien, je supporte pas ces clichés morbides.
C'est bien ça. Ces cheveux blonds. C'est flippant. Il me faut confirmation.
- On... On a son prénom?
- Elle avait une carte d'identité sur elle, la brave petite. Julia, c'est son prénom.
L'une des trois soeurs Rebelles. Je me disais bien qu'elle me rappelait quelqu'un.
- Allez, Chris.
Je tournai le bec vers le chef de la Police Internationale, toujours pas remis du choc:
- Hein? De... De quoi?
- Vous pouvez vous lever.
Wouah! Enorme! J'aurais pas cru ça aussi facile!
- VRAIMENT?! criai-je aussitôt.
- Puisque je te le dis! lança-t-il en souriant.
J'envoyai balader la photo et me ruai sur la porte:
- Au revoir, monsieur!
- Hum hum...
Je m'arrêtai net. Sa voix était toujours aussi amicale, mais ça sentait mauvais pour ma poire.
- ...Tu vas me dire tout ce que tu sais. Dans le moindre détail.
- J'te l'avais dit, t'es dans la merde, s'immisça la Voix.
Je tremblai comme une plume dés la moindre brise de vent:
- Je... Je ne vois pas de quoi vous voulez parler...
Columbo sourit:
- Toujours la même rengaine. Voyons, tu me prends pour un abruti? Tu m'as dit qu' "ils" t'ont transformé en Pokémon, tu les a donc vus ou entendus, ou en tout cas rappelé d'une scène quelconque. Ta piteuse excuse qui a suivi tes lamentables balbutiements quand je t'ai parlé de la Poké Ball autour de ton cou, et les essais pour changer de sujet, bref pour que je ne découvre pas ce qui s'y cache réellement. Le fait qu'il ne se soit rien passé avant l'assassinat de Julia, c'est faux: nous t'avons vu assister à l'atterrissage forcé de l'homme aux cheveux rouges sur le Pont Sagiciel grâce aux caméras de surveillance. Puis le fait que tu mentes quand tu me racontes ta vie passée, vu que tu m'avoues avoir rencontré une fille menant une rébellion. Donc tu peux te lever, certes. Mais tu es bien loin d'être libre. De plus, si, car c'est tout à fait possible, tu es innocent, tu ne fais partie d'aucune organisation spéciale te permettant de divulguer des informations sur une affaire secrète. Te laisser sortir serait impensable. Tu as voulu des informations, tu les as. Tu ne m'as pas demandé si la liberté suivrait.
[...]
Bordel.
- J'en parlerais à ma femme, tiens. T'es un marrant, Chris, rajouta le malin.
Puis je me retournai fièrement, et bombai le torse:
- Ah ha! Bien sûr que si, je peux profiter de vos informations! Je suis un Membre Officiel du Comité Légendaire des Agents Sauveurs du Monde!
J'entendis une voix s'étouffer dans ma tête, puis tousser violemment. Columbo parut amusé:
- Pardon?
- Je fais partie du MOCLASM, moi monsieur!
La Voix gueula, après s'être remise:
- ABRUTI! FERME-LA, FAUT PAS EN PARLER!
Columbo ne bougea pas. Il resta là, en face de moi, avec son sourire gentil en coin. Il fit un signe au miroir sur le mur ; j'entendis des pas précipités qui vinrent
fermer la porte à clef.
- Quoi? Qu'est-ce qu'il y a?
Je faisais moins le fier, pour le coup. Il s'approcha de moi, et se pencha sur ma petit personne:
- Un Membre Officiel du Comité Légendaire des Agents Sauveurs du Monde? C'est donc ça que ça veut dire, MOCLASM? 500 ans depuis l'apparition de ce mot, il refait surface aujourd'hui, apparemment mis à neuf, vu qu'ils recrutent toujours, à ce que je vois. Tu as donc déjà sauvé le monde, comme ça? Et bien, enfin, nous tenons un membre de ce Comité qui agit dans l'ombre depuis des siècles, sans jamais faire une seule bavure, laisser une seule trace. Bien. Tu vas rester un peu plus longtemps avec nous, Chris.
Chercher quoi faire. Maintenant. Tout de suite. Sans réfléchir, la solution radicale. C'est ça ou je ne suis pas prêt de sortir. Je me prépare à donner un coup, mon aile reluit, et je le frappe d'une Cru-Aile dans les jambes. Il tombe au sol en criant, se tenant la jambe. Je cours, bondis sur la table, me mets à une extrémité. J'entends des cris d'alerte au dehors, de la précipitation et des cliquetis dans la serrure. Je ne réfléchis pas. Pas le temps. Je cours, piétine les documents éparpillés, je déploie mes pattes plumés, j'arrive au bout de la table, prend mon élan et saute. On déboule dans la pièce, on pointe un flingue vers moi. Je plane tant bien que mal sur les trois mètres me séparant du mur avec le miroir. J'atteignis le miroir ; je balançai une Cru-Aile, on tira une balle. Les deux atteignirent le miroir qui se brisa, et je passai au travers avec mon élan dans des bruits d'éclats de verre. C'était bien un de ces miroirs-vitres des salles d'interrogatoire. Je m'écrase dans le couloir , les gens qui y étaient avant étaient maintenant occupés avec le Chef de la Police Internationale. Je détale comme un dingue à travers, passe une porte ouverte, arrive dans une pièce éclairée par une seule fenêtre, un flic assis devant. Il est derrière son bureau ; alerté par le boucan voisin, se précipite sur moi. Il bondit, je lui file entre les pattes, je sprinte à travers la salle, saute sur son bureau, puis m'élance, déploie mes ailes et passe à travers la fenêtre du trentième étage qui explose dans un éclat cinglant.