Attention aux stalactites !
Le braillement de Typhlosion la réveilla, elle avait toujours froid mais beaucoup moins que la nuit passée. Le pokémon feu était toujours allongé derrière elle mais par contre Toty n'était plus là. Il était un peu plus haut et avait déjà escaladé une partie du mur de glace.
- Salut, Angie. Tu as bien dormit ?
- Que fais-tu ?
- Je crée des prises, pour qu'il te soit plus simple de grimper.
- Merci, mais je n'en aurais pas besoin.
Elle n'avait plus mal au crâne, à présent, elle se sentait apte à pouvoir grimper sans aide. Angélina s'étira puis escalada la corniche jusqu'à rejoindre Toty, ce dernier lâcha une main qu'il utilisa pour rappeler Typhlosion, toujours couché. Angélina s'agrippa du plus qu'elle put aux morceaux de glace ou à ce qu'elle trouvait. Ces muscles se raidissaient déjà et ces membres étaient parcourus de courbatures.
Elle tâta la glace, à la recherche d'une quelconque prise jusqu'à ce que ses doigts rencontrent un bout du mur éraflé, elle y glissa la main puis s'y hissa.
Grâce à l'entraînement qu'elle se faisait chaque jour, l'escalade n'était pas trop dur. Elle parvint en haut bien avant Toty et là, elle resta figée sur place. Jalil dormait encore, emmitouflé dans son sac de couchage, néanmoins sa maigreur avait subitement frappé Angélina comme un coup de fouet dans le dos.
Angie chercha les deux autres des yeux et ne tarda pas à les trouver, dans le même sac de couchage, collé
l'un à l'autre. Angélina ne cherchait même à pas à savoir ce qu'ils avaient fait ou pas, son regard se posa sur un tas immense de détritus, leur nourriture. Toty se hissa à son tour en haut de la corniche, le front ruisselant de sueur.
- Qu'y a-t-il ?
Mais lui aussi s'arrêta dans son élan.
- Levez-vous ! Fit Toty en les secouant.
Ils poussèrent des grognements mécontents, Toty était furieux, les yeux exorbités, il fixait le tas d'ordures près du sac de couchage du soi-disant «couple ».
- Égoïstes ! Lança Toty en crachant de dégoût sur le sol. Vous n'êtes que des égoïstes ! Tous les trois.
Jalil mit ses lunettes sur son nez, sans elles, il était aussi myope qu'une taupe. Le spectacle eut le même effet effroyable sur lui.
- Mon dieu ! La nourriture ! Où est-elle passée ?
- T'as du culot de demander ça alors que c'est vous qui l'avez mangé !
- Arrête, Toty ! Je n'ai rien mangé, tu sais bien, je fais le minimum pour moi et mes pokémon, je t'en prie, ne m'engueule pas, j'y suis pour rien !
Il était évident que Jalil n'y était pour rien. Même s'il n'avait pas été aussi maigre, Angélina aurait facilement deviné les coupables. Yannis et Léane restaient dans leur sac de couchage, l'air fautif. Les couvertures s'abaissèrent un peu, et, pendant un court instant, Angélina crut voir Léane très légèrement vêtue. Elle se sentit alors envahit d'une soudaine colère qui lui fit serrer les poings et crisser les dents.
- Pourquoi avez-vous fait ça ? Demanda-t-elle à l'adresse des deux concernés.
- Fait quoi ? Dit Léane comme si de rien n'était.
Angélina se retint d'aller la gifler ou même la mettre à terre.
- Nos pokémon mourrait de faim, si vous ne l'avez pas remarqué, Azumarill a perdu énormément de poids ces
temps-ci...
- Et Jalil ?! Tu ne crois pas qu'il a perdu la moitié de ses kilos ?! Lança Angélina en montrant les dents comme une bête sauvage.
Léane lui lança un regard noir.
- On crève la dalle. Tu peux comprendre ça ? Fit Yannis. On aurait pu mourir de faim si on avait pas mangé ! Parfois, je me demande, entre un bon steak et une grande cruche d'eau, qu'est-ce que je choisirais. Et puis, vous aussi, vous avez des réserves, non ? Je vous signale que Léane et moi avons seulement épuisé
les nôtres.
- Nous aussi avons besoin de manger, fit Jalil le ton querelleur. Je te rappelle que chacun d'entre nous est partit du chalet avec un sac rempli de nourriture qui doit lui être propre, on avait arrangé ça avant de partir, tu l'as oublié ? Maintenant que toi et Léane n'avez plus rien, nous allons être contraint de partager notre nourriture avec la vôtre. Léane aurait put arriver à cette conclusion si elle avait un peu arrêter de geindre durant le voyage et utiliser son peu de matière grise...
- Quoi ?! S'exclama-t-elle, furieuse.
- Fais gaffe à ce que tu dis, Jalil, je te préviens, dit Yannis, menaçant, je suis déjà à cran et tu risques de ne pas aimer ce qu'il va t'arriver.
Jalil se tut mais Toty reprit le flambeau avec un ton agressif, presque effrayant.
- Nous sommes coincés dans une grotte de glace, ce lieu est peuplé de dangers, de pokémon sauvages, et
malgré ça, la pire nuisance dans cet enfer se trouve être un grand crétin qui pense plus à son estomac qu'à ses propres amis !
- Moi, un crétin ? S'exclama Yannis, les yeux en dehors de ses orbites. Tu veux qu'on se balance des insultes, c'est ce que tu veux, Toty ? Et, Toty, ce ne serait pas un nom de...
- Ca suffit ! S'écria Angélina en s'interposant entre eux. Taisez-vous, tous les deux !
C'en était trop, trop pour tous, ils avaient complètement pété les plombs. Yannis brailla.
- Dégage, Angie, avant de lui ressembler ! Ce serait dommage de te défigurer autant qu'il l'est !
- Tu veux qu'on se batte ? Allons-y, alors ! Lui hurla Toty au visage.
Tous deux se jetèrent l'un sur l'autre comme deux fauves enragés. Léane poussa un petit cri et se rétracta contre le mur du fond. Jalil émit un petit rire amer.
- Allez vous faire voir, tous les deux. Marmonna-t-il.
- Qu'ils se débrouillent tout seuls, dit Léane. C'est ce qu'ils savent mieux faire, de toutes manières !
Il eut un énorme grondement puis le sol s'ébranla furieusement. Toty et Yannis cessèrent leur combat, tous regardèrent le plafond de la grotte, il s'effondrait ! D'énormes stalactites de glace menaçaient de tomber d'une seconde à l'autre. Angélina attrapa Léane par le bras et la tira hors de son sac de couchage, pendant que les garçons étaient occupés à rassembler la nourriture, les affaires et les choses encore serviables.
- Farfuret ! Hurla-t-elle.
Le pokémon démon sortit de sa pokéball et se mit à creuser un antre dans la glace. Angélina leva la tête, elle vit que les piques de glace commençaient leur chute droit sur eux, il ne leur restait que quelques secondes... Le trou n'était pas assez grand pour les cinq. Angie y poussa Léane et s'y réfugia la seconde où les stalactites s'écrasaient sur la corniche. Elles l'avaient échappé belle. Léane laissa échapper un sanglot.
- Les autres...
Angélina regarda autour d'elle. Aucuns des garçons n'avaient pensé à se réfugier dans sa grotte. Du moins, c'est ce qu'elle pensait, mais elle avait tort car elle entendit une voix étouffée marmonner.
- Angie, tu me marches sur le pied...
Angélina sursauta, sans qu'elle s'en rende compte, sa main s'était refermée sur la poignée de son sabre encore une fois. Les trois garçons étaient bien là, sains et saufs, ils avaient dû s'entasser dans la grotte sans qu'elle s'en aperçoive. Ils se relevèrent et retournèrent sur la corniche, à présent couvert de piques de glace.
- C'était chaud... Soupira Yannis, la lèvre ensanglantée.
- J'en ai assez, de vous tous ! Lâcha Léane. J'en ai plus qu'assez de vous voir vous conduire comme des mômes ! Peut-être que les mâles sont incapables de se comporter en adultes, je ne sais pas, c'est peut-être
un problème d'hormones.
- Écoute, Léane, c'est pas grâce à toi qu'on est arrivé ici, fit Jalil, c'est vrai, quoi ! A t'entendre, on dirait que tout est de notre faute ! De plus, je ne cherche même pas à te rappeler qui a bouffé toutes ses réserves en une nuit !
- Alignez-vous. Ordonna Angélina.
- Quoi ?
- Vous avez très bien entendu, mettez-vous en rang, tous les quatre, toi aussi, Léane. Épaule contre épaule. Ne discutez pas !
Ils s'exécutèrent un peu surpris. Angélina se planta devant eux, les poings sur les hanches, les lèvres tremblantes de colère.
- Ouvrez grandes vos oreilles. Nous avons tous besoin les uns des autres. J'ai besoin de vous et comme il se
trouve que je vous ai sauvé la vie en creusant cet antre, il serait juste d'admettre que vous avez aussi besoin de moi. Par conséquent, je me fiche de connaître toutes les imbécillités que recèlent vos cerveaux, nous sommes les uns pour les autres tout ce qui nous reste et nous devons plus que jamais nous entraider, non nous disputer. Nous sommes en dehors des rails, dans un bourbier inextricable. Un bourbier dont nous ne pourrons peut-être plus jamais nous extirper. Alors, je vous le dis avec tout mon respect et toute mon affection : conduisez-vous en être civilisés. Et si vous ne comprenez pas ce que ça signifie, demandez-moi, je vous expliquerai. Dorénavant, en cas de différend entre nous, nous voterons. Et si nous ne parvenons pas à obtenir une majorité, je trancherai.
Ils la regardèrent avec étonnement, seul Yannis se mit à rire bêtement.
- Tu me donneras la fessé si je suis méchant ?
- Non, toutes fois, si vous voulez vous battre, vous le ferez à corps nus !
- Hein ? Fit Jalil tout rouge.
Léane répliqua.
- Angélina a raison, il faut bien trouver un peu de divertissement dans cette mésaventure !
Tous s'esclaffèrent. La rage s'était dissipé, laissant place à l'ironie et aux rires des anciens amis qui se retrouvent enfin. Ils continuèrent à grimper le mur de glace et il fallut à Yannis et à Toty une bonne trentaine de minutes avant de pouvoir se reparler.
Aucuns des deux ne s'est excusés, même Jalil n'avait pas cherché à le faire pour les méchancetés qu'ils avaient glissées à Léane.