Chapitre 61 : La confrontation des jumeaux
Tandis que le Seigneur Vriffus était en train de conter à Galatea un autre chapitre de l'histoire des Mélénis, pour parfaire son enseignement, sa jeune élève était morose. Elle commençait à se lasser de la seule compagnie du Mélénis Noir. Cela faisait trois jours qu'ils étaient arrivés à Akuneton, et même là, Vriffus lui avait demandé de rester à bord. Pour quelle raison, elle n'en savait rien. Peut-être craignait-il qu'elle ignore ses ordres et aille tuer Solaris sur le champ ? Galatea avait essayé de rechercher un peu de compagnie en la personne de Sacha Ketchum, toujours enfermé dans les cellules du vaisseau, mais le dresseur n'avait pas vraiment la tête à la conversation. Galatea pouvait le comprendre, quand la menace de se faire dévorer vivant pesait sur votre tête. Galatea aurait même été ravie de revoir Solaris, et aurait même résisté à l'envie de lui faire quelques misères.
Mais non, elle était confinée dans ce satané vaisseau sombre, vide et déprimant, avec pour seule compagnie le Seigneur Vriffus dont le visage balafré commençait à lasser Galatea. Elle n'avait même plus le cœur à sonder son incroyable Flux en sa présence. Soudain, son frère et sa sœur lui manquaient. Eux, et le colonel Tuno, son père Penan, Djosan, et même ce type incroyablement sexy, ce prince Octave. Et surtout, ses Pokemon lui manquaient. Peut-être était-il temps de prendre congé de l'Empire de Vriff et de revenir au bercail ? Elle n'avait pas encore la puissance nécessaire pour vaincre Vriffus, mais si elle rentrait, elle pourrait être utile à la Team Rocket. Mais alors quoi ? Elle continuerait à travailler pour Giovanni en tant que soldat surpuissant. Son rêve de grande nation qu'elle dirigerait prendrait fin...
- Tu m'écoutes, Galatea ?
La voix roque du Seigneur Vriffus la coupa dans ses pensées.
- Pardonnez-moi, maître.
- Tu sembles avoir quelque chose à l'esprit...
Galatea eut un sourire.
- J'ai toujours quelque chose à l'esprit, maître.
- C'est vrai. Même beaucoup de choses, et c'est pour ça que j'arrive si peu à percevoir tes pensées grâce au Flux.
- « Pour que tes pensées restent tienne face à un Mélénis, il suffit de deux choses : soit ne penser à rien, soit penser à plein de chose à la fois », récita Galatea. C'est vous qui m'avez appris ça, maître.
- En effet. Tu es une élève douée. Bien plus que mon précédent.
Galatea cligna des yeux.
- Votre précédent ? Vous m'aviez dit que les Mélénis avaient disparu !
- Et c'est le cas. Les vrais Mélénis du passé. Ceux qui n'avaient pas peur d'utiliser toute la puissance et le savoir qu'offrait le Flux. Mais il en demeure toujours aujourd'hui, des pleutres, des ratés, qui se contentent de faire des tours de passe-passe avec le Flux et de rechercher la paix intérieure. Ils ont peur de se dévoiler, et se cachent, refusant de se saisir du pouvoir qu'ils mériteraient. Ils ne sont pas dignes de l'appellation "Mélénis". Mais parfois, l'un d'entre eux se montre un peu plus ambitieux, et trouve son chemin jusqu'à moi. Rien à voir avec toi, bien sûr, mais si on les forme bien, on peut en tirer quelque chose. Ce ne fut pas le cas de mon ancien élève. Il est mort.
- Comment ?
- Je l'ai tué, admit Vriffus sans une once d'émotion.
- Euh... pourquoi ?
- Il était faible et sans importance. Si tu es encore en vie, ma chère, c'est que tu n'as pas encore fait preuve de la même faiblesse. Garde ça à l'esprit.
Galatea en eut froid dans le dos. Était-ce un avertissement ? Vriffus savait-il qu'elle envisageait de le quitter ?
- Oui... poursuivit le Mélénis Noir. Garde ça à l'esprit surtout pour l'instant qui va suivre.
- Que va-t-il se produire, Seigneur ?
- Il arrive... je le sens. Ton frère.
***
Même si seule Solaris l'amenait vers l'Invincible, Mercutio n'essaya pas de résister. D'une, car ça serait inutile ; Solaris le maîtriserait rapidement. Et de deux, aussi parce que Mercutio désirait monter à bord de l'Invincible justement, même s'il aurait préféré le faire discrètement, et armé de préférence. Solaris lui avait pris ses Pokeball et était en train de jouer avec son épée tandis qu'ils marchaient vers le grand vaisseau noir stationné non loin du palais.
- J'ai appris que tes amis à Kanto nous posaient quelques problèmes pour notre invasion, dit Solaris sur le temps de la conversation.
- Dommage pour vous. Mais je n'en suis pas du tout affligé.
- Tu devrais pourtant. Les Elus ont tellement été fâchés qu'ils m'ont ordonné de lever une flotte pour aller attaquer votre base. Je te dépose chez le Seigneur Souverain et je pars là-bas immédiatement.
Mercutio serra les poings, mais il ne pouvait rien faire pour l'instant. Peut-être que quand il serait à bord, et si Galatea s'y trouvait réellement, ils pourraient tenter quelque chose. Dès qu'ils montèrent sur une espèce de socle juste en dessous du vaisseau, un rayon noir partit de l'Invincible pour aller les frapper. Bien qu'il se crispa instinctivement, Mercutio ne ressentit aucune douleur, si ce n'était que ses pieds et ceux de Solaris furent soulevés de terre et qu'ils montaient peu à peu vers l'immense vaisseau. Quand ils furent à l'intérieur, Solaris lui fit signe d'avancer devant dans un fin couloir sombre, faiblement éclairé par des bougies aux flammes bizarrement bleues. Mercutio se sentait mal à l'aise, et pas à cause de sa situation. L'air était comme oppressant ici, et tout son corps était tendu à l'extrême.
Après quelques minutes de marche, ils parvinrent jusqu'à une large porte sombre, où Solaris frappa. Elle s'ouvrit comme sur un signal, et Mercutio s'avança, vers le trône qui prédominait la grande salle. Enfin, il rencontra le Seigneur Souverain Vriffus en personne, celui que tout le monde craignait. Rien que son visage et ses yeux surnaturels pouvaient en effet vous donner envie de vous cacher quelque part et d'y trembler. Solaris s'inclina profondément devant Vriffus, mais Mercutio resta debout, observant d'un air stupéfait la jeune femme qui se trouvait aux cotés de Vriffus.
C'était Galatea, mais il ne l'avait pas reconnu au premier coup d'œil. Le contraste entre cette fille et la sœur qu'il avait toujours connue était frappant. Galatea était habillée comme une lady, avec une espèce de robe noire assez moulante qui mettait sa poitrine en valeur, agrémentée d'une cape rouge. Ses cheveux, d'ordinaire courts et en bataille, étaient raides et gracieusement relevés sur sa nuque. Même son visage avait changé. Galatea était toujours souriante, rieuse, même un peu trop. Là, elle avait le visage pâle, sombre, et aucune trace d'un quelconque sourire sur ses lèvres, aucun signe qu'elle venait de revoir son frère qu'elle n'avait plus vu depuis plus d'un mois. Malgré cela, Mercutio était captivé. Bien sûr, il avait toujours trouvé sa sœur jolie, et tous les garçons de son âge en aurait dit autant. Mais là, ce n'était plus simplement la simple joliesse de l'adolescence. Galatea ressemblait là à une femme faite. Et elle était belle. Plus simplement mignonne ou jolie.
- Ah, Mercutio Crust, commença Vriffus en se levant comme pour l'accueillir. J'attendais ta venue depuis longtemps, mais je savais que tu viendrais un jour ou l'autre si j'avais Galatea avec moi. Les jumeaux s'attirent l'un à l'autre, c'est ainsi.
Mercutio regarda une seconde Vriffus, se demandant vaguement quelles âneries il débitait, puis revint à sa sœur, cherchant ne serait-ce qu'un signe infime de sa part. Mais on aurait dit une statue. Son silence et son immobilisme arracha à Mercutio un cri de colère.
- Qu'est-ce que vous lui avez fait ? Espèce de timbré ! cria-t-il au Seigneur Souverain.
Vriffus éclata de rire, une profonde excitation brillant dans son œil rougeoyant.
- Pardonnez-moi, Seigneur, intervint Solaris. Je sais que vous m'aviez demandé de le tuer, mais puisque j'ai réussi à le capturer vivant, et que vous n'étiez pas loin...
- Tu as bien fait, coupa Vriffus. Autant que cela soit fait dans les règles de l'art.
Mercutio ne comprenait rien à ce qui se passer ici.
- Tu dois te sentir un peu déboussolé, c'est normal, fit Vriffus comme s'il avait senti ses pensées chamboulées. Laisse-moi rapidement t'expliquer de quoi il retourne. Toi et ta sœur vous présentez tous les deux des pouvoirs qui m'intéressent au plus haut point. Ils sont encore endormis chez toi, mais depuis qu'elle est ici, j'ai réveillé ceux de Galatea, et lui ait appris à les contrôler. Mon but est d'avoir l'un d'entre vous comme successeur. Mais l'existence de deux Mélénis serait pour moi une menace. Donc, l'un de vous doit disparaître. Seule votre puissance décidera lequel mourra, et lequel se révèlera digne d'être mon héritier.
- Que... que voulez-vous dire ? demanda Mercutio, fébrile.
- Vous allez vous battre. Un duel à mort. Entre jumeaux. Et je garderai le gagnant comme apprenti. Tous les coups sont permis ; la mort de l'autre est la seule règle. À présent, Solaris, rends lui son épée et ses Pokemon.
Solaris enfonça brutalement Livédia dans la main ballante de Mercutio, puis lui jeta ses Pokeball, qu'il rattrapa instinctivement. Apparemment, Vriffus espérait que lui et Galatea allait se battre à mort pour son bon plaisir. Mercutio ne saisissait pas toute l'étendue de la folie du Seigneur Souverain, mais c'était une aubaine pour lui et sa sœur. Avec leurs Pokemon, ils pourraient essayer de filer. D'ailleurs, leurs chances d'évasion grimpèrent encore plus quand Vriffus dit à Solaris :
- Laisse-nous maintenant.
Visiblement mécontente, Solaris salua brièvement avant de s'en retourner. Mercutio eut le temps de voir l'expression furieuse de son visage. Il n'y avait aucun garde dans la pièce. Seul Vriffus était là, désarmé, face à Mercutio et Galatea avec trois de leurs Pokemon. C'était trop beau pour être vrai !
- Très bien, commençons, dit Vriffus. Galatea, chère disciple, tue ton frère ici et maintenant. Ça sera ta dernière épreuve pour te montrer digne d'être une véritable Mélénis Noire !
Comme un automate, Galatea hocha la tête et s'avança vers son frère. Il n'y avait toujours aucun signe de reconnaissance dans son regard. Mercutio avait l'impression d'avoir devant lui une étrangère.
- Galatea... commença-t-il.
Sa sœur leva la main pour l'interrompre.
- Tu peux utiliser ton épée, comme tous les Pokemon que tu possèdes, dit-elle.
- Qu'est-ce que tu racontes, enfin ?! Profitons-en plutôt pour nous débarrasser de ce type puis de filer d'ici !
- Il n'y a aucune fuite possible, mon frère, soupira-t-elle. Pas pour nous. Notre destin a été tracé bien avant notre naissance.
Mercutio s'inquiétait vraiment, à présent. Jamais il n'aurait cru entendre ce genre de phrase de la bouche de Galatea.
- Euh... Galatea... ? Tu es vraiment toi, hein ?
La question était stupide, même de sa part.
- Moi est une notion relative, répondit-elle en continuant à s'avancer.
Mercutio leva un peu son épée.
- Ok, c'est bon, j'ai compris. Ce psychopathe t'a fait la même chose qu'à Zeff ? Il t'a détraqué le cerveau ?
Comme il n'eut aucune réponse, Mercutio raffermit sa prise sur son épée.
- N'avance pas plus ! Je te préviens sœurette ! Je te ramènerai de force s'il le faut !
Galatea se contenta d'un sourire moqueur. N'y tenant plus, Mercutio dirigea son poing sur sa sœur. Tant pis. Il devrait la porter. Mais d'un geste aussi rapide que stupéfiant, Galatea arrêta le poing avec simplement le haut de ses doigts. Puis elle les referma sur sa main, et le souleva comme s'il n'était qu'un enfant de trois ans.
- Qu'est-ce que...?
Galatea l'envoya sur le mur d'en face. Il se secoua la tête pour reprendre ses esprits. Que s'était-il passé là ? D'accord, Galatea, en dépit des apparences, possédait quelques muscles - chose normale pour quelqu'un ayant subi l'entraînement du commandant Penan - mais ça...
- Sors tes Pokemon, Mercutio, fit Galatea. Il n'y a que comme ça que tu pourrais me tenir tête... pendant une dizaine de secondes.
- Tu sais que je n'ai que Mortali à moi, gronda Mercutio en se relevant. Kirlia et Pyroli sont à toi, et je ne les appellerai pas pour te combattre. D'ailleurs, je n'en ai même pas envie. Pourquoi fais-tu ça ? Pourquoi tu écoutes les conneries de ce type ?! À nous deux, bottons-lui les fesses une fois pour toute et fichons le camp d'ici ! Il faut rentrer à la base, les prévenir... Solaris vient d'envoyer une armée là-bas !
- La Team Rocket. Les armées. Tout ça n'est qu'une comédie, Mercutio.
- Une comédie ?! Que notre sœur qui est là-bas se fasse tuer n'est qu'une comédie pour toi ?
- Ils ne sont d'aucune importance, tout comme Siena, acquiesça Galatea. Seuls nous deux comptons. Nous avons le pouvoir de changer les choses. Les gens communs comme Siena ou Giovanni ne changeront rien, ils ne s'élèveront jamais au-dessus de la masse. Le Flux et ceux qui le possèdent ; voilà la seule chose véritable de ce monde !
- C'est vrai, approuva Vriffus sur son trône. Vous deux, vous êtes bien au-dessus des êtres humains normaux. Votre Giovanni le savait, bien sûr. Il a conclu un pacte avec votre père avant même que vous ne soyez nés. En échange de la protection de la Team Rocket pendant les années de votre enfance, il pourrait se servir plus tard de vous et de vos pouvoirs pour son propre intérêt.
- Je ne comprends rien à ce que vous racontez, tous les deux, s'exclama Mercutio. Et je m'en fous, en fin de compte ! Galatea, tu rentres avec moi, un point c'est tout ! Tu rentres chez ta famille !
- Nous n'avons pas de famille, Mercutio. Notre mère est morte et notre père nous a abandonnés sans se soucier de nous. Et celle que tu prends pour notre sœur ne l'est qu'à moitié.
- Qu'est-ce que tu...
- Attention ! Lève les mains !
C'était la voix dans sa tête. Instinctivement, Mercutio obéit, et cela lui sauva surement la vie. Galatea venait de lancer une espèce de rayon blanc d'origine inconnue de la seule paume de sa main droite. Il s'était arrêté sur les mains tendues de Mercutio, mais assez violement pour qu'il en ressente la brûlure sur ses paumes. Galatea et Vriffus furent aussi surpris que Mercutio lui-même.
- Impressionnant, souffla le Seigneur Souverain. Parvenir à bloquer une attaque de Troisième Niveau sans avoir reçu aucun enseignement... Jeune homme, le Flux chez toi doit être encore plus puissant que celui de ta sœur !
Cela ne parut pas être du goût de Galatea, qui envoya à Mercutio un autre rayon encore plus puissant. La voix se manifesta à nouveau.
- Ne fais rien, lui souffla-t-elle. Laisse-moi prendre le contrôle. De l'aide va bientôt arriver. Je te guiderai.
Sachant que les pouvoirs en jeu le dépassaient totalement, Mercutio choisit de faire confiance à la voix. Il inspira grandement et laissa la mystérieuse présence en lui prendre le contrôle de ses gestes. Avec une seule main, il fit disparaitre le rayon de Galatea avant qu'il n'arrive jusqu'à lui. De l'autre, il contre-attaqua avec un rayon de même type, mais étrangement ondulé. Stupéfaite par cette riposte inattendue, Galatea créa rapidement autour d'elle un bouclier de Flux. Il ne fut pas assez puissant. Il arrêta le gros de l'attaque, mais se brisa avant qu'elle ne soit terminée, et Galatea fut projetée à son tour contre le mur. Elle se releva rapidement, avec une expression de profonde stupeur sur le visage, et même un peu de peur. Puis, trop affaiblie par l'attaque de son frère, son Flux totalement épuisée, elle retomba à terre dans un gémissement de douleur. Sur son trône, Vriffus éclata de rire.
- Fascinant ! Incroyable, mon garçon ! Oui, sens le Flux monter en toi. Ne cherche pas à le dompter. Laisse-le se déchaîner. Qu'il écrase ton ennemie !
- Maître ! protesta faiblement Galatea.
Mercutio reprit le contrôle de son corps pour déclarer :
- Galatea n'est pas mon ennemie. Le seul ennemi ici, c'est vous.
- Crois-moi, mon garçon, dit Vriffus. Moi seul peux t'aider à apprivoiser tes incroyables talents. Ils sont bien plus conséquents que ceux de Galatea. Reste avec moi, et je t'enseignerai. Tu deviendras l'être le plus puissant de cette terre !
- Et Galatea ?
Vriffus fit un geste comme si il chassait une mouche.
- À quoi nous servirait-elle ? Elle est faible comparé à toi. Seuls les forts doivent survire. Elimine-là.
L'esprit de Mercutio nageait soudain dans un épais brouillard. L'éliminer ? Eliminer sa sœur ? Bon, après tout, les paroles de Vriffus étaient censées. C'était vrai que seuls les forts survivaient. C'était une loi de la nature. Qui sait quels pouvoirs il pourrait posséder avec Vriffus ? Et puis, c'était Galatea qui l'avait attaqué la première, non ? Il ramassa son épée et se dirigea vers sa sœur qui gémissait au sol. Mercutio sentit un sourire de prédateur naître sur son visage tandis qu'il observait sa future victime. Celle-ci lança un regard implorant à son frère, qu'il ignora en levant son épée.
- Arrête, fit la voix. Vriffus se sert du Flux pour te manipuler. Rend-moi le contrôle. Je peux y résister !
Mercutio hésita, son épée toujours suspendue au-dessus de sa tête, prête à transpercer Galatea.
- Ne fais pas ça, insista la voix. C'est ta sœur. Ton amour est bien plus fort que l'ambition de Vriffus ! Je sais que tu peux lui résister !
Guidé par la voix, chaude et lumineuse, Mercutio parvint à sortir du brouillard qui souillait son esprit. Quand il se rendit compte ce qu'il s'apprêtait à faire, il poussa une exclamation de stupeur, et laissa retomber Livédia au sol. Au même moment, un pan du mur de la pièce se brisa. Une silhouette lumineuse fit son entrée, se positionnant au centre de la salle. Vriffus gronda :
- Toi !
La lumière s'évanouit quelque peu, laissant apparaître un homme. Il portait une toge blanche, de longs cheveux blonds, mais semblait avoir le même visage noble et puissant que Vriffus, si ce n'était que le sien ne souffrait d'aucune cicatrice et que ses yeux étaient normaux, d'une intense couleur noisette. Il semblait être l'antithèse parfaite de Vriffus, qui se leva de son trône, l'air furieux.
- C'en est assez, Vriffus, déclara l'inconnu avec une voix de velours. Ces enfants ne t'appartiennent pas.
- Pauvre imbécile, gronda le Seigneur Souverain. Toujours à te mêler de mes plans. Mais tu ne pourras rien faire cette fois ci. Tout est en marche pour le grand assainissement de cette planète !
L'homme aux cheveux blonds secoua lentement la tête.
- Je sais de qui tu tires tes directives, Vriffus. Tu es fou de faire confiance à ces êtres.
- Bientôt, je serai l'un des leurs ! Et je leur ai promis de s'occuper de toi si tu venais nous déranger ! Disparais !
Il tendit la main et lança une salve de rayons noirs qui firent dresser les cheveux sur la tête à Mercutio. L'inconnu répondit en une nuée de petits nuages blancs qui stoppèrent les rayons maléfiques et qui allèrent entourer Vriffus. Puis il se tourna vers Mercutio.
- Je vais le retenir. Partez !
- Mais qui êtes-vous ? demanda Mercutio.
- Pas le temps de vous expliquer. Mais on se reverra. Pour le moment, vous devez survivre. Il n'y a rien de plus important que votre survie ! Quittez ce vaisseau, retournez chez vous !
Vriffus venait de se libérer des nuages de l'inconnu et avait répliqué par de terribles éclairs noirs que son adversaire contint difficilement. Une partie de Mercutio voulait rester ici assister à ce duel phénoménal, mais il choisit d'écouter les conseils de ce type, qui qu'il soit. Il souleva Galatea et la prit sur son épaule, et ensemble ils quittèrent la pièce qui se décomposait peu à peu sous l'effet des pouvoirs surnaturels de Vriffus et de son mystérieux opposant. Après s'être éloigné de quelques bons mètres de sécurité de la salle de Vriffus, Mercutio interrogea sa sœur, toujours appuyée contre son épaule.
- Tu sais comment on peut sortir de ce vaisseau ? Ces rayons noirs...
Il constata soudain que Galatea était en train de pleurer.
- Eh, dit-il doucement. Ça va aller, c'est fini. On va rentrer à la maison.
- Je suis désolée... Je ne voulais pas... Je ne l'aurai pas fait... Mais c'est comme si je ne contrôlais rien ! Vriffus... il...
- C'est bon. Je ne t'en veux pas. Moi aussi, il m'a comme possédé. Partons de cet endroit. Est-ce que tu saurais faire fonctionner leurs rayons de transferts ?
Galatea secoua la tête.
- On ne peut pas les utiliser si le vaisseau bouge.
- Quoi ? On vole ?!
- Oui. Vriffus a fait redémarrer le vaisseau après le départ de Solaris. Je l'ai senti.
- Bon. Y'a-t-il des Ailes de la Mort dans ce truc alors ? Tu sais, leurs vaisseaux monoplaces. On peut y rentrer à deux si on se tasse, et ce n'est pas difficile à piloter...
- Il n'y a rien à bord, soupira Galatea. Ce n'est pas un vaisseau fait pour la guerre.
- Embêtant ça...
- Pourquoi ne pas utiliser Kirlia ? Tu as dit que tu l'avais pris avec toi. Il pourrait nous téléporter à terre.
- Ouais, très bonne idée, si ce n'est que je ne l'ai pas actuellement. Il est euh... avec un ami.
- Vous voulez parler de moi, infidèle ? Mesurez vos propos, je vous prie. Dieu ne me pardonnerait pas si j'avais un ami comme vous.
Mercutio faillit attraper une crise cardiaque. Herts venait de se matérialiser au milieu du couloir, avec Kirlia à ses côtés. Le Pokemon sauta sur Galatea quand il la vit.
- Kirlia ! s'exclama la jeune femme en l'enlacent profondément. Comme je suis heureuse que tu ailles bien !
- D'où vous sortez comme ça ? demanda Mercutio à Herts.
Herts haussa les épaules.
- Quand j'ai vu que vous ne reveniez pas, je suis revenu dans la ville incognito. J'ai vu Solaris quitter l'Invincible, seule, donc je me doutais que vous seriez là.
- Mais pourquoi êtes-vous là ? s'étonna Mercutio.
- D'après vous, crétin ? J'ai pensé que vous auriez besoin d'un peu d'aide, voilà tout ! Notre marché n'est pas terminé. Je dois vous aider jusqu'à que vous ayez tué Solaris, vous vous rappelez ?
Mercutio eut un large sourire.
- Vous vous rendez compte que c'est le vaisseau du Seigneur Souverain Vriffus là. Vous êtes en train d'aider deux ennemis de votre chef suprême !
- Bah, vu où j'en suis, je n'ai plus rien à perdre, de toute façon. Seule la réussite de ma vengeance me permettrait de me laver des péchés que je commets avec vous. Bon, y allons-nous ?
Galatea n'avait posé aucune question sur ce curieux vriffien au visage défiguré qui était venu les aider, mais elle sursauta en se rappelant de quelque chose.
- Sacha Ketchum !
- Hein ?
- Le dresseur que tu as envoyé me chercher !
- Il est ici ?
- Oui, dans une cellule. Il faut le sauver ! Il a un Dracaufeu, il pourra nous ramener rapidement à Kanto !
Mercutio suivit sa sœur dans les dédales du vaisseau.
- Alors il s'est fait attraper, ce naze, se moqua Mercutio.
- Euh... en fait, c'est moi qui l'ai attrapé. J'avais pas envie de partir alors...
Mercutio fut ravi d'entendre Galatea dire ça d'une voix à peine gênée. Elle se remettrait bien vite de ce qui s'était passé avec Vriffus. Quand Sacha, à moitié endormi dans sa petite cellule, vit Galatea approcher, il soupira.
- Tu veux pas me laisser passer mes derniers jours tranquillement ? D'ailleurs, c'est quand que ton seigneur compte passer à table ? Je commence à m'ennuyer sérieuse...
Il s'arrêta dans un silence stupéfait quand il vit Mercutio l'accompagner.
- Yo, salua-t-il. Alors, tu as fini par trouver l'Invincible. Chapeau sur cette partie-là. Pour le reste...
- Que fais-tu là ? Pourquoi vous êtes si abimés, tous les deux ? Et qui c'est ce type qui ressemble à Freddy Krueger ? Qu'est-ce qui se passe ici ?
Galatea brisa la porte de la cellule avec un de ses rayons blancs.
- On s'en va, dit-elle. Je suis vraiment désolée pour ce que je t'ai fait, alors que tu venais pour me secourir. C'était si mignon de ta part... Toi aussi tu es très mignon d'ailleurs !
- Euh...
La situation dut prendre Sacha de court, car il resta là, immobile, un air abruti sur son visage. Mercutio le prit par l'épaule.
- T'occupes. On se tire. Parait-il que tu as un Dracaufeu pour nous déposer ?
Sacha retrouva ses esprits.
- J'avais, rectifia-t-il. On me les a pris. J'ignore où ils sont, ni même si ce fêlé de Vriffus ne les a pas déjà mangés...
Galatea sourit et sortit de sous sa tenue six Pokeball qu'elle tendit à Sacha.
- Je les ai gardés, sans le dire à Vriffus. Si toi je ne pouvais pas te sauver, je ne voulais pas qu'il mette la main sur tes Pokemon.
Sacha ouvrit l'une d'elle, et son Pikachu rugit de contentement en voyant son dresseur, et reprit sa place habituelle sur son épaule. Sacha remercia sincèrement Galatea, et ensemble ils quittèrent l'Invincible sur le dos du Dracaufeu. Mercutio ne tourna la tête qu'une fois. Il se demandait toujours qui était l'homme qui les avait sauvé, et comment il allait maintenant.
- Où dois-je vous poser ? demanda Sacha.
- À notre base, à l'est de Lavanville ! Solaris s'y dirige en ce moment même. On doit les prévenir avant qu'elle n'arrive !
- Pas mon genre d'aider toute une base de Rocket, commenta Sacha, mais enfin, je peux bien faire ça pour ceux qui m'ont évité de passer à la casserole.
- Attendez voir, protesta Herts. Je n'ai aucune envie d'aller dans votre région d'infidèle !
- Solaris est là-bas, l'informa Mercutio. Vous voulez toujours sa mort, non ?
Herts grommela et demeura dans un sombre silence tout au long du voyage. Mercutio voyait que Galatea faisait des efforts pour essayer de lui parler, mais avant qu'elle n'ouvre la bouche, il dit :
- On a beaucoup de chose à se dire, Galatea. Tu as toi-même un paquet de trucs à m'apprendre, apparemment. Mais ça devra attendre. Pour l'instant, il nous faut sauver notre base. Notre maison !
- Notre famille, approuva Galatea.