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Coeur de Pêche de Ailes de cerise



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» Auteur : Ailes de cerise - Voir le profil
» Créé le 22/05/2011 à 18:25
» Dernière mise à jour le 12/06/2011 à 00:45

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Chapitre troisième : la galerie aux esprits !
Chapitre Troisième : La Galerie aux esprits.

La nuit suivante, je ne me souviens pas avoir dormi sans t. Je restais un long moment étendue dans sur mon futon, fixant le plafond sans le voir. Depuis que j'avais quitté Ceandros, j'essayais d'imaginer le visage de mon père, mais à chaque fois, l'image entêtante d'un homme barbu s'imposait dans mon esprit. J'avais la curieuse impression de le connaître, mais je ne parvenais pas à mettre un nom sur ce visage.
Quand le jour commença à poindre au travers du papier de riz opaque, je me redressai, la mine bouffie. Le soleil dardait éclairait le visage rond de Nijiko, elle dormait encore. J'éprouvais une grande affection pour la petite fille. Je la considérais presque comme ma sœur. Nous avions six ans de différence. Elle n'était pas incroyablement belle, mais elle faisait de son mieux et avait une très jolie voix. Je restais assise un long moment à la contempler avec regret, jusqu'à ce qu'une servante ne vienne nous réveiller.
Elle nous aida à nous habiller. Avant de partir, je glissai mon obi plusieurs paquets de gâteaux sec et une bourse que j'avais subtilisée à ma mère la veille au soir. Je ne reviendrai pas à l'Okiya, à moins d'y être forcée.

***

Je passai une matinée délicieuse. J'avais à cœur de m'appliquer pour ce dernier jour. Les professeurs ne cessèrent de me complimenter.
A midi, en sortant de mon cour de Shamisen, je m'approchai une dernière fois de Nijiko et lui expliquai que j'avais une course à faire pour Mère. Elle acquiesça naïvement et rentra sans m'attendre. J'attendis que la cour devant l'école soit complètement vide pour m'élancer rapidement dans la pelouse et me glisser dans la haie de bambou. Ceandros m'attendait, tapi entre les tiges. Il se leva et m'accueillit d'un mouvement de la queue.
Sans un mot, nous levâmes les yeux vers le soleil, en cœur. Il était presque à son zénith.
Je me demandais depuis la veille pourquoi Kinjirô avait décidé de partir au beau milieu de la journée, cela me paraissait périlleux.
Je me mis à courir à petites foulées, mal à l'aise dans mes grandes chaussures appelées okobos. Mon kimono entravait mes mouvements et je gardais la tête baissée pour éviter que l'on me reconnaisse. Mon cœur battait fort à l'idée de revoir Kinjirô.
Je mis plusieurs minutes à retrouver la ruelle de celui-ci. Il m'attendait au fond de l'impasse, le visage fermé, les bras croisés sur le torse. Je m'inclinai profondément devant lui, il me lança un regard perplexe.
— Désolée… Fis-je en m'inclinant à me penchant à nouveau malgré moi. C'est une habitude.
Kinjirô acquiesça. Son sourire mystérieux adoucissait son visage. Puis il plongea sa main dans sa sacoche en toile et en extirpa un globe blanc, qui scintilla un instant dans la lumière d'un rayon de soleil.
— Voici le fameux œuf… Fit-il d'une voix posée. Mais je dois t'avouer qu'il est un peu étrange.
Il me le passa avec d'immenses précautions. Je le pris et effleurai sa coquille lisse. Elle était très chaude.
— Cet œuf change de couleur de temps à autres. Ici, personne ne sais d'où il vient. Un jour, une fille qui vit ici l'a ramenée, elle l'avait…
— Volée ?
Je n'avais pas oublié que Kinjirô faisait partie d'un groupe de voyous qui volait les gens de passage dans l'Hanamachi. Ils avaient une réputation qui n'échappait qu'aux touristes.
— Euh… Oui. Il ne ressemble à aucun œuf que l'on à l'habitude de trouver ici. Cela fait plus de quatre mois, et il n'a jamais éclot. Pire, lorsqu'il est en compagnie de certaine personne, il devient glacé, alors qu'il se réchauffe auprès d'autre, comme toi. Cet œuf est vraiment…unique ?!
— Mais pourquoi tu me le donnes ? Demandai-je, fébrile.
— Justement parce qu'hier, lorsque tu es venue, l'œuf s'est brusquement réchauffé dans mon sac. Je pense qu'il éclora s'il est près d'une personne comme toi.
Je contemplais le globe, perdue dans mes pensées, lorsque Ceandros poussa un cri et recula brusquement. Il buta contre mes jambes en tremblant de colère. Une pierre roula devant ses pattes. Le Zorua se mit à gronder. Un autre garçon venait de sortir d'un des bâtiments.
Il s'avança et se planta devant moi, ratant de peu la queue de Ceandros.
Il me dominait de toute sa hauteur, avait les épaules larges et ses cheveux sombre, noués en queue-de-cheval dans son dos, masquaient presque ses yeux noirs.
— Alors comme ça, c'est toi Miki ?
Ce prénom sonnait encore bizarrement pour moi, mais j'éprouvais un immense plaisir lorsque l'on m'appelait comme ça.
Le garçon se tourna vers Kinjirô.
— Elle est plutôt petite et elle m'a l'air fragile. Tu es sûr que c'est une bonne idée de s'encombrer de cette gamine ?
Kinjirô haussa les épaules.
— Tu n'es pas obligé de nous accompagner, Shouta…
Le dénommé Shouta grogna.
— Combien elle nous paye ?
Il faisait comme si je n'étais pas là, pourtant, son regard était fixé sur moi. Je n'entendis pas la réponse de son compagnon, j'étais trop occupée à me noyer dans les yeux de Shouta. Ce regard mystérieux et sombre m'était familier – en ce moment, j'avais l'impression que tout m'était familier.
Soudain, je sentis une main lourde s'abattre dans mon dos. Je tombais à genou. Shouta me fixait avec mépris.
— Elle ne tient même pas sur ses jambes.
Mon épaule me lançait, il m'avait frappée si fort.
Je levai des yeux embués. Vu de si bas, Shouta paraissait encore plus immense. Je me sentis alors toute petite, ainsi agenouillée devant lui.
Je fermai les yeux, serrant contre moi l'œuf brûlant, Shouta levait à nouveau la main sur moi. Cependant, il fut stoppé par Kinjirô qui l'attrapa par le poignet. Il envoya valser son compagnon avec une facilité déconcertante malgré son petit gabarie.
— Baka ! Tu vas briser l'œuf ! Vociféra-t-il à son attention.
Shouta grommela quelques choses d'inaudible. Puis il fit volte face et tira une porte, à sa droite.
Kinjirô poussa un soupir et me tendit une main. Je la saisis et il me tira vers le haut. Puis il partit à la suite de son compagnon, sans pour autant me lâcher. La porte débouchait sur un minuscule palier qui n'avait pour seule autre issue qu'un escalier dont je ne pus distinguer que les premières marches, avant que la porte ne se referme sur Kinjirô et ne nous plonge tous dans l'obscurité la plus totale.

***

J'entendis Shouta descendre quelques marches. Puis sa voix résonna dans le noir.
— Tu n'as pas peur des esprits ?
Mon cœur se mit à battre la chamade lorsque je compris par le silence de Kinjirô qu'il s'adressait à moi.
— Par « esprit » tu veux dire… fantôme ?!
— Bien sûr ! Répondit-il avec un ton d'évidence.
Je cherchai vainement le regard brillant de Kinjirô dans le noir, dans l'espoir que celui-ci démente son compagnon, mais seule sa main serrant la mienne m'indiquait qu'il était là.
Shouta dût prendre mon silence comme une invitation à continuer.
— Il est normal que je te prévienne, cette galerie en est remplie !
Je frissonnai. Depuis toujours, je redoutais de me réveiller en plein milieu de la nuit et d'être seule dans l'obscurité silencieuse, à attendre le sommeil. Je haïssais les fantômes. Mon interlocuteur n'ajouta rien et reprit sa descente. Ceandros avait reculé et était blotti entre mes jambes. Kinjirô avait lâché ma main. J'avais une sensation de tournis, je ne savais plus de quel coté se trouvait la porte par laquelle nous étions entrés. Je chancelai et m'appuyai sur Kinjirô. Celui-ci me soutint et me redressa gentiment. Alors que je nageais dans l'océan trouble de la peur, il glissa à nouveau sa main dans la mienne et commença à descendre en me guidant dans le noir. La matinée passée à l'école me paraissait bien loin à présent.
Le silence de l'escalier à vis était pesant. Seul le cliquetis des griffes de Ceandros et nos souffles saccadés venaient le troubler régulièrement. J'eu l'impression de descendre aux enfers et cet escalier semblait s'enfoncer si profondément qu'une vie n'aurait pas suffit à atteindre le fond.
Enfin, après ce qu'il me parut être une éternité, je mis pied sur une surface lisse. Ceandros, qui me suivait de près, butta contre ma jambe. L'œuf, rangé dans un sac en toile que m'avait donné Kinjirô, était très chaud.
Tout à coup, Shouta frappa deux fois dans ses mains, comme au temple avant de prier. L'obscurité se dissipa aussitôt, chassé par des flammes qui avaient jailli de bougies placées de part et d'autre de la galerie. J'étouffai un cri de surprise.
Le garçon se tourna vers moi avec un sourire moqueur.
— Terrifiant, pas vrai ?
Je ne répondis pas. Ceandros s'était mit à gronder si fort que j'avais à peine entendu sa question. Je pris le Zorua dans mes bras et tentais d'aplatir la fourrure de son échine sous des caresses apaisantes. Il se débattit un instant encore avant de se calmer.
Ayant recouvré la vue, j'en profitai pour observer le tunnel. Il s'étirait visiblement sur une très grande distance. Le sol était pavé de pierres grises et des murs suintaient des gouttes d'humidité.
Les bougies aux flammes bleues semblaient flotter à quelques centimètres de ces cloisons et Zorua ne les quittait pas des yeux.
La voix de Kinjirô s'éleva derrière moi.
— Ce tunnel passe sous Janusia. Il nous mènera jusqu'au bout de la route 11, avant le pont du Hameau.
— Lorsque nous serons sortis, nous devrons retourner à Janusia. Tu poursuivras donc ta route seule, ajouta Shouta sans me ménager.
— Si tu vas à Maillard, suis la route qui va d'Entrelasque à Méanville. Une fois là-bas, tu devras suivre la route du sud, à travers le désert, jusqu'à Volucité, puis tu continueras vers l'Est. Là, tu finiras par tomber sur Maillard.
Je fus vite débordé par le flot d'information fournit par mon guide.
— Ne t'inquiète pas, tu trouveras bien des personnes prêtes à t'aider ! Me rassura le garçon comme s'il lisait en moi.
Je soupirai. Le chemin serait long.
— Allons-y à présent, plus nous tardons et plus les risque pour que l'on parte à ta recherche sont grands. Termina Shouta en commençant à avancer. Et attention aux esprits !
Le ton agressif qu'il arborait un peu plus tôt s'était mué en amicalité apparente. Je me demandais quelle était la raison de ce changement si brusque lorsque je me rendis compte que je m'étais laissée distancer par les deux garçons. L'une de bougie s'agita soudain et commença à flotter vers moi, lentement.
Je poussai un hurlement et courrai rejoindre mes compagnons.
— Ne cris pas si fort, tu veux qu'on nous repère ? S'exclama Shota d'un ton qui ressemblait plus au garçon grognon que je connaissais depuis quelques minutes.
Je déglutis difficilement, tremblante comme feuille au vent.
Comme nous avancions, les bougies s'éteignaient une à une après notre passage. Je ne me retournai qu'une seule fois pour voir des silhouettes bleues fluorescentes flottant dans le noir. Terrorisée à l'idée que ses lumières puissent nous poursuivre, j'essayai de me concentrer sur autre chose. Mais à chaque fois, mes pensées revenais inexorablement au fantôme – J'appris plus tard qu'il s'agissait de Funécire.
Il arrivait que Kinjirô se tourne vers moi pour me sourire et chaque fois, la vue de ses traits fins me rassurait. Néanmoins, je ne pouvais m'empêcher de craindre la séparation qui allait suivre la sortie de la galerie. A cette époque de ma vie, j'étais effrayé et en même temps attirée par tout changement qui pourrait intervenir dans mon quotidien.
La marche, qui dura pourtant plus d'une demi-journée, me parut très courte.
Quelle ne fut pas ma déception lorsque j'aperçus la lumière orangée de crépuscule devant nous. Les derniers Funécire s'éteignirent et nous fûmes plongés dans le noir. La galerie commença à remonter vers la surface et à mesure que nous avancions, une brise fraîche caressait notre visage avec plus d'intensité.

***

Enfin, après quelques minutes, nous arrivâmes à l'air libre. Shouta s'arrêta devant moi tandis que Ceandros bondissait de mes bras en soupirant de soulagement.
Kinjirô sortit en dernier et s'arrêta près de moi. Nous nous retournâmes comme un seul corps. Le soleil descendait derrière les pins en étirant nos ombres loin derrière nous. Le ciel entier semblait s'embraser. J'arrivais à distinguer la silhouette minuscule de Janusia à l'horizon.
— Bien. Commença Shouta en brisant délibérément le silence. Nous devons rentrer à présent. Kinjirô ?
— J'arrive !
Il se tourna vers moi.
— Tu te souviens du chemin Miki-chan ?
J'acquiesçai. J'avais la gorge trop serrée pour parler.
Ceandros, quant à lui semblait apaisé. Il paraissait beaucoup plus détendu, à présent que nous étions loin des Pokémon spectres et que nos deux guides s'apprêtaient à nous laisser seuls.
Soudain, Shouta fit volte face et s'enfonça dans à nouveau dans le tunnel obscur, sans un regard pour moi. Kinjirô me dévisagea longuement et avec une telle intensité que je baissai les yeux, les joues en feu.
— Tu devrais changer de vêtements… Lâcha-t-il enfin. Tu es bien trop remarquable habillée ainsi !
Il disparut à son tour. J'éprouvai une pointe de déception. J'avais espéré un adieu plus éloquent.
Je me retrouvais donc seule avec Ceandros. Le chemin était boueux et parsemé de hautes herbes qui se balançaient doucement.
Cet environnement ne ressemblait en rien à celui dans lequel j'avais grandi, je ne m'y sentais pas à ma place. Une femme et un petit garçon étaient là, courbés au dessus d'un ruisseau gazouillant. La mère montrait à son enfant comment attirer des Pokémon poissons avec la tige d'un roseau. Le garçonnet riait à l'éclat et agitait la plante en éclaboussant partout. Le banc d'Ecayon se dispersa.
— Oh ! Ils sont partis ! Fit la mère en se redressant. Viens, rentrons maintenant, la nuit ne va plus tarder !
Le petit garçon saisit la main qu'elle lui tendait, déçu. Ils firent volte-face et se retrouvèrent presque nez-à-nez avec moi. Voyant que je les observais, la femme me lança un regard méfiant et m'étudia de la tête aux pieds. Après un temps, elle fronça les sourcils et entraina son fils sur le chemin qui menait vers la petite bourgade du pont du Hameau.
Je baissai la tête, des larmes de piquaient mes yeux. J'avais peur d'être seule, peur de la suite. Mais surtout, j'étais terrifiée à l'idée que l'on me retrouve. J'enviais le petit garçon et sa vie si simple. Tout à coup, Ceandros jappa pour me tirer de ma rêverie. Je baissai le regard. Le Zorua me fixait de ses grands yeux bleus, les pattes avant sur mes cuisses.
— Tu regrettes ? Me questionna-t-il.
Je secouai alors la tête. J'avais vraiment hâte de rencontrer mon père, de revoir son ami et de m'éloigner de ma vie d'avant. De cette vie qui n'était pas la mienne…


Chapitre 3/fin