Point de vue de White
- White... Je te dis... Adieu...
Allongée dans l'herbe baignée par la fraîcheur d'une fin d'après-midi, la jeune fille repensait à cet épisode ultime de leur rencontre. Jamais auparavant elle n'aurait pensé que l'acte final se serait déroulé dans de telles conditions. Conditions Oh ! combien brusques que les larmes ne se manifestèrent qu'à son retour auprès de sa mère. Plus jamais leurs routes ne se croiseraient. Pincement au coeur accouplé au vide que lui procurait son absence, elle commençait seulement à comprendre ce qui lui arrivait, à déchiffrer la personnalité fragile que son alter-ego tentait de lui faire lire depuis leur première rencontre, à Arabelle. Quelle ignorante, quelle pauvre créature incompétente elle faisait. Pourquoi ce mystérieux personnage s'était-il intéressé à elle, d'ailleurs ? Pourquoi ne pas avoir choisi une autre cible, quelqu'un qui aurait su l'arrêter dès le départ ? Des personnalités plus malignes que la petite White, plus expérimentées dans le domaine des Pokémons, plus aventureux dans leur esprits, il en existait des centaines. Si ce n'est des milliers. L'incompréhension régnait en son âme, une tempête de contradictions envahissait sa mémoire. Tant de questions, si peu de réponses. Tant de mystères, si peu d'enquêtes menées à terme. Elle finit par s'enrouler sur elle même, joignant les rebords de ses yeux larmoyants l'un contre l'autre. Et elle s'endormit, un Chinchidou sauvage s'étant invité à se pelotonner contre son flanc.
Pont Yoneuve
Il lui était tant de passer de l'autre coté du pont Yoneuve. Chevauchant un Zeblitz trottinant joyeusement, elle entama la traversée vers son prochain rendez-vous : Méanville. Loin de l'ardente fougue des nombreux combats de ces dernières semaines, cette petite ville animée résonnait à son ouïe comme lieu de joie et de détente. De joie car elle retrouverait ses amis Bianca et Tcheren qui patientaient après elle. De détente pour raison d'une journée fortement remplie "de surprises en notre compagnie" comme lui avait signalé ses compères. C'est particulièrement dans ces moments là qu'elle détestait au plus haut point cette montre qui s'enchaînait à son poignet, son Vokit. Lorsqu'on lui laissait le programme d'une journée sous une tension digne d'un polar à suspense. D'agacement, la brunette souffla bruyamment, levant par la même occasion les yeux vers le ciel. Ce qui eut pour effet de lui faire basculer son poids du corps vers l'arrière, demandant un arrêt au zèbre électrique. Et elle s'immobilisa à son tour. Son regard s'adoucit, laissant transparaître une tristesse discrète et profonde dans le fond de ses pupilles. Dominant tous ses alentours, une grande roue tournoyait lentement.
La grande roue qui roulait au rythme lent et calme de la vie.
Cette grande roue rappelant à chacun que tout sur cette planète se devait de commencer quelque part avant d'atteindre l'apogée.
Cette grande roue qui semblait dire à ceux qui osaient poser un oeil sur elle qu'une descente vertigineuse précédait toujours une fin.
Cette grande roue qui reprenait le flambeau des peuples tombés afin de les passer aux nouvelles générations.
Mais bien plus loin que cette symbolique, un souvenir resurgissait. L'un des plus beau que sa mémoire pouvait se remémorer, tout autant que l'un des plus choquant. Seule, en tête à tête avec une personne, cette personne-là même qui hante ses nuits devenues trop solitaires depuis ses adieux, il lui révélait être un prince. Malgré le fait que la nouvelle retentisse comme une onde de choc à ses oreilles, elle se souvenait parfaitement de ce petit nuage l'ayant transporté jusqu'aux plus hauts sommets que ce pays, ce continent, cette Terre, son univers puisse compter. Se tenir en face d'un prince dans une nacelle de grande roue, isolés et coupés du monde, là n'est pas chose courante. Voilant le bleu de ses prunelles, elle expira une longue bouffée d'air. Et, serrant modérément ses mollets, sa monture repartit tranquillement.
Arrivée à Méanvlle
White les apercevait enfin. Ils patientaient après elle, près de l'entré du Music-Hall. Ne voyant aucun Chacripan traîner les rues, elle donna un vigoureux coup de talon, déclenchant chez son Zeblitz un galop ventre à terre jusqu'à ses amis. Quelques mètres avant Tcheren et Bianca, elle se mit en amazone avant de sauter pieds joints devant eux, un sourire radieux illuminant son visage. Sourire qui lui fut rendu par la blonde habitée d'une joie de vivre naturelle, ainsi que par son camarade masculin qui se déridait au fur et à mesure que le temps déroulait son cours. Ce qui se comprenait facilement par les mains entrelacées qui se tenaient entre eux deux. Elle aussi aimerait se montrer fièrement en public avec quelqu'un dans ses bras, une main à serrer tendrement dans le creux de sa paume. Mais jamais elle n'en serait capable. Son souvenir reviendrait et envahirait cette place si convoitée en son coeur. Non, il ne fallait pas y penser aujourd'hui, la jeune fille ne devait pas laisser son être se faire submerger en cette journée chaleureuse. Rappelant son équidé dans sa LuxeBall, elle se mit en marche avec ses amis d'enfance pour des surprises en perspectives.
Bilan d'une journée à Méanville
"Épuisante". Oui, si quelqu'un devait lui demander de résumer ce jour en un seul mot, elle opterait pour celui ci. A moins qu'elle ne lui préfère le mot "Chance". Car les trois compères n'en avaient guère manqué en ce jour faste.
A commencer, quelque semaines auparavant, par un courrier reçu par Bianca lui signalant qu'elle venait de gagner un concours lui permettant de réserver la grande salle du Music-Hall durant toute une matinée. Concours auquel aucune participation de la demoiselle ne venait se mêler dans le flot de mails reçus. Appel de sa part signalant ce malentendu, réponse lui précisant qu'aucune erreur n'était permise dans le système informatique. Elle s'était finalement résignée avec joie à accepter son lot. Et surtout d'en profiter avec bonheur avec ses amis.
Ensuite, alors que le zénith rayonnait de tout son saoul, le trio fut tenter d'aller faire un tour dans le petit centre commercial de la ville. Et à nouveau, le destin leur donna un coup de pouce en les faisant millionième client de la zone. Ils obtinrent chacun un bon d'achat de cinq milles pokédollars. Enfin, disons plutôt qu'ils se partagèrent les quinze milles pokédollars. La brune aux yeux bleus s'était d'ailleurs exclamé un puissant : "À nous les boutiques !". Au plus grand bonheur de son homologue féminin. Au plus grand désarroi de l'unique garçon du groupe.
Pour terminer en beauté, White eu l'immense privilège d'être filmée par les caméras du stade lors du match de base-ball pour gagner un bon dans l'hôtel de son choix dans la ville. Son lot lui fut d'ailleurs remis en mains propres par le joueur du jour. Le stade, déjà en délire par rapport à la victoire du club local, l'ovationna à la manière d'un match de ligue qu'elle aurait remporter à l'instant.
Fête foraine
La brunette se laissa tomber sur un banc. Enfin un peu de repos en solitaire. Car les amoureux tentaient de dénicher un endroit où passer la nuit, un hôtel qui accepterait le bon qu'elle n'avait guère préféré garder pour son utilisation personnelle. Et puis, autant qu'ils en profitent pour se retrouver ensemble. Ses yeux se levèrent en direction du manteau de velours recouvrant la ville. Les étoiles naissantes illuminaient un ciel calme et serein. Aucun nuages ne se profilaient à l'horizon éclaircie des derniers rayons du soleil couchant. Son regard plongea finalement au plus profond de l'infini parsemé de lumières étincelantes.
Une nuit comme elle les appréciait particulièrement.
Une nuit ressemblant à ce qu'elle prit à l'époque comme un rendez-vous.
Une nuit qu'elle ne serait pas prête d'effacer de sa mémoire.
Une nuit magique, tout simplement.
Se remémorant ce souvenir, une perle roula le long de sa joue. Elle se devait d'y retourner afin de se remémorer ce passé. Avant de se redresser de sa place, un jeune homme lui offrit une glace qu'il ne voulait "pas gâcher à cause d'une petite amie poseuse de Laporeille". Elle le remercia et commença sa dégustation en marche. Gout Voluté, le parfum qu'elle préférait le plus au monde. La chance continuait donc à lui sourire. Oubliant le trou béant de son coeur, elle essuya les traces de larmes séchées présentes sur joues du revers de sa manche et alla se positionner dans la file d'attente de la grande roue... Bien que file d'attente fut une bien grande expression dans cas précis, n'ayant qu'une personne la précédant. Vint donc rapidement son tour. Et ses pieds franchirent la porte de la cabine.
Grande roue
- ... Ils ne sont pas là. Montons dans la grande roue. Nous pourrons surement les voir en prenant de la hauteur. Ça tombe bien, j'aime énormément la grande roue. Ce mouvement circulaire... Cette dynamique... C'est une collection de superbes équations...
Trop... Trop... Ce souvenir fut de trop... Son visage se cacha dans les méandres de ses membres. Un sens caché au plus profond de cette phrase afin de se retrouver en tête à tête avec elle ? Uniquement en sa compagnie ? Car pas une seule fois il ne lui demanda de jeter un oeil sur l'extérieur. Parler. Il n'avait fait que lui parler... Révéler son identité serait plus approprié. Sans aucun doute ne voulait il pas être dérangé pas quelquonque membre de cette organisation aujourd'hui dissoute. Dissolution qui fut en grande partie due à ses actes, sa victoire sur cette saloperie de Ghetis (une ombre de grimace passa sur son visage) mais aussi sur celle du roi. Sa tête se délogea du creux de ses bras, sondant l'extérieur de la PokéBall du plus loin qu'elle le pouvait. Et à ce moment défila sur l'étoffe de soie une étoile filante. De la même lueur étant passé dans son regard d'émeraude lorsque sa main déclencha la libération de son Zekrom. Peut être cette météorite enflammée représentait l'esprit de son Reshiram, libéré quelques heures à la suite de son frère. Car jamais elle n'aurait supporté de le voir se morfondre au fond d'une balle inconfortable et non représentative de sa puissance, de sa liberté. Son regard lui avait d'ailleurs donné des frissons à l'époque.
Sauvage et reconnaissant à la fois.
Libre et protecteur tout en même temps.
Complexe et singulier.
Indéchiffrable et simple.
Aujourd'hui encore, ce mystère la rongeait de l'intérieur quand sa mémoire fouillait les décombres de ses souvenirs. Souvenirs dont elle fut brusquement tirée par l'arrêt soudain de la machine. Bizarre de laisser un tour en suspens comme cela. Surtout lorsque l'on se trouve à l'apogée de celui-ci. Alors qu'elle s'approchait prudemment de la porte mécanique, celle-ci s'ouvrit, laissant place à un Rhinolove. Son Rhinolove ! Tâtonnant brièvement sa ceinture, elle se rendit compte que sa LoveBall n'y trouvait plus. Cela avait dû se produire juste avant qu'elle ne grimpe à sa position actuelle. Il revenait donc de chez son ravisseur pour la retrouver. Elle lui tendit les bras, soulagée de le voir sain et sauf. Mais à sa grande surprise, il semblait ne pas être joyeux : un air sérieux traversait ses traits. Elle le prit malgré tout entre ses mains avec la plus grande délicatesse... avant de sombrer dans les bras de Rondoudou.
Au réveil
Première secousse... "Fchez mla paix..."
Seconde secousse... "Lssez mdormir..."
Troisième secousse... "Bsang, mdégagez...!"
Quatrième secousse... "On vous a jamais appris à laissez les gens terminer leur nuit !!!"
La dernière phrase franchit ses lèvres à la manière d'un dard-venin des plus venimeux qui soit, insistant bien sur les dernières syllabes. Elle détestait que quelque personne ne la réveille ainsi. Et l'effet escompté se produisit : le gêneur recula de deux pas. Mais se remit à sa hauteur tout aussi vite. Il ne manquait pas de détermination, on pouvait le dire. Cependant, des bruits de pas lointain s'approchèrent, provoquant la fuite précipitée du secoueur. Des éclats de voix féminins résonnèrent de plus en plus à ses oreilles. Elle la reconnaissait. Elle pourrait la reconnaître entre mille. Décollant ses paupières l'une de l'autre, elle se laissa submerger par l'éblouissante clarté matinale, la faisant se retourner... avant de rencontrer le béton de la grande place. Malgré le choc, elle réussit à se redresser sur ses coudes et à croiser le regard inquiet et soulagé de son amie. Toujours un sourire sur ses lèvres, cette Bianca. Mais White, trop endormie encore pour pouvoir lui rendre la pareille, se releva difficilement. C'est seulement une fois en équilibre qu'elle s'aperçut que Tcheren la soutenait par le côté droit. Et, observant les alentours, elle hoqueta de surprise : elle venait de se réveiller dans la cohue de la fête foraine, sur un banc loin de son lit circulaire. Surement son volatile qui, ne désirant pas la voir dormir en hauteur, l'avait déplacé sur cette assise à l'aide d'un Psycho ou d'un Choc Mental. Où pouvait-il se trouver, d'ailleurs ?
Car toute bonne chose possède une fin
Saluant ses deux amis d'un signe vigoureux de la main, elle s'en retourna vers sa prochaine destination : la Ville Blanche. Pédalant aussi lentement qu'elle le pouvait, elle repensait à tout ce qui venait de se dérouler durant ce week-end. A cette chance sans limites s'étant déverser sur elle, Tcheren et Bianca, à cette nuit si mystérieuse passée dans le parc d'attractions. Mais ce qui la déstabilisait surtout demeurait le comportement de son pokémon réapparut de on-ne-sait-où, volant à ses côtés. Au grand jamais il n'avait possédé une telle agitation. Et ceriz sur le gâteau, il refusait toute tentative de communication avec sa dresseuse. D'où sa préférence à le laisser se défouler à ses côtés (sa LoveBall était réapparue à sa ceinture miraculeusement elle aussi), ce qui ne portait cependant pas vraiment de résultats positifs. Serrant ses doigts sur les freins, elle stoppa sa course et bascula la tête en arrière... avant de la repasser en mode "Vers le bas". Sa casquette ayant disparue, elle ne pouvait plus se protéger de la vive lumière du soleil. Elle expira profondément, jeta un coup d'oeil en direction de son camarade qui agitait vigoureusement ses ailes autour d'elle, entama une bouteille d'eau. Le tout avant de repartir en direction du Pont de l'Inconnu.
Le chemin ne lui prit que trop peu de temps à son gout. Pourtant, ce n'était pas preuve que d'avoir essayé de rivaliser avec un Ramoloss au niveau de sa vitesse. Repliant et rangeant son vélo (pratique quand ils sont portatifs), elle franchit le porche menant au relieur symbolique de ce monde. Elle se trouva dans une pièce de taille considérable où régnait en maître une miniature du pont qu'elle s'apprêtait à franchir. Mais là ne se situait guère ce qui venait d'éveiller son instinct sauvage. Bien que dans son dos, elle venait de percevoir, elle venait de sentir une présence. Elle n'eut le temps de pivoter sur elle même que quelque chose se posa sa tête, aplatissant ses cheveux. Elle n'avait guère besoin de le voir pour comprendre qu'il s'agissait de sa casquette. Quant à son Rhinolove, il se calma d'un coup, comme intimidé, absorbé par se qui se déroulait dans cette pièce. Tout devint clair dans son esprit désormais.
Elle savait que la chance ne s'immisçait jamais par hasard dans la vie de quelqu'un.
Elle savait que son ange gardien veillait sur elle depuis le début.
Elle savait d'instinct que, si elle venait à se retourner, elle croiserait son regard.
Comment ? Elle l'ignorait.
Elle savait. Tout simplement.
Quelque chose glissa le long de son visage, lui enlevant la vue momentanément. Elle le laissa faire, elle lui faisait confiance. Un doigt effleura ses lèvres. Puis sa bouche vint à la rencontre de la sienne.
Instant trop bref à son gout...
Mais le moment fut magique.
Le moment fut féerique.
Un moment fabuleux qu'elle n'oublierait pas de sitôt.
Il lâcha prise en premier, la saisissant par la taille d'une main et par les épaules de l'autre. L'étreinte ne dura qu'une poignée de secondes. Une poignée de secondes qui sembla durer une éternité. Une poignée de secondes où il lui susurra un "Merci" à l'oreille. Un "Merci" tendre et sincère, doux et puissant, sanglotant et joyeux. Ses bras se décrochèrent de sa chair, la laissant seule au milieu du corridor. Elle souleva le bandana de ses yeux.
Plus personne. Vide. Abandonnée. Mais soulagée. Et trempée par la douce sueur de ces courtes mais intenses minutes. Voletant jusqu'à elle, son pokémon de l'amour lui enleva sa casquette et lui remit en mains propres. Une lumière illumina son regard. Car en plus d'appartenir au voleur de son coeur, une lettre y avait été glissé à son intention. Une lettre qu'elle déplia avec le plus grand des soins. Et des sanglots vinrent prendre place au coin de ses yeux.
Il y était inscrit : "Don't forget our Fairy Tale.
N"