Prologue + Chapitre 1 : Une mystérieuse rencontre...
[Prologue]
Je ne savais pas quoi faire. Nous étions en plein milieu des vacances d'été, un samedi après-midi d'août au moment où tout le monde voyage et rapporte des petits souvenirs plus ou moins amusant de leur lieu de vacances. Quand je dis nous, je parle des français en général, et je ne m'inclus pas dans ce lot de petits globe-trotteurs qui se sentent obligés de voyager pour avoir quelque chose à dire aux collègues à la reprise du boulot. J'étais seule chez moi. J'avais refusé de partir avec mes parents cette année car je préférais m'ennuyer ici plutôt que dans un bungalow sous une chaleur à crever ou je ne sais quoi d'autre. Les volets du salon étaient à demi clos, il faisait légèrement sombre dans la pièce et l'air était respirable. Bref, l'atmosphère était plutôt agréable.
Je m'étais assise sur le canapé, pensant à papa qui m'aurait dit, s'il avait été là : "Pour une fille de ton âge, t'affaler comme ça dans le canapé est assez lamentable". Il n'aurait pas eu tort. Mais je m'en fichais. Je n'avais personne a inviter, toutes mes amies étaient partis. Personnellement, cette sensation de solitude ne me déplaisait pas. Le calme, le silence, j'aimais vraiment ça. Par réflexe, et comme n'importe quelle personne cherchant a lutté contre l'ennui, je saisis la télécommande et allumai la télévision. Je tombai sur une chaîne d'infos diffusant un flash spécial comme quoi une météorite aurait été trouvée dans le Sahara. Il s'agirait de la plus grosse météorite tombée sur Terre jusqu'alors, si on met de côté celle qui a ravagé notre pauvre et misérable planète il y a environ trois millions d'années. Elle serait apparemment tombée il y a une semaine, ce qui explique le bruit assourdissant entendu à des kilomètres du désert, bruit qui aurait résonné dans toute la savane. Enfin, c'est ce qu'ils disent. Je n'étais pas là-bas pour le vérifier. Quoiqu'il en soit, cette fameuse météorite venait d'être trouvée.
<< Une atmosphère étrange règne et un mystère semble s'être installé dans le Sahara. Certains membres de l'équipe envoyée sur place, dont un de nos plus fidèles journalistes, ont récemment été portés disparu. Mais où sont-ils ? Quel danger nous guète ? Certains nomades disent avoir rencontrés d'étranges créatures, seraient-ce des extraterrestres ? >>
Et voilà comment transformer une simple découverte en phénomène surréaliste ! Ils n'avaient pas l'impression d'en faire un peu trop ? Voilà à quoi nous menait la course aux audiences des médias...
Je décidai de mettre un terme à ses fantaisies d'extraterrestres et de météorites. J'éteignis la télé et repartis dans ma chambre pour m'évader un peu dans mes rêves les plus profonds... Les vacances d'été se terminaient...
[Chapitre 1] Une mystérieuse rencontre...
Novembre 2010, le froid c'était installé. L'hiver était là. On avait plus entendu parlé de l'affaire sur la météorite tombée en Afrique. Sous une pluie battante, j'attendais tranquillement mon bus. Les cours avaient repris, pour le plus grand malheur des étudiants. Cela faisait deux mois que j'étais entrée au lycée, et je commençais déjà à en avoir marre. Je songeais à arrêter mes études, par pure fainéantise, et à me rediriger vers un truc moins compliqué, où il n'y avait pas vraiment besoin de réfléchir. Ma mère refusait totalement cette idée. Pour elle, ce serait gâché ma vie de "brillante lycéenne". C'est vrai que je ne m'en sortais pas trop mal, mais je n'avais aucune envie de continuer.
Plongée dans mes pensées, je n'entendis pas l'arrivée de Théo à l'arrêt. Ce garçon m'avait toujours paru mystérieux. Il ne parlait jamais à personne, il n'avait pas vraiment d'ami. Pourtant, il était loin d'être repoussant. Je me souvins du jour où je l'avais aperçu pour la première fois. Nous étions tous les deux penchés sur les listes de classes, cherchant nos noms parmi les deux milles cinq cent élèves du lycée, si nous ne sommes pas plus. Nos regards s'étaient arrêtés sur la même feuille. Et mon cœur aussi, c'était arrêté ce jour là. C'était la première fois que je ressentais cette étrange sensation.
- Le bus arrive, Anaïs, murmura-t-il.
Je relevai lentement la tête pour constater que le jeune garçon me regardait, pour la première fois depuis le jour où nous avions cherché nos classes. Je me noyais totalement dans son regard, ses yeux étaient d'un bleu si profond... Ses cheveux, noirs d'ébène, étaient légèrement ébouriffés. Qu'est-ce qu'un aussi beau garçon ferait avec une fille aussi banale que moi ? Franchement ? J'étais de taille moyenne, j'avais des cheveux châtain mi-longs et des yeux marron comme tout le monde ! Je ne sortais vraiment pas du lot.
- Mademoiselle ?
Le chauffeur me sortit de mes réflexions. Les passagers me regardaient de travers, comme si j'étais la seule responsable de leur retard au bureau.
- Pardonnez moi, j'étais ailleurs.
Comme je l'imaginais, il n'y avait plus de place dans le bus. La dernière avait été prise par Théo.
- Tu veux ma place ? me fit-il d'une voix douce.
- Non merci, je pense pouvoir tenir jusqu'au lycée.
Espèce d'idiote ! C'est ce que je pensais au plus profond de moi. Je posai mon sac à mes pieds, histoire de me soulager le dos, qui supportait depuis vingt minutes dix kilos de livres de cours. Bien sûr, quitte à me tenir debout pour le trajet, j'étais face à Théo. C'est à ce moment qu'il me sembla apercevoir quelque chose bouger sous son siège. Le bus freina violemment. Tout le monde se retrouva projeté vers l'avant. Moi y compris. Me rattrapant sur les genoux de Théo, j'agrippai mon sac et me relevai presque simultanément. Il devait avoir remarqué ma gêne.
- Espèce d'abruti !
Comme d'habitude, le chauffeur était d'une diplomatie indiscutable. Je jetai un regard sur mon sac, il ne semblait avoir subi aucune dégradation. La poche principale avait été légèrement ouverte lors du choc. Je n'eus pas la possibilité de vérifier si il me manquait quelque chose car nous étions arrivés à l'arrêt le plus proche du lycée. Il était temps de descendre.
- C'était une belle secousse, fit Théo d'une voix presque inaudible, tu n'as rien ?
- Non, rien du tout.
Je ne savais pas quoi dire pour animer la conversation. Nous arrivâmes au lycée, sans un mot.
- Anaïs ! Je suis là ! s'exclama Emilie lorsque j'eus passé le grand portail, tu as fait tes exos de maths ? Je n'ai rien compris !
- Dis plutôt que tu n'as pas eu le courage de comprendre, répondis-je, de toutes façons il ne vérifie jamais, je ne vois pas de quoi tu as peur.
- Je n'ai pas peur ! Bon, viens, il fait froid près de l'entrée !
Elle me tira dans la masse d'élèves et nous nous retrouvâmes avec les autres filles de notre classe en plein milieu du grand hall. Emilie était ma meilleure amie depuis le collège. Je ne pourrais sans doute jamais expliquer pourquoi nous étions si proches, car elle et moi étions les parfaits opposés. Elle aimait se faire remarquer, connaître du monde, sortir pendant le week-end... Une fille très sociable, contrairement à moi qui suis une vraie sauvage. Relevant ses lunettes, elle expliquait avec entrain sa théorie sur les profs du lycée aux autres filles, très attentives à son discours. Je m'adossai contre un pilier, dans l'espoir de récupérer quelques minutes de sommeil, lorsque j'eus la vague impression que quelque chose s'agitait dans mon dos. Un terrible malaise me pris. Quelle était cette affreuse sensation qui me parcourait le corps, comme si j'avais encaissé une légère décharge électrique ?
- Je reviens les filles ! lançais-je nerveusement.
Je me dirigeai vers les toilettes, espérant qu'une souris ne se soit pas invité dans mon sac. Je me souvins alors du choc dans le bus, quelques minutes plus tôt. Mon sac s'était renversé et la poche principale s'était entrouverte. Un quelconque rongeur se serait-il glissé dedans ? Non, bien sûr que non. Je l'aurais remarqué... enfin c'est ce que je croyais. J'entrai dans une cabine, bloquai le verrou et, d'une main hésitante et tremblante, ouvris mon sac. C'est là qu'il apparut. Je fis un bond vers l'arrière.
- Aaaah ! Un rat bionique ! m'écriai-je stupéfaite.
J'étais ridicule. Je fermai les yeux quelques instants pour me remettre les idées en place. J'entendis les gloussements insupportables de quelques pimbêches qui se recoiffaient devant les glaces. Il n'était pas question que je sorte maintenant, pour mon honneur et pour celui des gens de ma classe. Je ré-ouvris un œil, puis deux. Rien. Mon sac n'avait jamais été aussi normal. Je baissai la tête, quelque chose se frottait à mes pieds.
- C'est pas possible, c'est pas possible, murmurai-je affolée, qu'est-ce que je dois faire ?
Un énorme rat d'au moins quatre-vingts centimètres se dressait devant moi, sur ses postérieurs. Non, cela n'avait rien d'un rat. C'était une créature qui avait dû subir toutes sortes d'expériences atroces. Une bestiole horrible, orange et marron, avec une tête toute ronde, une queue se terminant par une sorte d'éclair et des espèces de patchs jaunes sur les joues. On aurait cru que de la foudre en sortait. Une fille normale aurait pris ses jambes à son cou et aurait fait comme si elle n'avait rien vu. Mais moi, au lieu de ça, tétanisée par la peur d'une soudaine attaque, je ne bougeais pas. La sonnerie annonçant le début des cours retentit. Je n'avais plus le temps. Ne sachant quoi faire, je saisis mon sac et enfermai la créature à l'intérieur. Elle n'eut aucun geste de résistance. Après tout, elle avait déjà fait le trajet sortie du bus-lycée dans mon sac. Complètement déboussolée, je sortis des toilettes, m'apercevant que les couloirs étaient déjà presque désert, je courus jusqu'à la salle où se tenait le cours de physique-chimie. Le professeur avait commencé son cours mais m'accepta tout de même. Je pris place à côté d'Emilie, qui se trouvait juste derrière Théo.
- Où étais-tu passée ? Je t'ai cherché partout ! me lança-t-elle avec une pointe d'agacement dans la voix. Dis le moi si je t'embête !
- Bien sûr que non ! Je t'expliquerais apr...
- Il me semble que bavarder après être arrivée en retard au cours ne soit pas à votre avantage, mademoiselle ! me fit remarquer le professeur. Vous seriez priée de faire semblant de vous intéresser au cours !
Ce prof me donnait la chair de poule. Il était complètement fou avec ses théories sur les extraterrestres. Oui oui, j'ai bien dit théories sur les extraterrestres ! Car figurez-vous que dès qu'il peut exposer son point de vue à ce sujet, il n'y manque pas ! Cela me fit repenser à la chose qui se trouvait à ce moment même dans mon sac. Je me penchai pour regarder, il était immobile, et il en valait mieux pour moi d'ailleurs.
- Tu as l'air stressée, reprit Emilie tout bas, qu'est-ce qu'il y a ?
- Après les cours viens chez moi, il n'y aura personne, on sera tranquille. J'ai quelque chose à te montrer, chuchotais-je. Toi, ça va te plaire. Tout ce qui est bizarre et qui sort de l'ordinaire te plait.
- C'est vrai ? Une bizarrerie ? Génial ! fit-elle toute excitée.
A ce moment, je sentis comme une présence derrière moi. Je me retournai, l'air innocente, et constatai que le vieux fou aux cheveux blancs me regardait, avec ses lunettes grossissement fois cinq cents, d'un air peu amical.
- Vous comprendrez mieux les notions de silence et d'écoute après deux heures de travaux supplémentaires, mademoiselle. Donnez moi votre carnet, que je le note, fit-il de sa voix la plus sadique.
Moi qui n'aimais pas me faire remarquer, j'étais servie ! Théo s'était retourné. J'étais aussi rouge qu'une tomate cerise bien mûre. Je me fis discrète tout le long du cours, en priant pour que l'hôte de mon sac à dos ne se manifeste pas. La journée promettait d'être longue...