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Team Rocket X-Squad de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 14/02/2011 à 12:00
» Dernière mise à jour le 16/05/2022 à 11:40

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 1 : Les enfants Rocket - [Arc I : Team Cisaille]


Il était minuit passé quand ils passèrent à l'action.

Dans les bâtiments de la Searche Com, à l'étage le plus sécurisé, un pan de mur moquetté commença à grésiller, puis à fumer. Une lueur rouge traversa le mur en un point, puis traça un cercle ; cercle assez grand pour permettre à quelqu'un, d'assez fin en l'occurrence, de traverser. Quand le cercle fut tracé et perforé, le pan de mur tomba, donnant un accès direct vers l'aile voisine de l'immeuble, bien moins sécurisée que celle-ci.

Quelqu'un passa par l'ouverture créée au chalumeau. C'était un adolescent d'une quinzaine d'années, aux cheveux bleus foncés et aux yeux quasiment de la même couleur. Il avait un air fier et décidé sur son jeune visage, d'une détermination contrôlée et d'une concentration extrême. Il portait un uniforme gris et blanc, sur lequel était dessiné un grand R rouge. Enfin, il portait un béret blanc qui ne recouvrait que partiellement ses longs cheveux indisciplinés. Ce garçon s'appelait Mercutio et était en mission pour la Team Rocket.

La Team Rocket... Un nom qui en faisait frémir plus d'un, mais qui faisait naître en Mercutio un sentiment d'euphorie, d'ambition et de gloire. Mercutio connaissait bien les intentions à long terme de cette organisation secrète : la domination du monde grâce aux Pokemon ! Quelle vision idyllique : la planète sous la gouvernance unique de cette si puissante organisation. Dès lors que la Team Rocket serait au pouvoir, il n'y aurait plus de guerre, plus de conflit, plus de pauvreté. Les gens vivraient heureux grâce aux Pokemon, que la Team Rocket savait, plus que tout autre, utiliser pour satisfaire les besoins de l'humanité. Après tout, les Pokemon existaient dans ce but-là.

Mercutio était lui-même dresseur de Pokemon, comme la grande majorité des membres de la Team Rocket. Pour autant, il avait déjà vu, assez souvent d'ailleurs, plusieurs membres se servir de leurs Pokemon comme de vulgaires outils, comme s'ils n'étaient pas vivants. Mercutio était d'accord avec le fait que les Pokemon devaient servir les humains, mais dans ce but, il prenait toujours en compte les sentiments et les attentes de son propre Pokemon. C'était ainsi qu'une équipe fonctionnait le mieux ; quand tous ses membres savaient et comprenaient les besoins des autres. Plus que son partenaire, le Pokemon de Mercutio était son ami. Et c'était ça qui allait le distinguer de toute cette masse de sbires au bas de l'échelle de la Team Rocket !

Une fois passé par l'ouverture qu'il avait créée, Mercutio se saisit de son arme équipée de lumière pour éclairer le couloir sombre qui se présentait à lui. Il avança prudemment parmi les plantes de décorum entreposées là par la Searche Com, tendant l'oreille pour capter le moindre bruit suspect. Il était censé n'y avoir plus personne dans cet étage à cette heure-ci, mais la prudence était de mise. Elle l'était toujours. « Prudence, analyse, décision, action, rapidité », comme le répétait souvent le commandant Penan, celui qui lui avait tout appris.

Mercutio vérifia sur son brassard électronique sa position, et pianota pour faire apparaître le plan en trois dimensions de l'immense immeuble. La trappe où il était censé retrouver Galatea était un escalier et un couloir plus loin. Arrivé devant, il regarda l'heure, et attendit, constatant qu'il était en avance d'une minute et vingt secondes. Mais une fois ce délai passé, Galatea n'était toujours pas là. « Avant l'heure, c'est encore l'heure, mais après l'heure, ce n'est plus l'heure », avait coutume de dire le commandant Penan. Galatea n'avait apparemment pas bien enregistré ce conseil de leur instructeur.

Mercutio commença à s'inquiéter et à être passablement énervé. Galatea n'avait jamais été la fille la plus ponctuelle du monde, mais là, le plan était pourtant simple. Qu'est-ce qui lui prenait autant de temps ? Elle allait faire foirer toute l'opération ! Mais alors que Mercutio s'apprêtait à la contacter par radio malgré le risque de se faire capter, la trappe, qui était une plaque d'aération, fut propulsée par un pied botté et alla s'écraser contre une table métallique, provoquant un bruit monstre. Mercutio serra les dents de colère.

Galatea sortit souplement du conduit d'aération pour atterrir devant Mercutio. Ce dernier contempla sa sœur, l'air furieux. Galatea avait le même âge que Mercutio, à une ou deux minutes près, puisqu'ils étaient frère et sœur d'une fratrie de triplés. Pour autant, ils ne se ressemblaient guère, ce qui arrangeait Mercutio ; il pouvait ainsi prétendre ne pas la connaître quand elle devenait trop lourde. Galatea avait des cheveux magentas, et des yeux verts émeraude. Son visage était d'une beauté que ni Mercutio ni leur sœur Siena ne pouvaient approcher. Tout comme son frère, elle portait l'uniforme de la Team Rocket ainsi qu'un béret blanc. Mercutio l'apostropha violemment à voix basse.

- Tu es en retard ! Et c'était quoi cette entrée ? Tu tiens vraiment à réveiller tout le monde à un kilomètre à la ronde ?!

- Nous sommes des voleurs type agents secrets, des infiltrés, protesta la fautive. Opérer avec un certain style est capital pour notre réputation.

- Et opérer prudemment est capital pour notre survie, répliqua Mercutio. Et puis, qui va la fonder, ta réputation, puisque nous sommes seuls ici ?

Mercutio laissa sa sœur réfléchir à ce problème et fit réapparaître son plan 3D. Les idioties de Galatea leur avaient fait perdre du temps pour la coupure du système de sécurité de la salle du trésor. Et Siena serait bien capable de commencer sans eux. Mercutio ordonna donc qu'ils accélèrent le pas, tout en restant prudents, s'empressa-t-il d'ajouter en voyant sa sœur se précipiter en sautillant, l'arme au poing. Ils montèrent quelques étages, déjouèrent quelques pièges, pour enfin parvenir devant la cible ; en l'occurrence, une salle fortifiée, protégée par deux rangées de portes blindées. Mais le plus gros de la sécurité était dedans. Pour l'instant, il s'agissait seulement de parvenir à ouvrir ces portes inviolables. Ce qu'ils devaient voler était derrière.

Essayer de l'ouvrir de force aurait été la dernière des stupidités. D'une, même un troupeau de Tauros chargeant à toute vitesse n'y serait sans doute pas parvenu, et de deux, c'était le moyen le plus efficace pour se faire repérer. Par chance, il existait un circuit, à l'étage au-dessus, qui, une fois bien bidouillé, pouvait ouvrir cette porte. Ni Mercutio ni Galatea n'étant expert en informatique ni en électronique, c'était leur sœur qui devait se charger de cette partie du plan. Et avant que Mercutio ne lève son poignet pour regarder le chronométrage, la porte clignota et s'ouvrit devant eux. Mercutio constata que Siena avait réalisé là un minutage à la seconde.

- En voilà une qui est sérieuse, dit-il en aparté à l'intention de Galatea.

- On attend qu'elle nous rejoigne ou on se débrouille tous les deux ? demanda cette dernière.

- À chacun sa mission, répondit Mercutio. La sienne était d'ouvrir cette porte, la nôtre de s'emparer de la disquette.

La salle devant eux était un bureau; celui du président de Searche Com, dans le cas présent. Ce que les triplés recherchaient était une disquette de données sur une nouvelle invention de son département de recherche sur laquelle la Team Rocket voulait faire main basse. Galatea hocha la tête, trop heureuse de laisser un peu sur le côté leur sœur Siena qui réussissait toujours parfaitement ses missions et avait toujours les meilleures notes à l'entraînement, pour retirer enfin sa propre part de gloire. Elle entra comme à l'accoutumée, c'est-à-dire inconsciemment et sans réfléchir, dans le bureau du président. Mercutio tenta de la rattraper avant qu'elle passe le seuil, mais c'était trop tard.

Dès que la jeune fille eut posé le pied dans la salle, il y eu un déclic, et deux mitrailleuses automatiques sortirent des angles de la pièce. Galatea courut se mettre à l'abri derrière le bureau du président, mais ne réagit pas assez vite. Elle fut touchée deux fois avant de s'écrouler sous le bureau. Mercutio jura et se précipita dans la salle en tirant à l'aveugle sur les défenses automatiques, tout en courant pour atteindre sa sœur. Elle était encore vivante, mais elle avait été touchée en pleine poitrine, et ne s'en sortirait pas. Déjà, ses yeux se voilaient.

- Désolée... parvint-elle à prononcer. J'ai... encore foiré...

Ses yeux se fermèrent, en même temps que sa conscience disparaissait, et elle ne bougea plus. Mercutio tenta de faire le vide dans son esprit ; s'il se laissait distraire par quoi ce que ce soit, alors que des mitrailleuses continuaient de tirer sur le bureau, le réduisant peu à peu en débris, il allait connaître le même sort que sa pauvre sœur. Il ne pouvait pas sortir de son abri relatif ; il aurait peut-être le temps de détruire l'une des mitrailleuses, mais l'autre aurait tôt fait de l'abattre avant qu'il ait eu le temps de se remettre à l'abri ou de la détruire elle aussi.

Son seul espoir de survie était que Siena, alertée par les coups de feu, songe à le rejoindre. Ce qu'elle fit, au bout de quelques minutes, et alors que le bureau en dessous duquel Mercutio se cachait était pratiquement en miettes. Siena ressemblait plus à Mercutio qu'à Galatea. Elle avait les mêmes yeux que lui, et ses cheveux étaient d'un bleu lavande. Elle était la seule des trois à ne pas porter le béret de la Team Rocket. Question de goût, disait-elle. Elle était assez petite et fine, mais ça ne l'empêchait pas de maîtriser à la lutte bien des gens plus gros et plus grands qu'elle.

Elle évalua rapidement la situation comme elle savait le faire. Galatea était tombée et son frère était piégé et bientôt une cible facile pour les armes automatiques du bureau. Occupées sur Mercutio, les mitrailleuses ne détectèrent Siena qu'après qu'elle ait eu le temps de mettre hors service l'une d'entre elles. Elle dut toutefois se remettre à couvert avant que la seconde ne se désintéresse de Mercutio pour viser Siena. Cela fut l'occasion pour le jeune homme de sortir et de foncer hors de la salle, avant que l'arme ne puisse lui tirer dessus.

- Galatea est morte, dit-il à sa sœur, essoufflé.

- J'avais deviné, répondit-elle sans une once de quoi que ce soit.

Siena était la meilleure des trois durant les missions ; elle était efficace et n'échouait jamais rien. Elle pouvait gérer des situations qui échappaient totalement à Mercutio et Galatea, et était la chouchoute de leurs supérieurs. Mais il y avait quelque chose en Siena qui avait toujours mis de la distance entre elle et son frère et sa sœur : sa froideur excessive. Siena avait le sourire rare et était toujours très sérieuse. Ce n'était pas qu'elle n'aimait pas son frère et sa sœur, ni qu'elle n'avait pas de sentiments ; seulement qu'elle ne les montrait jamais.

- Et la disquette ? Tu l'as ? demanda-t-elle à son frère.

- J'avais d'autres priorités, avoua Mercutio. Comme éviter de me faire tuer, par exemple.

- Aucune priorité ne doit passer avant la mission, renchérit Siena. Il faut la récupérer. J'entre, et tu me couvres.

- Non, on fait l'inverse, dit Mercutio, qui ne voulait pas voir mourir son autre sœur.

Avant que Siena n'ait le temps de répliquer, Mercutio fonça dans la pièce. Siena tira sur la mitrailleuse, mais cette dernière préféra se concentrer sur Mercutio. Ce dernier avait ouvert le tiroir du bureau détruit et avait mis la disquette dans sa poche. Mais la mitrailleuse s'apprêtait à lui tirer dessus tandis qu'il sortait. Siena se précipita pour lui faire bouclier de son corps, mais Mercutio la devança. Il la protégea avant qu'elle n'ait eu le temps de le faire en se jetant sur elle, prenant au passage plusieurs balles dans le dos. La douleur était immense, mais il sombra dans des ténèbres bienfaisantes en quelques secondes.

Essoufflée par la chute de son frère sur elle, Siena déchargea sur pistolet sur la mitrailleuse qui continuait de tirer sur elle, mais les balles étaient arrêtées par le cadavre de Mercutio, reposant sur elle. À sa dernière balle, elle parvint à mettre HS l'arme automatique. Elle se releva difficilement. Avec des gestes mécaniques, elle fouilla les poches de Mercutio pour y trouver la disquette, cassée dans la chute de son frère. Seule survivante de cette mission ratée, elle soupira, attendant que le commandant vienne lui remonter les bretelles. Mais une fois encore, c'était la faute de ses deux imbéciles de frère et sœur !

Elle n'eut pas à attendre longtemps avant que les lumières s'allument et que le commandant Penan arrive sur place, dévisageant le carnage avec calme. Penan était un homme ayant dépassé la fleur de l'âge. Il devait avoir une soixantaine d'années. C'était un ancien commandant de la Team Rocket, aujourd'hui à la retraite, qui passait son énorme temps libre à entraîner les nouvelles recrues, comme ses trois protégés.

Siena n'avait peur de rien ni de personne, et elle aurait été capable de dévisager sans sourciller le Boss lui-même. Mais Penan, l'homme qui les avait élevés depuis leur naissance, qui leur avait tout appris, était le seul au monde qui puisse faire éprouver un sentiment de honte et d'humilité à Siena et la forcer à baisser les yeux devant son regard de vautour. Penan était un petit homme, mais large d'épaules. Ses muscles saillaient sur ses puissants bras. Il avait de courts cheveux blonds qui étaient aujourd'hui tous pratiquement gris et blancs, et il avait une belle collection de cicatrices sur le visage.

- Etat de la mission, soldat ? demanda-t-il.

- C'est un échec, commandant, répondit Siena sans relever les yeux.

Il y eut un long silence qui parut insupportable pour la jeune fille, puis le commandant lui lança deux seringues.

- Réveille-moi ces incapables, ordonna-t-il.

Siena alla piquer Mercutio et Galatea au cou. Ce produit neutralisait la substance que contenaient les balles qu'avaient reçues les deux jeunes Rocket. Une fois touché à un point sensible qui aurait signifié la mort en situation réelle, cette substance provoquait un sommeil qui pouvait durer une semaine sans antidote. Penan les avait souvent d'ailleurs laissés dans les vapes après d'autres exercices échoués, en guise de punition. Une minute plus tard, Galatea et Mercutio se réveillèrent de leur « mort », sous le regard sévère du commandant. Ils se ratatinèrent quand il parla de sa voix forte et autoritaire, comme quand ils avaient six ans et que le commandant les avait surpris à faire une bêtise.

- Bravo. Deux morts sur trois, et la disquette détruite. Ça me pose un petit problème ça. Ça ne pose un problème à personne d'autre ?

Personne ne répondit. C'était inutile. Dans ce genre de situation, le commandant pouvait faire les questions et les réponses pendant près d'une heure sans s'arrêter. Mais Galatea, qui était quelqu'un de particulièrement sincère, fit d'une petite voix :

- Pardon commandant, c'est entièrement de ma faute. Je suis entrée dans la salle sans réfléchir.

- Oui, c'est le cas, acquiesça Penan. C'est d'ailleurs toujours le cas avec toi, Galatea. De mémoire, je serai bien incapable de te citer deux entraînements où tu ne t'es pas fait descendre, et mon âge avancé n'en est pas la cause.

La jeune fille aux cheveux magenta déglutit sous le regard du commandant, et ses joues devinrent de la même couleur que ses cheveux.

- Mais même à deux, poursuivit Penan, vous auriez quand même pu mener à bien cette mission et survivre. Alors, que s'est-il passé ?

Un coup d'œil vers Mercutio suffit à Siena pour deviner qu'il n'était pas d'humeur à faire des autocritiques. Siena s'en chargea donc.

- On a voulu récupérer la disquette, dit-elle, mais Mercutio a été tué, et la disquette s'est brisée dans sa chute.

- Tiens donc ? C'est ce qui s'est passé, Mercutio ?

- Oui commandant, répondit-il sans le regarder, mais plutôt par colère que par gêne.

- Tu t'es fait descendre alors que vous étiez deux ? reprit Penan. Aurais-je oublié, durant votre formation, de vous apprendre les règles de bases d'un engagement à plusieurs ?

Personne ne répondit, mais cette fois, le vieux commandant exigeait une réponse.

- Galatea ! rugit-il si fort qu'il fit sursauter la jeune fille. Quelle est la première règle lors d'échanges de coups de feu à plusieurs si objectif il y a de traverser les tirs ?

- Un court, l'autre couvre, balbutia Galatea.

- Un court, l'autre couvre, exactement, bande de décérébrés ! Qui a couru et qui a couvert, cette fois ci ?!

- Je couvrais Mercutio, commandant, avoua Siena.

- Et c'est que tu devais être pas très douée dans ta tâche, puisqu'il s'est fait descendre !

Siena lança un regard de reproche à son frère, qui soupira et s'expliqua avec soin.

- Siena m'a bien couvert. Mais la mitrailleuse m'a quand même gardé pour cible.

- Et dans une telle situation, qu'est-ce qu'il faut faire, alors ? Rugit Penan.

- Celui qui couvre doit tout faire pour que celui qui traverse les tirs s'en sorte, récita mécaniquement Mercutio.

- Et c'est-ce que tu as fait ? questionna-t-il en se tournant vers Siena.

- Oui, dit-elle simplement.

- Oui ? Alors pourquoi diable Mercutio est-il mort ?

Siena laissa là le soin à l'intéressé de répondre à sa place.

- Elle s'apprêtait à se sacrifier pour moi, expliqua Mercutio en regardant n'importe où sauf vers sa sœur. Je l'en ai empêché, et c'est moi qui l'ai sauvé à la place.

Penan garda un silence désapprobateur en apparence, mais Galatea, qui elle seule le regardait, pouvait distinguer un léger sourire sur son visage dur.

- Quelle est ta justification pour cette conduite ? demanda enfin Penan.

- Je n'en aie pas, soupira Mercutio.

- Eh bien, creuse-toi les méninges pour m'en trouver une, fiston, fit Penan en perdant patience. Et une bonne, il vaudrait mieux... Allez, je t'écoute !

Il était clair que le commandant attendait une réponse sincère et ne pas le contenter était impensable pour ces trois adolescents pour qui il faisait figure de père depuis tant d'années.

- Je n'ai pas réfléchi, avoua Mercutio avec un pincement au cœur pour ce qui allait suivre. J'ai vu que Siena était en danger, et j'ai foncé. Je n'ai plus réfléchi à la mission, ni au fait que ce n'était qu'un entraînement sans danger, ni à rien d'autre que de la protéger. C'est tout.

Lui arracher cette confession de force le tiraillait, car s'il n'était pas aussi froid que Siena, déclarer au grand jour ce genre de chose le rendait mal à l'aise. Pourtant, c'était la pure vérité. Penan eut une moue pensive. Mercutio pensait qu'il allait avoir droit à une bonne engueulade à un taux de décibel très élevé, mais le commandant le surprit en posant une main chaleureuse sur son épaule.

- Songer à la sécurité de ses partenaires avant la sienne est une aptitude que j'attends de tous mes élèves, déclara-t-il.

- Eh bien... dit Mercutio, surpris par ce compliment. Je ne pense pas que c'était parce que Siena était ma partenaire lors de cette mission que j'ai agi comme ça, mais parce que c'est ma sœur.

- J'avais compris, fils. Tes sentiments fraternels sont louables et me rendent fier. Néanmoins, aussi dur que ce soit, il faut parfois avoir une vision plus globale. Le sacrifice est parfois nécessaire. Siena a bien fait d'essayer de te protéger, pour que tu accomplisses ta mission.

- Mais si la disquette ne s'était pas brisée durant ma chute, tenta Mercutio, ça serait revenu au même non ? Siena aurait survécu et accompli la mission.

- Peut-être. Peut-être pas. Mais d'une façon générale, c'est à celui qui couvre celui qui accomplit la mission de se sacrifier. En pleine bataille, Siena n'aurait peut-être pas eu le temps de fouiller dans tes poches pour trouver la disquette.

Mercutio comprenait. Ça ne lui plaisait pas, mais il comprenait.

- Jamais je ne ferai passer ma famille après ma mission pour la Team Rocket ! Et tant pis si pour ça je ne serai jamais pris.

Penan ne pouvait pas en vouloir au jeune homme d'avoir dit cela et de le penser. Ces enfants n'avaient jamais connu leurs parents. Ils avaient vécu ensemble durant toute leur courte vie, et étaient inséparables. Qu'un des trois disparaisse aurait été un choc insurmontable pour les deux autres. Parfois, Penan avait l'impression qu'à eux trois, ils formaient un être à part entière. Chacun avec son caractère et ses qualités propres : le dynamisme et la gentillesse de Galatea, le sérieux et la froide intelligence de Siena, et l'ingéniosité et le courage de Mercutio. À eux trois, ils valaient bien plus que si chacun était seul. Séparez-en un du groupe, et cet être individuel disparaîtra.

C'était cet attachement entre eux qui posait des difficultés pour leur entrée dans l'organisation. Pourtant, la Team Rocket aurait bien tort de ne pas profiter de leurs capacités combinées. Ces gosses étaient les élèves les plus doués que n'ait jamais formés le commandant Penan ; et il en avait formés un paquet. Mais voilà : la Team Rocket ne faisait pas dans les sentiments. Ce n'était tout simplement pas possible, quand on était une organisation mafieuse et criminelle à l'échelle mondiale.

- On y serait arrivé sans la moindre difficulté si tu nous avais autorisé à nous servir de nos Pokemon, père, renchérit Galatea en touchant ses Pokeball à sa ceinture.

La jeune fille ressentait très bien quand elle avait devant elle le commandant Penan, et quand c'était son vieux bienfaiteur qu'elle avait appris à appeler « père », tout comme son frère et sa sœur. Penan sentait une étrange chaleur l'envahir à chaque fois qu'un de ces trois-là l'appeler ainsi. N'ayant jamais eu d'enfant, il avait accepté d'élever Siena, Mercutio et Galatea comme s'ils étaient les siens quand le général Tender lui avait présenté ces trois bébés, il y a moins de quinze ans. Bien sûr, il considérait comme ses enfants tous les élèves qu'il avait eu à former dans sa carrière, mais les triplés étaient un peu plus. Penan aimait tous ses « enfants » sans réserve, et sans aucun favoritisme, mais Galatea, Siena et Mercutio avaient une place spéciale dans son cœur.

- Il existe plein de situations où se servir de ses Pokemon est impossible, ou alors très dangereux, jeune fille, répliqua Penan. Il faut savoir aussi compter sur ses propres moyens.

- On n'est jamais aussi fort qu'avec son Pokemon, déclara Mercutio.

- Peut-être cela est-il vrai pour vous trois. La plupart des Rockets n'ont jamais approché avec leur Pokemon le lien que vous avez avec les vôtres.

- C'est pour cela qu'en combat, ils ne valent pas un clou, ricana Galatea, qui passait ses journées à défier des sbires au combat Pokemon.

Les triplés n'avaient aucun grade ; ils ne faisaient même pas encore parties officiellement de la Team Rocket. Ils n'étaient que des cadets postulants. Pourtant, ils étaient devenus en peu de temps des références du combat Pokemon dans la base, et même les Rockets les plus âgés et les plus gradés n'hésitaient pas à leur demander conseil dans ce domaine.

- Mais eux au moins sont des Rockets à part entière, rappela Siena, maussade.

Penan fut désolé de voir cet air peiné sur leurs visages ; depuis le temps, ils avaient pratiquement perdu tout espoir de rentrer un jour dans les rangs de l'organisation, même si leur père adoptif était un ancien officier respecté et influant.

- J'ai une réunion tout à l'heure avec le général Tender, leur dit Penan pour leur remonter le moral. Je dois lui parler des progrès de mes élèves, et des potentielles recrues pour la Team Rocket. Je ne manquerai pas de lui citer vos noms.

- Comme s'il ne les connaissait pas, depuis le temps, marmonna Mercutio.

Penan leur fit un sourire navré et sortit de la salle d'entraînement holographique, qui reprit son aspect synthétique. En son for intérieur, l'ancien commandant ne sautait pas de joie à l'idée de savoir que ses trois protégés feraient parties de la Team Rocket. C'était un métier dangereux ; beaucoup finissaient en prison, ou pire, dans un cercueil. Il avait déjà perdu beaucoup de ses autres enfants, et perdre les triplés aurait été similaire à une lame dans son cœur.

Pourtant, il savait que des enfants de leur âge, si prometteurs, ne pourraient pas rester toute leur vie avec lui sans rien faire de leurs dix doigts. Et faire partie de la Team Rocket était leur rêve, depuis qu'ils savaient que leur mère en faisait partie aussi avant son décès. Et puis, Penan voulait leur bonheur avant tout, comme tout bon père qui se respectait. Il ferait rentrer les triplés dans les rangs de Giovanni ; il s'en fit la promesse. Il devait bien ça à ces gamins qui lui avaient accordé tant d'années de bonheur.