Chapitre 1 : Cette fois, c'en est trop !
« Kalnim ! Tu va être en retard à l'école ! »
La voix de ma mère brise net le beau rêve que j'étais en train de faire. Je rêvais d'une magnifique Evoli de mon âge nommée Rinya. Qu'est-ce qu'elle est belle... Elle a le poil long et soyeux, et elle fait tourner la tête de tous les Evoli de la forêt. La mienne aussi... Mais elle est souvent froide, même avec les plus grands, les plus beau et les plus séduisants Evoli du coin. Alors moi, pensez-vous... Je n'ai pas la moindre chance ! Surtout que je suis assez particulier... Je suis né avec une grosse pierre transparente en plein millieu du front, le genre de truc qui fait bien moche et qui attire les moqueries et les mauvais regards. La plupart des gens de ce coin de la forêt pensent même qu'il s'agit d'une malédiction, alors bonjour le mépris...
Enfin, je me contente d'espérer que Rinya ne fera ne serait-ce que m'adresser un sourire, et de rêver d'elle à chaque nuit... Je me lève et sort de mon lit de mousse en m'étirant avant de sortir de ma petite tanière. Ma mère m'adresse un doux sourire. C'est une Phyllali. Elle a 9 printemps mais mon père dit sans arrêt qu'elle ne les fait pas. Mon père est lui aussi un Phyllali. C'est une question de commodité ; on vit au coeur d'une forêt qui abrite la fameuse Pierre Mousse, alors pourquoi aller braver la montagne pour évoluer en Givrali, par exemple ? Enfin, il y a bien quelques malades qui le font, pour être bien vus... De plus, les pierres Feu, Foudre et Eau deviennent de plus en plus rares et se vendent de plus en plus cher. Vous me direz, mais pourquoi ne pas évoluer en Mentali ou Noctali ? La réponse est simple. Ici, pour évoluer en Mentali, il faut se rendre de jour sur la colline Aube, qui est à l'extrême est de la forêt. Pour devenir un Noctali, on doit aller sur la falaise Crépuscule la nuit, de l'autre côté, à l'extrême ouest de la forêt. Et, je vous le rappelle, nous vivons au coeur de la forêt, donc c'est trop loin... Personnellement, j'aimerai évoluer en Noctali, et je me sens prêt à faire le chemin qu'il faut pour y parvenir. Mais mes parents ne veulent pas. Tu es trop jeune par ci, il faut y réfléchir très sérieusement car tu ne pourras pas revenir en arrière par là...
Bref, je sors donc de ma tanière et vais chercher dans la réserve de vivres quelques baies Oran en guise de petit déjeuner que j'engloutis rapidement. Je m'apprête à sortir de la petite clairière où j'habite quand la voix de ma mère me retient.
« Attends, tu n'aurais pas oublié quelque chose ? »
Je me tourne vers elle et lui sourit avant de presser ma truffe contre la sienne pour lui souhaiter de passer une bonne journée. Elle me rend mon sourire et je prends donc la direction de l'école.
En ce moment, nous étudions les différentes conditions d'évolution qu'il existe, et pas seulement chez les Evoli. Mais la prof, une vieille Voltali toute ramollo, fait tout pour rendre le cours extrêêêêêmement ennuyeux...
Quand finalement l'heure de rentrer chez soi arrive, je commence à prendre la route du retour. A mi-chemin, Un trio composé d'un Voltali, d'un Pyroli et d'un Aquali me barre la route. Ils me regardent avec un sourire mauvais et je les reconnais. Ce sont trois frères qui passent leur temps à martyriser les plus petits qu'eux, et en ce moment c'est sur moi que c'est tombé. Evidemment.
« Alors la petite erreur de la nature ? Comment ça va aujourd'hui ? Lance le Pyroli en ricanant. »
Je recule. Le Voltali s'approche et me donne un violent coup de patte dans la pierre sur mon front, m'envoyant au sol. Il s'esclaffe :
« Vous avez vu ? Sa pierre est si lourde qu'il ne tient même pas sur ses pattes !
- Ouais, répond l'Aquali. C'est pas étonnant, t'as vu la taille de la bête ?
- Pourtant elle est au milieu alors ça devrait être équilibré, renchérit le Pyroli !
- Bon aller, finit par dire le Voltali, on se tire d'ici. On a perdu plus de temps avec lui qu'il ne le mérite. »
Ses deux frères hochent la tête et l'Aquali exécute une attaque Pistolet à O qui m'asperge entièrement avant que le trio s'éloigne en éclatant de rire. Je me relève et m'ébroue. Les oreilles basses et la queue trainant par terre, je reprend ma route vers chez moi, au bord des larmes.
« Cette fois, c'en est trop, pensais-je, j'en ai assez de subir les moqueries et de sentir les regards mauvais des autres posés sur moi en permanence ! Ma décision est prise, cette nuit je m'en vais... »
Focalisé sur la décision que je viens de prendre, je rentre chez moi, bien décidé à la mettre à exécution...