Mort d'un ange ...
Thème d'ambiance: http://www.youtube.com/watch?v=u5Khjzcqbc4
Allongée dans sa caverne isolée, Absol en était revenue à son point de départ. Mais pourtant, elle avait beaucoup changée. Parce que désormais, elle savait ce qu'il y avait au delà des montagnes et elle en avait tiré une seule règle. Le savoir est ce qui vous torture le plus, vous fait douter et remettre en question, car désormais elle pouvait se demander : Qui était elle ?
De toute manière, elle était paralysée, l'esprit bloqué et totalement éloignée de ces questions. En ces temps sombres, Absol ne faisait même plus fonctionner ses neurones, elle avait passé tellement de temps enroulée sur elle même pour tenter de sentir la chaleur d'un corps. Le tapis de mousse se révélait froid et rêche en comparaison de la soyeuse fourrure du chat. Elle n'entendait qu'un faible battement, si différent de celui de son amant et enroulée sur elle même, cet ersatz de présence chaleureuse ne faisait que la torturer encore plus, l'absence de Voltali se faisant encore plus sentir.
Elle avait versé tant de larmes, qu'elle avait l'impression que ses yeux seraient secs pour si longtemps qu'elle n'imaginait même ne plus jamais pouvoir pleurer. Qu'est ce qui pouvait être si puissant pour que votre esprit veuille cesser de fonctionner ? Absol aurait donné plus que tout pour cesser de ressentir quelque chose, car ce vide la détruisait, lui donnait l'impression que plus rien ne comptait. Tant de larmes avaient coulés que les iris rouges flamboyants de détermination semblaient avoir déteints, ne laissant désormais que des yeux violets pâles dont la lueur de vie semblait avoir disparue depuis longtemps. Des yeux pareils étaient semblables à de fades perles ternes et mal polies.
La chasseuse était restée seule, plus qu'elle ne l'avait jamais été alors qu'elle ne cessait d'être assaillie par des images. C'est tellement idiot, il y a trois mois elle ignorait l'existence de Voltali et elle se considérait comme l'être le plus heureux du monde. Pauvre idiote aux illusions stupides, trop faible pour mériter quoique ce soit. Faible, c'est effectivement ce qu'elle devenait. Elle avait énormément maigrie à force de rester immobile sans pour autant ne rien pouvoir avaler.
Elle n'avait pas faim, ne ressentait plus la soif, comme si son corps était déconnecté de la réalité. Absol n'arrivait plus à dormir et lorsqu'elle s'effondrait, trop épuisée pour tenir, c'était pour être mieux assaillie de cauchemars. La femelle ne voulait plus rien faire, elle passait son temps à regretter, allongée pitoyablement sans même pouvoir pleurer.
Dans les rares instants ou elle avait encore un zeste de volonté pour faire un mouvement, elle s'arrachait quelques touffes de poils pour voir si elle sentait encore quelque chose mais il semblait qu'elle ne ressente plus rien. Qu'est ce qu'elle aurait pu donner pour ressentir encore une seule chose positive, même si ça la referait souffrir …
Avec ses os apparents et ses cernes, elle se disait qu'elle ressemblait plus à un mort qu'à quelque chose de vivant.
-Tant mieux, si ce damné cœur pouvait cesser de battre.
Absol eut un petit flash dans son esprit embrumé. Un cœur, elle aurait tant souhaité ne pas en avoir eu pour pouvoir vivre. Elle ne cessait de penser que sans sentiments, tout aurait pu aller pour le mieux.
Elle soupira faiblement alors qu'elle ne sentait même plus son estomac gargouiller. Plus que quelques jours et tout finirait enfin.
-Pourquoi m'est ce arrivé à moi ? J'avais pourtant juré de … ne pas me faire dicter ma conduite par une force mystique. Pourquoi j'ai écouté cet oiseau et surtout pourquoi est-ce que j'ai sauvé ce monde. ? J'aurais du le laisser se faire détruire, j'aurais eu moins mal.
Elle aurait ricané si elle avait pu. Elle se retrouvait seule et bientôt elle n'aurait plus jamais mal. Elle n'avait plus peur de disparaître.
-Vas y Absol, ce sera bientôt terminé … Absol ?
Elle se souvint vaguement de l'origine de ce nom. Un nom pour la désigner et la séparer des autres pour prouver qu'elle était unique.
-Absol … une désignation de la chose que tu es. C'est un titre comme celui d'Absolue. En fait, tu n'as jamais eu de nom, tu n'es rien qu'une erreur, une poussière qui disparaîtra bientôt.
En se sentant si faible, elle ne fit rien d'autre que de continuer à délirer.
-Je m'étais pourtant juré de ne pas abandonner … je ne tiens jamais mes promesses. Promesse …
Ce terme lui rappelait quelque chose mais quoi, elle n'arrivait même plus à le savoir. Elle avait voulu tout oublier …
Un éclair de souvenirs lui revint à l'esprit.
-J'avais juré de ne jamais t'abandonner, de toujours être là pour te protéger.
Elle avait trahi sa promesse la plus importante, celle qu'elle voulait honorer par dessus tout.
-Menteuse … tu ne mérites que trop ta déchéance. Je ne fais que de trahir mes proches … Proches ? Pourquoi proches ? Ils sont aussi insignifiants que moi même … ils ne sont rien d'autre que des créatures vouées à mourir alors pourquoi me suis-je liée avec eux … Pourquoi j'existe ?
Elle aurait tellement aimé vivre en paix avec elle même. Peut être que ce n'était pas sa faute. Mais alors qui est responsable ?
Oui, qui pouvait elle blâmer de ses déboires ? C'était son destin depuis le début.
-J'ai jamais voulu de ces pouvoirs ni de cette destinée … c'est les autres qui m'ont tout imposé ! C'est eux qui m'ont rejetée sans même me connaître … c'est de leur faute à tous !
Pour la première fois depuis des semaines, elle venait de se relever. Sans même s'en apercevoir, elle avait serré les crocs, s'était mise sur ses pattes frêles et surtout, ses yeux retrouvèrent leur lumière. Une lumière qui donnait une impression de profondeur comme si la volonté de la femelle s'apprêtait à engloutir tout sur son passage.
Immédiatement, elle tituba, ses membres trop ankylosés par son inertie et la faiblesse physique s'emparait d'elle au point qu'elle ne soit prête à s'effondrer.
Le fait qu'elle soit debout la surprit et l'étonna. Elle se mit à rire de démence, avant de s'arrêter. Que devait elle faire ?
Maintenant qu'elle était levée, elle n'avait plus totalement envie de se laisser mourir, c'était trop lâche et ça leur ferait trop plaisir.
Pourquoi lui ont il fait ça ? Pourquoi avaient-ils décidé de la haïr alors même qu'elle ne connaissait personne ? Tant d'êtres si différents existaient, si nombreux qu'elle aurait pu mettre des années pour en connaître une infime minorité.
Elle ne voulait pas savoir, ignorer leurs motivations futiles, futiles comme leurs existences. Un souvenir l'assaillit étrangement, elle se souvint de cette technique qui permettait d'entrer dans l'inconscient. La Prescience et la Psychokinésie pouvaient révéler les pensées, mais une autre capacité lui revint en mémoire, l'Amnésie. Cette attaque pouvait la rendre plus forte en oubliant ce qui la faisait souffrir, tout en offrant l'avantage d'être plus rapide. Absol ignorait ce qu'elle pourrait faire, ni même si elle devait recommencer une nouvelle vie. Une chose est sure, elle ne pouvait pas continuer ainsi.
Comment faire pour maîtriser l'Amnésie ? Absol ne pouvait pas apprendre de techniques psy influant sur l'esprit mais seulement sur la chair. Elle se rappelait d'une pierre magique donnant accès à toutes les capacités possibles. La pierre, ou pouvait elle bien se trouver ? De rapides flash-back revenaient dans son esprit. Une montagne, des combats féroces revenaient dans son esprit. Mais des combats contre qui ?
Elle s'en fichait, elle se focalisait uniquement sur son objectif. Un seul sentiment la motivait, c'était la rage de comprendre et de gagner.
La chasseuse amaigrie et brisée sortit lentement en titubant. Elle avait bien cru et espéré que cette tanière serait son tombeau, mais elle était sortie. Dans son état, elle savait qu'elle ne pourrait pas lutter très longtemps mais elle revoyait la route. Il lui fallait faire vite, sans nourriture, elle risquait de mourir rapidement, mais elle s'en moquait. Autant mourir sur le chemin, elle ne voulait pas risquer d'être retardée.
Peu à peu, des informations revenaient dans sa mémoire. Elle revoyait la route et se fiant tant à l'instinct qu'au flair, Absol parvint à revenir au pied du pic. Elle sourit en créant un escalier de glace pour monter jusqu'à la grotte située au sommet. Alors qu'elle escaladait, le vent sifflait et ses souvenirs refaisaient surface.
L'étrange grotte se trouvait devant elle, elle était enfin à l'abri du souffle givrant. Elle se rappelait de tout et se retint de pleurer. Inutile de perdre du temps à se lamenter pour rien. Absol revoyait la porte abattue et retrouva la crevasse qu'elle avait bouchée. Elle distinguait la pierre au fond, il fallait vraiment savoir qu'elle était là pour la distinguer.
D'un coup de corne rageur, elle détruisit la couche de glace protectrice avant de descendre prudemment au fond. Les joyaux étaient toujours là, brillant d'une lueur apaisant l'esprit et si attirante que beaucoup tueraient père et mère pour s'en emparer. Cette pierre avait une telle fascination sur l'esprit qu'Absol ne put s'empêcher de l'admirer avant de poser la patte dessus.