Chapitre unique.
Elle me protège,
Sous son aile
Même de la neige
Ne revient qu'à un petit souffle.
Avec elle l'hiver devient été,
Et l'été est tempéré
Je lui dois tout,
Toi aussi rejoins-nous !
Car le temps est venu,
De fêter envers et contre tout
Nos maman ce dimanche !
Ceandros fixait son poème avec une certaine amertume. Cette activité ne l'intéressait pas du tout. Quelle était l'utilité de réaliser un travail pour la fête des mères, lorsqu'on n'a plus ?
Autour de lui, ses camarades de classe poussaient des petits cris d'exaltation, trop heureux d'échapper à un après-midi de cours pour ça.
Doublement agacé, le petit Absol entreprit de mâchouiller son crayon à petits coups de dents absents, avant de se rendre compte que sa voisine l'observait. Oska était une adorable femelle Evoli, reconnaissable grâce à la délicate fleur d'hibiscus derrière son oreille. Ceandros plongea son regard rouge dans celui de la petite créature.
-C'est beau… Dit-elle d'une voix hésitante, en désignant le poème.
-Merci… répondit Ceandros en inclinant la tête.
-Pourquoi tu n'as pas l'air content ?
Ceandros ne répondit pas.
L'Evoli continua de le fixer, pendu à ses lèvres.
Heureusement, l'Archéondong sonna, marquant la fin des cours de l'après-midi.
Soulagé, le jeune Absol ressembla ses affaires et quitta la salle, situé dans le tronc creux d'un arbre foudroyé.
Oska courut pour le rattraper. Ceandros s'était stoppé, le museau au vent, l'oreille tendue.
-Tu entends ? Demanda-t-il à sa compagne.
-Non…
-Mais si, écoutes !
Oska tendit elle aussi l'oreille. En effet, elle percevait un bruit, ténu certes, mais bien réel. Un grondement, et quelques hurlements dans une langue étrange.
-Viens ! S'écria Ceandros en s'élançant vers la source du bruit.
-Ca vient du fleuve ! Haleta la femelle.
-Vite !
Le bruit enflait, jusqu'à devenir assourdissant.
Ils firent halte à la lisière d'une clairière, qui n'en était plus vraiment une…
Là où pas plus tard que ce matin coulait un grand fleuve se trouvait maintenant un lac d'eau boueuse.
L'eau avait envahit la cuvette, comment cela pouvait-être possible ?
D'ailleurs, elle continuait de monter, en effet, les deux petits avaient les pattes avant trempées.
Tétanisés, paralysé par la peur, ils ne pouvaient plus bouger.
Ce fut quand Ceandros eu de l'eau jusqu'aux genoux – ce qui correspondait au menton d'Oska - qu'il réagit. Il donna un petit coup de museau à sa compagne et ils tentèrent de patauger pour se mettre à l'abri.
Hélas, l'eau montait vite, et les bébés pokémon, réduit à nager à grands coup de pattes paniqués s'épuisaient vite.
La pauvre Oska se noyait à présent. Ceandros rassembla ses dernière forces et planta ses croc pointus dans la fourrure de son cou et ils furent tout deux entrainés vers le fond par leur pelage détrempé.
L'eau était montée à une vitesse fulgurante après que les humains eurent pulvérisé le barrage Castorno, qui modérait le débit du fleuve. La moitié de la forêt fut engloutit sous deux mètres d'eau, noyant donc Ceandros et Oska dans les abysses…
Lorsque l'Absol se réveilla, il se trouvait dans un endroit somptueux. Une immense forêt luxuriante, en plein milieu de la saison estivale, alors que dans sa forêt, l'hiver régnait.
Les troncs des arbres étaient deux fois plus larges que ceux de sa maison, et leur feuillage laissait filtrer les rayons du soleil. Le sol était tapissé d'un agréable tapis d'herbe grasse, moucheté de fleur de jachère colorées.
Près de lui, Oska s'éveillait doucement elle aussi.
Les deux pokémon contemplèrent l'environnement, émerveillés.
Une voix s'éleva alors derrière eux :
-Bienvenu mes petits !
Un grand Arcanin s'avançait vers d'une démarche aérienne. Il paressait très vieux, comme le traduisait les poils blancs qui encerclait son large museau.
Il passa sa langue râpeuse derrière l'oreille de chacun des enfants, avant de s'assoir devant eux.
-Qui êtes-vous ? Risqua Ceandros.
-Mon nom est que je n'en ai pas ! On ne m'appelle pas, et lorsqu'on le fait je ne viens pas. Je ne suis jamais là, et le suis toujours…
Le petit pencha la tête de coté, intrigué par les paroles sans aucun sens du vieux tigre.
-Venez… Souffla-t-il en se remettait sur patte.
Les petits lui emboitèrent le pas.
Il les guida vers une clairière ensoleillée. Au milieu de cette trouée trônait un immense temple qui semblait en verre, fragile mais indestructible.
L'Arcanin sans nom gravit les marches de cristal et s'assit au sommet.
-Mes enfants, savez-vous pourquoi vous êtes ici ?
-Nous sommes… mort ? Questionna Oska.
L'Arcanin secoua la tête.
-Oui et non… Croyez-vous seulement à la vie ? Demanda-t-il.
Les deux petits s'entreregardèrent, incertain.
-Ceandros, depuis la mort de tes parents, tu ne crois plus en rien n'est-ce-pas ? Mais cela t'empêche-t-il de les célébrer le jour de leurs fêtes respectives ? Médites là dessus…
Ceandros baissa la tête et se mit à réfléchir avec sérieux.
-Et toi Oska, poursuivit le doyen. Penses-tu que le fait d'être née chez les humains te dispense d'honorer ta mère ?
L'Absol se redressa soudainement.
-Quoi ! Tu es une pokémon domestique ! Cracha-t-il, outragé.
-Oui… Avoua Evoli, accablée.
-Ne te fâche donc pas ! Intervint l'Arcanin. Chacun a ses origine, et c'est cela qui fait de nous des êtres uniques ! As-tu réfléchit à ma question jeune Absolu ?
-Non…
-Hum… élève difficile… fais un effort voyons !
Absol se replongea dans ses pensé et chercha dans les souvenirs qu'il voulait à tout prix faire disparaitre. C'était très douloureux, bien plus que cela en avait l'air.
Il revit son père et sa mère comme des êtres d'exception. Il revit la grotte baignée de soleil où il avait grandit. Puis il se souvint des Hommes, qui se rapprochaient toujours plus près de la caverne, avec leurs monstres dévoreurs d'arbres qui dévastaient la forêt sur leur passage. L'image de deux bipèdes positionnant des bâtons de couleur rouge autour de la grotte s'imposa dans son esprit, bâtons que Ceandros reconnut plus tard comme de la dynamite.
Le cri que sa mère, Artaï, poussa, alors qu'elle était piégée dans l'effondrement de la grotte se mêla à celui d'Ezin, son père, qui lui hurlait de courir. Le grand Absol le conduisit jusqu'au fleuve, bien plus haut en amont de la forêt où vivait aujourd'hui Ceandros. Ezin le posa sur un radeau de fortune, et le poussa jusqu'à être totalement épuisé, et il se noya, laissant son fils dériver vers l'aval…
Quand Ceandros ouvrit les yeux, après ces flashes de souvenir douloureux, il se trouvait bien loin de la forêt chaude et luxuriante. La colonnade de verre au sommet du temple avait complètement, et il se trouvait à présent étendu sur les flancs sur la rive d'un torrent déchainé.
Le cœur battant, il se rendit compte qu'il était de retour dans la forêt inondée. Il était vivant, mieux, le débit avait baissé, et l'eau perdait du terrain. Peu à peu, le bois reprenait ses droits.
Sonné, le jeune Absolu se leva avec difficulté. Près de lui, Oska gisait, évanouie mais vivante, son poitrail se soulevait régulièrement sous son pelage détrempé.
Ceandros tourna sur lui-même, tentant de se repérer. Soudain, il tomba en arrêt. Devant lui reposait le poème de la fête des mères, et une petite bouteille de verre en parfait état, à peine mouillé. Emu, l'Absolu les pris délicatement entre ses crocs et glissa le poème dans la bouteille. Puis il s'avança vers l'eau, sous le regard ensommeillé d'Oska, et il la lâcha dans le courant. Elle fit quelque mètres, avant que des milliers de petites particules dorées ne l'entour et petit-à-petit la fasse disparaitre dans des éclats d'argent. Dans l'eau déchainée, le reflet de Ceandros se métamorphosa en celui de son père, puis de sa mère, enfin, dans l'onde apparut le visage souriant de « Sans-nom », l'Arcanin du temple de verre.
Absol continua à observer son reflet dans le fleuve en décrut, cherchant quelque part un signe de l'au-delà. Au bout de quelques temps, Oska vint se presser contre lui, et ensemble, ils contemplèrent monter dans le ciel la toison argentés. Les larmes aux yeux, Ceandros se dit que quelque part, parmi cette nuée d'étoiles argentines, se trouvaient ses parents, qui lui manquaient tant…
-Non ! S'écria-t-il soudain. Il son dans mon cœur et mon âme, et cela pour toujours !
Oska le contempla d'un air compréhensif.
Euphorique, il ajouta :
-Bonne fête Papa et Maman ! Vous m'entendez ? Bonne fête !!!
Après tout, l'amour n'a
pas de frontière !