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Smirnoff R. 3 de Domino



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» Auteur : Domino - Voir le profil
» Créé le 01/06/2010 à 14:38
» Dernière mise à jour le 01/06/2010 à 18:34

» Mots-clés :   Action   Drame   Humour   Romance

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156 - Go, Malcolm, Go !
« Je serais la béquille de Malcolm, c'était mon destin »
(Roland dans "Tribunal Hero")



Méditation. Il prie. En son for intérieur tout se relâche. Il fait grand soleil dans la prairie. Tout le monde est en cercle. Malcolm est parmi eux, assis en tailleur avec les autres. Ses Pokémon somnolent dans l'herbe autour des humains, avec tous les Pokémon des autres membres de la communauté. Bastiodon dormait, les pattes avant sous le menton. Qulbutoke était couché contre son flanc. Noctali était au sol, recroquevillé. Torterra était non loin, ventre contre l'herbe, alors que Noctunoir ronflait comme un bûcheron, allongé sur le gazon.

Une semaine que Malcolm « Cohabitait ». Il envisageait presque de se mêler définitivement à eux.

-Gardez les yeux fermés… Faites le vide… Laissez votre esprit se confondre avec l'espace. Repensez maintenant à de bons moments de votre vie.

« Le jour où Roland m'a promis qu'il me sauverait à mon procès… Toutes les soirées qu'on a passées ensemble… Ma rencontre avec Claire… Toute notre relation… La naissance de… »

-Allongez-vous…

« J'arrive pas à y penser comme à un bon moment, c'est pas vrai ! »

-Détendez-vous, dépliez vos jambes, écartez vos bras…

« Ca devrait être un bon moment, pourquoi je dois me faire violence pour y penser de cette manière ?! »

-Et maintenant riez !

Tout le monde se mit à rire par réflexe. Ce genre de séances faisait un bien fou à Malcolm.

« En tout cas je décompresse ! »

Ca faisait une semaine qu'il était en t-shirt et short avec des tongs. Complètement décontracté, détendu, souriant, éveillé. Un nouveau Malcolm plein de vie. La forêt s'étendait à perte de vue autour d'eux.

-Bien, frère Malcolm, aujourd'hui vous transportez le terreau vers la serre !
-Cool ! J'aime bien les trucs comme ça !
-Je sens que le travail vous fait beaucoup de bien.
-Absolument !
-Veillez quand même à bien vous reposer.
-Pas de soucis, Karen. Je ne suis pas si travailleur quand même !

Malcolm s'éloigna et regarda ses Pokémon.

-Les gars, on a du boulot ! Faut transporter du terreau !

Les Pokémon baillèrent et se levèrent pour suivre leur maître.

***

-Je suis là parce que j'ai dénoncé mon voisin au fisc après qu'il se soit fait construire une piscine que je lui jalousais. Et j'ai énormément de remords de l'avoir fait…
-Moi je suis là parce que j'ai essayé de me suicider après m'être rendu compte qu'à trente ans, je n'avais jamais travaillé de ma vie…

Malcolm plissa les yeux tout en portant les sacs. Il regarda ses deux camarades.

-Dur, les gens, dur !
-Et toi alors ?
-Moi… bah… J'aime pas ma petite fille. J'ai l'impression que c'est juste un gros boulet qui m'empêche de vivre ma vie comme je l'entends.

Les deux accompagnants de Malcolm s'étonnent.

-Tu n'aimes pas ton enfant ?!
-Bah… j'ai un peu de mal… soupira Malcolm, peiné.
-C'est ton enfant quand même… ça devrait venir naturellement !
-Ouais, je pensais aussi que ça viendrait naturellement. Le pire c'est que j'ai même pas demandé l'aide de mes amis…

Les deux types regardèrent Malcolm, étonnés.

***

-Malcolm…

Il était en train de préparer de la limonade avec d'autres sous une tente.

-Yep ?
-Visite !

Malcolm se leva et se dirigea vers la seule tente en contact avec l'extérieur. C'était sa première visite. Rachel était venue avec Nathan.

-Oh… Salut, sœurette.
-J'espère que ça va… Quand Roland m'a donné l'adresse j'ai cru à une blague… marmonna Rachel.
-Et elle a été obligée de la lui extorquer par la force ! Admit Nathan.
-Ca me fait plaisir de vous revoir…

Ils s'assirent à la table.

-Bon, Mac, on va être directs… marmonna Rachel.
-Claire ne veut pas venir te voir… lâcha Nathan.

Malcolm plissa les yeux, désolé.

-Oh…
-Roland passe beaucoup de temps avec elle, tout comme Léo pour l'aider à s'occuper du bébé, mais elle ne viendra pas de sitôt. Tu l'as beaucoup… choquée.

Malcolm hocha la tête, pas étonné.

-Ouais, ouais… je… J'aurais dû m'en douter.
-Faut dire que t'y a été un peu fort quand même… marmonna Nathan.
-Mais ouais, comment… comment t'as pu en arriver à penser des choses pareilles ? Geignit Rachel.

Malcolm soupira.

-Euh… écoutez, là je… je suis bien ici, alors…
-Tu n'y resteras pas éternellement, Mac, il y a bien un moment où tu devras sortir ! Soupira Rachel.

Malcolm hocha la tête. Rachel lui prit les mains.

-J'ai foi en toi, frérot ! Tu vas y arriver !

Malcolm hocha la tête. Nathan regarda Rachel, puis Malcolm.

-En tout cas ça a l'air d'aller mieux, tu as l'air plus détendu, déjà…
-Oui… sanglota presque Malcolm.
-Tu commences à réaliser que des choses te manquent… acquiesça Nathan.

Malcolm commença à pleurer. Rachel regarda Nathan.

-Bien joué…
-Au moins maintenant il réalise ! Admit Nathan.

Malcolm hocha la tête.

-Ouais, ouais… Faut… Faudra que je change des choses en rentrant.
-Roland a dit que tu n'avais qu'une phrase à dire et tu pourras rentrer.
-Quelle phrase ?

Rachel haussa les épaules. Malcolm plissa les sourcils, étonné.

***

-Je sais que vous n'aimez pas ça…

Malcolm s'assied sur le divan de Shoshana, la thérapeute du camp.

-Disons que je ne me sens pas fou, docteur…

Shoshana éclata de rire. Son Chaglam sauta sur un guéridon à côté de son fauteuil.

-Je ne suis pas vraiment docteur, Malcolm. Je suis une aura d'énergie pure, je suis là pour vous rassurer et vous guider.
-Ok, maintenant ça devient carrément bizarre.
-Vous avez besoin d'aide, de soutien, de compréhension.
-… Hm… possible.
-Alors… abusé dans votre enfance ?

Malcolm haussa les sourcils.

-Quoi… Nan !
-Il y a bien quelque chose de lié à votre vie d'enfant. Un évènement qui vous a secoué…
-J'ai attaqué la Team Galaxy quand j'avais quatre ou cinq ans mais ça m'a plus amusé qu'autre chose…
-Une enfance heureuse alors…
-Hm…
-Un frère, une sœur envahissante ?
-Ma sœur a toujours été capricieuse dans notre jeunesse, et aujourd'hui elle… est un peu embrouillée avec nos parents.
-… C'est un évènement récent ?

Malcolm plissa les yeux.

-Ca date d'avant la naissance de Nell.
-Intéressant ! Extrêmement intéressant, nous tenons quelque chose.
-… vraiment ?
-Je pense que dans votre esprit vous juxtaposez l'image de votre sœur enfant, capricieuse et désagréable, et que vous la retrouvez maintenant, adversaire de vos parents. De ce fait, Nell est le catalyseur de votre frustration.
-Non, enfin je pense pas…
-D'autres choses frustrantes dans votre vie ?

Malcolm plissa les yeux.

-J'ai… une relation compliquée avec mon meilleur ami.
-Le fameux Roland.
-Voilà.
-Vous n'avez fait que parler de lui !
-Il est une grosse part de ma vie, Shoshana… C'est mon meilleur ami, nos destins sont liés. Mais notre relation… n'a pas toujours été très saine.
-Vraiment ?
-Ouais, parce que…

Malcolm se mordilla les lèvres.

-Vous avez encore vingt minutes, Malcolm.
-… Mon… père a couché avec sa mère.
-Vraiment ?
-Voilà… et il a tout vu.
-Voilà qui est extrêmement intéressant ! Extrêmement intéressant, maintenant j'ai envie de rencontrer ce Roland.
-Et de me délaisser moi, hein…

Shoshana regarda Malcolm avec un doux sourire.

-Ouais, tout le monde veut Roland, mais moi… Je suis dans l'ombre. Le petit mec à côté du grand Roland. C'est un cas, je vous ai évoqué ses diverses lubies…
-Un pianiste alcoolique acerbe et surdoué de l'enseignement, vaste portrait en effet… Il doit avoir une famille affreusement dysfonctionnelle… Mais revenons à vous.
-Vraiment ? On peut continuer à parler de Roland, Roland est un très bon sujet de conversation.
-Non, Malcolm, je veux parler au vrai vous. Quel genre de vie menez-vous ?

Malcolm se mordilla les lèvres.

-J'ai toujours aimé ma liberté… J'ai… jamais été très fort pour changer, ni pour faire comme tout le monde. Ma petite amie… Claire…
-Celle dont vous avez tant de mal à parler.
-Ma relation avec elle, quand… elle a fait un pas vers moi, j'ai reculé au début… Ce n'est qu'après que j'ai réalisé que je ressentais la même chose, tout s'est fait lentement… Quand on est partis en voyage itinérant, je l'ai évitée comme la peste.

Shoshana s'étonna.

-Pourquoi ça ?
-Bah…
-Enfin visiblement il y a un problème avec cette relation, si vous n'arrivez pas à être vous-même en la présence de cette femme, si vous êtes contraint de l'éviter…
-N… ne vous méprenez pas, il n'y a qu'avec elle que je suis le vrai… moi.

Shoshana se mit dans une position très réfléchie.

-Vraiment ?
-Ouais… avec Roland… je joue, je suis aventureux, je vais dans des bars où j'aurais jamais osé aller… Ca vous faisait pas ça quand vous étiez petite, vous étiez une certaine Shoshana avec vos parents, mais une fois avec vos amis, c'était la nouvelle Shoshana qui naissait, et avec d'autres gens, d'autres attitudes…
-Ca s'appelle ne pas assumer tous les aspects de sa vie, Malcolm.

Malcolm plissa les yeux.

-Ah…?
-Vous aimez beaucoup vos parents…
-Oui…
-Vous êtes sincère avec eux.
-Oui !
-Vous aimez Roland.
-Ouais, si on veut.
-Pour autant vous n'iriez pas boire un verre avec vos parents comme vous allez boire un verre avec Roland. La situation serait embarrassante.
-C'est certain…
-Bien, maintenant Claire. Comment êtes-vous avec elle ?

Malcolm plissa les yeux.

-… gentil… affectueux… c'est… c'est la première personne à m'avoir fait réaliser combien je pouvais être tendre.
-De cette tendresse est née un enfant…
-Attendez…
-Non, vous devriez dire autre chose, vous devriez dire « oui, c'est vrai » ! Pas « Attendez » ! Rien ne passe avant un enfant !

Malcolm poussa un soupir coléreux. Shoshana claqua des doigts.

-C'est ça ! Nous tenons le problème.

Malcolm regarda Shoshana.

-Vous… avez un individu, un Moi très fort, de par le fait que votre sœur et votre meilleur ami sont de très fortes personnalités qui vous écrasent. Au milieu de tout ça vous avez trouvé Claire qui est votre équivalent féminin, elle aussi n'est pas dans la lumière mais elle a un Moi plus faible que le votre, elle a accepté cet état de fait, vous êtes en train de vous battre pour être sur le devant de la scène alors qu'elle est déjà pleinement consciente de l'existence du monde.

Malcolm plissa les yeux.

-… vous… êtes en train de dire que je suis juste un gros égoïste ?
-Je suis en train de dire qu'il n'y a pas de place dans la vie de Malcolm pour Nell. Vous aviez déjà tout ce qu'il vous fallait, Nell est venue s'ajouter.
-Pourtant quand elle est née j'étais heureux qu'elle soit là !
-Sa présence n'était pas encore un poids. Aujourd'hui vous sentez qu'elle se met en travers de vos besoins personnels.
-J'ai fait trop de conneries dans ma vie pour déconner avec elle aussi… Je vous ai parlé de Marie-Hélène…
-Ca peut jouer aussi, ce tempérament sensible vis-à-vis des enfants. Vous n'avez pas de patience avec eux…
-Mon… père est pourtant un type patient, aimant, gentil… Ma mère est la personne la plus douce qui soit…

Malcolm se mit à pleurer.

-Pourquoi moi j'y arrive pas ?
-Les frustrations. Vous vivez trop dans l'ombre des gens, ça vous énerve. Vous devez accepter de n'être qu'un second rôle. Claire y arrive bien. Elle a eu des évènements importants ?
-Elle… s'est réconciliée avec son frère avec qui elle avait une énorme brouille…
-Claire fait des avancées… Vous, vous n'avez eu pour ainsi dire que des problèmes. Et vous avez fait de ce bébé un problème de plus dans votre vie car c'est votre façon à vous de traiter ce qui vous arrive. Les gens analysent les choses, les détaillent. Vous vivez avec des boîtes barbouillées au marqueur noir. Rien n'a de forme pour vous. Problème, problème, problème. Même Claire a été un problème pour vous dans les premiers temps. Vous êtes comme votre Qulbutoke, vous rejetez tout en bloc sans vous préoccuper de savoir ce que c'est.

Malcolm plissa les yeux.

-C… Comment je fais pour… accepter… Nell, Claire, la nouvelle vie ?!
-En laissant de côté votre égo et votre ambition de lumière. Vous n'êtes pas unique, et vous devez apprendre que les autres sont vos meilleurs atouts et pas vos plus gros boulets.

Malcolm plissa les yeux.

-C'est pour ça que j'évitais tout le monde dans mon voyage itinérant…
-Et que vous avez giflé cette fillette. Vous auriez dû entrer en thérapie immédiatement après ça.
-Difficile, l'immeuble de Roland avait brûlé, il avait besoin d'une nouvelle maison…

Shoshana s'étonna.

-Vous lui avez payé une maison ?

Malcolm hocha la tête. Shoshana se rassit mieux, intéressée.

-Extrêmement intéressant !
-C'est un acte stupide ?
-Pas du tout !
-… Vous voulez que je dilapide mon argent pour offrir des cadeaux ?
-C'est un bon moyen de réaliser votre guérison. Donner. C'est peut-être ce qui vous manque. Vous êtes généreux, vous donnez facilement ?
-… J'habite dans un appartement très normal… dans un quartier normal… J'évite de profiter de l'argent de mes parents, au contraire de ma sœur qui vit dans un quartier chic… Je suis obligé de m'habiller spécialement pour y aller sans rougir de honte…
-Vous aspirez à la plus totale normalité, pourtant vous n'êtes pas quelqu'un de normal. Votre vie n'est pas banale. Vous êtes professeur. C'est votre rôle de donner, d'offrir, de transmettre. Vous devriez être le meilleur père qui soit pour cette enfant. Parce que votre passion consiste à donner.

Malcolm regarda au plafond, semblant prendre conscience d'un tas de trucs.

***

Malcolm travaillait au jardin avec d'autres camarades. Biner, bêcher, semer faisait partie du quotidien.

-Mais… on plante quoi, au juste ? S'étonna Malcolm.
-Des trucs, supposa un type.
-Des… trucs… ok… Je suppose que c'est juste une activité comme ça !
-Exact, pas de but précis… marmonna le même type.

Malcolm hocha les épaules et prit l'occupation comme elle lui était donnée.

***

Les repas étaient l'occasion de conversations animées.

-Le gouvernement est rempli de connards ! Tu peux pas faire confiance à un maître du conseil qui a du sang sur les mains ! On devrait tous se rallier à Hoenn !
-Hoenn ? Un pays de bourges dirigé par un chef d'orchestre ?
-Quelque chose me dit que cette guerre ne va pas être triste avec des traitres pareils…

Malcolm soupira, quelque peu gavé par toutes ces digressions guerrières.

-Je peux ?

Malcolm vit un grand type brun s'asseoir à côté de lui.

-Je suis Luc !
-… Malcolm !
-Tu trouves pas tout ce qu'il y a autour de nous ultra stimulant ?
-… si ! Ouais, c'est… sympa.
-T'aurais pas un truc pour améliorer tout ça, tu vois… un… un truc pour stimuler encore plus ?
-… du viagra ?!
-Nan, nan, haha ! Nan ! Eh, relax, mec !
-Je suis relax, vous, vous avez l'air un peu détraqué.
-M'nan, m'nan… Mange, va. On en rediscutera.

Malcolm plissa les yeux et continua à manger.

***

Le soir même, nouvelle visite : Léopold.

-Tiens…
-Je t'ai apporté du chocolat !
-… Léopold c'est un lieu de détente, pas un goulag !

Léopold acquiesça. Malcolm s'assied face à lui. Long regard silencieux entre les deux. Malcolm baissa la tête, gêné.

-J'suis désolé.
-Enfin !
-Ecoute, je suis content que tu tiennes à la petite, tu fais un parrain super…
-Je ne te crois pas, monstre !

Malcolm plissa les yeux. Léopold semblait se faire violence pour parler ainsi à Malcolm.

-Une… une part de moi voudrait t'adresser un pardon inconditionnel, parce que… on a grandi ensemble, tu es comme un petit frère pour moi…
-Léo… soupira Malcolm, écrasé par la honte.
-Mais une part de moi ne peut s'empêcher de t'en vouloir parce que tu as trompé ton monde ! On te pensait heureux !
-J… J'ai jamais…
-T'as jamais rien dit, en effet. Je viens pas t'accabler, je viens te dire que tout le monde va bien, et que… tu manques à ta fille et à Claire.
-…
-… Malcolm, merde ! Réagis ! Ca devrait te faire réagir !
-Et si j'ai pas envie de faire semblant de bien réagir ? Merde ! Si… j'ai juste envie de… rester moi-même ?
-Tu as un enfant, tu dois l'inclure dans ta vie.
-J'ai vingt-quatre ans, Léopold, je suis trop jeune pour…
-Oh je t'en prie, t'avais pas quatre ans que tu défonçais des Galeking au milieu d'une prairie avec le Goinfrex de ton père !
-Ca n'a rien à voir ! Là il faut que je m'investisse !
-Un comportement comme le tien, de la part de Roland, c'aurait été logique. Mais toi, un garçon si aimable, si compréhensif, si gentil…
-Ouais, ouais, Roland est un connard, Malcolm est un type bien… Bah vu ce que je me suis pris sur la gueule…
-C'était lui ou moi, mais franchement je t'aurais cassé la gueule aussi ! Grommela Léopold.

Malcolm soupira.

-C'est tout ce que tu étais venu me dire ?
-Nan.

Léopold tendit à Malcolm un petit ruban rose.

-… un de tes prix de concours ?
-Alors là c'est grave ! C'est un des rubans de la robe que j'ai offert à Nell à son baptême ! En la reprisant, je l'ai enlevé pour te le ramener.

Malcolm plissa les yeux.

-Courage, Malcolm. Au bout d'un moment, tu vas comprendre ce qu'on veut tous t'entendre dire. Tu vas le réaliser par toi-même. On ne te blâme pas.
-Claire va venir me voir ?

Léopold se mordilla les lèvres.

-Pas sûr.
-Tant mieux.

Léopold regarda Malcolm, étonné. Le jeune homme brun se leva.

-Vos visites me font trop souffrir.

Malcolm tourna les talons et partit. Léopold hocha la tête.

-Bon début.

***

Malcolm continuait les travaux. De même, Luc était de plus en plus collé à ses basques. Malcolm soupira.

« Le type on dirait 80% de mes relations hors cercle d'amis… Le genre de type que je fais typiquement semblant de bien m'entendre avec… »

-La terre ça s'arrête pas aux arbres qu'on voit là-bas, Malcolm ! C'est vachement profond, la terre !
-Je sais ça, ouais…
-Tu fais quoi dans le civil ?
-Je suis prof de maths.
-Ca alors j'ignorais que le démon avait pris possession de ces lieux…
-J'imagine que tu fais un boulot cent fois mieux que le mien…
-Nan, même pas !

Malcolm plissa les yeux.

***

-Les visites des autres me font souffrir.

Shoshana se servit du thé vert.

-C'est bon signe. Leur présence vous donne un coup de fouet, elle vous ramène aux réalités. Vous réalisez ce que vous avez perdu. Leur confiance, leur amitié, leur inconditionnel amour pour vous.
-J'ai été nul… Je me sens nul ! Pourtant ici je me sens mieux. Ca me fait du bien tous ces travaux manuels.
-Vous aimez vous dépenser. Peut-être que votre métier ne vous convient pas.
-Et si c'était ma vie qui ne me convenait pas ?

Shoshana secoua la tête.

-Personne ne choisit inconsciemment une vie qui lui déplait, sinon on ne survit pas. Votre vie en elle-même vous plait, c'est la façon dont vous la dépensez qui vous déplait. Permettez que je vous apprenne quelque chose, vu que vous n'avez pas accès aux journaux ?
-… allez-y…
-Deux semaines.

Malcolm plissa les yeux.

-Dans deux semaines, c'est la guerre. Dans deux semaines, les troupes seront appelées à leurs postes. Je serais conseillère psychologique pour les soldats blessés. Je n'ai pas hâte. Les soldats sont vides, ils ne pensent pas, ils bloblotent.
-Je vais être soldat…
-Vraiment ? Avec une équipe comme la votre je vous aurais vu tireur ou tankiste.
-Ne comptez pas sur moi pour tuer qui que ce soit pendant cette guerre.
-Vous êtes un bon esprit, Malcolm, vous êtes très positif. Acceptez le bébé.
-C'est plus vraiment un bébé, c'est ma fille.
-Elle vous manque ?

Malcolm haussa les épaules.

-Pas vraiment.
-Au moins vous êtes sincère. Il vous faudrait un déclic, quelque chose qui vous fasse réaliser à quel point cette enfant est importante dans votre vie.

Malcolm plissa les yeux.

-J'ai…

Shoshana regarda Malcolm qui était quelque peu mélancolique.

-… j'ai jamais eu l'impression d'être important pour qui que ce soit. De passer après… X ou Y, ou même tel ou tel impératif… Jamais d'être… le centre d'attention. Et quand je trouve enfin une femme qui me voit comme le centre de sa vie… Voilà qu'on fait un bébé ! Et que du coup, bah…
-Bah… vous pouvez devenir le centre de la vie de votre bébé. Ou accepter d'être un second rôle dans la vie de beaucoup de gens. Parfois c'est une bonne chose aussi, de s'asseoir à une table, d'être une simple présence qui rassure.

Malcolm hocha la tête.

-Acceptez, Malcolm. Acceptez le fait que votre vie ne soit pas le centre du monde.
-Je sais ça, mais…
-Mais vous aimeriez bien.

Malcolm hocha la tête.

-Ma famille me manque.

Shoshana hocha la tête en souriant.

-Cette seule phrase est un grand pas.

***

Le lendemain, Malcolm portait encore des sacs de terreau, sans se poser trop de question. Luc rejoignit les porteurs.

-Han non, pas lui… grommela l'un des camarades de Malcolm.
-Vous le connaissez ? S'étonna Malcolm.
-C'est un gros lourdingue… marmonna la jeune femme.
-Hey ! Salut les gars ! Alors, on entrepose ?

Malcolm acquiesça et rentra le sac de terreau dans la serre. Il entendit deux coups de feu et se releva brusquement. Il sortit de la serre et vit Luc face aux deux corps.

-L… Luc…
-… T'as vu ça ? Tu leur tires dessus et pouf ! Ils meurent.
-… Ouais… Ouais, c'est… bête.
-Tu sais quoi ? Bientôt c'est la guerre, t'as entendu ?

Malcolm hocha la tête, blême.

-Eh bah moi je veux que ce soit maintenant ! MAINTENANT !

Luc tendit le revolver en direction de Malcolm. Il se figea et ferma les yeux. Ses Pokéballs commencèrent à vibrer.

-Viens VOIR ça !

Luc le prit par le bras et l'emmena dans le fond de la serre.

-M… M…
-Viens voir viens voir viens voir viens voir…

Luc entraina Malcolm dans le fond de la serre jusqu'à une bâche qui cachait… un laboratoire de drogue. Une dame âgée y travaillait.

-Je peux vous…

Luc la shoota d'une traite. Malcolm serra les dents, apeuré.

-T'as vu ça ? DE LA DROGUE ! Des PLANTS ! D… D… D…. Un centre de mise en conditionnement !

Malcolm plissa les yeux. Luc sortit une plaque.

-J'aime pas ça !
-T… T… T'es un policier ?!
-Ouais, ouais c'est vrai la police, ouais, mais… C'est la guerre alors on s'en fout ! Hein ? On va tous mourir, après tout, toi, moi…

Luc plaça le canon du pistolet sous le menton de Malcolm.

-Toi… Tu peux mourir, là, il suffit que je plie un doigt…
-Non, non, non, non, non…
-Ouais, excuse-moi ! T… T… T'es mon copain, Mac ! T'es mon copain !

On entendit des cris. Malcolm et Luc se tournèrent vers la porte de la serre.

-Elle est morte !
-Mais quand c'est arrivé ?!

Luc ricana.

-Cette sale pute de hippie qui m'a dit que tout était de la faute de ma mère… C'est pas sa faute si papa était parti et que j'ai dû la laver dans son bain ! Gnnn…

Malcolm était totalement hébété.

-C'était facile d'empoisonner son thé vert depuis les cuisines ! Gniiiiiii…

Malcolm secoua la tête et éloigna Luc de lui.

-EH ! TU M'ELOIGNES PAS COMME…

Luc tira mais Malcolm lui opposa Bastiodon.

-Tu vas payer ça, enfoiré !
-Ah tu veux ce genre de baston ?
-Comment t'as pu tuer la thérapeute ? C'était la seule un peu limpide ici !
-Je te l'ai diiiiit ! Sois attentif ! Je ne répèterais pas ! MAGANON !

Le Pokémon sortit de sa Pokéball et déversa ses flammes partout autour. Malcolm et Bastiodon s'échappèrent de la serre et traversèrent le camp alors que l'herbe prenait feu autour de lui.

-DEGAGEZ ! FOUTEZ LE CAMP ! PUTAIN ! SORTEZ D'ICI !

La plupart des tentes explosèrent et prirent feu. Malcolm et Bastiodon se retournèrent vers Luc et Maganon. Le grand type brun éclata de rire.

-Tout le monde va mourir ! Tout le monde ! Ca sert à quoi de préserver tout ça, d'arranger les choses ? La violence est en marche et d'ici peu de temps, elle va tout réduire en cendres… Tout comme toi ! La guerre va venir et va tout raser. Il ne sert à rien de soigner des esprits malades quand la vie n'est pas à même de continuer ! La tombe est creusée, il suffit de s'y allonger...

Maganon tendit ses canons vers Malcolm qui prit une Pokéball.

« Ca y est Malcolm, tu vas crever.
Ce que tu as accompli jusqu'ici a été bien vain.
Je me demande ce que fait Roland en ce moment...
Tout va être question de timing… »

Maganon chauffa les canons.

« C'est moi ou lui… »

Luc ricana et chargea son révolver.

-Tu y as cru, hein ? Prépare-toi à…

Maganon tira. Malcolm sortit Qulbutoke qui renvoya les flammes vers Maganon et Luc qui se retrouva brûlé par ses propres flammes.

-GUAAAAH !
-Désolé, mais là c'est toi ou moi…

Malcolm sortit Noctunoir.

-Et là j'ai pas le choix ! GRAVITE !

Malcolm plaqua Luc au sol et le laissa brûler. Maganon partit quand Luc rendit son dernier souffle. Malcolm regarda ce qu'il avait fait. Autour de lui, tout brûlait. Il rappela ses Pokémon et marcha nonchalamment vers la sortie du camp. Il sortit le ruban de Nell de sa poche et le fixa longuement.

« Claire… Nell… J'arrive. Je sais pas si j'ai… compris quelque chose, mais… j'arrive. »

Il marcha jusqu'à la route alors qu'il faisait nuit, tendant le pouce en espérant qu'on le prenne en voiture.