Le crépuscule de l'espoir de junkolusa

Thème d'ambiance: http://www.youtube.com/watch?v=DIjX34OyRj8


Celle qui venait d'avoir enfin un nom regarda la pleine lune et sourit. Elle avait enfin un nom qui lui semblait moins pompeux. Ses yeux parcouraient les bois environnants, seulement agités par le vent dans les tilleuls et les saules. Elle retint un bâillement et reprit sa route avec ses deux compagnons. Après une heure de marche dans la végétation, les arbres devenaient plus nombreux et une odeur parvint à son museau. C'était un mélange composé de celle de la foret en plus moisi et de l'odeur de la boue des ruisseaux de montagne lorsqu'ils s'asséchaient avec l'automne.
Lorsque l'odeur devint plus persistante, Branette les fit stopper.
-Nous nous arrêterons ici pour ce soir. C'est inutile de nous aventurer dans les marais la nuit, nous irons dès demain. En attendant, reposez vous.
Les deux obéirent, sachant pertinemment que de dormir la nuit dans les marécages est fortement déconseillé, à moins d'être suicidaire. S'enfoncer dedans la journée est déjà risqué alors inutile de prendre une décision funeste sur un coup de tête.

La femelle se roula en boule au pied d'un rocher et s'endormit rapidement. La poupée vivante s'étendit inerte aux cotés de la femelle, profitant de la chaleur du pelage immaculé. Xatu resta debout, calme et stoïque, servant de garde. La nuit se déroula sans problèmes, mis à part les hululements agaçants des Noarfang en chasse et les battements d'ailes des Nosferalto traquant leurs proies.
Ce n'est qu'au petit matin qu'un bruit plus étrange retentit. Cela faisait quelques minutes que l'équipe était levée, Branette guidait le groupe en montant sur le dos d'Absol. Un craquement de branche les surprit tous et fut suivi par des bruits de chute et de craquement. Se fiant à son ouie, la chasseuse releva la tête en direction de la menace et comprit. Un Etourvol leur fonçait dessus en piqué.
-Attention ! Ecartez vous !
Alors qu'elle se poussait, Absol vit Branette se cacher dans l'ombre d'un rocher et Xatu s'entourer d'un bouclier.

L'Etourvol continua son piqué et s'écrasa au sol dans une position peu glorieuse. L'animal était à terre, la tête plantée dans le sol et semblait avoir quelques difficultés. Alors qu'il battait des plumes dans tout les sens, une voie étouffée par la terre se fit entendre.
-Ne venez surtout pas m'aider !
Xatu ressortit délicatement l'oiseau de terre et l'aida à se redresser. L'oiseau secoua ses plumes pour enlever la poussière qui s'était accumulée sur son plumage et se retourna vers Xatu.
-Merci de ton aide.
Les trois compagnons eurent un choc en voyant ses yeux ternes. Elle était aveugle.
-De rien. Comment te nommes tu ?
-Je m'appelle Etole. Je suis une voyageuse.
-Que t'est il arrivé ?
L'oiseau se retourna vers la femelle qui avait prononcé ces paroles.
-Je me dirigeais vers l'ouest quand un courant ascendant m'a brutalement déstabilisée. En réalité, je suis une voyageuse nomade, errant au gré de ses envies.

Absol sourit, ironique.
-Ah, la liberté absolue. Quelle joie de n'avoir ni dieu ni maître !
-Parle pour toi. Je suis prisonnier de mes visions, je sais que je n'aurais pas d'autre destin que celui ci.
-Dommage pour toi. L'avantage d'être un spectre est de ne plus craindre quoi que ce soit.
La femelle au pelage de neige présenta son groupe à Etole.
-Je m'appelle Absol. L'oiseau c'est Xatu et la peluche …
-Poupée ou marionnette, mais pas peluche !
-C'est pourtant ce que tu es, je ne fais qu'énoncer la réalité. Donc je disais, la peluche s'appelle Branette.
-Et puis je savoir ce que trois pokémon si dissemblables et si peu aptes a vivre en groupe font si éloignés de chez eux ?

Les trois compagnons s'amusèrent de cette remarque. Apparemment, le fait d'être aveugle n'empêchait pas cette Etourvol de bien cerner la psychologie des membres du trio.
-Nous sommes à la recherche d'un moyen de sauver le monde. Le piaf bariolé a des visions d'apocalypse et la peluche a soi-disant quelque chose à nous montrer à ce sujet.
-Et la ronchon enfarinée cherche a sauver le monde et accessoirement à découvrir qui elle est.
Avec un sourire ne présageant rien de bon, Absol se retourna vers Branette, Xatu gardant son air habituel.
-Qui tu traites de ronchon enfarinée ?
-Celle qui nous a affublés de surnoms aussi réducteurs que blessants.
Branette prit un air aussi triste que possible, mais avec des billes pour yeux et une fermeture éclair en guise de bouche, le résultat était plutôt pitoyable. Etole était surprise de ces petites piques glissées pour susciter l'hilarité.
-Dites, ça vous dirait une aveugle dans votre groupe ? Parce que moi je n'ai rien à faire alors ça ne me ralentirait pas … et puis ça pourrait être amusant.

Xatu aurait haussé les sourcils, dans l'hypothétique cas ou il en était doté, voir tous les jours une explosion de flammes consumer la surface de la Terre n'avait rien d'amusant. Il garda cette réflexion pour lui et regarda Absol et Branette de son air impassible. La figurine haussa les épaules, montrant ainsi qu'il s'en moquait totalement.
-Bon, tu peux venir avec nous.
Etole sautilla et se mit aux cotés de Xatu, histoire d'être à proximité d'un confrère volant.
-Je suis ravie d'être avec vous … ou allons nous maintenant ?
Branette poussa un soupir
-Vous me suivez. Je vous conduis dans un endroit que vous n'avez jamais vu. Nous allons au Temple des Existences.

Absol se repassait cette dénomination dans son esprit. Le nom ne lui inspirait pas confiance et lorsque quelqu'un essayait de poser une question, Branette se taisait. Il leur avait dit qu'une seule chose, c'est qu'il fallait le voir de ses yeux pour le croire.
Le groupe avançait lentement, la terre se changeait peu à peu en boue puis en marécages. L'air moite regorgeait de cris et de vie, les pokémon insectes pullulaient, leurs ailes vrombissaient et bourdonnaient sans cesse, jour et nuit. Une Rafflésia émettait des spores ainsi qu'une odeur épouvantable tandis qu'un Empiflor ouvrait sa feuille pour engloutir un Rattata malheureux passant à proximité.
-Je sens que je vais détester cet endroit.
Les autres soupirèrent et continuèrent leur marche. Le chemin de terre glissant serpentait entre les arbres ou de nombreux Mimigal tissaient leurs toiles et l'eau boueuse. L'odeur des végétaux en décomposition et la brume persistante faisaient de ce lieu plein de vie un endroit idéal pour les ermites.

Le chemin de terre se termina brusquement, il avait disparu sous l'eau et continuait à une dizaine de mètres. Il était hors de question de faire demi tour alors Xtu écarta ses deux ailes et flotta vers la rive opposée. Ayant entendu le bruit, Etole se fia à son sens auditif pour franchir l'étendue d'eau par les airs. Branette quitta sa monture pour flotter en direction des deux oiseaux.
-Et comment je fais moi ?
-Ben … à la nage.
Une veine battit sur la tempe de la femelle. Comprenant qu'elle devrait de salir un peu, elle prit de l'élan et courut pour sauter. Elle avait aperçu un léger monticule émergeant à peine de la surface et espérait bien y prendre appui pour son saut.
Comme elle l'imaginait, elle arriva bien sur la bosse mais la boue glissa sous elle et elle se vautra dans la terre liquide.

Elle émergea avec quelques traces marron sur son visage ainsi que sa fourrure qui avait perdu sa pureté.
-Je vais vous tuer dès que je vous aurait rejoints !
Elle nagea dans le marais pour les rejoindre mais une forme glissa sous l'eau en direction de la femelle. Absol continuait de nager vers la terre ferme sous le regard amusé des deux autres tandis que Xatu regardait l'eau.
-Absol ! Attention à droite !
Mise en garde, elle tourna la tête avant qu'une puissante paire de mâchoires bleues ne l'agrippe et ne l'entraîne sous l'eau. Elle ressurgit paniquée et avança le plus rapidement possible vers la berge. L'agresseur chargea la femelle avant de le cogner contre un mur vert. Absol mit finalement pied à terre et put souffler, un Crocrodil s'éloigna dépité.

La femelle s'effondra, une vilaine morsure marquait sa pelisse désormais brune. Branette grimaça à la vue de la blessure, ces fichus pokémon cannibales avaient de bonnes dents et vu qu'ils consommaient souvent des charognes, leur hygiène buccale était déplorable.
-C'est une sale blessure, il faut la soigner avant qu'elle ne s'infecte.
Xatu fit briller ses yeux et un rayon de lumière éclaira les marques de crocs avant que la chair ne se referme.
-Voila, avec ça, elle ira mieux et c'est désinfecté.
Etole hocha de la tête.
-Pratique.
La mordue se releva, ne ressentant plus qu'un léger picotement là ou le crocodile avait enfoncé ses crocs. Elle regarda Xatu avant de le remercier, même si elle était en colère, colère aussi bien dirigée contre ses acolytes que contre elle même.

Le chemin continuait, zigzagant entre terre et eau jusqu'à ce qu'ils atteignirent enfin des sols plus secs. La terre ferme leur avait manqué et ils n'étaient pas mécontents de quitter ces marais. La végétation se faisait plus rare, les sols plus rêches et plus sombres.
-Vers ou allons nous ?
Branette se retourna et répondit avec sarcasmes.
-Nous allons au temple. Nous allons traverser les terres abandonnées.
Etole frissonna.
-Mais il n'y a rien là bas !
-C'est bien parce qu'il n'y a rien que le temple s'y trouve. Tu voudrais cacher quelque chose, tu le mettrais dans un lieu ou nul ne va jamais.