L'obscur amour brillant
Natsu était déjà sur place. Il récupérait l'eau qui tombait du haut du jet de la fontaine. C'était son maître qui lui avait ordonné d'aller chercher ce breuvage. Lorsqu'il eut terminé sa récolte, il partit. Comme il ne voyait pas souvent son visage, à part dans le grand miroir qui trônait dans la salle de son maître, il prit le temps de se regarder dans l'eau. Ses joues étaient creuses, et pire encore, des cernes venaient apporter une mine morne et triste sur le visage de l'enfant. Et oui, ce n'était pas un adolescent, et encore moins un adulte. Il n'avait que dix ans après tout, et pour survivre, il devait écouter son maître. Dans le reflet de l'eau qu'il avait récupérée dans son seau fait de bois, il vit aussi ses cheveux délavés, sales et remplis de matières comme de la poussière, de la boue, et même de l'herbe. Normal ? Exactement. Souvent il tombait lorsqu'il devait se presser d'amener quelque chose à son maître, souvent il trébuchait à la vue de la colère de son chef qui venait de le disputer pour une raison ridicule. Toujours il trébuchait. Depuis sa naissance. Il n'avait pas eu une enfance radieuse, comme tous les jeunes de son âge qui étaient devenus dresseurs... S'il était né pauvre, ce n'était pas sa faute. S'il s'était fait abandonné à un âge dont il n'a pas la connaissance, c'était ses parents. Du moins, la richesse trop faible de ses tuteurs. Jamais il n'aurait cru imaginer que travailler était si dur. A présent, c'était devenu une habitude comme toutes les autres. Et si jamais il se plaignait, il recevrait des coups, ou se ferait enfermé dans un endroit sombre et rempli de Ratatta prêts à lui manger ses orteils. Lorsqu'il vit ses yeux bleus transpercer l'eau de son seau, il manqua de le lâcher, mais il eut le réflexe de le rattraper à temps. Cependant, dans l'action, il cracha de lourdes larmes qui tombèrent dans le liquide. Natsu s'assit donc violemment par terre, en faisant attention à ne pas renverser d'eau ; le maître serait trop en colère envers lui, et si le chef serait en colère, ce serait les punitions habituelles : coups, enfermement jusqu'à aller à travailler pendant toute la nuit juste pour que le maître accomplisse sa vengeance.
"Hé Natsu !"
Une jeune fille accourut vers le jeune garçon. Celle-ci semblait légèrement plus âgée. Elle avait un petit visage, avec des lèvres très fines ainsi que deux yeux bleus comme cristal pour clore ce joli spectacle. Natsu se releva alors subitement et fit mine d'avoir une stupide poussière dans ses yeux.
"Fuyu ? Tu fais quoi là ? Le maître il va te punir, tu dois pas rester près de moi ! s'inquiéta Natsu, tout en frottant ses yeux pour mimer le fait qu'il s'était pris une poussière dans les yeux.
- Le maître, je m'en fiche. Ses punitions, encore plus. Donc le maître si il veut me punir, bah il me punit c'est tout, rétorqua Fuyu.
- Comme tu veux... Bon désolé mais j'dois aller lui donner son eau !
- Ok, moi j'vais chercher à bouffer pour lui, assura la jeune fille en s'éclipsant."
Natsu reprit alors son chemin vers le palais. Cette bâtisse avait l'air de faire une dizaine de mètres, et possédait environ quarante pièces. Natsu et Fuyu étaient les préférés du maître : il les avait choisis pour le représenter et pour lui apporter des choses venant de l'extérieur. Les soixante autres serviteurs passaient leurs vies dans le château, à le nettoyer de fond en comble, à changer les draps tous les jours, à faire la vaisselle, ou bien le repas. Natsu arriva alors au palais. Il ouvrit la grande double-porte de huit mètres avec beaucoup de difficultés. Le maître était en train de se faire brosser par sept personnes, tandis que quatre autres lui faisaient un massage. Deux autres serviteurs secouaient des branches garnies de feuilles pour lui offrir un peu d'air et une dizaine d'autres esclaves faisaient des vas et viens de la cuisine jusqu'au maître pour lui offrir de la nourriture faite spécialement pour lui. Natsu approcha de l'immense Pokémon, puis lui montra ce qu'il avait récupéré.
"C'est tout ce que tu peux porter ? se moqua son chef."
Le jeune garçon eut des larmes qui lui montèrent peu à peu aux yeux. Oui, c'était tout ce qu'il pouvait transporter, et pourquoi était-ce une faute alors que Natsu faisait son possible pour apporter ce que le maître lui demandait ? Il faisait de son mieux pour accomplir ses ordres et ses demandes les plus énormes, et tout ce qu'il obtenait en échange, c'était des moqueries. De méchantes moqueries. Le maître regardait fièrement Natsu. Natsu lui répondit d'un regard apeuré.
"Oui, avoua le jeune garçon."
Le Pokémon se leva donc sur ses quatre pattes. Il fixait de haut Natsu. D'un coup de sa lourde patte avant, il frappa violemment l'enfant. Celui-ci se fit projeter puis glissa au sol sur une dizaine mètres. Il se mit à pleurer. Le maître venait de lui arracher tout la partie gauche de son t-shirt : il n'avait dorénavant plus de manche de ce côté là, et vers sa hanche, le tissu s'était déchiré. Sa peau était devenue énormément rouge, jusqu'à lui causer des brûlures un peu partout. Natsu s'évanouit. Le maître poussa un grognement, et sa fourrure orange et beige se hérissa durant un instant. Tous les serviteurs le regardèrent avec un air de pitié pour le jeune enfant, c'est alors que le Pokémon leur fit le signe d'aller voir ce qu'il était arrivé à Natsu. Tous se ruèrent vers lui. Chacun des esclaves criait, se dépêchait de chercher de quoi le soigner, ou de courir dans tous les sens, inquiété de l'état du garçon. Fuyu entra alors, des herbes à la main. De son autre main, elle avait cueilli une rose blanche qu'elle avait croisée sur son chemin. C'est alors qu'elle la lâcha, et vit une traînée de sang, puisque la peau de Natsu n'avait pas tenu sur les dix mètres de sa glissade sur le sol. Elle accourut en direction du blessé, et s'aperçut que c'était son meilleur ami. Fuyu étouffa un cri, puis commença à avoir beaucoup de mal à respirer. Un serviteur remarqua sa situation tragique et l'aida à se calmer, en la consolant.
"Calme-toi Fuyu ! Calme-toi. Ce n'est rien, c'était un accident, je te le promets ! assura l'homme d'environ trente ans.
- Je veux pas te croire ! Si Natsu est comme ça, c'est que c'est pas un accident ! hurla-t-elle, en libérant toute la rage qui sommeillait en elle.
- Fuyu ?!"
L'enfant était en train de se secouer la tête tout en se la tenant avec ses deux mains. Fermement, elle ne lâchait pas prise et commençait à perdre son équilibre. Des larmes coulèrent du long de ses joues creuses. Elle ferma les yeux. Celles-ci commencèrent à devenir de grosses gouttes, telles des rivières qui coulent le long d'un chemin. L'homme qui était venu s'occuper de Fuyu hurlait le plus fort possible, mais en vain, la fille ne voulait rien entendre. Elle continuait à gigoter violemment, elle fit même tomber un vase précieux du haut d'une colonne. Le maître regardait ce spectacle tragique sans même chercher à remettre de l'ordre, ou à aider tout le monde.
"Maître ! Maître ! MAÎTRE ! hurlai Daisuke, l'homme qui avait tenté de calmer la jeune enfant."
Le majestueux Pokémon tourna sa tête vers l'homme qui tentait de calmer Fuyu. Il s'approcha doucement et prit la jeune enfant dans sa gueule, par sa manche. Celle-ci ne cessait ses cris et hurlait encore plus fort quand elle se rendit compte qu'on la transportait. Elle ouvrit alors ses yeux et vit le maître. Elle ferma ses paupières et se frottait les yeux en balbutiant des phrases :
"C'est pas vrai... C'est qu'un cauchemar... C'est pas vrai... C'est pas vrai ! Je veux pas que Natsu meure !
- C'est bien vrai Fuyu. C'est la vérité."
La jeune fille écarquilla les yeux : était-ce vraiment le maître qui avait dit ces paroles si touchantes et consolantes ? Pour Fuyu, c'était impossible. Lassée de toutes ces aventures, elle voulut s'endormir et ne plus jamais se réveiller. Elle ferma alors les yeux et laissa le sommeil enfermer son énergie. Sans qu'elle ne s'en rende compte, Fuyu s'évanouit volontairement.
Les deux enfants se réveillèrent dans une salle du palais qui leur était inconnue. Ils regardèrent autour d'eux. Natsu tourna la tête en direction de Fuyu, qui venait d'elle aussi s'éveiller. Il lui fit un signe de main pour lui dire bonjour, ou pour tout simplement appuyer sur sa présence. La jeune fille se contenta de fixer son flanc, qui était entièrement bandé. Le garçon cacha cette partie de son corps sous sa couverture et sourit à Fuyu. Celle-ci ne lui rendit pas son sourire.
"Fuyu... Pourquoi tu me parles plus ? s'inquiéta Natsu.
- J'te parle encore. Te fais pas de soucis, c'est juste que ta blessure elle...
- T'inquiète pas, c'est rien. J'vais bien, j'te le jure !
- J'espère... murmura la jeune fille."
Natsu se leva. Il remarqua qu'il n'était qu'à moitié habillé, et que ses lambeaux de vêtements avaient été remplacés par un pantalon confortable, bien repassé, propre et neuf. Il écarquilla les yeux. C'était comme si on lui avait volé une partie de son âme. Mais il ne s'en fit pas plus, il pensait que c'était inutile. Pour un garçon de dix étés, Natsu était bien mature. Il avait vécu une enfant bien plus que difficile, après avoir été abandonné, recueilli par un simple Pokémon puis pour avoir été gradé comme esclave à se faire battre. Le jeune garçon avait appris à vivre comme cela. Et il avait grandi comme les autres, mais autrement. Lorsqu'il voulut s'approcher de Fuyu, il trébucha.
"Natsu ! hurla la jeune fille. Ca va ?!
- Oui... C'est super bizarre ! J'ai voulu m'approcher de toi et puis j'me suis retrouvé par terre comme si je m'étais pris un mur en pleine tête...
- Un... Un mur... ? bafouilla Fuyu."
C'est alors qu'un bruit se fit entendre. Un grincement agaçant, qui ne dura que quelques secondes, mais qui cassa un peu les oreilles des deux gamins. Natsu pointa du doigt le Pokémon à fourrure orange et beige, et Fuyu suivit son geste. Ils remarquèrent que c'était le roi qui venait de pénétrer dans une salle en face de la pièce où se trouvaient les enfants.
"N'essayez pas de trouver un échappatoire. Il n'en n'existe aucun, expliqua le chef en appuyant sur le dernier mot qui fit un écho dans la salle.
- Pourquoi on est là ?! protesta Natsu.
- Parce que j'en ai décidé ainsi, conclut son supérieur tout en commençant à sortir."
Toutefois, le Pokémon se retourna et ajouta :
"Oh, j'avais oublié : une barrière invisible a été mise entre vous. Dommage, hein ?"
Et il s'éclipsa. Les yeux de Fuyu commencèrent à cracher des larmes aussi violemment que sa fureur qui avait éclaté au grand jour lors du soit-disant "accident" de Natsu.Mais néanmoins, la jeune enfant ne bougeait pas. Elle retenait sa rage en elle, tandis que son ami la regardait, consterné. Il était affligé. Mais aussi abattu. Et pourtant, il ne disait rien. Il se montrait comme un bavard silencieux et attristé. Il posa alors sa main contre la vitre. Fuyu entendit ce bruit et reluqua sa main presque de griffures et d'égratignures ainsi qu'une belle coupure entre son pouce et son index. La jeune muse s'approcha doucement, en écarquillant peu à peu ses magnifiques yeux bleu clair. Elle ne lâchait pas du regard cette main qui lui tendait un signe. Soudain, elle leva son membre à son tour. Fuyu le posa contre cette fenêtre invisible. Son ami lui sourit. Elle lui rendit gentiment. Le garçon l'enleva brusquement et se rangea tranquillement dans son lit, en tournant le dos à la cellule séparée de Fuyu. Cette dernière fit de même, mais elle se mit face à son ami. Pendant les heures où elle l'avait fixé, il n'avait pas bougé. Pourtant, elle regardait Natsu et remarquait tout de même qu'il tremblait horriblement. Sans cesse. Cela l'inquiétait de plus en plus, parce que Fuyu trouvait qu'il y avait un froid terrible depuis quelques instants. La jeune fille se leva et commença à frapper contre les parois des murs glacés, en hurlant à la mort :
"S'il vous plaît, aidez mon ami ! Aidez Natsu ! Il fait froid ici ! Très froid ! Aidez-le ! S'il vous plaît !"
Un homme qui passait par là vit bien Fuyu. Mais il n'y prêta pas attention et continua sa route comme si de rien n'était. La jeune fille commençait aussi à avoir vraiment froid, alors elle se recoucha dans son lit et ne voulut plus bouger. Natsu se leva alors. Il avait les joues extrêmement rouges ainsi que ses yeux. Ses paupières affichaient de la fatigue, en plus des cernes qui trônaient sous son regard. Pourtant, on aurait dit qu'il ne ressentait pas toutes ces douleurs-ci. On aurait dit que Natsu avait quinze ans. Quinze. Néanmoins, il n'en avait pas plus de dix. Soudain, le jeune garçon s'approcha de la vitre. Il la tâta, la reluqua et pour finir, il la caressa. Lentement. Doucement. Comme pour prendre possession de la matière. Comme pour préparer une tactique. Mais Natsu la regardait éternellement.
Cependant, son regard changea subitement. C'est alors que brusquement, il frappa cette stupide vitre qui le séparait de son amie. Il utilisait ses poings comme s'il était un Tygnon. Natsu faisait ressortir sa rage. Cette fureur qui trônait depuis ses dix premières années. C'était cette colère qui le permettait de continuer ce combat pour arriver à briser ce mur invisible. Le jeune garçon de seulement dix ans ne relâchait aucun de ses efforts. Il ne cessait de frapper de toutes ses forces. Fuyu se leva immédiatement et lui hurlait d'arrêter, mais Natsu ne voulait rien entendre. Les paupières de la jeune fille se faisaient transpercer par des larmes sincères et honteuses ainsi que désolées : elle pensait que tout était de sa faute, pas de la sienne. Mais ce n'était la faute de personne. Seulement celle du chef. Celle du maître. Celle du Pokémon. Pas la leur. Pourtant, c'était eux qui en subissaient les fâcheuses conséquences, et ça, Natsu ne pouvait pas l'accepter. Soudain, il tomba à terre, essoufflé d'avoir tant frappé sans arriver à délivrer une minuscule faille.
"Ca va, Natsu ?! Arrête ça, je t'en supplie, tu te pourris toi-même !
- Je me pourris pas ! C'est bon lâche-moi, j'essaie de trouver une solution donc c'est bon, okay ?!"
Fuyu fit une mine d'enfant triste. Elle se résigna et baissa les yeux. Puis elle afficha un regard désolé. Mais seulement, elle n'était plus une enfant pourtant. En elle, la jeune muse savait qu'elle avait grandi. Elle avait mûri. Oui. Pour son bas âge de onze ans et demi, elle était mûre. Ni trop, ni pas assez, elle l'était. C'était seulement ça qui comptait pour elle.
"Non, Natsu. Non. T'as tort, conclut-elle, avec un air bien sérieux."
C'est alors que son jeune ami regarda le plafond. Un trou laissait passer un filet de soleil. Il le fixa, le reluqua, sans lâcher son faible regard. Brusquement, la lumière commença à transpercer sa bouche ouverte et ses yeux. Fuyu hurla à la mort. Apeurée par cet évènement si soudain, elle frappa contre la vitre invisible. De toutes ses forces. Sans relâcher ses maigres efforts. Seulement, elle était encore plus faible que Natsu : elle n'avait donc aucune chance de briser cette prison de verre. Cependant, elle tapait de toute sa rage.
"Natsu !! hurla-t-elle."
Le petit garçon se faisait comme emplir de la lumière, puis, il disparut subitement. Fuyu sautait, se tenant la tête, hurlait, criait, pleurait... Elle ne se contrôlait plus. Comme lors de l'accident de Natsu. Elle n'acceptait pas qu'on lui fasse du mal, à ce pauvre gamin de seulement une dizaine d'années. Mais elle comprit. Elle se calma peu à peu, se laissant tomber lentement sur ses deux genoux. Elle murmura alors :
"La vie... Elle est... si injuste..."
Elle s'endormit alors, les larmes qui avaient trempé ses joues pâles et creuses. En pleine nuit, elle disparut à son tour également. L'Arcanin, le chef de ces enfants, accourra après la disparition de ces deux esclaves. Il s'en ficha pourtant totalement. Il avait juste demander la fouille de leurs cellules, afin de ne pas se faire avoir par ces deux gamins.
Une dizaine d'années plus tard, personne ne revit ces deux enfants. Personne. Pas un chat, pas un homme. Personne. Mais pourtant, ils ne pouvaient pas avoir disparu comme ça. Ils se cachaient sans doute.
"Dis Fuyu, pourquoi on est devenu comme ça ?"
C'était Natsu. Il parlait à son amie. Celle-ci avait pris dix années de plus, comme si elle n'avait jamais été "supprimée" de ce monde. La jeune fille était habillée d'une longue robe argentée suivie de grandes cuissardes noires. Elle portait des gants noirs et était coiffée d'un diadème avec des perles brillantes qui soulevait une longue chevelure brune tirée en arrière et en queue de cheval avec diverses mèches blondes. Son âge avoisinait les vingt ans, et Fuyu s'était maquillée avec des couleurs pâles dans les teintes roses pour les joues puis les lèvres mais avec de l'argent pour le contour des yeux réhaussé par un peu de crayon noir. Des petits dessins de vagues qui tournaient ainsi qu'une lune lui étaient dessinés près de son regard. Natsu, lui, était torse nu. Il était superbement bien musclé et assez carré des épaules, mais il portait des mitaines qui allaient d'un dégradé de couleurs chaudes, avec un petit soleil schématisé sur le dos de ses deux gants troués. Son pantalon était représenté par des flammes, ainsi que des rayons, mais il finissait replié sur lui même, avec une base blanche et jaune, pour montrer la chaleur. Ses pieds étaient habillés par des tongs, avec un fond qui représentaient une troisième fois des couleurs plutôt chaudes. Ses cheveux étaient en bataille, au naturel, mais légèrement recoiffés et ils présentaient des mèches rouges, oranges et blondes. Les deux meilleurs amis étaient assis non loin de la mer, au bord d'un petit muret. Ils admiraient le magnifique crépuscule qui perçait le ciel à cette heure-là. Fuyu mit sa main sur la main de Natsu, puis celui-ci rougit en répondant :
"Je ne sais pas... Sans doute parce que la vie a été injuste envers nous pendant notre enfance, et que nous avoir séparé a sans doute tout déclenché.
- Peut-être. Tu regrettes toute cette aventure ?
- Jamais je regretterai d'avoir été un esclave. C'était horrible franchement... Heureusement, c'est terminé ! assura-t-il.
- Je te trouvais pourtant mignon étant petit, ahah ! ria Fuyu.
- J'avais seulement dix ans à l'époque, ma vieille ! Tu dois te faire à la raison que je ne suis plus le mignon petit enfant que tu as rencontré ! sourit son ami.
- Oh, tu sais, tu as beaucoup changé. Je me rappelle de tes dix ans et de mes onze ans comme hier, Natsu...
- Je le sais bien, Fuyu. Enfin, je devrai plutôt dire Tsukiko, dorénavant, se reprit l'homme aux cheveux ébouriffés.
- C'est dur de revenir à la réalité, et de se dire que maintenant on doit s'appeler autrement. N'est-ce pas Yoko ?"
La jeune femme lui sourit, tandis que son meilleur ami le lui rendit. Ils se voyaient tout le temps, à présent. C'était normal, ils "travaillaient" au même endroit. Cette histoire était la légende qu'on racontait de nos jours. Fuyu et Natsu, Tsukiko et Yoko. Les enfants de la lune et du soleil. L'homme, l'étoile brûlante. La femme, le croissant brillant. Chacun choisi pour leur force de caractère et pour leurs sentiments d'amitié qui leur ont forgé des qualités incomparables. Leur mission était très simple : empêcher des forces maléfiques détruire le monde. Jusqu'à maintenant, rien ne s'était produit. Ils avaient dû changer de prénom pour représenter leur travail. Yoko signifiait "enfant du soleil", en japonais, tandis que Tsukiko voulait dire "enfant de la lune". Cela les représentait parfaitement. Et pourtant, on pouvait les croire heureux, mais pas totalement. Yoko avait l'impression d'être rongé par l'habitude, rongé par toutes ces histoires bidons et surtout, rongé par un manque. Mais pas n'importe lequel. Tsukiko était aussi mal depuis quelques temps. Et ça, le jeune homme l'avait bien remarqué.
"Dis Tsukiko... Qu'est-ce que tu as ? demanda Natsu, intrigué.
- Rien. Pourquoi ?"
Il savait bien qu'elle mentait. Pourtant, il ne creusa pas le chemin, comme pour laisser l'intimité de Fuyu en paix. Laisser l'âme de la jeune femme seule.
"Pour rien. Pour rien, se résigna le jeune homme."
C'est alors que Natsu prit la main de son amie, puis commença à courir. Il allait vers la direction de la plage, où le soleil n'était pas encore couché, mais il n'allait pas tarder. Lorsque les deux amis arrivèrent sur la plage, juste à côté des vagues qui faisaient des vas et viens entre la mer et le sable fin, ils s'arrêtèrent, essoufflés. Fuyu s'assit par terre, lassée, tandis que Yoko se coucha sur le dos, les mains derrière la tête. Son amie le regardait, étonnée de sa réaction.
"Et toi alors... Qu'est-ce que tu as ?
- J'ai vraiment l'intention de tout t'avouer Fuyu. Vraiment. Je sais ça depuis trop longtemps mais j'avais pas le droit de t'en parler... Peut-être qu'on ne sera plus comme maintenant si je te dis tout, mais je n'ai pas le choix. C'est un poids trop lourd que je porte sur le cœur, et ça me hante l'esprit depuis un très bon moment. Je n'en peux plus. Plus du tout, avoua en une traite Yoko."
Fuyu baissa son regard, ainsi que sa tête. Ses cheveux vinrent se placer sur tout son visage. Natsu ne savait pas quoi faire. Il prit juste l'initiative de faire sortir son Pokémon de sa Pokéball fétiche. Une forme commença à se dessiner. Autour d'elle, un rayon rouge, qui la délivrait. La jeune femme fit de même, en laissant son Pokémon favori laisser se promener. Une seconde silhouette floue apparut. Alors que les deux créatures n'étaient pas encore sorties totalement, deux cris s'étouffèrent en même temps :
"Solaaaaroc !
- Selerooooc !"
Le Pokémon de Yoko était une sorte de soleil en pierre. Celui-ci était orange, mais ces antennes faisant des formes étranges semblaient entre du jaune et du doré. Il s'appelait Solaroc. Quant à la créature de Tsukiko, c'était une lune dans les tons beige-jaune. Un croissant de lune à dire vrai. Il avait deux yeux rouges à l'intérieur et noir autour. En guise de nez, cette lune avait une sorte de pique. C'était un Seleroc, le Pokémon Lune. Tous deux allèrent se promener en faisant une sorte de danse. C'était la fin du printemps. Ils faisaient donc la danse de l'amour, pour représenter leur amour.
"Tsukiko... Je... se lança Yoko, tout en jetant des regards de doute aux deux Pokémon liés.
- Je comprends Natsu..."
Son ami lança alors un regard étonné. Cependant, il continua de parler. Mais ce qu'il ne savait pas, c'est que Fuyu reprit à la même seconde que lui :
"Je t'aime."
Les amis se regardèrent. Fuyu se mit à pleurer, Natsu la prit dans ses bras tendrement. Tous deux se fixaient. Tous deux étaient heureux. Tous deux étaient amoureux. Tous deux étaient ensemble. Le jeune homme approcha ses lèvres de celle de la jeune muse. Ils s'embrassèrent tendrement, en face d'un soleil couchant dans un ciel dont le crépuscule se reflétait dans l'eau claire et colorée représentant cet amour.
Deux destins. Deux personnes. Deux amis. Mais un seul et unique amour sincère, qui les lia pour toujours.