Le manoir Rocket
Le manoir se dressait devant eux, majestueux, trônant en plein centre d'une importante propriété encore verdoyante, dans la douceur de cet hiver clément qui planait sur la campagne londonienne. Tom s'avança légèrement, tendant le cou vers l'entrée principale sans pour autant s'en approcher.
-Aucun piège... pas de comité d'accueil... c'est quoi ce délire ?
-Souviens-toi des paroles de James dans la grotte. Il t'a invité à venir régler ce conflit, il ne cherche pas à te piéger tout de suite, répondit Sylvain.
-Après tout... pourquoi pas, fit le jeune homme en s'avançant vers la porte cochère.
-Tom ! S'affola Marie.
-Bah quoi ! Je sonne ?
-Euh...
La porte s'ouvrit lentement et un vieux laquai en smoking s'avança.
-Vous êtes Monsieur Bratin ? Demanda-t-il.
-Oui, et voilà mes... euh... amis.
-Veuillez me suivre s'il vous plait.
Le groupe obéit et Maxime se passa une main sur la figure.
-On nage en plein délire.
Ils montèrent un grand escalier central puis le majordome ouvrit une porte à double battant, laissant apercevoir une salle à peine éclairée. En son centre, une grande fontaine richement décorée d'où partaient cinq couloirs. Le vieil homme s'arrêta.
-Malheureusement, My Lord ne désire rencontrer que Monsieur Bratin et sa concubine. J'invite les amis de Monsieur Bratin à bien vouloir patienter dans les pièces annexes. Chacun de ces couloirs mène à une salle où ils pourront l'attendre.
-Lesquels ?
-Peu importe à vrai dire.
-Très bien, on est quatre, alors on en prend chacun un, ordonna Maxime, je sens le coup fourré.
-C'est idiot de se séparer, grogna Miranda.
-En se séparant, il y a plus de chance qu'il reste un survivant, répondit Tobias.
-C'est joyeux... bon, je prends ce couloir, bonne chance Tom, mes salutations à James... pfff...
Le majordome accompagna Thomas et Marie le long du couloir central. Arrivé devant une lourde porte en bois, le vieil homme l'ouvrit sans la franchir et laissa passer le couple en s'inclinant légèrement.
-My Lord vous attend dans cette pièce, je vous laisse.
-Merci Arthur...
-Comment connaissez-vous mon nom ?
-Dingue ! J'ai dit ça au hasard ! Enfin bon...
Le couple avança. La pièce était circulaire et une sorte d'estrade, elle aussi ronde, se trouvait en son milieu. Tom et Marie ne virent pas de suite James, car il était au bout de la salle, face à une grande armoire métallique aux teintes grises, de laquelle il avait ouvert un tiroir et dont il observait attentivement le contenu.
-Je suis un clone.
-Oui, bonsoir également, répondit Tom.
-Un clone, continua James d'un air absent.
-Un clone de qui ? Margaret Thatcher ?
-De mon père.
-Ah... désolé. Je suis sûr que ça fera des circonstances atténuantes si tu te rends.
-Quel génie. Je le haïssais, mais pour cloner un être humain... le pouvoir de la lignée des Rahikot était bel et bien en lui.
-Génial...
-Et toi Thomas...
James referma le tiroir et se retourna.
-Ton père avait le pouvoir de prendre soin de toi... de te donner des conseils... c'est pour cela que tu as pu le voir en rêve. C'est pourtant ridiculement insignifiant par rapport à l'oeuvre de mon...concepteur.
-Tu es complètement cinglé.
James avança soudain très rapidement vers le centre de la pièce et l'estrade, en faisant de grands gestes avec les bras.
-Un match Pokémon ! Allez Baraïto ! Prends ton meilleur Pokémon ! Celui qui gagnera aura tous les droits ! Je m'inclinerai et mettrai fin aux Rockets si tu l'emportes.
-Ah bah si tu tiens parole c'est cool alors.
-Viens sur cette estrade !
* * *
Miranda ouvrit la porte au bout de ce couloir et fut soudain aveuglé par une lumière étincelante qui l'obligea à fermer les yeux. Lorsqu'il les rouvrit, il n'eut que le temps de voir une ombre fuser sur son visage avant de s'écrouler plus loin, heurtant le mur. Il ne put que reprendre ses esprits et roula sur le côté pour éviter le coup de pied vertical plongeant sur lui. Miranda recula à toute vitesse pour observer avec une vision plus lointaine et plus large son mystérieux agresseur : une vraie masse. L'homme devait faire deux mètres et portait des habits si simples et si grossiers que l'on aurait pu penser qu'il s'agissait de haillons. Son visage massif observait Miranda d'un air absent, ses cheveux secs et bruns étaient éparpillés un peu partout sur sa tête carrée. Miranda passa son bras sur son nez et remarqua que la manche de son imper bleu était recouverte de traces de sang.
-Tu m'as pété le nez ! C'est malin !
-Je suis O'Jay, je vais te tuer, c'est ainsi.
-Pas d'accord ! Monaflémit, montre-lui tes biceps !
Mais la Pokéball émit un simple click sans libérer le Pokémon du père de Thomas.
-Quoi ?
-Annihilateur !
O'Jay montra une sorte de sèche-cheveux dont l'extrémité consistait en une sorte d'ampoule qu'il tenait dans les mains.
-Je connais ça ! S'exclama Miranda. Les premiers modèles sont sortis au Japon… Ca bloque complètement le mécanisme d'ouverture des Pokéballs... Alors les miennes sont HS pour un bon bout de temps !
-Exact. Et maintenant, je vais tout simplement te tuer. C'est la vie. C'est comme ça.
O'Jay avança d'un pas lourd vers Miranda en faisant craquer ses articulations.
-Je suis dans de beaux draps moi...
* * *
-Bon, on abandonne, on ne peut plus rien faire. J'appelle le général.
-Attendez, si les militaires s'en mêlent, les factions terroristes qui ont joins les Rockets demanderont de l'aide à leurs pays, on risque de créer un conflit mondial !
-Je ne peux pas me permettre de continuer à perdre autant d'hommes.
-Léon, fit Félix, dis quelque chose !
-Félix… Tu vois bien l'issue qu'est en train de prendre cet affrontement… tout comme moi. C'est au-delà de notre… pouvoir, tout comme celui de la police.
-On vient à peine de trouver leur centre de communication Léon ! Il suffit qu'on le neutralise et ce sera bon ?
-Et comment ? Demanda le capitaine du SWAT. Il est surprotégé. Il faudrait carrément bombarder la zone.
-Mais nous sommes à quelques kilomètres des habita…
-J'étais ironique Félix, tout ça pour vous faire comprendre que ce n'est plus de notre ressort.
Une ombre apparut derrière les trois hommes qui se retournèrent alors.
-Razor ?
-Non, je ne suis plus un Anti, plus de nom de code s'il te plait.
-Qu'est-ce que tu fais là ? La zone est bouclée.
-Je vais là où je veux… Et je viens vous aider.
-Tu viens de dire que tu n'es plus un…
-Ils ont détruits ma vie, ma famille… Je pensais retrouver une raison d'exister, un peu loin de l'organisation, mais apparemment c'est impossible. La logique voudrait que je fasse tout pour que le conflit qui oppose les Antis aux Rockets ne s'arrêtent jamais… mais je suis las Léon.
-Qu'est-ce que tu racontes Nico, tu as des amis chez…
-Je n'ai pas d'amis.
Il s'avança vers les docks où des tirs de feu fusaient de toute part.
-Lorsque le hangar qui leur sert de communication sautera, vous n'aurez qu'à les assaillir de toute part en même temps, ils seront désorganisés.
-Nico, arrête !
-Léon, j'ai laissé mes Pokémons chez toi, je te fais confiance.
Il partit tête baissée vers les docks remplis de Rockets, évitant les tirs. Léon, complètement bouleversé, le regarda courir, touché de plein fouet par des dizaines de balles mais continuant d'avancer, sans se soucier des blessures. Il plongea dans un hangar lointain, celui qui semblait être le post de communication des Rockets. Au même moment, un groupe de policiers arriva en courant vers Léon, Félix et le capitaine du SWAT.
-Capitaine, capitaine ! Un homme s'est introduit dans le périmètre !
-Je sais… nous… il est connu.
-Capitaine, continua le policier en tentant de reprendre sa respiration, il est passé par la zone de sécurité que nous avons installé en périphérie !
-Et alors ?
-IL EST BOURRE D'EXPLOSIF !
-Quoi ?
Une immense détonation se fit alors entendre, et le centre de communication des Rockets sembla s'affaisser sur lui-même, comme un gâteau mal cuit.
-NICO ! Hurla Léon.
-Capitaine, fit Félix en tentant de garder son calme. Je crois que vous pouvez ordonner un assaut collectif…
-Je… à toutes les unités, déployez-vous immédiatement ! Le hangar de communication a été neutralisé, je répète, déployez-vous !
-Bien compris !
-Nicolas… c'est pas vrai, murmura Léon les yeux écarquillés.