L'invincible champion
-Hello !
-Hello champion.
-J'ai bien dormi !
-Tant mieux.
-Je suis désolé, hier on a pas trop parlé, tout s'est passé si vite… j'avais l'impression de ne plus rien calculer !
Marie s'approcha de Thomas et l'embrassa sur le front.
-Ca va mieux maintenant ?
-Oui ! Mais… Je sais pas si mes Pokémons sont aptes à combattre ce soir…
-N'y pense plus. T'as vu comment tu m'as battu ? Je serais toi je serais confiante ! Enfin confiant.
-Ouaip… C'est drôle… dire que j'ai suivi tous les matchs de Jean à la télé en 2002, pendant le championnat Européen… Et l'année dernière, pour le Mondial…
-Ca veut dire qu'il n'est pas le seul à savoir comment tu combats.
-Oui, mais lui il m'a vu en vrai, pas seulement à la télé. Y a pas mieux placé qu'un arbitre pour savoir comment joue tel ou tel type. Et puis, cette histoire de… enfin le fait que de toute façon tout le monde s'attend à ce qu'il gagne.
-Oui mais c'est là que c'est bien ! Parce que tu gagneras et tu surprendras tout le monde. Rowi, mon chéri deviendra le Champion de France.
-Arrête tes bêtises Marie…
-Arrête d'être sérieux, détends toi ! Sois comme d'hab !
-Mouais… t'as raison. Ca te dit qu'on aille se balader dans Paris ? Je vais devenir fou si je reste ici !
-Oké ! Ca roule !
Moins d'une heure plus tard, le jeune couple marchait tranquillement dans Paris, s'arrêtant ça et là, riant, oubliant que hier encore, ils étaient rivaux. Mais était-ce une réelle rivalité qu'il y avait eu. Il s'agissait pour eux plus d'un défi à grande échelle que d'une bataille rangée. Ils ne pouvaient de toute façon pas se résoudre à devenir ennemis, même si c'était juste au niveau du dressage. Leur complémentarité était telle que dans n'importe quelle domaine, ils éprouvaient plus de satisfaction à s'entraider plutôt qu'à se défier.
Les heures passèrent, et Tom voulu aller au Stade de France. Marie lui fit remarquer qu'ils avaient encore trois heures devant eux, mais le jeune homme insista. Ils arrivèrent devant l'édifice deux heures avant que le match ne commence. Mais déjà, quelques personnes traînaient autour du stade. C'est là qu'ils virent un attroupement autour de deux silhouettes. Ils s'approchèrent. Un Mangriff glissa le long du sol et s'arrêta devant le couple, les yeux fermés, visiblement inconscient. Ils n'eurent pas le temps de voir l'autre Pokémon, il venait de se faire rappeler. Le Mangriff ne tarda pas, lui non plus, à retourner dans sa Pokéball, et Thomas vit avec stupeur qui en était le propriétaire : Laurent Ztavolieski. Il semblait désemparé et des chuchotements parcouraient la foule. Son adversaire n'était autre que Jean Deno. Il souriait tranquillement.
-Désolé de te dire ça, mais que ça te serve de leçon. Ne me défie plus ainsi.
Le champion sortit du petit cercle créé par la foule et s'arrêta quelques secondes. Il venait d'apercevoir Thomas à qui il fit un petit signe en tapant deux de ses doigts sur son front, avant de repartir, rentrant dans le stade. Le couple s'approcha de Laurent, il était tétanisé.
-J'ai… j'ai voulu le défier, parce que j'étais trop… trop déçu de n'avoir pas même réussi à aller en demi-finale et… Ce dresseur est trop fort. Il y a un monde entre son niveau de dressage et le mien.
-Allons Laurent, ça va aller !
-C'est Thomas n'est-ce pas ?
-Oui.
-Abandonne… Je sais pas…après avoir combattu contre lui, je sens que… le dressage n'est pas pour moi.
-Ca t'arrive jamais de te prendre des misères dans la figure ?
-Je…
-C'est la faiblesse des bons dresseurs, fit une voix derrière eux.
Un homme arriva, les cheveux courts, blonds, de petites lunettes de soleils devant les yeux. Il portait une chemise ouverte rouge avec des fleurs, un short beige et des tongues. Thomas le reconnût de suite.
-Nicolas Darras !
-Hey, ta figure me dit quelque chose.
-Oui ! On s'est rencontré il y a deux ans dans un bateau-mouche lors du Pokéfight ! Et quelques mois plus tard, tu m'as torché dans ton arène de Paris.
-Je m'en souviens.
-Quelle gamelle j'avais pris ce jour là.
-C'est ce qu'il manquait à notre ami aujourd'hui, fit Nicolas en désignant Laurent du doigt.
-Me manquer quoi ?
-Tu es un bon dresseur, un trop bon dresseur. Lorsque tu perds, tu perds avec panache… A ton regard, je suis sûr que tu n'as jamais connu de défaite cuisante. C'est ce qui manque aux types comme toi. Dès que vous prenez une branlée, vous perdez vos forces, alors que le match n'est pas terminé.
-Mais je…
-Tu vois ! J'aurais dit ça avant le match, tu m'aurais défié du regard, là tu te caches limite. Jean lui, connaît mieux la défaite que toi.
Tom s'approcha de Nicolas Darras, le champion d'arène de Paris.
-Dis, tu connais Jean ?
Il eut un sourire un peu moqueur avant de prononcer cette phrase qui glaça tous ceux qui l'entendirent :
-C'est mon frère.
-Quoi ?
-Ca paraît évident maintenant qu'il le dit, remarqua Marie. Même couleur de cheveux, mêmes yeux… Mais pas le même nom de famille.
-Il a changé de nom… Depuis un problème avec notre famille… Venez, y a un petit bar dans le stade, je vais vous raconter ça.
Nicolas fut assez évasif sur la vraie nature de la séparation de Jean avec sa famille et se concentra surtout sur qui était Jean Deno.
-Il est trop gentil pour ce milieu. Il n'est pas fait pour être champion, et lui-même reconnaît qu'il en a assez d'être ici. Mais des gens plus haut placés que lui gagnent beaucoup d'argent sur sa tête et il ne peut pas arrêter. Et s'il se laissait battre pour qu'on lui prenne son titre, ses agents lui feraient certainement un procès.
-C'est scandaleux ! S'indigna Laurent.
-Oui… C'est surtout que Jean n'a jamais su bien s'entourer. J'ai… Disons que… J'ai toujours regretté de ne pas pouvoir prendre sa place. Les choses sont mal faites vous savez. Jean serait bien mieux dans une arène, et moi je ne me laisserais pas marcher sur les pieds comme lui.
-Ah…
-Si je suis venu ici, c'est parce que j'espère qu'il va perdre. Non pas par méchanceté, mais parce que s'il perd vraiment, il pourra sortir de ce milieu.
-S'il perd et que je gagne, je risque d'être dans le pétrin comme lui ?
-Non, ça n'arrivera pas. Le milieu a été épuré, les gros pontes qui gagnent du fric derrière le dos des gens n'existent plus trop dans le dressage. Jean a les derniers spécimens de ce genre avec lui.
Il se mit à rire.
-Tom, il faut que tu gagnes.
-A quoi bon, je n'ai pas réussi à te battre.
-D'une part, c'était il y a deux ans, d'autre part… Je suis plus fort que mon frère.
-Quoi ?
-C'est une conviction. Lorsque nous nous battons, nous sommes à égalité, mais je sais que j'ai plus d'expérience, et plus de hargne que lui.
-Je…
Thomas serra les poings. Il y a deux ans, lorsqu'il avait combattu Nicolas, il avait perdu, mais pourtant, le match, sans être serré, n'avait pas pour autant dépassé Tom. Peut-être était-il de taille, avec les progrès qu'il avait fait, à se mesurer à Jean. Nicolas détruisit ses ambitions immédiatement.
-Quand je combats dans mon arène, je baisse mon niveau pour permettre aux meilleurs dresseurs de remporter le badge Lumière, mais sinon, je peux vous assurer que j'ai au moins le même niveau que Jean.
-Génial… chuchota Tom, ironique.
Il regarda sa montre, le match était dans une heure. Il lui fallait se présenter à l'accueil. Il salua Laurent et Nicolas, et embrassa Marie. Après s'être présenté, il attendit dans le hall. Des voix familières l'appelèrent. Toute la bande de hier était de nouveau réunie.
-Tom, je veux te parler quelques secondes, fit Sylvain.
Il approcha et s'en alla avec le garçon, à l'écart.
-J'ai visionné pas mal de cassettes de Jean. Je dois avouer qu'il est exceptionnellement fort.
-Merci, j'ai pas le moral au beau fixe déjà…
-Woh ! On dirait pas que je t'ai entraîné pendant tout ce temps !
Il lui prit la tête et le mis de force devant un miroir.
-Regarde-toi ! T'es un winner ! T'as une copine qui t'aime, des amis, de la famille, et un coach génialissime. C'est clair ? En plus ton nouveau look Boys Band déchire tout !
-… T'as raison chef ! Je vais gagner !
-J'aime mieux ça ! Vas-y d'amblée à fond.
-Je sais !
-S'il prend le large, laisse-lui le temps de te narguer un peu et revient comme un fou !
-Je sais aussi !
-Bon, soyons honnête. Je ne sais pas si tu vas gagner.
-Pardon ? Je croyais que tu savais toujours tout !
-Et bien là j'arrive pas à me faire une idée. Il est vraiment fort. D'un autre côté tu es Thomas Bratin.
Sylvain parût réfléchir.
-Pense à Marie, ça devrait suffire.
-Hein ?
Sylvain partit rejoindre le groupe. On emmena Tom dans le couloir. Il attendit plusieurs minutes, puis on lui indiqua qu'il pouvait sortir. Une fois de plus, il gravit les marches et se retrouva à l'air libre, dans le stade, sur sa plate-forme de dressage.