Vipère au poing
« Ponyta !!! Hurlai-je désespérément. Esquive le ! Par pitié ! »
La jument fit un bond. Quelques millièmes de secondes plus tard, un rai lumineux dévastateur éradiqua la zone où le pokémon se tenait quelques temps auparavant. Il aurait pu le tuer si facilement. Mon cœur battait tant qu'il me sembla qu'il allait exploser. Des nombreuses larmes coulaient sur mes joues. Des flots incessants... L'une d'elle vint effleurer le coin de mes lèvres. Je passai ma langue dessus lentement. Le simple contact du fluide salé me redonna espoir lorsque celui ci aurait du me quitter définitivement... Je me concentrai de nouveau et mis toute mon énergie au service de Ponyta qui livrait une bataille acharnée contre... contre une chose que je ne pouvais identifier. Enchaînant sauts, esquives, offensives, mouvements de défense, le pokémon rayonnait.
Je posai un genou à terre tenant mon bras comme si j'avais peur qu'il ne se détachât. Un filet de sang coula le long de ma tempe. Je ne contrôlais plus mes mains. Elles tremblaient de manière inquiétante, parcourues de spasmes. Je vis la fin arriver. Quel dommage, j'aurais voulu aller plus loin... Mon souffle se fit plus court, se mut en un râle moribond. Et Ponyta continuait de rayonner... seule...
***
J'ouvris les yeux et pris une immense inspiration. Les réveils en sursaut avaient le don de me mettre de mauvaise humeur... Je passai une main sur ma poitrine et une autre sur mon front. Il était chaud. Inquiète, je m'examinai rapidement dans la petite glace clouée au mur à côté du lit. L'image qu'elle me renvoya me fit vivement reculer... Mon visage s'était paré d'une désagréable couleur rougeâtre et les traces de l'oreiller, encore imprimées sur ma joue gauche me donnaient une mine abominable. J'avais dû pleurer aussi... Pour quelle obscure raison ? Mon bras était aussi chaud que mon front était trempé et il me picotai...
« Espèce de corps déglingué. » Maugréai-je.
Je pris le temps de détailler la chambre, chose que je n'avais pas eu la force de faire la veille compte tenu de la journée épuisante que nous avions vécue. Claire, les murs tartinés de peinture beige appliquée sans aménité, la petite pièce ronde n'en restait pas moins accueillante. Sur mes jambes, d'élégants draps mauves répandaient une douce odeur poudrée de lilas sous les rayons du soleil matinal. Je m'étirai en baillant lorsque je me souvins que ma blessure n'était pas encore complètement cicatrisée. La douleur revint. Je serrai la mâchoire puis tâtonnai afin de trouver les calmants qu'on m'avait dit de prendre si ce genre de souffrance venait me tarauder. J'en avalai un tout rond, sans eau, et je le sentis glisser difficilement dans ma gorge dont il racla les parois. Je toussai bruyamment, espérant que le goût désagréable s'estomperait avec l'air que je recrachais mais rien n'y fit.
Malgré tout cela, je me sentais en forme, prête à m'envoler vers de nouvelles aventures. Quelle heure pouvait-il bien être ? Nous devions reprendre la route aujourd'hui et il aurait été malvenu de s'attarder si Lionel était déjà prêt.
Je m'habillai rapidement, rassemblai mes affaires et une fois ceci fait, massai mon visage une petite dizaine de minutes. Il fallait arranger cette tête avant d'offrir son image au reste du monde. Les traces de l'oreiller et une couleur de peau décente retrouvée, je descendis l'escalier en trombe, manquant de renverser un petit garçon qui jouait au cheval sur la rambarde en hurlant comme un vendeur de cacahuètes un samedi soir. Quelle idée... Je soupirai. En arrivant dans le hall du bâtiment, Joëlle me gratifia d'un large sourire : ce « massage de fortune » avait eu le mérite d'être efficace. Le petit filet d'air qui circulait espièglement dans la salle me décoiffa avec douceur et m'incita à regarder par la fenêtre entrouverte... A ma grande surprise, la route avait déjà été refaite. Et dire que je n'avais absolument rien entendu...
« Bonjour ! Il fait un temps radieux ce matin ! S'égosilla Joëlle.
- Oui... Fis-je en réprimant un bâillement. Les travaux sont finis alors ? C'est étrange, il n'y a pourtant pas eu de bruit cette nuit.
- C'est normal ! Répondit-elle en souriant. Une équipe du Mont Sélénite est arrivée aux alentours de vingt et une heures. Ils avaient, entre autres, un Kadabra et grâce à lui, ils ont entouré l'Aire d'un dôme insonorisé. A l'extérieur, je peux vous garantir que ça faisait un potin pas croyable mais au sein de la protection, le calme olympien. Les Abra dorment énormément, environ dix-huit heures par jour à l'état sauvage et ce dans n'importe quel environnement. Ils ont développé des pouvoirs qui leur permettent de sommeiller tranquillement, à l'abri de n'importe quelles nuisances sonores. Leurs évolutions conservent ces capacités bien utiles dans de tels cas, expliqua t-elle en dodelinant de la tête. J'en déduis que vous avez bien dormi !
- Si on veut. » Murmurai-je.
Sans insister davantage, la jeune femme me tendit la Ball de Magicarpe, ainsi qu'un dossier où étaient répertoriées les caractéristiques de mon pokémon ainsi une liste de symptômes... vide : à remplir en cas de maladie, puis à remettre au gérant d'un centre pokémon. Elle était définitivement parvenue à m'arracher à la contemplation béate de la fenêtre. Elle m'indiqua d'un gracieux mouvement du menton que je pouvais profiter d'un petit déjeuner complet - et copieux ! - si je me rendais au coin Cantine et me confia une petite carte plastifiée - « Elle vous servira à commander. ». Cette proposition fut accueillie avec joie : un peu plus et les gargouillis de mon ventre auraient réveillé l'Aire entière.
Le nom du lieu – la Cantine - était bien mal choisi. Il renvoyait immédiatement à une salle remplie de bruit, de gens parlant pour ne rien dire autour d'une nourriture infecte et grasse, que les employés affalés sur des comptoirs délavés, un chiffon crasseux au bras et un air agacé fichés sur leurs visages contrits, délaissaient...
Or, les noms des choses cachent souvent très bien ce qu'elles sont en réalité, que le résultats soit bon ou mauvais. L'image ragoutante que je m'étais faite de cette Cantine disparut comme une traînée de poussière sous le balai de ma mère lorsque j'y posai un pied. La pièce était claire, lumineuse, très vaste, agréable. Quelques fresques et tableaux originaux égayaient les grandes cloisons jaune tournesol surmontées de petites décorations bleu lavande. Les quelques dresseurs et voyageurs attablés là riaient, discutaient tous de bon cœur. Et les effluves qui flottaient dans l'air... Du pain chaud, du sucre et des fruits... Cela constituait un réconfort qui n'était pas négligeable après ces longues journées de vadrouille à travers la forêt. Je me sentis soudainement dans mon élément. Le parfait remake de « Flora au pays des Skitty » : douceur et quiétude.
La surprise passée, j'entrepris de rejoindre le comptoir où un pokémon inconnu, visiblement nommé Ecremeuh - le nom était inscrit sur un badge collé à sa poitrine – s'affairait tranquillement puis zigzaguait entre les tables pour apporter les commandes des clients. Je m'assis sur un tabouret haut à dossier et observai le décor. Il y avait des verres partout et de toutes les tailles, des tasses, des choppes mais aussi plusieurs piles d'assiettes rutilantes parfaitement alignées les unes à côté des autres, des couverts argentés rangés dans de petits compartiments transparents. Le tout était agencé de façon à ce que la vaisselle fasse partie intégrante du mobilier en tant qu'objets de décoration, cela rendait l'atmosphère extrêmement conviviale et pendant un instant, je me crus chez moi.
Ecremeuh revint, me jaugea rapidement et finit par poser son regard sur la carte plastifiée que Joëlle m'avait donnée. Elle était plutôt jolie d'ailleurs. D'un mouvement de tête, le pokémon désigna une machine qui comportait une encoche où l'on devait faire glisser cette carte. C'était un petit appareil électronique blanc cassé qui trônait fièrement au milieu d'une montagne de minuscules bouts de papier griffonnés à la va-vite : certains étaient froissés ou déchirés, sans doute des commandes achevées. Je me déplaçai de quelques mètres sur la droite et fit ce que le pokémon attendait de moi. L'appareil lut le code et émit un « BIP » mélodieux. Ecremeuh s'égaya au son produit et son visage rougit alors que je rangeais la carte dans ma poche : il m'adressa un clin d'œil et me tendit le menu, solidement enserré entre ses élégantes pattes rosées qui ne relâchèrent leur étreinte que lorsque je l'eus saisi. Je parcourus rapidement le calepin des yeux, tout me faisait envie et j'aurais goûté chacun des mets présents sur la carte si j'avais eu de l'argent et un estomac assez grand : mon choix fut finalement des plus classiques et même des plus « économiques » Une grande tasse de chocolat chaud au lait Meumeu, deux croissants et un verre de jus de baie Stekpa. Ecremeuh désigna une place vide, située près d'une immense baie vitrée qui offrait une vue imprenable sur le Mont Sélénite et d'un large bassin ovale rempli d'une eau absolument limpide avant de m'y conduire.
« Ecremeuuuuuuuuuh ! » S'écria le pokémon.
Comme cela semblait signifier « Ne bougez pas, je vous apporte la commande. », j'obéis.
Je soupirai d'aise tandis qu'à ma ceinture, une pokéball s'agitait. Histoire de patienter, je lus rapidement le dossier remis par Joëlle que je tenais toujours contre moi et mémorisai les principales caractéristiques de mon pokémon puis, m'assurant que personne ne m'observait, je glissai le dossier inutile dans la poubelle. Devant l'insistance de Magicarpe à vouloir sortir, je ne résistai pas bien longtemps. J'appuyai sur le bouton de la ball, et le gros poisson se matérialisa devant moi, dans le bassin susnommé supposément réservé aux Pokémon aquatiques, en répétant son nom et me gratifia finalement d'un regard plein d'amour.
« Il t'en faut peu pour te satisfaire, hein ? » Fis-je.
« A toi non plus, il ne t'en faut pas beaucoup ! » Répondit-il les yeux brillants, sans émettre un son.
« Oui, tu as raison, à moi non plus. » Acquiesçai-je à voix haute, surprise de la répartie du pokémon.
Il était plus futé qu'il n'y paraissait en réalité. Un peu plus loin, un homme se retourna en un vif froissement de tissu à l'instant même où je terminais ma phrase. Il se tenait à quelques mètres de moi, mais pourtant, je ne l'avais pas remarqué en m'asseyant. Il portait un long manteau bleu nuit bien coupé et une élégante redingote mauve au col haut. Une paire de gants de cuir sombre étaient négligemment posés sur la table qu'il occupait et un chapeau violet surmonté d'une plume blanche touffue masquait une partie importante de son visage. De longs cheveux lisses, épais et soyeux, d'une agréable couleur brune dégringolaient en cascade sur ses larges épaules. L'une de ses mains tripotait doucement la grande mèche qui dépassait de son couvre-chef tandis que les phalanges de l'autre emprisonnaient vicieusement les barreaux dorsaux de la chaise en bois. C'était bien la seule personne de la salle dont l'apparence physique contrastait autant avec les tons pastels de la Cantine.
Il était beau. Très beau à n'en pas douter... Mais il émanait de lui une aura sombre. Derrière cette élégante allure de dandy guindé, je sentais son regard posé sur moi malgré le couvre chef qui masquait une grande partie de son visage, d'une pâleur excessive à en juger par le bout de menton dévoilé, et cela me glaçait littéralement. Il se racla la gorge et dès lors, je sus qu'il allait me parler. Faisant mine de pas le voir, je plongeai le nez dans mon sac à dos, comme si cette piètre activité pouvait me sauver d'une discussion que je ne souhaitais pas entamer.
« Vous... parlez seule ? Susurra l'homme, avec... avidité.
- Je m'entretiens avec mon pokémon, monsieur ! Peut-être que je parle trop fort ? Si c'est le cas, je vous prie de m'en excuser. » Répondis-je tremblante.
A ces mots, un sourire mesquin s'étala sur son visage, dévoilant une partie de ses dents qui me semblèrent l'espace d'une seconde pointues, blanches et aiguisées... Sa voix, au léger accent que je n'aurais su qualifier, résonna quelques instants dans ma tête. Lente, posée, envoûtante, grave et... déstabilisatrice, je me sentis à la place d'un Abo charmé par ces dresseurs virtuoses dont m'avait parlé Phil une fois. Pourquoi parvenais-je à extraire de cet homme une étrange impression, qui, plus elle se précisait, m'apparaissait comme profondément violente ?
« Et... il vous répond ? Poursuivit-il, presque salivant.
- Euh, oui. Je ne parle pas seule.
- Il vous répond sans émettre le moindre son...
- Il me semble que c'est ce que je viens de sous entendre logiquement, non ? Dis-je en haussant le ton, feignant d'être agacée par ces questions étranges.
- C'est tout à fait intéressant... Bien, je ne vous importune pas plus longtemps. A très bientôt... mademoiselle. » Souffla l'homme, sans paraître nullement affecté de ce ton si sec que je m'étais évertuée à employer.
Il se leva et les pans de tissu sombre de son large manteau l'enveloppèrent alors délicatement. Saisissant ses gants avant de les enfiler, il me gratifia d'un dernier regard et pas des moindres. Pour la première fois depuis le début de ce court entretien forcé, j'entrevis ses yeux, enfin... plutôt que des yeux, ce furent de larges pupilles oblongues et le mauve profond de ses iris... qui s'imposèrent à moi. Une seconde... Puis une autre... Mon cœur ne battait plus et le temps ralentissait. Portant sa grande main blanche à son chapeau et rompant ainsi la léthargie dans laquelle j'étais plongée, l'homme me salua respectueusement, sourit une dernière fois, lentement, avant de s'éclipser. Sa démarche était d'une légèreté incroyable. Il flottait presque sur le sol, aucun de ses muscles ne semblait sollicité et j'eus l'impression que même de dos, il continuait à m'observer avec attention. Je restai interdite un bon moment après qu'il eut disparu. Ce qui me frustrait le plus était sans doute de ne pas savoir pourquoi il me posait ces questions ridicules et surtout comment ou à nouveau pourquoi il avait créé un tel tourbillon d'émotions dans mon cerveau.
« Tu crois qu'il dort la tête en bas ? » S'exclama Magicarpe en riant, rompant ainsi mes tortueuses réflexions.
- Je... Je... La tête en bas ?
« Comme les chauves-souris ! »
- Mais ? D'ailleurs, c'est vrai que c'est drôle... Comment ça se fait que tu me répondes comme ça toi ? Je t'entends... parler dans ma tête.
« J'en sais rien. C'est p'tet normal, j'ai jamais eu de dresseur avant toi. »
Décrire ce que j'entendais restait complexe. Magicarpe avait la voix d'un bon vivant allègre et bedonnant d'une quarantaine d'années et il était vrai que jamais je n'avais vu de dresseur dialoguer avec son pokémon de cette façon. D'ordinaire, une compréhension totale n'était pas clairement possible.
D'après les connaissances humaines que j'avais acquises grâce aux livres de la Bibliothèque Nationale de Jadielle, un pokémon répondait au dresseur par une suite de grognements, de gestes. On pouvait étudier le comportement d'un individu lambda en se basant sur ses attitudes, le mode de vie pour déchiffrer ses intentions, et dieu savait combien les manuels traitant ce sujet pouvaient être légions dans les différents rayonnages de toutes les librairies.
De l'autre point de vue, on en savait déjà nettement moins. Neuf pokémon à travers le monde savent aujourd'hui parler notre langue, la « langue humaine » et une partie d'eux avait rédigé des ouvrages tentant d'expliquer le fonctionnement de cette communication vers les Humains. Si un pokémon normalement constitué comprenait les Humains également par le biais des gestes, de la chaleur corporelle, et de diverses expressions et attitudes, il était rare de voir des pokémon aptes à s'exprimer oralement et même par le biais du contrôle de la pensée. Sophie m'avait permis un jour de feuilleter un livre dans l'Enfer de la Bibliothèque, me faisait jurer de n'en toucher mot à personne. Aujourd'hui, je commençais à comprendre pourquoi toutes ces précautions étaient nécessaires.. Un dirigeant assoiffé de pouvoir, croyant aux fantômes et aux chimères et bonjour la décadence du monde... Rédigé par l'un des plus vieux scientifiques encore vivants à l'heure actuelle, un pokémon nommé Docteur Kazam, un vieil Alakazam que les gens du milieu nommaient tous « l'illuminé » tant ses théories paraissaient grotesques et surréalistes, ce livre était précieusement gardé dans les coffres et réservé à un nombre extrêmement restreint de personnes. Je gardais des souvenirs confus de cette lecture que je n'avais pu comprendre à mon jeune âge. Ce professeur n'avait jamais eu grand crédit auprès de ses confrères. Il vivait seul et reclus d'après ce que Sophie m'avait expliqué. Il parlait de l'existence de certaines exceptions de langage, des Humains et des Pokémon « hôtes »... Je ne me souvenais pas de ce que c'était.
Je commençais à me poser de sérieuses questions sur moi-même, ayant une totale confiance en ces manuels qui avaient forgé mon enfance et mon cerveau. Peut-être se trompaient-ils. Il fallait que j'emprunte ce livre à Sophie : elle me l'enverrai
Magicarpe fit quelques ronds dans l'eau pas inquiet pour deux sous : j'observai sa parade avec attention, comme un parent attendri au spectacle de fin d'année de son enfant puis Ecremeuh revint, les bras chargés de victuailles. Elle posa devant moi une énorme tasse remplie à ras bord, deux énormes croissants dorés et brillants ainsi qu'un énorme verre de jus de baie rougeâtre. Un « Bon appétit » pokémon me fut souhaité et la petite vache retourna vaquer à ses occupations. Je restai un instant interdite devant le plateau, nonchalamment installé sur cette petite table ronde et rempli de nourriture aussi appétissante pour le regard que je la supposais être pour le ventre.
J'avais une faim de Goinfrex et c'est à pleines dents que je mordis dans le premier croissant, oubliant ainsi miraculeusement l'étrange entretien. Ce que c'était bon. Je le trempai ensuite dans le chocolat qui manqua pour l'occasion de s'échapper de sa tasse et cette seconde bouchée fut encore plus savoureuse que la première : le goût des miettes ramollies dans le lait chaud... Magicarpe, qui avait cessé de nager me fixait, les yeux brillants. Je séparai le croissant en deux et lui en envoyai une moitié. Décidément, mes pokémon avaient d'étranges goûts pour... des pokémon.
« C'est trop bon, il y a de la drogue la dedans, plaisantai-je. Je ne sais pas avec quoi ils préparent cette viennoiserie mais crois-moi, Magicarpe, c'est dément.
« Merci, j'y ai gouté aussi ! C'est vrai que c'est excellent. »
Ce que la faim peut chambouler un Homme... Le jus de baie Stekpa glacé fut une réelle découverte. Sucré à outrance et véritable champ de bataille de plusieurs notes fruitées étranges, il fallait avoir le gosier bien accroché pour le supporter mais après le chocolat bouillant, c'était si appréciable. J'engloutis le reste du croissant, et rassasiée, je rappelai Magicarpe dans sa pokéball.
A présent, où était Lio ? Je déambulai un instant parmi les chambres du rez de chaussée, ne sachant pas où il avait bien pu dormir la nuit et je serais montée à l'étage pour poursuivre mes recherches si une flopée de jurons n'avait pas retenti à l'extérieur, devant le hall de l'Aire. Un petit attroupement s'était formé sans doute pour assister à un combat pokémon... Ah, ces dresseurs, toujours besoin de se battre pour se prouver qu'ils sont les meilleurs. Je me frayai un chemin parmi la modeste foule, jusqu'au lieu du duel, intriguée et intimement persuadée que Lionel serait parmi les spectateurs. J'arrivai au devant de la masse et cherchai le jeune homme des yeux. J'entendis une voix familière résonner et je tournai la tête vers l'endroit d'où elle venait : l'aire de combat. Je m'intéressai davantage à ce qui se passait sur le « ring » et je me frappai le front de consternation. « J'aurais du m'en douter » pensai-je.
Qui pouvait être assez barré pour combattre au sortir du lit à part Lio et... Mes yeux s'écarquillèrent à en rester coincés. Son adversaire n'était autre que le bonhomme au Rhinocorne : Sébastien. Il était mal parti... Lionel se battait avec Tortipouss et le Pokédex m'indiqua que l'autre pokémon était un Charmillon : cela devait faire un bon moment qu'ils luttaient. Et dire que là encore, je n'avais rien entendu.
« Fouet Lianes ! »
De grandes tiges vertes et solides allèrent emprisonner l'élégant papillon chatoyant. Au fut et à mesure qu'elles se resserraient, l'adversaire en apparence inoffensive s'étouffait. Tortipouss décida d'effectuer simultanément une attaque Charge afin de l'achever mais un débutant aurait compris que c'était peine perdue. Je n'aurais su dire pourquoi : il me semblait simplement évident que Tortipouss n'allait pas faire le poids.
« Para Spore puis Vent argenté ! » Fit la voix grave de Sébastien.
Une fine pellicule de poussière moirée paralysa la tortue en quelques secondes et doucement une multitude de rafales scintillantes se créèrent puis firent miroiter délicatement les lianes. J'étais émerveillée... Quel style ! Quelle élégance ! Quelle fluidité ! Le reste du combat avait-il été aussi splendide ?
Il y eut une petite détonation suivie d'un rayonnement éblouissant qui plongea le paysage alentour dans un véritable lac de clarté. Plusieurs pokémon fuirent les buissons environnants, effrayés par l'activité inhabituelle du lieu.
Lentement, la lumière se dissipa... Un nuage de poussière retomba lentement, laissant entrevoir le terrain de combat. La petite tortue était au sol, tandis que Charmillon voletait gracieusement autour de son dresseur, fier de sa victoire apparemment bien méritée. Les quelques personnes qui assistaient à la scène, cherchèrent un point de repère, désappointées par l'improbabilité d'un tel résultat... Leurs regards, tournés en désespoir de cause vers le firmament furent immédiatement captivés, emprisonnés par ce qui venait de se matérialiser juste devant eux.
Un superbe arc-en-ciel, apparu suite à l'attaque Vent Argenté, « flottait » là-haut : les petites particules scintillantes avaient joué le rôle de prisme puis décomposé la lumière solaire afin d'offrir à l'assistance ce si beau spectacle. Certains poussèrent des « Oh ! » admiratifs et de fervents applaudissements retentirent sous le soleil radieux.
Je sortis de la léthargie dans laquelle cet étrange scène m'avait plongée... Lio devait être dans un sale état : il n'avait jamais été bon perdant. Je le vis qui se précipitait vers son pokémon évanoui et, presque éploré, le serra dans ses bras longuement, une forte étreinte fraternelle qui signifiait tant de choses. Il finit par extirper une boite plate et circulaire de l'une de ses poches et enduisit la frêle carapace de son contenu : c'était le baume de Maman.
« Attaque basique, piège basique et tu tombes dedans à pieds joints... Schéma habituel. Et moi qui croyais avoir affaire à un dur... Néanmoins, je dois dire que c'est pas mal pour un début...
- Vous êtes d'une prétention innommable... » M'écriai-je.
Sébastien, surpris de mon intervention fit quelques pas dans ma direction et s'arrêta devant moi, plantant son regard dans le mien. Il avait beau être d'une puissance incroyable, il n'égalait en rien celui de Ponyta.
« Tiens, comme on se retrouve...
- Ce n'est pas de gaîté de coeur.
- Avec toutes ces « bêtises », je ne t'ai même pas demandé ton nom, poursuivis t-il sans paraître affecté de ma réaction.
- Savoir comment je m'appelle ne vous sera d'aucune utilité... répondis-je, l'air mauvais.
- Marine... Ne te mêle pas de mes affaires bordel ! S'écria Lionel qui nous avait plus ou moins rejoints.
- Hum... Marine... C'est drôlement joli, susurra Sébastien, ravi de la bourde de Lionel.
- Mais Lio, je voulais juste...
- Reste en dehors de ma vie, tu veux ?! » Reprit le jeune homme aux boucles brunes, les dents serrées.
Il fit rentrer le petite tortue dans sa Ball, serra la main de son adversaire dignement et s'en fut, la tête haute. Je n'étais pas dupe... Il allait mal et il venait de me heurter encore plus. Sébastien le jaugea un instant.
Je m'apprêtai à partir consoler mon ami mais un bras dénudé aux muscles saillants me barra la route. Très en colère, je posai ma main sur ce bras et d'un seul geste, Sébastien se retrouva en fâcheuse posture, contorsionné, à ma merci, mon bras sous sa gorge... Quel dommage que la foule se soit dispersée, j'aurais aimé voir leurs yeux ébahis devant cette scène, preuve accablante de la faiblesse physique de ce grand bonhomme aux muscles de pâte à modeler.
« Est-ce que tu vas me foutre la paix ?
- Tiens, tiens, fit-il en déglutissant, tu me tutoies maintenant. »
Un nouveau mouvement et cette fois, c'était moi qui me retrouvait sous son emprise. Quelle honte...
« Lâche moi, tout de suite...
- Si je te lâche, ça risque de faire mal, je préfère te garder comme ça. Puis, j'aime bien la vue que j'ai d'ici. »
En effet, il avait une vue plongeante sur mon décolleté. Rouge de honte et tout ce qui pouvait être plus fort que ça, je pris une grande inspiration et mordis son bras. Il desserra son étreinte, gémissant, surpris par cet accès de sauvagerie inattendu. Les yeux ronds comme des billes, il me fixa sans mot dire...
« Sale pervers ! » Répliquai-je en avalant ma salive.
Sa peau avait un goût étrange... De toutes façons, goût étrange ou pas, j'aimais ce type de moins en moins. Pourtant, ce petit duel physique m'avait mise de bonne humeur. Le plus drôle était sans nul doute la tête qu'il faisait, une moue déconfite qui n'élut domicile sur son visage que quelques secondes mais qui restait incroyablement savoureuse. Une nouvelle victoire.
« Ce que je voulais dire, c'est... laisse le. C'est jamais facile de perdre, se radoucit-il. Surtout devant sa petite amie.
- Nous ne sommes pas ensembles. Et puis, la nature de notre relation ne te regarde pas !
- Je vois... En tous cas, ne te pose pas trop de questions, c'est mauvais pour le moral.
- De quel droit, tu te permets de me donner des conseils ?
- Tu as du caractère... Observa t-il, ce petit sourire narquois agaçant de retour sur ses lèvres. Ça te plairait de combattre contre moi ? A titre amical bien sur. Le vainqueur paie un « verre » à l'autre. Ça te convient ? A moins que tu n'aies pas de pokémon, ou pire, que tu aies peur de perdre... » S'exclama t-il en riant.
Instinctivement, j'effleurai ma cicatrice. Une provocation ? J'allais y répondre. Et de telle manière qu'il s'en souviendrait longtemps. Il me fallait juste... C'était là, le problème majeur. Ponyta... Sébastien avait déjà pris place de l'autre côté de l'aire de combat. Comment allais-je me dépatouiller ?
« A toi l'honneur ! » Lança t-il, très sûr de lui.
Je commençais à me sentir plutôt mal à l'aise. Comment ne pas passer pour une brêle en ayant qu'un Magicarpe sur soi ? Je saisis la pokéball, coincée dans une « voie sans issue », et priai pour qu'un élément imprévu me permette de me défiler. La cicatrice commença à me brûler... Encore.
La terre trembla. Terrifiée, je m'imaginai un instant que les Gravalanch revenaient pour se venger de l'affront qu'on leur avait fait subir la veille. Sébastien tourna la tête vers les collines qu'il scruta avec attention. Je l'imitai. De temps en temps, très furtivement, une forme bleue se dessinait, puis disparaissait pour réapparaitre quelques mètres plus loin : une chose était sûre, elle se dirigeait vers nous.
La boule bleue dévala la pente à toute vitesse. Impossible de savoir ce qu'elle contenait : trop opaque. Mon bras me picota au fur et à mesure qu'elle se rapprochait... Puis, j'entendis des sabots marteler le sol. La pression accumulée s'évapora en un instant. Cette boule, c'était une barrière de flammes. Et derrière cette barrière, il y avait Ponyta.
« Ponyta ? Mais qu'est-ce que c'était ? Fis-je, interloquée.
- Une petite combinaison d'attaque... Répondit la jument alors que la protection se dissimulait. J'ai travaillé toute la nuit pour arriver à ce résultat, alors ne crois pas que je me fiche de toi.
C'était la première fois qu'elle me parlait... enfin, qu'elle envoyait des émissions psychiques que je parvenais à comprendre comme si Lionel ou mes parents s'adressaient à moi. Comme Magicarpe tout à l'heure. Sébastien ne cilla pas d'un poil. Il se contenta de sourire. Quant à moi, je jubilais parce qu'il fallait l'avouer, c'était une entrée fracassante et quoique Sébastien puisse en penser. Je flattai son encolure avec énergie. La curiosité me fit me demander comment Ponyta avait bien pu apprendre seule une technique de la sorte.
« Bien, voilà qui risque d'être intéressant, s'exclama Sébastien. J'appelle Rhinocorne ! »
...
Il lança vigoureusement une ball bleue en direction du soleil. Je fus presque éblouie : mon bras se plaça instinctivement en visière. Ma vue ne serait pas altérée. Lorsque je sentis que le pokémon s'était matérialisé pour de bon, je dérageai prudemment un œil. Je distinguai une énorme masse sombre : elle se rapprochait dangereusement de moi. L'ombre heurta le sol avec un fracas épouvantable et je pus ôter le bras de mon visage. La grosse bête de pierre mugit, mettant en avant son excroissance frontale meurtrière, roulant ses étranges muscles rocailleux tandis qu'une lueur combattive intense se logeait doucement dans ses pupilles. En face, Ponyta hennit en se cabrant fièrement. Elle avait une allure incontestable, c'était à peine si je ne me félicitais d'être parvenue à gagner sa confiance et son amitié. Ces manœuvres d'intimidation étaient bel et bien les prémisses d'un affrontement qui relevait de la nouveauté pure et simple. Désormais, nous livrions notre premier combat véritable et une bouffée d'adrénaline secoua mon corps, puis agita le sang sommeillant qui se mit à me battre violemment les tempes.
« Ponyta ! Hâte ! »
C'était parti ! Ponyta commença sa course autour de l'adversaire : elle accéléra petit à petit jusqu'à atteindre une vitesse incroyable. Le Rhinocorne ne fut pas désemparé pour autant. Déterminé et à l'écoute parfaite des ordres de son dresseur, il se roula en boule et exécuta une attaque semblable à celle que les Gravalanch déchainés avaient utilisé pour nous pourchasser. Il formait à présent une boule compacte qui se mouvait lourdement sur le sol sablonneux. C'était un bon point, cela le ralentirait. J'ordonnai à Ponyta d'effectuer un Écrasement. La vélocité acquise permit à la jument de doubler la puissance de l'assaut et elle parvint alors à égratigner le corps massif de l'adversaire. Nous prenions l'avantage dès le départ et ce n'était pas pour me déplaire.
« Rhinocorne, attention ! Charge !
- Tu as le temps d'éviter tranquillement, » lançai-je confiante.
Il chargea. Tout se passa à une allure incroyable. Je pensais que la Roulade freinerait l'adversaire, qu'il serait alors dans l'incapacité de contre-attaquer. L'état du sol, la configuration antérieure, tout aurait du jouer contre lui... or il en fut autrement. Lui aussi accéléra et percuta la jument de plein fouet, l'éjectant dix mètres plus loin. Son corps lourdement projeté passa très près de moi et je sentis mes jambes se dérober. Je m'affalai à l'instant où elle heurta la terre. Je la vis grimacer. Jetant un coup d'œil à Sébastien, surpris par mon étrange chute, rappela Rhinocorne près de lui et lui donna une nouvelle série d'ordres secs auxquels l'animal répondit par une nouvelle Charge. Se relevant avec peine, Ponyta eut juste le temps d'esquiver puis de bondir un peu plus loin. Des picotements commencèrent à se faire ressentir dans mon bras droit alors je tentais moi aussi de me redresser.
« Zénith puis Danse flamme ! » Hurlai-je en y mettant tout mon cœur.
Ponyta étendit son encolure vers le soleil et ferma les paupières. L'astre luisant du midi la foudroya de son plus puissant rayon. Elle brilla. L'énergie solaire irradiait son corps et les pulsations du sang dans ses veines, de plus en plus rapides, s'accordèrent avec le battement de son sabot qui frappait le sol en cadence, raclant la terre. Toujours ces picotements mais plus intenses cette fois ci. Je tentai d'ignorer cette sensation désagréable afin de rester concentrée sur le combat. Ponyta rayonna et projeta une onde flamboyante qui se matérialisa sous la forme d'un tourbillon. La tornade de feu s'abattit avec violence sur le rhinocéros et le piégea en quelques secondes. La bête poussa un hurlement à glacer le sang. Sébastien, lui, était d'un calme olympien, il examinait le moindre des mouvements que nous effectuions Ponyta et moi. Son pokémon semblait très bien entraîné, il évoluait avec une grâce inouïe sur cette aire de combat malgré sa masse volumineuse.
« Finissons en rapidement. Rhinocorne ! Séisme pleine puissance !!!
- Oh mince... »
Le fameux « coup de poker » qui m'avait permis de remporter la victoire sur mon père me revient à l'esprit, aussi vif et cuisant que la première fois. La chance du débutant ne me servirait guère plus ici. Cette attaque était notre arrêt de mort. La clé de notre défaite. Ponyta tourna la tête vers moi, tout en maintenant son attaque, mais ce n'était pas de l'inquiétude qui brillait au creux de ses pupilles, c'était de la détermination. Pendant ce temps, l'autre se concentrait, tentant de ne pas prêter attention au tourbillon qui lui dérobait ses forces. Il leva sa grosse patte et en un hurlement déchirant frappa le sol.
« PONYTAAA !!!!! »
La laisser seule, face au danger était une folie, une attitude impardonnable. Au moment où l'adversaire frappa le sol de la patte, mon pokémon bondissait. Il s'entoura d'un halo de flammes bleues qui disparût finalement en une fraction de seconde. J'avais peur, j'étais même terrorisée à l'idée que mon pokémon puisse être blessé ou pire ! Ce combat était d'une rare violence malgré mon faible statut de dresseuse en herbe... Cette situation me fit prendre conscience, au plus profond de moi, dans les abîmes de mon inconscient, que Ponyta n'était pas un pokémon comme les autres : elle était bien plus forte que ce que j'avais pu imaginer. Je ne savais plus quoi faire, ni comment réagir, mais elle, semblait le savoir. Ponyta retomba gracieusement au sol et attendit fermant les yeux. Droite, les muscles bandés, l'allure sereine, elle était comme en attente d'une fin proche... La douleur qui parcourait mon bras de long en large se fit de plus en plus cuisante. Je commençais à souffrir réellement. Je serrai les dents et mes phalanges alors qu'une onde sismique meurtrière atteignait le cheval de feu.
Une explosion...
La Terre qui s'ébranle...
La poussière qui emplit les poumons...
Les yeux qui piquent...
Le cœur qui bat...
L'âme qui frémit...
Les jambes qui tremblent...
Le corps qui sue...
Les larmes qui coulent...
Cette sensation, ce fut la première fois que je la ressentais. Elle ne dura que quelques infimes instants et pourtant, je ne l'oublierai jamais : elle faisait à présent partie de moi. C'était... si particulier.
Progressivement, le plancher des vaches cessa de s'agiter. Je me sentais vide, exténuée, mais heureuse : une plénitude insolente s'était emparée de moi. Je cherchai Sébastien du regard, Ponyta, l'adversaire, quelqu'un... Je ne parvint à distinguer que le Rhinocorne affalé sur le flanc, plein de sable, les yeux révulsés et respirant péniblement. Joëlle accourut affolée, et tenta de raviver le pokémon à coup de Potions, Guérisons, Herbes ou autres baies. Rien n'y faisait. Le dresseur aux cheveux longs ne laissait entrevoir aucune émotion : il était sans doute certain que son pokémon allait guérir. Il se contenta de s'approcher, de s'assoir près de son ami et suivre calmement la scène des yeux, murmurant des mots de réconfort à la grosse bête. Je me retournai. Ponyta ! Où était-elle ? Je voulus hurler son nom mais le seul son que je parvins à émettre fut un couinement ridicule. Je m'allongeai, les bras en croix et fermai les yeux le temps de récupérer. Je voulais voir quelqu'un, n'importe qui... Je sentis un souffle sur mon visage. Un souffle tiède, réconfortant puis un doux hennissement. La jument se coucha à mes côtés. Nous avions gagné.
« Marine ! Tout va bien ?! Fit une voix que j'identifiai comme étant celle de Lionel.
- Ouais... Ça t'en bouche un coin hein ? » Dis-je en tentant de rire.
Celui ci se transforma en une toux prolongée qui secoua longuement ma poitrine. Le garçon se détendit et me serra la main.
« Qu'est-ce que c'est que ce raffut ?! » Hurla une drôle de voix.
Lionel se redressa et vit arriver un un homme massif portant un sac sur son dos. A sa droite, lévitait un élégant Charmina. Le jeune homme le laissa s'approcher de moi et j'entendis des os craquer, sans doute venait-il de s'accroupir, occasionnant ce bruit d'articulations. J'ouvris les yeux quelques instants. Je le reconnus immédiatement.
« Oh, salut p'pa... »