Captive dans la tour
Dans la tour, Cynthia ouvrit doucement les yeux. Les murs de pierres nues étaient sales, pas entretenus et chargés de multiples armes usagées mais toujours mortelles. A genoux, elle constata que ses membres étaient retenus par de grosses cordes. Autour d'elle, des orques s'affairaient, l'air était lourd, chargé de mal. Son manteau noir lui avait été ôté, elle se retrouvait en soutien gorge et en pantalon. Dans cette position peu enviable, Cynthia tenta de se dégager de ses liens qui la maintenaient au centre de la pièce, comme un trophée. Le bruit qu'elle fit attira l'attention d'un des orques qui tenait la lame que lui avait offert la reine elfe.
-Arrête de gigoter !
Un ourouk-haï attrapa le premier orque par le bras et se disputa avec lui.
-Cette épée est pour moi !
-C'est pour le grand œil, comme le reste d'ailleurs !
Les deux soldats se disputèrent, ne se préoccupant plus de Cynthia. L'un des deux combattants fut jeté dans un puits conduisant au niveau inférieur. Après quelques invectives, la moitié de la garnison composée d'orques se mit à combattre l'autre moitié composée d'ourouk-haï. Cynthia n'avait pas pu espérer mieux. Avec le raffut et le massacre, les deux hobbits pourraient venir la chercher plus facilement. Encore mieux, le chaos pourrait s'étendre à tout le Mordor, rendant alors la traversée plus facile.
Son sourire s'éclipsa quand elle vit que le premier orque était toujours là et n'avait pas l'intention de descendre en bas pour rejoindre le massacre. Il regarda la prisonnière entravée et s'approcha.
-Bien. Maintenant tu vas souffrir sale espionne. Je vais adorer te faire du mal.
L'orque s'éloigna et alla chercher son matériel. Plusieurs tiges de métal trempaient dans un brasero ardent. Voyons le bon coté des choses, la chaleur stérilisant les outils de torture, elle n'aurait pas d'infection. Le bourreau se prépara tandis que Cynthia se débattait pour libérer un de ses bras. Les cordes étaient serrées, comprimant ses poignets ensanglantés, dire qu'il y avait un couteau pourtant si près … à la ceinture de son ennemi.
De leur côté, Frodon et Sam pénétraient furtivement dans la tour et étaient plus ravis que surpris d'assister à la mêlée entre les serviteurs du mal. Pendant que les gardes s'arrachaient mutuellement les tripes et pataugeaient dans leur sang noir, le service était effectué avec moins de zèle. Leur but était d'essayer de se diriger vers le sommet de la tour, là ou se trouvait sûrement Cynthia.
Ne connaissant pas le coin aussi bien que les gardes, ils se perdirent dans les couloirs, tentant de passer aux étages supérieurs. Arrivés sous une trappe, ils entendirent un cri féminin.
-Aïe ! Non pitié ! Arrêtez ! Je vous en supplie, j'ai mal ! AAAARGH !
Les deux hobbits serraient les poings, mis dans une colère noire à l'idée que leur amie puisse être torturée.
Une nouvelle fois, le tisonnier chauffé à blanc rencontra la tendre peau de Cynthia, laissant une brûlure cuisante sur son corps. Effondrée, seulement retenue par ses chaînes, la jeune femme pleurait toutes les larmes de son corps. La douleur l'envahissait, pure, intense, continue. La seule chose qu'elle espérait, c'était de mourir pour que tout s'arrête. Son tortionnaire n'avait pas exactement le même projet. Il la frappa au visage pour la sortir de son évanouissement.
Elle se retrouva le nez ensanglanté, l'œil droit poché, un goût métallique dans la bouche. Cynthia respirait difficilement, épuisée par l'horreur qu'elle venait de vivre. Le bourreau lui susurra à l'oreille que tout cela ne faisait que commencer et elle se raidit lorsqu'elle entendit un claquement. Elle contracta ses muscles en prévision de la suite et appela à l'aide.
-Au secours ! A l'aide ! Aidez moi, je vous en prie !
Le claquement du fouet lui arracha un nouveau cri. Les coups tombaient, zébrant son dos, lui arrachant de nouveaux hurlements. Elle ne compta même plus les coups, préférant s'évanouir plutôt que de continuer à subir ce calvaire. Une fois que le dos de la jeune femme fut strié de rayures rouges et recouvert de sang, le bourreau cessa la pluie de coups. Dans sa main gantée, il prit une poignée de cristaux blancs.
Ironiquement, Cynthia se réveilla pour sentir que ses multiples plaies étaient nettoyées au sel. Après quelques minutes, elle put souffler un peu, son bourreau fouinant dans ses outils mal rangés.
Il allait passer à la suite. Il connaissait deux moyens de vaincre une femme : soit il pouvait la briser moralement, ce qui le forcerait à s'abaisser en touchant une vulgaire humaine, soit il détruisait son physique. Il se mit face à elle, tournant le dos à la trappe de sortie et sortit son épée rouillée.
-Je vais faire des petits trous dans ton charmant minois.
Alors qu'il levait sa lame, il s'arrêta. Une pointe bleutée perfora son armure de part en part.
-Pas si je te transperce le premier.
Cynthia leva le visage et reconnut son sauveur. Expert en nœuds, Sam détacha les mains de la dresseuse qui s'écroula sur Frodon.
-Ils m'ont … même pas posé de question.
Cynthia s'évanouit sur Frodon qui tremblait de rage. Comment avaient ils pu lui faire subir ça ?
La blonde se réveilla quelques heures plus tard. De nombreuses compresses humides étaient appliquées sur ses blessures qui la lançaient toujours. Elle ouvrit l'œil gauche, le droit caché par un bandage visant à soigner son coquard.
-Frodon … Sam.
-Ne parle pas, nous sommes là. Repose toi encore un peu. Ca va aller.
Sam se rapprocha de Cynthia qui se releva et massa ses poignets endoloris.
-Merci les amis. Vous n'avez pas idée de ce que j'ai vécu.
-Ne pense plus à cela. Nous allons bientôt repartir. Est-ce que tu peux te lever ?
Cynthia se raccrocha à lui et se mit sur ses jambes. Elle tituba avant de se rattraper et de souffler deux secondes.
-Je vais y arriver. Ou sont mes vêtements ?
Sam lui amena ses affaires et l'aida à se rhabiller. Elle remit son manteau et le ferma à l'aide de la broche en diamant. Elle mit la main dans sa poche et paniqua.
-Ma … ma boite à musique. Ou est elle ? Je ne partirais pas sans l'avoir retrouvée.
Sam sortit un objet de sa poche et lui tendit.
-La voilà. Je l'avais mise en sécurité.
Cynthia attrapa le petit coffret de nacre et d'argent avant de le remettre dans sa poche. Elle était visiblement plus soulagée, comme si les tortures qu'elle avait vécu n'étaient rien face à la perte de l'objet.
-Merci. Dis moi, as tu regardé à l'intérieur ?
-Non.
Cynthia se détendit et sourit. Son sourire se transforma en une grimace de douleur. Frodon le remarqua et lui demanda de se reposer quelques instants de plus.
-Si tu veux, mais je vais bien. Qu'est ce que nous faisons en attendant ?
-Je sais que cela fait longtemps, mais je voulais m'excuser de t'avoir ennuyée avec ta boîte.
-C'est pas grave Frodon. J'ai été un peu cassante la dernière fois que nous en avons parlé. Cette boite est l'objet le plus cher du monde à mes yeux. Elle m'a été offerte par ma mère quand j'avais trois ans. Elle jouait une berceuse que j'aimais écouter pour m'endormir. Maintenant, elle me fait pleurer car elle est chargée de regrets.
Elle contempla le ciel sombre et reprit son récit.
-La photo à l'intérieur représente ma famille réunie. Ils ne sont plus qu'un souvenir lointain parmi d'autres, mais je ne veux pas les oublier.
Elle ouvrit la boite pour montrer la photo à Sam et à Frodon.
-La, ce sont mes parents. Ils sont morts un an plus tard. Personne ne m'a dit de quoi ils sont morts, mais j'ai découvert qu'ils étaient à la recherche de ruines sous marines et qu'ils se sont noyés.
Cynthia était sur sa lancée, elle finirait d'une traite, sans s'arrêter.
-Là, c'est mon chat Noctali, il est mort au combat. C'est le seul dont j'ai accepté la mort, c'est le seul que je ne pleure plus. A coté, c'est ma grand mère. Durant toute mon enfance, elle s'est occupée de moi et je l'ai vue mourir juste devant moi.
Cynthia referma la boîte et la fixa, l'esprit à des milliers de kilomètres de tout ce qui l'entourait. Les deux hobbits la plaignaient, maintenant qu'ils avaient fait le lien avec les récits précédents.
Cynthia frotta ses yeux avec le revers de sa manche avant de se relever.
-Bon, on y va ? Au fait, ou est mon épée ?
-Je ne sais pas. Ils ont du la prendre pour leur seigneur noir.
-Ce n'est pas grave, ce n'est qu'une arme. Belle mais pas irremplaçable.
Cynthia ramassa un cimeterre abandonné par un orque. Cette arme usée et ébréchée ferait parfaitement l'affaire.
-Par ou est la sortie ?