Accusations sans fondement
Laetitia resta sans voix devant le ton glacial de Thomas. Marie le regardait sans comprendre.
-Qu'est-ce que tu veux savoir ? Demanda Léa timidement. Il y a un souci ?
-Oui, on te voit dimanche avec Maxime, qui malgré son silence semble être fou de toi, et toi tu ne te cache même pas d'être avec ce mec qui t'appelle chérie et…
-Laetitia, s'il y a un problème je peux vite le résoudre… fit Vincent dont le regard s'était fait soudain plus dur.
-Tom qu'est ce qui t'arrive ? Demanda Marie qui n'avait pas entendu Vincent.
Laetitia réfléchit à toute allure. Comment…
Oui, cette manie de m'appeler chérie comme avant va se terminer ici.
Elle se tourna vers Vincent.
-Vincent, toi tu n'as rien à expliquer. J'allais le faire avant que tu viennes.
Elle regarda Thomas et sourit en pensant que Maxime se croyait sans ami près à prendre sa défense.
-Thomas, ce n'est pas la peine de te mettre dans un état pareil, mais je suis contente que Max ait des amis comme toi.
-Maxime n'est pas mon ami, mais j'aime pas les gens qui se foutent des sentiments des autres.
-Mais, laisse moi t'interrompre, Vincent est uniquement mon meilleur ami et ce depuis la primaire. Il m'a appelé chérie et ça t'a induit en erreur. C'est une mauvaise manie qu'il a toujours eue, et que j'espère aujourd'hui il perdra.
Vincent resta interdit, Marie se taisait, tentant de comprendre ce qui se passait. Elle n'avait pas souvent vu Thomas s'assombrir ainsi. Celui-ci pesait le pour et le contre de cette réponse. Léa lui donnait l'impression de se fiche de Max, et lui ne voulait pas avoir à se reprocher de ne pas l'avoir défendu. C'est pour cela qu'il répliqua :
-Comment pourrais-je en être sûr ? Tu peux me mentir.
-Non, c'est un truc dont je ne suis pas capable, reprit Laetitia. Même si tu ne me connais pas depuis longtemps, tu as pu t'apercevoir du fait qu'il était amoureux de moi. Tu connais pas mal Max je crois, et je ne pense pas qu'il accorde sa confiance à n'importe qui. Alors comme il a la tienne et la mienne, je pense que tu peux toi aussi me faire confiance.
-Oui… tu dois avoir raison.
Vincent les avait raccompagnés quand il avait su qu'ils n'avaient pas de voiture, et autant de courses à transporter. Thomas les avait invités à boire un verre chez eux pour le remercier, et surtout pour vérifier si Laetitia et lui était des amis, et rien que des amis. Devant l'insistance de Vincent, Thomas l'avait laisser faire son chocolat dont Laetitia leur avait vanté les mérites. Il eut le temps de se rendre compte que le couple n'était que des amis. Contrairement à la veille où Maxime et Laetitia se lançaient des regards emplis de tendresse, eux, quand ils se regardaient les yeux dans les yeux, étaient loin de faire apparaître de tels sentiments. Avant qu'ils repartent, Thomas s'excusa auprès de Laetitia de la réaction qu'il avait eue. Marie profita de leur entrevue pour prendre les coordonnées du centre sportif dont Vincent leur avait parlé. Après tout, vu qu'elle aurait le droit à une réduction si elle venait s'inscrire de la part de Vincent, ce n'était pas négligeable. En plus, comme c'était la moitié de Vincent qui gérait le centre, elle pensait que c'était loin d'être une arnaque. Ils se quittèrent devant la maison de Marie et Thomas.
Sur le chemin de l'appartement, Laetitia et Vincent purent continuer leur conversation. Mais Vincent la recentra rapidement sur ce qui s'était passé dans le magasin. En fait, il voulait savoir qui Thomas avait défendu. Alors, elle fut bien obligée de lui parler de sa relation avec Maxime, mais sans pour autant tout expliquer. En effet, elle se contenta de lui dire qu'ils avaient dû se séparer, sans en préciser les causes.
Vincent se contenta de cette réponse. Il savait pertinemment que brusquer Laetitia ne servait à rien, elle devait en parler librement. Il avait remarqué qu'elle n'avait pas précisé les raisons de cette rupture, mais il pensait qu'en lui laissant le temps de tout raconter petit à petit, elle se sentirait mieux. Mais d'après ce qu'elle en disait, ce Maxime, elle l'aimait. Elle semblait ne pas pâtir de cette rupture.
Mais il avait tort, il s'en rendit compte immédiatement lorsqu'il la raccompagna. Laetitia remarqua de suite que la voiture de Maxime était garée en face de chez elle. Mais, comme elle ne l'aperçut pas dans la voiture. Elle sortit donc avec Vincent, et ils parlèrent encore un moment devant la grille. Alors que Vincent voulait partir, Laetitia le retint par le bras.
-Attends une minute, je suis sûre qu'il va arriver. Je voudrais te le présenter.
Mais Maxime n'entendit pas cette phrase, il revenait de l'épicerie du coin, un soda à la main. Il attendait Léa depuis longtemps, et n'ayant rien mangé de la journée, s'était absenté une minute pour acheter un truc à grignoter et une boisson. En arrivant, voici ce qu'il entendit :
-Tu sais, je ne vais pas trop pouvoir te voir ces prochains jours Laetitia, mon travail va me prendre beaucoup de temps, mais je t'inviterai au resto pour qu'on puisse passer un peu de temps ensemble. Et puis tu peux passer à l'appart' quand tu n'as rien à faire. Tu sais que tu es toujours la bienvenue.
-Je vais passer alors plus de temps avec Maxime, répondit-elle.
A cet instant tout se mélangea dans la tête de Maxime. Rêvait-il ? Lui qui venait pour lui dire qu'il la pardonnait, lui qui venait pour s'excuser… Et elle était là, avec un autre type ! Il ressentit un grand chagrin, mais ne s'étant jamais laissé aller qu'avec elle, il lui fut difficile d'y faire face. Son chagrin se mua alors en colère. Et lui qui croyait qu'elle ne lui en voulait plus. Il se souvenait de ses paroles sur le chemin du Gyriados, en fait, il avait dû tout mal interpréter. Elle ne devait pas parler de lui. Il s'était encore bercé d'illusions. En s'en rendant compte, il écrasa sa canette dans la main. Il la soumit à, une telle pression qu'elle se fendit en lui coupant tout le creux de la main. Il sortit de l'ombre décidé à dire tout ce qu'il pensait du comportement de Laetitia à celle ci.
Au bruit, les deux amis se tournèrent :
-Max tu es là, s'exclama Laetitia.
En voyant son regard noir, elle fit un pas en arrière.
-Oui je suis là, et je crois que j'ai bien fait de venir ce soir. Je me rends compte que tu me prenais pour un con. Tout ce que tu me disais, il y a quatre ans, je crois que je peux le dire de toi aussi ! Je n'avais jamais vu ce masque de Laetitia, d'une vulgaire traîtresse !
Devant le ton accusateur de Maxime, Laetitia frissonna de la tête au pied. Elle sonda ses yeux, et su qu'il ne plaisantait pas. Pourtant contrairement à Thomas qui ne connaissait pas l'existence de Vincent, Maxime savait qu'elle devait le voir. Elle tenta de garder son sang froid. Il était hors de question de perdre cet être qu'elle aimait tant. Elle devait savoir ce qui s'était passé ! Elle fit signe à Vincent de ne rien dire, et fit un pas vers Maxime.
-Ne t'approche pas, cria-t-il
-Mais explique-moi, hier tu étais si bien, qu'est-ce qui s'est passé ?
-N'essaye pas de me faire réfléchir à tes mensonges. Tu m'as trahi !
-Quand ? Maxime, jamais, comment peux-tu dire ça, et même juste le penser alors que jamais je n'ai aimé quelqu'un d'autre que toi, s'exclama-t-elle.
-C'est faux ! Et lui ?
Il pointait du doigt Vincent. Elle respira, soulagée. Ce n'était que ça !
-Mais Max, c'est Vincent !
-Non tu mens, Vincent je l'ai vu la semaine dernière, tu partais avec lui en voiture !
-Non, je n'ai revu Vincent qu'aujourd'hui. Je ne suis pas sorti la semaine dernière.
-Traite-moi de menteur ! Je t'ai vu comme je te vois. Tu avais une de tes robes de bal hors de prix.
Maxime ne mentait pas, Laetitia réfléchit à toute allure. Mais bien sûr que si ! La semaine dernière elle était sortie avec De Ralotre. Comment pouvait-elle lui expliquer ça ? Il était dans un tel état de nerfs. Elle ne l'avait encore jamais vu dans une telle colère. Elle n'était plus sûre de parvenir à le calmer. Tout s'embrouillait dans son esprit, elle se voyait sans Maxime, il fallait faire quelque chose elle ne pouvait se résoudre à le perdre une nouvelle fois. Mais comment réagir ? Vincent ne pouvait rien faire, elle ne lui avait pas raconté cette histoire de sortie organisée. Comment pourrait-elle se sortir de ce pétrin ? Elle devait gagner du temps. Si elle parvenait à faire douter Max peut-être que cela marcherait ?
Elle jeta un coup d'œil vers celui qu'elle aimait. Le faire douter, dans son état d'esprit actuel revenait à un acte suicidaire. Mais il lui restait une dernière arme. Cependant, Vincent devait s'en aller. Il pourrait s'en prendre à lui. Mais pas à elle. Elle se tourna à moitié vers Vincent.
-Il faut que tu partes.
-Je te laisse pas avec ce fou.
-Il y a quelque chose qui m'échappe et quand Max est en colère, il est capable de tout. Je t'en prie.
-Mais toi ?
-Il ne me fera rien !
Elle se retourna à nouveau vers Maxime :
-Laisse Vincent partir, après on parlera.
-Je m'en fous de ce mec, il a qu'à se casser si c'est un froussard.
-Laetitia, murmura Vincent, tu es sûre de ce que tu fais ?
-Oui … lui répondit-elle sans se retourner.
Il se dirigea vers sa voiture, et après une dernière hésitation, monta et parti. Maxime et Laetitia se faisaient face, ils restèrent un moment sans parler. Laetitia le regardait droit dans les yeux en essayant de rester aussi courageuse qu'elle le pouvait ! Puis son regard se décentra et elle regarda ses bras contractés jusqu'aux poings.
Soudain, elle s'aperçut qu'il y en avait un qui saignait. Les gouttes de sang tombaient une à une sur le sol à intervalles réguliers. Oubliant alors l'humeur massacrante de ce garçon, elle se précipita sur lui en disant :
-Max, tu saignes. Comment tu t'es fait…
Mais il la repoussa violemment. Elle se retrouva à terre.
-Ne me touche pas. Tu me dégoûtes. Comment peux-tu croire que je veux encore de toi alors que tu me trompes ?
-Je te répète que je n'ai rien à me reprocher.
-Rien ? Et quand tu es partie, il y a quatre ans, en me laissant avec ma honte et mes regrets ?
Elle ne répondit pas. C'était le moment, il avait besoin de tout dire. Après ils pourraient parler calmement.
-J'avais besoin de toi à ce moment. Et toi tu m'as laissé tomber.
-…
-Tu ne réponds rien et bien je continue. Tu crois être la seule à avoir souffert ? Tu crois que ma vie a été heureuse depuis ? Tu veux que je te dise, tu as eu le bon rôle dans l'histoire, tu as fait ta martyre, tu es parti sans te préoccuper des autres. C'était égoïste.
-…
-Et puis tu reviens dans ma vie comme si de rien n'était. Et c'est uniquement pour me rejeter une nouvelle fois.
Laetitia était toujours à terre, elle l'écoutait. Tout ce qu'il disait était vrai. Mais il y avait un point où il avait tort.
-Je ne t'ai jamais rejeté Maxime. Je t'ai toujours aimé. Quand je suis partie c'est vrai je voulais t'oublier, mais je n'ai jamais pu, j'aurais du le savoir. Je suis partie parce que mon père me manquait et que je ne pouvais plus me contenter de vivre en faisant semblant d'être heureuse. Non ne dit rien laisse moi parler. Ma belle-mère est horrible, je pouvais la supporter avant de te rencontrer parce qu'il y avait Vincent qui m'y aidait et puis mes études et mes livres. Après quand il est parti, c'est toi qui es entré dans ma vie. Je me suis senti la force de tout entreprendre. Mais lorsque tu as trahi la promesse que tu m'avais faite, j'ai eu besoin de partir pour réfléchir. Et surtout d'arriver à te pardonner.
Elle fit une pause mais rien ne semblait l'avoir touché. Mais comme il la laissa poursuivre, elle rassembla ses dernières forces et continua.
-Je me suis beaucoup remise en question et j'ai réalisé que mon comportement n'a pas été des meilleurs. Quand j'ai à nouveau eu assez de confiance en moi, je suis revenue. Il fallait que j'arrive à me reconstruire, je ne savais pas comment tu allais réagir. J'étais prête à tout encaisser. Tous tes reproches je m'y attendais, mais je ne suis pas la seule fautive. Je pense que tu t'es aussi remis en question, sinon tu n'aurais pas souffert. Mais je pense que tu as oublié la souffrance de quelqu'un d'autre…
-Pinko ? Tu, il…
Les traits de Max se détendirent un peu. Laetitia se releva doucement et profita de la brèche qu'elle avait créée pour poursuivre :
-Oui, Pinko, il a fallu le reconstruire aussi, il se laissait mourir, je me suis battue pour lui comme je me battrais pour toi. Ne m'as tu jamais fait confiance ?
-Mais… Si…
Soudain son regard se durcit à nouveau.
-Jusqu'à aujourd'hui en tout cas. Tu ne te rends pas compte du temps qu'il m'a fallu pour refaire ma vie. Je m'étais fait à l'idée que tu ne reviendrais jamais et à ce moment tu réapparais. Et au moment où je pense que tu vas s'arranger, que je viens pour… AAAAAAAAAAAh, tu vas me rendre fou. Je déteste l'emprise que tu as sur moi. Je ne veux plus jamais faire confiance à un seul être humain, tu m'as trop déçu. Comment pourrais-je te pardonner ce que tu as fais !
-Mais je n'ai rien fait, cria-t-elle en pleurant. Mon seul défaut c'est de tout faire pour plaire à tout le monde
-Tu avoues !
-Non, je n'ai rien à avouer. Je te répète que le mec que tu as vu aujourd'hui c'est Vincent. Tu peux vérifier, il a vu Tom et Marie avec moi, il travaille au Millenium Dream. T'as de quoi faire ! Ah ! Autre chose : le mec que tu as vu, c'est ma belle-mère qui m'a forcé à sortir un soir avec lui, mais il ne c'est rien passé. J'aurais préféré qu'elle ne se mêle pas de mes affaires, mais c'est dans son caractère d'être chiante.
Maxime compris à cet instant que la femme qu'il avait vu il y a cinq ans, c'était la belle-mère de Laetitia, c'est pour cela qu'elles n'avaient rien en commun…
-Tu n'es qu'une fille à papa-maman. Je suis sûre que tu si tu n'aimes pas ta belle-mère c'est qu'elle te laisse faire moins de chose que ta mère. Et d'ailleurs tu dois avoir honte d'elle, tu ne m'en as jamais parlé, qu'est-ce qu'elle a fait ?
-Je t'interdit de parler d'elle comme ça, cria-t-elle.
-Ah oui et pourquoi, elle a fait comme toi ? Se taper plusieurs mecs à la fois…
Maxime chancela sous le poing qui lui arriva en pleine figure. Il se tenait la joue, ce coup semblait lui avoir remis les idées en place, il considéra sa main en sang qui le brûlait et leva les yeux vers celle qui l'avait frappé. Laetitia avaient les yeux rougis des larmes coulaient sur ses joues. Son corps était parcouru de sursauts dus à ses sanglots. Cette fois, elle cria de toutes ses forces, de toute son âme :
-Ma mère est morte ! J'avais à peine 10 ans.
Elle tourna les talons et courut vers son entrée. Maxime la rattrapa. Il la força à se retourner, Laetitia prise d'une peur soudaine se protégea le visage. Maxime recula en la voyant ainsi. Qu'avait-il fait ? Elle avait peur qu'il la frappe ! Il se sentit désemparé. Soudain il ressentit une vive douleur dans le ventre. Il porta son regard vers le sol et aperçu Pinko. Laetitia le regarda, et prenant Pinko dans ses bras, elle entra chez elle.
-Laetitia, attends.
Elle s'arrêta, le regarda, les yeux embués de larmes, et dit d'une voix glaciale :
-Si c'est pour qu'on se fasse encore du mal, ce n'est pas la peine de continuer à se voir. Je ne t'oublierai jamais Maxime, je sais bien que je n'aimerai jamais personne d'autre que toi, mais je crois qu'il vaut mieux qu'on en reste là.
Ses paroles lui glacèrent le sang. Il la regarda rentrer chez elle sans pouvoir bouger un doigt.
Maxime observait la maison sans rien faire, il semblait incapable de pouvoir faire le moindre geste, attendant une aide extérieur pour pouvoir à nouveau vivre.
Bientôt, un homme vint lui taper amicalement l'épaule en lui demanda d'une voix grave :
-Vous allez bien monsieur ?
-…
-Je vous dérange peut-être, excusez-moi, peut-être attendez vous que quelqu'un sorte de cette maison
-Non, je viens de la perdre pour toujours.
Il se rua vers sa voiture et démarra en trombe.