Une soirée cauchemardesque
-Laetitia, ma puce tu es prête ?
-Une seconde je finis de m'habiller, cria-t-elle à travers la porte.
Et ne m'appelle pas ma puce pensa-t-elle.
-Vite, tu vas nous mettre en retard !
-Violette je croyais que c'était un dîner d'affaire pourquoi est-on obligé d'y aller ?
-Parce que Mme De Ralotre nous a invités, voilà pourquoi.
Oui mais ce soir je n'ai vraiment pas la tête à faire semblant d'être gaie.
Elle fixa une épingle à son chignon, vérifia son maquillage et enleva le peignoir qu'elle avait mit sur sa robe pour éviter de la salir avec la poudre. Elle jeta un regard à son reflet dans le psyché, elle avait réussi à masquer son teint pâle et ses yeux rougis grâce à un bon maquillage, mais elle ne pouvait cacher la déception et la tristesse qu'on lisait dans ses yeux... pourtant il faudrait faire avec. Elle aurait tout donné pour être aussi heureuse que le jour où elle l'avait acheté il y a 4 ans environ.
Il y a quatre ans... quand il l'avait regardé émerveillé, mais faisait tout pour ne pas le montrer.
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-Hum, hum !
-…
-Max qu'est ce que tu en dis de celle là ?
-...
-Maxime, elle te plaît pas ? C'est la couleur ? La matière ? La forme ? Y a des plis ? Une tâche ? Dis quelque chose !
-C'est que... C'est tellement beau que j'ai vraiment rien à dire, pour une fois. Limite le souffle coupé tu vois ?
-Elle te plaît ? Tu trouves qu'elle me va bien ?
-Comment ? Euh oui ! Tu… tu ressembles à une nymphe de la mythologie. Et encore j'trouve que c'est pas une comparaison suffisante, tu es époustouflante, j'ai du mal à croire que c'est moi qui suis ton petit ami. Ne baisse pas la tête. Tu es jolie avec les joues un peu rouges. Désolé si je t'ai trop complimentée mais... tu le mérites !!
Maxime se réinstalla correctement dans le siège d'où il avait failli tomber quand elle avait ouvert le rideau, prit un magazine, et déclara :
-En d'autres termes : Ouais c'est pas mal !
-Arrête tes bêtises ! Tu trouves vraiment qu'elle me va bien ?
-Un peu qu'elle te va bien !
-Bon bien, je vais la prendre je te remercie d'être venu m'aider à me décider.
-J'crois que je vais venir plus souvent si c'est pour voir un spectacle si ... terrible.
-T'exagères !
-Nan pas du tout, en plus ne t'inquiète pas personne d'autre n'a vu mais tu avais ton rideau un peu ouvert. Tu sais que c'est pas bon pour ma tension de te voir dans des tenues trop légères. Tu vas me tenter...
-Arrête mon rideau était bien fermé, murmura-t-elle en s'empourprant de plus belle.
-Jusqu'à ce que tu le bouges par inadvertance en te tortillant pour enlever ton pull.
-Maxime ! Pourquoi tu me l'as pas dit ?
Il l'avait regardé avec un sourire malicieux au coin des lèvres.
-Parce qu'il n'y avait que moi dans les parages.
-Oh ! Toi alors ! En tout cas malgré tout tu as fais quelque chose de très inhabituel !
-Ah oui ? Me retenir de te sauter dessus ?
-Non, tu m'as fais un compliment, un vrai de vrai ! Et pas détourné comme d'habitude.
-Oh ça m'arrive tu sais quand je suis en forme.
-Et bien je ne t'avais jamais vu aussi en forme mais t'inquiète je le répéterai pas.
-Bien alors encore un petite chose !
-Oui ?
-Je pense que c'est une erreur que tu ailles à ce mariage ... parce que c'est le jour où, normalement, la mariée surpasse tout le monde en beauté, et toi, à moins de te mettre un sac sur la tête, tu les surpasseras toujours. Et je suis même pas sûr que le sac suffira. Tu devrais être bannie de tous les mariages.
Elle lui avait sourit, sachant pertinemment que tout ce qu'elle pourrait dire, il le contrerait. Cette robe, elle ne l'avait pas mise au mariage, elle avait décidé de la porter pour leur un an ensemble, mais l'occasion ne s'était pas présentée, elle était partie avant.
Maintenant elle avait décidé de s'arracher du passé.
Pourtant j'aurais voulu qu'il n'y ait que lui qui la voie.
-Laetitia nous… Oh tu es ravissante, je ne comprends vraiment pas pourquoi tu ne l'as pas mise plus tôt, déclara Violette.
-Pour rien allons-y, répondit-elle avec un sourire forcé.
Maxime laissa ses pas le guider et se promena un moment dans le centre, il grignota un truc vite fait au Gyriados et après avoir un peu parler avec Pascal se remit en route. Il savait où il se rendait. Il voulait rester un peu devant chez Laetitia, la regarder marcher devant sa fenêtre, voir sa lumière s'éteindre pendant qu'elle glisserait paisiblement dans le sommeil. Il pourrait ensuite rentrer et s'endormir à son tour… il l'avait fait si souvent avant. Sa déception fut grande lorsqu'il s'aperçut que tout était éteint. Il décida alors d'aller faire un tour dans le parc, il était encore trop tôt pour rentrer se coucher. Et puis après tout la nuit était si belle qu'il serait dommage de ne pas en profiter.
Max se dirigea à pas lent vers le banc où il avait vu pour la première fois celle qui avait enflammé tous ses sens. Puis il escalada l'arbre qui était à côté du banc et vint se poser sur sa branche fétiche en se jurant qu'il ne descendrait pas avant d'avoir trouvé une solution. Il se mit à rire en lui-même en se disait qu'il resterait là un moment.
-Et là je le regarde et j'lui dit : Oh ! Je comprends maintenant pourquoi tu es archiviste, il ne t'ont pas pris à l'école du rire !
Un éclat de rire fracassant suivit cette pseudo blague de M. De Ralotre et Laetitia encouragée par son père fit mine de trouvé ça très drôle. Elle sourit à l'idée réconfortante que lui non plus n'avait pas trouvé ça très drôle. Violette par contre semblait beaucoup s'amuser...
Mon dieu... cette femme, plus elle la connaissait, plus elle lui semblait artificielle. Sa mère lui manquait tant par moment, mais elle lui avait promis d'être heureuse, et de tout faire pour que son père le soit également. Jamais elle ne trahirait cette promesse faite sur son lit de mort. Elle était jeune fille quand elle avait disparue, mais jamais elle ne l'avait oubliée, tout en elle voulait lui ressembler. Si elle avait encouragé son père à rencontrer d'autres femmes, elle savait pertinemment qu'il n'en rencontrerait jamais d'aussi merveilleuse que sa mère. Mais il semblait apprécier Violette, alors conformément à sa promesse, elle s'était gardée de lui révéler ses vrais sentiments.
Soudain elle se rendit compte de son égarement et se concentra sur ce qui se disait. Elle regarda en face d'elle, en se sentant observé. Le fils des De Ralotre, Paul, la fixait avec son visage rouge qui lui rappelait les cheveux de Maxime. Elle sourit à cette comparaison et le regretta aussitôt, car croyant que ce sourire lui était destiné le rejeton commença à parler de lui. Il devait être un peu plus âgé que Max mais lui était totalement opposé.
Elle commença une amusante comparaison des deux garçons. Paul avait des cheveux blonds recouverts d'une couche épaisse de gel, il était à peine plus grand qu'elle mais était trop mince il avait l'air de n'avoir que la peau sur les os. Les cheveux de Max se mettaient en place naturellement, rien ne les enlaidissait. Et puis Max était grand et musclé, bien fait de sa personne, incroyablement séduisant et tellement plus intéressant. Quand il parlait avec Léa, il y mettait du cœur, et ses émotions, même s'il fallait aller les chercher, Laetitia savait qu'il en avait. Alors que le discours de ce garçon soit disant instruit n'était qu'un verni, distant, sans intérêt, trop technique pour qu'on le comprenne. Une de ses "techniques" qu'utilisent les personnes qui essayent de faire croire aux autres qu'elles en savent beaucoup alors, qu'au final, leur inculture est exceptionnelle.
Comme disait Rabelais, Science sans conscience n'est que ruine de l'âme... Oh Maxime ma vie est si dénuée de sens si tu n'en fais pas partie
-Tu ne trouves pas que ce serait une bonne idée ? Tu pourrais en apprendre plus sur ce que je fais, déclara Paul.
Flûte, qu'est ce qu'il m'a demandé. Oh ce doit être pour visiter son entreprise, je ne risque rien à y aller, de toute façon ma vie est un véritable ennui alors autant faire plaisir à tout le monde...
-Tu veux peut-être une date ? Voyons, ah voilà le 19 décembre je suis libre toute la journée. Ca te convient ?
-Oui ce sera parfait !
-Qu'est ce qui sera parfait ? Demanda le père de Laetitia qui venait se joindre à la conversation
-Laetitia a accepté de sortir le 19 décembre avec moi, lança Paul, on pourra se connaître davantage.
-Très bonne idée, déclara Violette.
Laetitia tressaillit sous le poids de la nouvelle.
Oh c'est pas vrai, et puis ça m'apprendra à ne pas écouter quand on me parle, mais me le trimballer toute la journée c'est l'horreur... pourquoi ça n'arrive qu'à moi ? Bien on est le 11, j'ai un mois pour m'y faire !
Son père lui lança un regard surpris, elle préféra baisser les yeux. Vers minuit, elle prétexta la fatigue pour prendre congé d'eux, et eut l'extrême honneur que le fils De Ralotre la raccompagne.
Paul conduisait avec arrogance, se vantant des prouesses techniques de son véhicule... Enervé de voir qu'elle ne faisait aucun commentaire sur sa "magnifique" voiture de sport, le garçon dit :
-315...
-Pardon, fit Laetitia qui semblait s'extirper de ses songes.
-Non, je disais juste, 315...
-Euh... Désolée, je suis pas forte en histoire, je sais pas ce qu'il s'est passé en 315.
Le type se passa la main sur la tête.
-Non, c'est juste que mon petit coucou peut monter jusqu'à cette vitesse.
-Ah...
-C'est bien non ?
-C'est limité à 50 en ville, alors je ne vois pas l'avantage, mais si tu fais des compétitions ça doit être sympa.
Il ne répondit rien, soufflé de constater lui-même que cette vitesse ne lui servait à rien. De plus il ne faisait pas du tout de course automobile. Il se sentit bien bête pendant quelques instants, et ne dit plus rien. Elle lui indiqua le chemin de chez elle et en arrivant il émit un sifflement en voyant la maison.
-Jolie bicoque !
-C'est mes parents qui en ont conçu les plans.
-Hé bien Violette aurait-elle des talents caché ?
-Violette n'est pas ma mère !
-Je me disais aussi que tu ne ressemblais pas à tes parents.
-Je ressemble à ma mère.
-Et bien j'espère la voir un jour
Ca ne risque pas d'arriver.
Paul sortit de la voiture, lui ouvrit la porte et tendit son bras pour l'aider à en sortir. Le contact de sa main lui donna un frisson de dégoût dont il se rendit compte. Un sourire vainqueur s'afficha sur son visage.
C'est pas vrai, voilà qu'il se fait des idées. Laetitia calme-toi, montre-toi digne de ce que maman t'a toujours appris.
Ils arrivèrent devant la porte d'entrée. Elle déclara alors :
-Je te remercie de m'avoir raccompagner, tu serais aimable de m'excuser encore auprès de tes parents d'être partie si tôt mais...
-Ne t'inquiète pas tu as l'air fatiguée il est normal que tu te reposes. Tu as besoin d'autre chose, tu veux que je rentre avec toi ?
-Non ! Euh excuse-moi, non merci, c'est gentil, mais Rose est à la maison.
-Bien me voilà rassuré. Avant que tu rentres je voudrais t'offrir ceci !
Il lui tendit un petit boîtier.
-Non je suis désolée je ne peux pas accepter... après tout on se connaît pas.
-Toi pas mais moi si, ma mère connaît ta mère
-Violette n'est pas ma mère, répondit Laetitia en fermant les yeux de dépit.
-Et, continua-t-il sans tenir compte de sa remarque, j'ai beaucoup entendu parler de toi pendant que tu étais à Nice. Tu étais si jolie sur les photos que j'ai voulu te connaître. C'est une chance que ton père et mon père se soient mis en relation d'affaire et que l'on ait pu se voir si vite.
-C'est Violette qui les a amené à se connaître ?
-C'est exact. Mais cela n'a pas d'importance, l'essentiel c'est que je te connaisse et que je te trouve encore mieux que je ne t'avais imaginée.
-Je m'excuse mais je ne peux pas te retourner le compliment.
-C'est normal tu ne m'as pas imaginé.
Je te trouve surtout pire que tous les dragueurs que j'ai rencontré à Nice ! Au moins eux, ils n'étaient pas pathétiques et on pouvait rire un peu.
-Allez ouvre-le je l'ai fait venir de Tiffany's juste pour toi !
Elle ouvrit l'écrin qui contenait un bracelet en argent sertit de pierre qu'elle ne reconnut pas, en raison de l'obscurité de la nuit.
-Ce sont des émeraudes j'ai choisi ces pierres pour aller avec tes si beaux yeux. Viens je vais te le mettre, déclara-t-il en approchant ses mains d'elle.
Laetitia recula pour éviter tout contact avec lui.
-Merci, mais je ne peux pas accepter un cadeau d'une telle valeur
-Tu sais il ne représente pas grand chose pour moi. Tu m'offenserais en le rejetant.
-Bien je le garde mais laissons-le dans sa boîte de toute façon je vais l'enlever pour aller me coucher.
-D'accord ma belle fait comme tu veux.
-Je ne peux rien t'offrir en retour.
-Bien sûr que si tu peux m'offrir quelque chose. Ce que je désire avidement et que personne n'a sûrement jamais dû recevoir, déclara-t-il en l'enserrant, offre-moi tes lèvres Laetitia.
Vivement elle le repoussa, et répliqua immédiatement :
-Je ne pense pas qu'un cadeau même de cette valeur te donne le droit d'exiger quelque chose dont je sois la seule à décider d'offrir ou non.
-Bien ma belle j'attendrai que tu ne sois plus aussi effarouchée qu'une jeune vierge.
Il l'embrassa sur la joue et caressa son bras du revers de sa main.
-Dors bien ma chérie.
Elle claqua la porte et courut dans sa chambre, elle était révoltée par le comportement de cet imbécile.
-De quel droit est-ce qu'il… Aaaaaah pourquoi je ne lui ai pas mis un poing sur sa tête de chou rouge !
Elle jeta l'écrin dans un coin de sa chambre, et s'installa face à sa coiffeuse. Elle essuya sa joue avec un coton imprégné de démaquillant.
Quelle horreur, mais de quel droit a-t-il osé essayé de m'embrasser.
Elle se démaquilla et frotta la joue qu'il avait frôlée de ses lèvres dégoûtantes jusqu'à en avoir mal.
-" Vierge effarouchée" je vais t'en donner moi si tu savais quel homme merveilleux avait déjà posé ses mains sur moi, tu en serais tout retourné. Vieux pervers. Gros porc ! J'aimerais tellement voir Maxime t'écraser avec une seule main ! Non, un seul doigt !
Il fallait qu'elle se calme, elle se leva, déplaça un tableau, et ouvrit la porte d'un coffre que son père lui avait installé à 10 ans, pour cacher tous ses secrets. Elle en sortit d'un petit carton un cadre avec une photo de Max, et une petite boîte.
-J'ai tant besoin de toi pourquoi je ne te l'ai pas dit ce matin…
Elle ouvrit la boîte et sorti la gourmette que Maxime lui avait offerte à cet unique Noël qu'ils avaient passés ensemble, et l'accrocha à son poignet.
Je crois que j'ai surtout besoin d'une bonne dose d'oxygène.