Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

Smirnoff R. de Domino



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Domino - Voir le profil
» Créé le 16/07/2009 à 14:11
» Dernière mise à jour le 16/07/2009 à 14:11

» Mots-clés :   Drame   Humour   Kanto   Romance   Suspense

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
030 - L'Effet Doppler
« On n'est jamais mieux servi que par soi-même »
(Maxime populaire)

« Sweet dreams are made of this
Who am I to disagree ? »

(Annie Lennox)



Dernier jour à l'académie de Céladopole avant les grandes vacances. Les couloirs sont désertés. Malcolm vagabondait, ce matin là, dans le hall, observant partout. Claire vint le rejoindre.

-Nostalgique ?
-Un peu. J'ai beau savoir que je reviens l'an prochain… Je reste triste à l'idée de quitter cet endroit pendant deux mois.
-Et de nous quitter nous ?
-Aussi, oui. De vous quitter vous. Roland, dont ça a été la première année, toi qu'on a appris à connaître… Mon idiote de sœur elle-même va me manquer.

Claire ricana.

-Tu ne la détestes pas tant que ça !
-Oh… Si, quand même un peu beaucoup ! Non, je plaisante. Je suis content que Charlie et Léo se soient réconciliés.
-Moi aussi ! C'était tellement pitoyable !
-Je crois que c'est la force de la routine qui fait ça. J'ai jamais été en couple mais je suppose que ça arrive à un moment, on ne sait plus trop pourquoi on est ensemble…

Claire hocha la tête. Malcolm la regarda, souriant.

-Je suis vraiment content d'avoir fait ta connaissance cette année.
-Moi aussi.

Regards qui se croisent. Claire s'approcha de Malcolm qui… recula soudainement.
Claire sembla étonnée.

-…
-… C… Claire… ?!
-… Je… pensais que… de ton côté…
-… N… Non pas du tout… enfin pas de cette façon ! En… En plus… Roland a des sentiments pour toi et…
-Mais moi je n'aime pas Roland… A vrai dire… Je… Enfin c'est toi qui…
-Tu… te souviens de ce que je t'ai dit à propos de… ne pas reproduire les erreurs des parents ? Eh bah… en sortant avec toi c'est exactement ce que je ferais ! Désolé… On… on se revoit à midi. Pardon, Claire !

Il partit de son côté. Claire resta immobile, éberluée, choquée…

***

Roland arriva en cours, pas vraiment joyeux. Les élèves étaient en tenue décontractée, lui toujours dans son uniforme de prof, chemise et pantalon.

40 degrés dans les couloirs, quand même.

-Pschouuuu… Fait frais, hein !
-Vous nous donnez chaud, monsieur !
-Qui vous a autorisé à parler au nom de tous les autres ?!
-Personne !
-Eh bah alors, taisez-vous !

Roland continua son chemin. Il mit les clés dans la serrure en sifflotant.

-Dernier jour, vous devez être content, m'sieur !
-Autant que si j'avalais le contenu de mon évier !

Roland ouvrit la porte et la ferma soudainement, impassible.

-M'sieur ?!

Roland resta silencieux un moment.

-M'sieur ?
-S'passe quoi ?
-C'quoi ce délire.
-Vous êtes dispensés de cours ! Allez ! Rentrez chez vous ! Vous n'avez plus cours ! Ouste ! Du vent !

Les élèves, étonnés, ne boudèrent pas leur plaisir. Le proviseur Burton passa, accompagné par Richard.

-Monsieur Smirnoff !! Voyons ! Que faites-vous ?!
-J'aurais besoin d'un balai et d'une pelle !
-Comment ça ?!
-On a saccagé votre salle ?! S'étonna Richard.
-Pas mieux…

Roland ouvrit la salle à Richard et Harold qui virent le corps pendu de Megan Doppler. Elle se balançait doucement, la fenêtre ouverte, au dessus du bureau.

-Oh… marmonna Richard.
-NOM D'UN CHIEN !!! Appelez la police, Lewis !
-J'y vais, j'y vais…

Roland regarda le corps de Megan, intrigué mais pas plus choqué que ça.

***

A table, c'est la consternation générale entre Roland, Malcolm, Charlie et Léopold.

-J'arrive pas à y croire… soupira Léopold.
-Eh bah crois-y… soupira Charlie.
-Pourquoi ! Pourquoi elle a fait ça ?! S'étonna Léopold. Elle… Elle avait tellement l'air de se foutre de tout !!
-Bah… elle était peut-être malheureuse… sans qu'on le sache ! Soupira Charlie.
-C'est vraiment terrible… soupira Malcolm.

Roland était le seul à manger. Il regarda tout le monde.

-Je… pensais que vous la détestiez !

Léopold, Charlie et Malcolm regardèrent Roland.

-Enfin, Roland ! Elle… Elle est morte !
-On avait beau ne pas beaucoup l'aimer… Elle… enfin on la connaissait ! Geignit Charlie.
-Quand même, ça devrait te faire quelque chose !! Grommela Malcolm.
-Bof. Je la détestais personnellement, alors sa mort, au pire, me trouble mais ne m'émeut point.

Charlie secoua la tête, éberlué.

-Enfin, Roland, elle… elle s'est pendue dans ta salle de classe !
-Oui, tout au plus c'est une tentative de me faire culpabiliser.

Il regarda en l'air et cria.

-CA NE MARCHE PAS PAUVRE GARCE ! JE M'EN BATS LES STEAKS DE TA MORT !

Léopold frappa Roland sur la tête.

-Ca va pas !!! T'es d'un offensant aujourd'hui !!
-Rachel est folle de chagrin, elle est rentrée chez elle tellement elle était triste… soupira Malcolm.
-Rachel a une raison d'être triste mais personne autour de cette table n'en a.

Richard arriva devant la table des quatre.

-Jeunes gens, toutes mes condoléances pour le tragique décès de votre collègue.
-Merci mais on s'en tape !

Malcolm frappa Roland, excédé.

-Ahem… Je viens aussi vous apprendre… la démission de votre collègue Claire Perry.

Charlie, Léopold, Malcolm et Roland semblèrent vraiment étonnés.

-Quoi ?!
-Oh non c'est pas possible… soupira Léopold.
-Comment ça ?! Sans prévenir ?! S'étonna Roland.

Malcolm se mordilla les lèvres.

-Elle… est venue ce matin, en larmes, et elle m'a dit qu'elle démissionnait… Elle vous a laissés un petit mot… « Mes chers amis, je suis désolée de vous quitter ainsi, j'ai été très heureuse de faire votre connaissance, mais il arrive un moment où l'on ne se sent plus à sa place. J'espère que l'avenir vous sourira à tous. Claire ».

Léopold semblait peiné.

-Eh bah, quelle dernière journée…
-Tu m'étonnes…
-J'ai banalisé la journée, si vous voulez rentrer, libre à vous. L'enterrement se déroulera probablement samedi, je vous tiens au courant par mail. Encore toutes mes condoléances.

Richard s'en alla. La mine de Roland s'assombrit.

-Pour le coup, Claire, ça me fait chier, effectivement…

Malcolm resta silencieux. Charlie soupira.

-On y va, nous ?! Les élèves sont partis…
-Ouais, ouais… Bon, bah… Bonnes vacances… soupira Léopold.
-Désolés de se quitter sur de telles péripéties…
-Vous serez où, cet été ? Demanda Malcolm.
-On part aux Etats-Unis ! Expliqua Charlie.
-Cool… Bonnes vacances !
-Toi aussi, Mac… Tu pars ?
-Non.
-Et toi, Roland ?
-Ca m'étonnerait.
-Bon… Bah bonnes vacances !
-Hm…

Ils partirent. Roland semblait soucieux.

-Pourquoi Claire démissionnerait sans raisons…

Malcolm garda un silence de marbre.

Dehors, Léopold et Charlie étaient serrés l'un contre l'autre sur le chemin de leur appartement.

-Tu… tu te rends compte, elle… Hier elle avait l'air comme d'habitude et là…
-Peut-être que Roland avait raison… elle voulait juste nous faire culpabiliser… ou se faire remarquer.

Charlie acquiesça.

-Ou peut-être qu'elle allait terriblement mal et qu'elle n'avait rien dit à qui que ce soit. Et qu'on a juste été aveugles.
-Oui ou alors comme je te l'ai dit, elle a peut-être voulu uniquement attirer l'attention.
-Léopold, tu sais comme moi que les gens qui veulent attirer l'attention ne vont pas aussi loin !
-Vraiment ? T'en sais quoi ? Charlie… Moi par exemple je sais même pas si… t'es malheureux au point de…

Charlie haussa les sourcils

-Pas du tout, Léo ! Je t'assure que ces vacances vont bien vite effacer cette petite déprime passagère.
-Que tu as depuis deux bons mois…

Charlie sourit.

-Ouais. On verra. Je veux juste qu'on aille loin de tout ça. Qu'on reste… éloignés de tous nos problèmes.
-De tous TES problèmes. On partira après l'enterrement de Megan.
-Oh non…
-Bah si, désolé. C'était peut-être une salope mais on doit lui rendre hommage. C'est la loi !
-Tu veux qu'on demande à mon père ?
-Ah non !

***

Roland se retrouva chez lui. Il effaça les messages sur son répondeur qui se multipliaient depuis quelques jours.

« S'ils veulent m'inviter pour leurs vacances à la noix, je les emmerde. »

Il s'assit et se fit servir une vodka par Tartard.

-Merci Newton. C'est cool.

On frappa à sa porte.

-Si c'est les témoins de Jéhovah…

Roland ouvrit à Charlie, seul.

-Un revenant !
-On partira pas avant l'enterrement de Megan.
-Qu'est-ce que tu veux ?
-Bah… On peut discuter ?
-De ?
-Du suicide de Megan. Ca te touche pas trop apparemment, je pensais qu'on pouvait en discuter…
-Comment ça ?
-Bah voilà…

Roland pencha la tête sur le côté.

-Je la détestais.
-Hm.
-Elle tourmentait mon Léo, elle était méchante, acerbe… Bref une vraie garce.
-Tout à fait.
-Mais… je me sens mal de la détester maintenant… Et j'ai l'impression d'être un salaud.
-Bon, prenons ça depuis le début : Que ressens-tu par rapport à la mort de Hitler ?
-… Rien ! Il est mort c'est tout ! J'ai ni à m'en réjouir ni à en pleurer… certainement pas à en pleurer d'ailleurs.
-La mort de Mussolini ?
-Ou veux-tu en venir ?
-Eh bien, la mort ne fait pas des hommes des anges. Tu peux détester quelqu'un et ne rien ressentir pour sa mort. Tu te sens mal de l'avoir haïe, mais en réalité tu te sens mal parce que tu crois avoir été quelque part un rouage de son acte.
-Voilà !
-Pas du tout. Et le simple fait que tu te poses la question montre que tu as une certaine bonté d'âme qui ne laisse pas place à de sèches décisions. Tu devrais te réjouir de te poser des questions. Ca montre que tu n'es pas infâme, mais le fait de te sentir mal prouve que tu es humain.
-… Merci Roland.
-Ne me remercie pas, intègre un camp de remise à niveau hétérosexuel.
-… Salut…

Roland ferma la porte, excédé.

***

Le lendemain, Roland regardait un match de la Ligue Pokémon, passionnant, entre un certain Adam Merridew et un type qui vraisemblablement ne lui arrivait pas à la cheville. L'Ursaring d'Adam venait de massacrer l'Arbok adverse.

-Tu parles. Battre un Arbok, rien de plus facile. Qu'il essaie de se farcir un Tyranocif, un peu ! Feignasse !

On sonna à la porte.

-Ca doit être Charlie pour le deuxième Round.

Il ouvrit à Malcolm.

-Mon copain… Quel bon vent expulsé d'un rectum nettoyé t'amène ?
-Euh… je suis venu voir si ça allait.
-Bon. Très bien. Je sirote une vodka citron devant la télé.
-Citron ? Et pas orange ?
-Malheureusement j'aime les deux ! Soupira Roland. J'en suis désolé.
-… Moi ça va pas fort !
-Vous avez de la chance, le cabinet de psychiatrie est ouvert !
-Roland, on a été horribles avec elle. Personnellement j'ai mauvaise conscience qu'on l'ait larguée comme ça !
-On ne l'a pas larguée ! Elle a été immonde, elle s'est jouée de notre gentillesse, on s'est contentés de l'éloigner de notre cercle !
-Et elle s'est tuée !
-Tu te sens coupable ?
-Un peu, je t'avoue.
-Tu n'as pas. L'avantage avec un suicide c'est que c'est la faute a personne. Mais en contrepartie, tout le monde est en droit de se demander s'il y a joué un rôle, si tel Wikipédia, il y a contribué.
-… Grosso modo oui.
-Eh bien Malcolm Heine, tu n'es coupable de rien.

Malcolm fit la moue et hocha la tête.

-Et toi…
-Si ça peut te rassurer, je n'ai aucun remord de l'avoir pendue.
-Quoi ???
-Je plaisante. Je m'en fous comme de l'an 40 qu'elle se soit foutue en l'air. Qu'elle l'ait fait ou pas, ça m'importe totalement. Elle se serait tiré une balle, ça m'aurait à peine fait plus d'effet. Ah si attend, ça m'aurait fait chier pour le parquet mais sans plus.
-… J'aimerais être aussi insensible !
-Seulement réaliste mais je te remercie de m'envier.
-… alors selon toi…
-Comme avec ta non-parentalité, tu as tort de t'en vouloir. Malcolm, tu n'es qu'un faible, incapable de bien cerner ce qui t'arrive et incapable de faire les bons choix. Tu choisis toujours la solution qui te met dans une merde psychologique inconcevable. Là tu choisis de venir me voir au lieu de rester chez toi tranquille à boire !
-J'ai pas envie de boire !
-Tu devrais.

Malcolm soupira. Il regarda Roland.

-… Merci… je suppose !
-De rien. Cabinet Roland a été heureux de vous recevoir.

***

Le soir même, il renommait ses fichiers vidéos après le laborieux téléchargement d'un album live rare des Beatles. On frappa à sa porte.

-Putain c'est pas possible, ils ont des tickets et ils attendent devant l'appart ou quoi ?

Roland ouvrit à Léopold.

-Version blonde ! Entrez donc !
-Salut Roland… Excuse-moi de te déranger.
-Tu fais bien de t'excuser.
-… Euh, comme ça n'avait pas trop l'air de t'atteindre, je suis venu te voir.
-Grand bien t'en fasse, mon fils. Je ne te sers pas de café, tu es bien assez perturbé comme ça, mon fils.
-Euh… Tu… sais qu'entre moi et Megan c'était pas le grand amour.
-C'était une femme, tu étais un homme, forcément…
-Et l'ennui c'est que… J'me sens… La dernière pensée que j'ai eu à son propos de son vivant c'est… « Rha mais quelle traînée celle là, si elle pouvait claquer… »
-Oh ! Joli ! J'aurais dû essayer aussi.
-Comment tu fais pour rester aussi…
-Normal ? Je dois être exceptionnel, que veux-tu.
-Tu te rends compte ?! J'ai souhaité sa mort !
-Et je vais t'apprendre un tour de magie : Si tu souhaites la mort de 50 personnes, elles mourront instantanément !

Léopold s'étonna. Roland soupira.

-Les gens meurent tous les jours, ce sont des choses qui arrivent, Léopold. Il meurt des milliers de personnes chaque jour, il en nait des milliers en retour. Ce que grossièrement l'étude scientifique dite « Le Roi Lion » appelle « Le cycle de la vie ». South Park y a donné un nom plus classe…
-Roland…
-Quoi ? Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Pauvre Megan ? Pauvre chérie ? Je ne le pense pas et toi non plus !
-Mais moi j'ai une conscience ! Je… Comment je peux… aller à son enterrement en sachant que j'ai souhaité sa mort ?!
-En smoking noir. Le noir est la tenue de deuil dans nos contrées.
-… Tu penses que je m'apitoie inutilement ?
-Ces gens qui font les questions et les réponses, parfois on voudrait les faire abattre.
-… Bon… Merci, Roland.

Roland soupira.

-Inutile de me remercier.

Roland ferma la porte et eut un éclair de génie.

« C'était « Le Cycle du Caca » dans South Park ! »

***

Roland s'était fait livrer des sushis. Il regarda le calendrier qui indiquait que l'enterrement se situait le lendemain. Il soupira à cette éventualité.

« Qu'est-ce que ça va être chiant !! »

On frappa à sa porte.

« Oh putain NON PAS ENCORE !!! »

Roland ouvrit à… Rachel, en larmes, toute de noir vêtue.

-Je… peux entrer ?
-… Oui bien sûr, Rachel, entre.

Il la laissa entrer contrairement aux autres. Il l'assit sur une chaise.

-Ca va ? Tu… supportes ?

Rachel hocha la tête. C'était bien Roland qui lui avait demandé ça.

-J… J'me sens tellement… coupable…
-Tu es bien la dernière à pouvoir penser ça.
-J… Je sais que toi tu t'en fous.
-C'est pas un mal, j'ai fait psy pour les trois autres qui sont venus tâter de ma sagesse.
-Ah bon ?
-Sans importance. Tu veux un café ?
-Non, j'veux pas te déranger.
-Alors je t'en sers un.

Il s'éloigna mais Rachel le retint par le bras.

-S'il te plaît !
-…
-Roland j'ai besoin de parler !
-Bon, parlons.
-Megan… C'était ma seule amie depuis… des lustres… J'avais jamais réussi à me faire une amie femme avant !
-Le choc t'aura amenée à commettre les pires folies.
-J… La soirée avant, je lui avais demandé si elle voulait pas prendre un verre, elle m'a dit non et elle est repartie…
-Et alors…
-Je me repasse la scène et j'aurais dû… J'aurais dû… L'aider, la réconforter… Je savais même pas qu'elle allait si mal.
-Personne ne savait et ne pouvait savoir.
-Mais moi quand même ! J'étais proche d'elle !
-Rachel…
-Pourquoi j'ai rien vu…

Roland soupira.

-Tu… peux la revivre des dizaines de fois dans ta tête, la scène se passera toujours de la même façon. Vous ferez votre soirée, elle partirait, tu la retiendrais mais elle te dirait… « Désolée, tu ne peux rien faire. Laisse les choses s'accomplir comme elles le doivent car c'est ainsi que cela doit être. »

Rachel regarda Roland qui soupira.

-Tu as le droit de t'en vouloir, c'est d'une légitimité que je ne peux ni dénier ni comprendre. Mais tu n'as pas le droit de te tourmenter comme ça, Rachel. Toi, tu es là, elle est là haut et… C'est ainsi que cela devait se passer. Elle l'a fait sans te le dire ou te le faire sentir pour une bonne raison. Elle ne voulait pas que tu la regrettes.

Rachel plissa les yeux.

-Tu le penses vraiment ?
-J'ai pas pour habitude de caresser les gens dans le sens du poil.
-… Merci.

Roland hocha la tête, légèrement saoulé par tout ça.

-Bon, eh bien puisque ça va…

Rachel lui enserra le cou et l'embrassa. Mais pas un petit baiser d'écolière, loin de là. Rachel l'embrassait avec passion et sauvagerie. Elle se serra contre lui. Pris par surprise, Roland laissa les choses se faire. C'était proprement à l'encontre de tout ce qu'il pensait vivre cette semaine. Pressante, elle le poussa vers la chambre, ce qui le surprit. Il tenta de se défaire de son étreinte mais elle serrait trop.

-R… At… Arr… Rach…

Elle l'allongea sur le lit, toujours aussi éprise, et avec empressement, elle chercha à déboutonner sa chemise. Elle le lâcha un instant ce qui lui suffit à…

La pousser sans ménagement.

Il reprit son souffle. Elle était surprise, tant par sa réaction que son propre geste.

-R… Roland, je suis…
-S… SORS D'ICI !!!

Il se releva sur ses coudes et s'essuya la bouche d'un revers de la main.

-DEHORS !!! TOUT DE SUITE !!! FOUS LE CAMP !!! OUSTE !!! ALLEZ !

Rachel se mordilla les lèvres.

-A… A demain… Désolée…
-C'est ça, à demain… Gnnn…

Elle sortit prestement. Il soupira et se frictionna le visage, non sans interrogations.

***

Le lendemain, Roland, Malcolm, Rachel, Léopold et Charlie se rendirent à l'enterrement.

-C'est parti pour des heures d'ennui…
-Si tu pouvais te taire, ce serait très bien ! Grommela Malcolm.
-Vous étiez pas si pressés de me voir me taire cette semaine !
-Oui bon, mais là… tais-toi ! Soupira Léopold.

Ils se réunirent là où le service funèbre devait être fait. Ils prirent place sur les chaises derrière la famille.

-Quelle barbe…
-Roland !! Grommela Charlie.

Une vieille femme se tourna vers Roland. Il soupira.

-Toutes mes doléances. Maman m'a toujours dit de pas dire « Con » pendant un enterrement.
-… Je suis Mélinda Lange, la mère de la défunte.

Tout le monde s'étonna. Malcolm fit vite le rattachement.

« Jay et Megan étaient frères et sœurs ! »
-Ma fille vous aimait éperdument. Vous êtes Roland Smirnoff si je ne m'abuse.
-Vous ne devriez pas vous abuser, rabattez-vous sur des plus jeunes.
-… Vous êtes comme votre père, un immonde petit rat !
-Il y a des fruits de mer au buffet ou votre bouche sent toujours comme ça ?!
-Votre père… Il s'est tellement fait remarquer le jour de cet examen post-voyage itinérant que les juges ont remarqué que j'avais donné mes Pokémon à mes élèves pour qu'ils gagnent. Résultat… Hn ! J'ai été suspendue. Par sa faute. Je ne m'en suis jamais remise. J'ai presque répudié Aquali et Magirêve. Mon Aquali, battu par le stupide Ecayon du môme… Et Magirêve humilié par l'Altaria de l'autre bouseuse… Quelle humiliation. Et ma suspension…
-Ouais, autant de trucs dont j'ai rien à battre.
-Ma fille vous aimait, je me demande bien pourquoi.
-Moi aussi. Vous avez peut-être une explication.
-Arrête de lui parler, maman… geignit Jay.
-Vous… Vous ne devez pas avoir la conscience tranquille.
-Plus que vous qui avez cautionné le délire obsessionnel de votre fille.

Mélinda regarda Roland qui la regardait sans ciller. Elle se mit à pleurer. Roland eut un sourire satisfait. Malcolm lui pinça la cuisse.

-Aïe !
-C'est un enterrement !! Tiens-toi, merde !!
-Ca va, c'est pas comme si on en avait quelque chose à foutre !

***

Tout le monde partit. Rachel donna ses condoléances à la famille. Malcolm se plaça à côté de Roland et soupira.

-Personne ne veut monter en voiture avec toi, je ramène tout le monde.
-Merci de m'épargner cette peine.
-Tu as été insupportable !! J'aurais mieux fait de ne pas te forcer à venir.
-Ces efforts que tu ne fais jamais…

Roland monta dans sa voiture. Il repartit.

Sur le chemin, il mit un CD.

-Pour toi, Megan.

La musique résonna. Roland chanta avec eux.

I swapped my innocence for pride
Crush the end within my stride

(J'ai substitué mon innocence à la fierté
Ecrasé la fin sous mon pied)


Said I'm strong, now I know that I'm a leaver
(Dit que j'étais fort, maintenant je sais que je suis un lâcheur)

I love the sound of you walking away
(J'aime le son que tu fais en dégageant)

Mascara bleeds a blackened tear
And I am cold, Yes, I'm cold but not as cold as you are

(Le mascara s'écoule en une larme noire…
Et je suis froid, oui je suis froid, mais pas aussi froid que toi.)


I love the sound of you walking away, walking away hey, hey
(J'aime le son que tu fais en dégageant, en dégageant, hey, hey)

Roland jubilait, souriant, comme libéré d'un poids d'un mètre soixante dix et de quatre vingt kilos.

Why don't you walk away?
Why don't you walk away?
No buildings will fall down

(Pourquoi tu ne dégages pas ?
Pourquoi tu ne dégages pas ?
Aucun immeuble ne s'écroulera !


Won't you walk away ?
No quake will split the ground !

(Aucun séisme ne déchirera le sol !)

Won't you walk away ?
The Sun won't swallow the sky !

(Le soleil n'avalera pas le ciel !)

Won't you walk away?
Statues will not cry !

(Les statues ne pleureront pas !)

Won't you walk away ?
Why don't you walk away ?
Why don't you walk away, hey, Hm-hmm…


Roland semblait vraiment soulagé. Comme si cette mort marquait un apaisement de son esprit.

I cannot turn to see those eyes
As apologies may rise

(Je ne peux me tourner vers ces yeux
Car des excuses pourraient émerger)


I must be strong and stay an unbeliever
And love the sound of you walking away

Je dois être fort, rester impassible.
Tout en aimant le son de toi qui fous le camp


Roland bougeait avec la musique dans sa voiture.

Mascara bleeds into my eye
I'm not cold, I am old, at least as old as you are

(Le mascara s'écoule dans mon œil…
Je ne suis pas froid, je suis vieux, au moins aussi vieux que toi…


Roland chantonna les « Lala lala » très gaiement.

As you walk away?
As you walk away
My headstone crumbles down

(Alors que tu te casses ?
Alors que tu te casses ?
Ma pierre tombale s'effondre)


As you walk away
The Hollywood wind's a howl
As you walk away
The Kremlin's falling
As you walk away
Radio Four is STATIC

(Alors que tu te casses
Les vent de Hollywood hurleront
Alors que tu te casses
Le Kremlin tombera
Alors que tu te casses
Radio4 s'en tape complètement


Roland monta chez lui en fredonnant la même chanson.

As you walk away, as you walk away, as you walk away, hey…

Il soupira devant sa porte en secouant la tête, finalement lassé par cette journée. Roland mit quelques secondes à sortir sa clé, et tourna l'instrument dans la serrure. Il ouvrit la porte et constata tout de suite la présence de sa sœur Lily sur le canapé.

-… Sa…lut ?!
-Coucou Roland…
-Qu'est-ce que tu fais ici ? Comment t'es entrée ?! Pourquoi t'es là ?!
-En fait… Comment dire…

David sortit de la chambre de Roland, une serviette autour de la taille.

-Elle est super, sa douche, il se refuse r… BWAAAH !!
-Oh génial… Que me vaut cette double visite, avant que je ne commette un double meurtre ?!

David passa un t-shirt. Lily sourit et haussa les épaules.

-Bah… On emménage !

Roland fit des yeux ronds comme des soucoupes.

-On t'a appelé mais tu répondais pas ! Sourit David.
-Toi, VA METTRE UNE CULOTTE ! Première fois que tu viens chez moi et je te vois à moitié à poil !
-Pardon pardon pardon !
-T'as oublié le « Pardon » d'exister aussi… Pourquoi ?!
-Pour l'année scolaire suivante. J'ai été acceptée à Safrania et David fait son internat de médecine à l'hôpital universitaire d'Argenta.

Roland soupira.

-Et donc…
-On squatte ici… si ça ne t'embête pas bien sûr ! Sourit Lily.
-Bah évidemment que ça…
-S'il te plaiiiit ! Ca nous arrangerait tellement ! Geignit David.

Roland soupira.

-Vous… me… faites… chier. Bon. Tant pis. Restez.
-Pourquoi t'es aussi bien habillé ?! S'étonna Lily.

Roland la regarda en souriant.

-Enterrement d'une collègue ! J'me suis follement amusé !

David et Lily grimacèrent. Roland posa sa cravate et souffla de lassitude. Il n'en avait pas fini avec, ce qu'il considérait comme des boulets dans sa vie.