Prologue : L'Énigme de la télévision
Le soleil s'était levé et éclairait un ciel azur parsemé de nuages en forme de duvet en coton. Tandis que certains rêvassait à l'ombre d'un arbre, d'autres s'autorisaient une promenade sur la plage ou un combat de dernière minute en plein air. Des papillusions papillonnaient de-ci de-là dans une danse effrénée. Le printemps… enfin ! Sur la plage de Littorella à Sinnoh des enfants jouaient avec leurs pokemons et se munissaient de courage pour affronter l'eau (un peu fraiche…). Un gamin d'environ 8 ans fit le beau sur son rocher, se prenant au passage pour un machopeur et roulant les muscles qu'ils n'avait pas, et plongea… un plongeon qui dût se finir tel que tout le monde doit l'imaginer : en un magnifique plat. Plat qui éclaboussa un garçon d'environ 16 ans aux longs cheveux d'un noir bleuté qui avait fait la seule erreur de passer ici au mauvais moment. L'eau froide sur sa peau chauffé par le soleil eut un effet électrisant qui le parcourut en un frisson. Ses vêtements, actuellement trempés, se résumaient à une veste sans manches ouverte sur son torse nu, un pantacourt bleu très large et muni de grandes poches au niveau des genoux. Supportant vraisemblablement peu la chaleur, il avait retiré ses bottes noires à rayures blanches ainsi que ses gants de la même couleur, il portait les uns à la main, les autres pendaient à l'une de ses poches. Il n'avait gardé que deux larges bracelets noirs à ses poignets.
Il s'ébroua vivement pour retirer son corps de l'engourdissement dans lequel l'avait plongé l'eau froide. À côté sa compagne ne put s'empêcher de le taquiner, moqueries qu'il chassa d'un haussement d'épaules avant de détourner le regard, plus résolu que jamais. Attitude qui ne fit qu'agrandir le sourire de la jeune fille à ses côtés. Elle devait elle aussi avoir dans les 16 ans bien que son port de tête et son air mature la rendait plus âgée que son compagnon. Elle avait de longs cheveux verts et de grands yeux marron. Certains trouvaient que sa pâleur excessive avait quelque chose de maladif, mais la malade était étrangement belle malgré tout et cette pâleur y pourvoyait. Elle portait une longue tunique blanche fendue sur le devant, un pantacourt vert feuille, et de longs gants de la même couleur. Autant dire que ce couple était des plus étranges et ne passait pas franchement inaperçu. Ils quittèrent la plage, cherchant manifestement un lieu bien spécifique.
Le garçon s'arrêta, les bottes toujours en main, n'étant apparemment nullement incommodé par les cailloux qui parsemaient le chemin, pour regarder sa compagne, attendant manifestement quelque chose. La jeune fille plissa les yeux, très concentrée, puis elle désigna un chemin qu'ils prirent aussitôt. Ils arrivèrent très vite à un centre Pokemon.
Une fois à l'intérieur, le jeune homme avait de nouveau enfilé ses bottes, ils s'assirent sur l'une des banquettes observant au passage ce qui les entourait. Il se tenait là moult dresseurs, attendant la guérison de leurs pokemons, ou bien s'autorisant une petite pause dans leur périple. Les deux étrangers semblaient regarder chaque pokemon avec une pointe de mélancolie dans les yeux. Dans un coin un dresseur solitaire caressait son Etourmi. Ravi de ce geste plein de tendresse celui-ci inclinait sa tête vers son dresseur, les yeux fermés. Puis le pokemon volant les rouvrit pour regarder les portes vitrées du centre laisser place à un autre jeune homme d'environ douze ans. Sur son épaule se tenait un Lixy des plus joyeux.
Manifestement, ils se connaissaient, car celui à l'Etourmi se leva et se dirigea vers lui.
"Alors ? À la traine comme toujours ?
-Peut-être bien que je traine en chemin, mais je peux t'assurer qu'au combat je ne chaume pas !
-Très bien, je prends ça comme un défi.
-Tu fais bien."
Et ils sortirent. Nos deux acolytes semblaient quelque peu perdus et sans même se regarder pour se mettre d'accord ils se ruèrent vers la fenêtre pour voir ce qui allait se passer au juste. Un défi ? Comment ça un défi ?
Et puis… aucune insulte n'avait été échangée ! Cela était-il suffisant pour s'échanger des coups ? C'était une nouvelle coutume de se battre dés que l'envie nous en prenait ? Mais c'était quoi cette embrouille ?
Voici, en gros, ce à quoi ils pensaient, et cela alla en s'intensifiant lorsque le dresseur d'Etourmi prit dans sa main une petite balle blanche et rouge qui grossit subitement et qu'il lança en appelant un nom de pokemon. Son rival fit de même.
"Mustebouée, go !
-Keunotor, go !"
Il y eut une lumière blanche et les deux pokemons apparurent l'un en face de l'autre. Voilà autre chose, les deux gars voulaient se battre mais ils envoyaient leur pokemon... et puis... commet ils sont rentrés dans cette balle ces deux-là ?
De plus en plus médusés nos deux héros restaient obstinément plantés devant leur vitre, essayant de comprendre à quoi pouvait bien rimer tout ce cirque. Qu'allaient faire ces deux gamins avec leurs pokemon ?
"Mustebouée, vibraqua !
-Keunotor, esquive et enchaine avec vive-attaque !"
Le Keunotor se rapprocha dangereusement de sa cible mais au dernier moment Mustebouée exécuta un pistolet à eau en direction du sol ce qui eu le mérite de l'élever dans les airs et d'esquiver l'offensive, puis il enchaina avec un autre pistolet à eau, cette fois sur Keunotor. Celui-ci, pris au dépourvu se la reçut de plein fouet…
Quoi ? Les deux énergumènes allaient de surprise en surprise, comprenant de moins en moins ce qui se passait autour d'eux. Comment pouvait-on obliger des pokemons à se battre pour une chose aussi insignifiante que... que... quoi d'ailleurs ? Pourquoi se battaient-ils ? Voilà qui les dépassait totalement.
Et tandis que le combat battait son plein, un flash télévisé changea le sujet d'attention des deux nouveaux arrivants. Ils regardèrent, éberlués, cette boite noire avec des images qui défilaient toutes semblant être plus réelles les unes que les autres. Le garçon aux cheveux bleutés, se reprenant, se dirigea vers l'objet électronique et en fit le tour, le regardant sous tous ses angles.
Rien à faire, il ne comprit pas comment cela était possible… il releva la tête et se rendit compte que tout le monde le regardait. Certains le dévisageaient, d'autres ouvraient de grands yeux devant sa tenue et les dernier le prenait manifestement pour un attardé.
Il regagna aussitôt sa place sur sa banquette en faisant mine d'emporter quelque chose qu'il avait laissé par terre. La mâchoire crispée, il focalisa toute son attention sur l'écran, même à cette distance... il percerait son secret ! Et ce fut avec un regard plus perçant que celui d'un Roucarnage qu'il foudroya la boite.
La fille à ses côté murmura, l'air de rien :
"Si tu continues comme ça, tu vas le faire exploser."
Elle ne savait que l'objet "télévision" était féminin. Quelqu'un de normal aurait pris cette remarque pour une plaisanterie, mais elle semblait très sérieuse et son coéquipier se détendit, comme s'il se rendait effectivement compte que cela pouvait arriver, mais il ne cessa cependant de regarder, incrédule, ce "machin devant lui".
"… toujours aussi prompts à faire plaisir à nos amis les pokemons !
Passons maintenant au grand titre du jour : la catastrophe d'Iltia. Des fumées noires ont été aperçues tôt ce matin alors que diverses personnalités comme le Professeur Chen et ses pairs se rendaient sur l'île en espérant pouvoir enfin en atteindre les côtes après ces 500 ans de blocus. Ils espéraient réengager des démarches démocratiques et voir s'il existait des pokemons encore inconnus réfugiés sur cette terre qui a sans doute évolué différemment dans son isolement. D'après un communiqué de radio, ils n'auraient trouvé que cendres et dévastation. Il serait, d'après eux, impossible de mener une enquête : "ce n'est qu'un désert de cendre", confirme le professeur Orme.
Aaron, se trouve actuellement là-bas pour plus d'information.
Aaron, bonsoir.
- Bonsoir Giselle.
Je me trouve actuellement sur la falaise d'Iltia et en effet tout n'est que dévastation, voyez par vous-même, derrière moi s'étendent des dunes de cendres. Le vent en soulève des particules dans des nuages noirs inquiétants qui ne révèlent absolument aucune habitation. Je répète, aucune habitation. L'air est irrespirable dans les terres, c'est pourquoi nous nous tenons ici où l'air marin chasse les particules nocives.
-Aaron, croyez-vous que des scientifiques spécialisés seraient en mesure de mener une enquête ?
-C'est difficile à dire, Giselle. Comme je l'ai dit auparavant, il n'y a aucune trace d'habitation… en fait, il n'y a plus rien. Le paysage est déchiré, il n'y a pas une once de métal, une once de vie, pas de rochers, juste du relief et de la cendre. Autant être franc, on se croirait sur une autre planète et à moins d'une équipe ultra équipée, je ne vois pas ce que l'on pourrait en tirer.
-Merci Aaron. Passons maintenant au titre suivant, hier …"
Le reste de l'émission croula sous les discussions multiples et cris d'indignation qui naquirent instantanément dans tout le centre pokemon. Chaque personne avait attendu avec impatience la fin du blocus afin de savoir ce que réservait cette terre inconnue d'Iltia. Beaucoup étaient venus à Littorella pour s'apprêter à prendre le premier bateau qui leur permettrait de rejoindre les rives de la mystérieuse île et de partir à la rencontre de nouveaux pokemons ! Mais voilà que leurs espoirs étaient partis en fumée, littéralement ! Seules quatre personnes ne disaient rien à ce sujet : les deux dresseurs qui venaient de terminer leur match et qui n'avaient pas assisté au flash télévisé et les deux énergumènes sur leur banquette.
Finalement le garçon se laissa aller sur le dossier moelleux, songeur.
"Dis, tu comprends quelque chose, toi ?
-À vrai dire… de moins en moins. Et pourtant je pensais que la situation ne pouvait être plus critique."
À cette réponse le jeune homme regarda la télé d'un air dubitatif, soupira et s'étira mieux qu'un chat.
"Je suppose que de toute manière on ne peut aller que de l'avant, non ?
-Oui bien sûr… suffit juste de nous adapter à un monde qui nous est totalement inconnu sans se faire remarquer… rien de bien dramatique.
-Tu crois vraiment que ce serait mal de dire qui nous sommes vraiment ?
-Disons plutôt qu'il vaut mieux éviter de devenir des bêtes de foire tant qu'on ne sait pas nous même ce qui s'est passé.
-Pas faux."
Le garçon finit par relâcher ses muscles, l'air ravi. Un groupe de jeune filles n'avaient strictement rien raté du spectacle... et lançaient des regards noirs à la fille aux côtés de leur nouvelle idole. Elles s'échangèrent des messes basses en faisant des mimiques très significatives sur les projets machiavéliques qu'elles mettaient en place pour détruire cet obstacle indésirable aux cheveux verts. L'intéressée s'en aperçut et croisa obstinément les bras au-dessus de la table, s'efforçant de penser à autre chose. Faut croire que l'obstacle indésirable n'allait pas se laisser faire comme ça… Ceci dit, si quelqu'un, n'importe qui, pouvait intervenir et faire en sorte qu'on l'oublie…
"Comment ça le bateau en route pour Iltia a été annulé ? Mais je veux y aller !
-Sacha, calme-toi ! Il doit y avoir une explication, pas vrai, infirmière Joëlle ?
-Bien entendu, comme vous venez d'arriver je suppose que vous n'avez pas vu les infos, ils disent qu'Iltia a été réduite en cendre par un phénomène qu'ils n'expliquent pas encore. Et les cendres empêchent quiconque de s'aventurer dans les terres.
-Tu vois ! Et maintenant Pierre si tu pouvais… Pierre ? Oh non… c'est pas vrai, il a remis ça."
Le Dom Juan avait en effet "remis ça" et se tenait en ce moment même aux pieds d'une inconnue aux cheveux verts qui ne comprenait absolument rien à ce qui lui arrivait.
"Belle demoiselle…"
C'était à peu près la seule partie du discours dont elle saisissait le sens, après il la compara à de la pâtisserie raffinée et à une douce prairie printanière parfumée… elle se demandait encore comment elle était sensée le prendre quand un Cradopaud un peu belliqueux sortit de nulle part et lança un Direct Toxik sur le garçon. Encore plus interloquée la jeune fille était figée, la main que le jeune garçon lui avait pris toujours en l'air et les méninges surchauffées.
"Aïe... la prairie, la prairie..."
Elle ne comprenait peut-être rien, mais c'était tellement comique qu'elle ne put s'empêcher de rire. À ses côtés son compagnon lui lança avec humour :
"Voilà que t'as tapé dans l'œil d'un parfait inconnu."
Il pouvait parler lui…
Mais ce n'était pas fini ! Une jolie brune avec un Tiplouf et un drôle de bonnet se campa près d'un garçon aux cheveux noirs accompagné d'un Pikachu qui avait rejoint en vitesse la scène du carnage. Sacha, la main dans les cheveux et l'air gêné fit :
"Désolé, il fait toujours ça dés qu'il voit une jolie fille.
-Ah ? Euh... eh bien c'est plutôt flatteur, pas de quoi en faire drame" répondit la fille en question, de plus en plus gênée d'entendre de partout qu'elle était "belle", "jolie"... c'était quoi ces gens ?!
"Ravi que tu le prennes comme ça. Je suis Sacha du Bourg Palette et je serais le prochain maître pokemon !" qui ça ?, ne put s'empêcher de penser son interlocutrice "Lui c'est Pierre son rêve est de devenir le meilleur éleveur de pokemon.
-Moi c'est Aurore, coordinatrice, ravie de vous rencontrer."
La jeune fille aux cheveux verts marqua un temps d'arrêt, désorientée par tous ces noms aux connotations inconnues et tous ces termes farfelus. Son compagnon en profita pour prendre la parole, bien qu'il n'avait rien compris non plus.
"Moi c'est Lu… commença le garçon.
-Lou ? C'est pas un nom de fille ça ? le coupa Sacha."
Celle aux cheveux verts abandonna aussitôt ses tentatives pour trouver une explication aux termes qu'elle venait d'entendre et vola à son secours.
-Si, si c'est mon nom, répondit-elle en lançant un bref coup d'oeil à son compagnon. Euuuh... c'est quelqu'un de très poli et il me présente toujours en première...
-Ah pardon… s'excusa de nouveau Sacha.
-Si tu laissais les gens finir leurs phrases Sacha ! Tu vois bien que ce garçon est quelqu'un de courtois qui présente la jeune fille avec qui il voyage.... Ravi de connaître votre nom, belle demoiselle !
-Ah, Pierre ? Déjà là ? Bon alors toi c'est quoi ton nom ? redemanda Sacha.
-Euh... Aaron, répondit l'intéressé en reculant un peu dans la banquette devant le demi-tour tout juste contrôlé que venait de faire Sacha pour s'adresser à lui.
-Wahouuu comme le reporter ? s'esclaffa Aurore.
-Euh... oui, oui, exactement."
L'étrange couple s'échangèrent un bref regard... bon le tout maintenant c'est de s'habituer à ces nouveaux noms.