Souvenirs
Après l'incident dans la salle d'attente, j'eus droit à une petite discussion avec Jill. Nous nous assîmes à nouveau, et elle m'expliqua calmement :
- Ecoute, Kirby…Je comprends que ce n'est pas très facile pour toi, tout ce qui se passe. Mais, il faut que tu essayes de te contrôler ! Il ne faut pas que tu te comportes ainsi, ou tu vas t'attirer de sérieux ennuis !
- C'est promis, grognais-je.
Bien que je ne fusse pas très enchantée à l'idée de devoir contrôler mon instinct sauvage, je me résignais quand même à suivre le conseil de Jill.
Une voix claire retentit, venant de derrière la porte du bureau de Rose.
- Au suivant !
- C'est la voix de Miss Bettendorf, me chuchota Jill. On y va ?
- Oui, soufflais-je.
Et nous pénétrâmes dans le bureau de la directrice. Les rideaux ouverts et le soleil qui baignait la pièce, lui donnaient un côté chaleureux. Rose était assise sur sa grande chaise, derrière son bureau. Elle avait les mêmes cheveux roux et bouclés que sa fille, Eva. Ses yeux marron cachés derrière ses lunettes rectangulaires, étaient encadrés par de longs cils fins. Elle avait quelques tâches de rousseur et une peau très blanche. Le joli bureau était couleur or, argent et bronze. Trois couleurs, qui allaient vraiment bien ensemble, et qui donnaient au bureau, une allure de paradis. Mon amie s'avança prestement devant le luxueux bureau de la directrice, orné de décorations dorées.
- Bonjour Madame, salua rapidement Jill.
- Jill ! s'exclama Rose, de sa voix douce et pure. Que puis-je faire pour toi ? Tu as un problème ?
- Non, non ! Mais je voulais vous présenter Kirby. Vous savez, la nouvelle ?
- Oui, oui. Je vois. Approche, jeune fille, continua la directrice, me faisant signe d'avancer.
Mon ventre se serra. J'avais peur de ne pas plaire à Madame Bettendorf. Une impression de déjà vu me sauta aux yeux. Rose, avec sa voix si douce me disant d'approcher.
Une forte lumière m'aveugla soudain. Ce que je voyais était totalement différent du somptueux bureau de Rose. J'avais l'impression de me trouver dans un endroit totalement différent. Comme si, en un instant, j'avais changé d'univers… Je voyais un pokémon. Je n'arrivais pas à discerner qui il était exactement. Ce pokémon tendis doucement une patte vers moi.
- Approche, me dit-elle.
Sa voix était aussi claire que celle de Miss Bettendorf. Je perdais la tête.
La même lumière aveuglante me ramena à la réalité, dans le bureau de Rose. Jill passait anxieusement sa main devant mes yeux.
- Kirby, tu vas bien ? s'enquit-elle.
- O…oui, ça…ça va.
- Que t'es t-il arrivé ?
- Je…je ne sais pas, c'était…bizarre…
La directrice me regardait d'un air triste et soucieux à la fois. Jill aussi semblait soucieuse. Mais, j'étais déterminée à faire connaissance avec Rose Bettendorf. Alors je décidais de remettre les explications sur ce qui venait de m'arriver à plus tard. D'autant que je ne comprenais pas trop ce qui venait de ce passer.
- Ne vous en faites pas, bredouillais-je. Mon esprit est un peu embrouillé en ce moment…
Pas très convaincue, Rose engagea la conversation :
- Bien sûr, nous te comprenons. Tu dois être très perturbée en ce moment…Dis moi, Kirby, est-ce que cela te plairait de résider à l'Orphelinat Bettendorf, le temps que tu éclaircisse un peu ta situation ?
- Oh oui alors ! m'exclamais-je. J'aimerai beaucoup !
Et moi qui pensais qu'on ne voudrait pas de moi à l'Orphelinat ! J'avais eu tout faux.
- Bon ! Dans ce cas, bienvenue parmi nous, Kirby !
Je remerciais encore la directrice, qui m'envoya un sourire radieux. Elle pria Jill de me montrer ma nouvelle chambre, tout en lui indiquant le numéro de celle-ci. Jill me demanda de la suivre, et nous sortîmes sans piper mot du bureau de Rose.
Une fois arrivées dans le couloir, la blondinette m'interrogea, brûlant de curiosité :
- Peux-tu m'expliquer ce qui t'est arrivé, tout à l'heure ?
- C'est compliqué à expliquer, avouais-je. Pour être franche, je ne sais pas ce qui s'est exactement passé. J'ai vu tout blanc, et puis, ensuite, j'ai été…comme transportée dans un autre univers ! C'était si étrange ! J'ai eu une sorte de…de vision !
- Une vision ?
Jill parut réfléchir un moment. Elle tirailla sa frange quelques instants, puis s'exclama :
- A mon avis, ce que tu as vu, c'était un souvenir.
Un souvenir ? C'était fort probable…
- Tu sais, reprit Jill, des fois, les humains amnésiques retrouvent leur mémoire. Ca prend du temps, mais ça arrive. Souvent, ça commence par un petit souvenir, ajouta t-elle, en me lançant un regard complice.
Nous entreprîmes de reprendre notre chemin vers ma chambre. Au bout de quelques instants, nous arrivâmes devant deux portes. Une bleue et une rose. J'adressais un coup d'œil indécis à Jill.
- La rose, c'est le dortoir des filles. La bleue, celle des garçons, m'expliqua calmement mon amie.
Elle saisit la poignée de la porte rose, et l'ouvrit. Tout était rose. Je n'aimais pas cette couleur.
- Tu sais, dans chaque chambre, il y a deux lits. Donc, dans la tienne, il y en aura un pour toi, et un pour une autre fille.
- J'ai hâte de savoir avec qui je partagerai ma chambre ! m'exclamais-je.
- Et moi, j'ai hâte de savoir avec qui tu vas te retrouver !
Nous arrivâmes devant une nouvelle porte rose. Le numéro « 280 » y était inscrit. Jill se mit à rire.
- Puis-je savoir ce qu'il y a de drôle ?
- Je sais avec qui tu vas partager ta chambre !
- Comment le sais-tu ?
- Je connais la personne qui réside dans cette petite chambre, pouffa mon amie.
Après quelques secondes d'hésitation, j'ouvris la porte. Une jeune fille aux longs cheveux blonds, était tournée vers la fenêtre. Elle se retourna, apparemment surprise de nous voir débarquer. J'eus un choc. Jill se plaça juste à côté de la fille blonde : elles se ressemblaient comme deux gouttes d'eau.
- Mais qu'est-ce que tu fous-là, Jill ? pesta la fille blonde.
- Tais-toi un peu, grogna Jill.
J'examinais les deux filles de très près. Le même teint, les mêmes yeux, les mêmes cheveux d'or. Après une minute, je m'exclamais :
- Jill ! Comment as-tu réussi as te cloner ?
- J'suis pas son clone ! fulmina l'autre fille blonde.
- Du calme June ! tenta Jill. Cette fille là, c'est Kirby. Tu sais, la fille, dont tout le monde parle en ce moment ?
La dénommée June sembla s'apaiser.
- Ah, excuse moi ! J'avais pas compris que t'étais la nouvelle.
- Et bien maintenant, tu le sais ! lui lança Jill. Kirby, June n'est pas mon clone ! C'est ma sœur jumelle.
Jill et June m'expliquèrent brièvement ce qu'étaient des jumelles, ou des jumeaux.
- Pourquoi est-ce que vous n'êtes pas dans la même chambre ? interrogeais-je.
- Parce qu'on se dispute trop souvent, déclara June. Alors, on a préféré prendre des chambres séparées. Alors, c'est toi ma nouvelle copine de chambre, c'est ça ?
- Je crois bien, oui ! m'exclamais-je.
Au bout d'un petit moment, Jill s'éclipsa, me laissant seule avec sa sœur. Celle-ci tapota un lit aux draps roses.
- C'est ton lit ! m'indiqua t-elle.
Je fit la moue : encore du rose.
- T'inquiète, on s'habitue à la couleur, au bout d'un moment, plaisanta June, comme si elle avait lu dans mes pensées. C'est comme ça. Les filles ont toujours des trucs roses, même si elles n'aiment pas forcément cette couleur. Personnellement, je préfère le gris et le noir. Bon, qu'est-ce que tu veux faire ?
- Je n'en sais trop rien.
La blondinette chercha un instant.
- Laisse tomber, lançais-je. Je vais bien trouver de quoi m'occuper.
Sur ce, June saisit un casque gris, qu'elle disposa sur sa tête.
- C'est quoi ? m'enquis-je.
- Ca ? C'est mon baladeur. C'est un casque, qui fait de la musique.
- Ah.
- Tu veux écouter ?
- Ouais…
June me plaqua le baladeur contre les oreilles, mais je lui rendis aussitôt. La musique que June écoutait me fit mal aux oreilles. Voyant ma grimace, elle précisa, tout en m'enlevant l'engin des oreilles :
- On appelle ça du Hard Rock.
Il était environ vingt heures lorsque June m'annonça que nous devions aller dîner. Elle m'indiqua que tous les élèves se retrouvaient dans le réfectoire, le matin, le midi et le soir, pour manger. J'avais hâte de découvrir la nourriture humaine ! Nous traversâmes donc les couloirs, jusqu'à arriver à la cantine. Nous nous assîmes à la même table que Jill.
- Alors ? s'enquit Jill. Ma sœur ne t'en a pas fait voir de toutes les couleurs ?
- Non, ça va ! rigolais-je.
Tout en assénant un petit coup à Jill, June lui chuchota :
- Elle a fait connaissance avec le Hard Rock !
- Ma pauvre, me plaignit Jill. Ne t'en fait pas ! Ce n'est pas tout le monde qui aime le genre de musique de June !
Nous éclatâmes toutes les trois de rire. Un vieil homme nous apporta à chacune un petit carré de nourriture.
- Ce sont des lasagnes, précisa Jill.
Je goûtais précautionneusement. Un arôme salé envahit ma bouche.
- Ch'est trop bon ! m'exclamais-je, la bouche pleine.
Et c'est en riant que nous continuâmes à manger.