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Un long parcours de YumeArashi



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» Auteur : YumeArashi - Voir le profil
» Créé le 25/01/2009 à 13:02
» Dernière mise à jour le 27/07/2009 à 19:44

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Le Feu
Mon sommeil fut ponctué de sursauts et de réveils impromptus. Je ne saurais dire à quoi cela était dû dans la mesure où je me sentais étrangement sereine.
J'ouvris doucement les yeux comme à l'accoutumée, vers six heures du matin, heure du coq ou en l'occurrence, moment favori de toute une ribambelle de petits pokémon affublés d'une note de musique sur le haut du crâne, qui s'égosillaient joyeusement.

« Pijakooooooo ! Pijakoooooooo ! Piiiiii, piiiiii ! »

J'en arrivais à trouver leurs chants agréables : je ne me reconnaissais pas. Je dodelinai de la tête, prête à replonger encore un peu dans la rivière des rêves. Or, je ne pus me rendormir... Mon odorat m'indiquait que quelque chose n'allait pas : en effet, c'était le cas, une désagréable senteur de tissu brûlé flottait dans l'air, aussi je tournai légèrement la tête pour essayer d'en identifier la provenance. Complètement emberlificotée dans le sac de couchage dont je tentais de me défaire, on eut dit en cet instant précis une énorme saucisse potelée aux yeux cernés qui se débattait désespérément, pour ne pas aller griller dans une poêle. Non, les saucisses n'ont pas d'yeux, rassurez-vous.
Ce que je vis me surpris énormément et m'obligea à m'immobiliser sans attendre ; je n'avais pensé un seul instant que ce fut si... facile.

Ponyta était couchée à à peine deux mètres de moi. Sa respiration était calme et régulière. Elle dormait assurément. Je me retins de pousser un cri lorsque j'aperçus mon sac tout près de sa crinière, en contact direct avec les flammes. L'odeur, elle venait donc de là ! Mes livres ! J'allais lui sauter dessus pour récupérer les précieux manuels quand je réalisai que si le tissu avait du prendre feu, il n'aurait sans doute pas attendu mon éveil pour me narguer. Ponyta était certainement couchée ici depuis longtemps. Cela m'intrigua, et défiait surtout toutes les connaissances que j'avais acquises au cours de ma vie. Le tissu étant un parfait combustible, il brûlait forcément à moins qu'il ne soit ignifuge. Comment ce qui se passait sous mes yeux pouvait être possible ? Je défiai quiconque de répondre à cette question.
Quant à la température extérieure, elle ressemblait « à s'y méprendre » à celle d'une fraîche matinée d'été ; pas à celle d'un four préchauffé à 300°C. La proximité de Ponyta aurait du générer une augmentation sensible de la chaleur, pourtant, je ne sentais rien. Encore une autre surprise.
Je me pris à observer la jument plus précisément. Comme elle semblait tranquille. Sans comprendre que je courrais à toute vitesse vers un piège vicieux, je me laissai posséder par la danse endiablée à laquelle se livraient les « crins » flamboyants du pokémon. C'était si beau. Tantôt une mise à mort macabre, tantôt un entrelacs puissant des plus sensuels : des formes éthérées apparaissaient, puis se fondaient en un amas chaotique létal pour ensuite onduler légèrement et se mouvoir en une gerbe d'étincelles mutines qui explosaient, ravissaient l'âme et...

« HAYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIEEEEEE !!! »

Le hurlement avait sans doute atteint l'autre bout du pays.

J'avais apparemment approché ma main trop près de la crinière de Ponyta et celle ci s'était réveillée à ce moment précis. Ce type de familiarités ne lui avait absolument pas plu et le pokémon s'était levé en deux temps, trois mouvements. Un tourbillon de flammes emprisonnait maintenant mon avant-bras droit. Dieu ce que ça faisait mal !
Je courus jusqu'à l'abreuvoir où je plongeai mon membre enflammé. L'attaque avait littéralement ravagé les chairs qui se disloquaient, rongées et presque saignantes. A peine entrai-je en contact avec l'eau qu'il y eut un nuage de fumée considérable qui m'étouffa, me fit pleurer et tousser.

« Mais elle est complètement cinglée ! » Fis-je en mordant ma lèvre inférieure, une fois le « brouillard artificiel » dissipé.

Je restai ainsi, agenouillée, le bras dans l'abreuvoir et attendant que l'affreuse douleur lancinante s'atténue. C'était une sensation absolument horrible et je me retins de hurler. Les Marill apparurent un par un, frappant sur leur petit ventre rond, et toujours ce regard menaçant. Ils aspergèrent violemment Ponyta et l'enfermèrent quelques secondes dans un dôme aquatique, histoire de la punir. Le jument suffoquait, était véritablement sur le point de rendre l'âme vu la faiblesse des flammes de son corps. J'avais de plus en plus mal et j'étais bien trop concentrée sur ma blessure pour voir ce qui se passait derrière. Les Marill rompirent le cercle et Ponyta s'écroula sur le sol, les yeux clos.

J'entendis des bruits de pas et des bonds, quelqu'un courrait vers moi. Lionel, encore en pyjama, les cheveux en bataille et Oké sur ses talons, avançait au pas de course à ma rencontre. Il sauta habilement par dessus la barrière et, essoufflé, se planta à ma droite. Je sentis qu'il observait la scène puis il se mit à me parler.

« Mais qu'est-ce qui se passe ? J'ai entendu un cri à réveiller les morts ! J'ai pensé qu'on égorgeait quelqu'un ! Et puis... qu'est-ce que tu fous dans l'abreuvoir ? Demanda t-il en haussant un sourcil.
- Rien, je me baigne, ça se voit pas ?! Répondis-je agressivement. - Elle vient de me... DÉMOLIR LE BRAS, VOILA CE QU'IL Y A !!
- Oh, mais pourquoi tu es dans l'enclos ?
- Tu demanderas ça à ceux qui ont eu la bonne idée de me confier cette « mission ». Ce que ça fait mal ! Je comprends pas pourquoi la douleur ne passe pas, l'eau devrait justement la diminuer... Argh... »

Lionel se pencha au dessus de moi et soupira en intimant à Oké de cesser de sauter partout.

« Mouais... Bon, fais-moi voir, tu me raconteras après. »

J'extirpai mon bras de l'eau et le lui tendis : une large tâche brunâtre se formait doucement.

« Oh mon dieu... C'est vraiment... Ça... Ça sent le cochon trop cuit ! Bouge pas, je vais chercher de quoi soigner ce truc. Je te laisse Oké, il va te tenir compagnie, fit-il en riant.
- C'est ça...
- Okéééééééééé ! »

Pendant que le petit pokémon jouait au soldat en mission autour de moi, je cherchai Ponyta du regard. Je la trouvai complètement avachie sur le sol, les flammes de son encolure luisaient très faiblement et les Marill étaient toujours en cercle autour d'elle. Dix minutes s'écoulèrent pedant lesquelles je surveillais la jument qui ne bougeait plus du tout.

« Elle est très mal en point, tu sais... »

Lionel était revenu, vêtu d'une chemise à carreaux et d'un jean, à peu près coiffé. Il tenait une petite corbeille remplie de baies et de diverses plantes.

« Comment peux tu le savoir ? Demandai-je, sans quitter Ponyta des yeux.
- Son feu ne doit pas s'éteindre sinon elle meurt. Plus il est faible, moins son état est au beau fixe.

Tout en expliquant le mécanisme, il commença à retirer sa ceinture de cuir. Lorsqu'il se tut, je me tournai vers lui et le regardai faire avec une profonde inquiétude...

« Dis moi Lio... commençai-je prudemment. Qu'est-ce que tu fais ?
- Je me mets à poil ! Ça se voit pas ? »

Il éclata de rire. Bêtement, je me dis qu'il aurait pu ne pas mentir et je rougis, gênée. Mon teint s'accordait à merveille avec la couleur du morceau de cochon grillé auquel Lionel avait comparé mon bras. Il me tendis la ceinture.

« C'est juste pour épargner mes tympans, répondit-il en souriant.
- Pourquoi ? Je n'en ai pas besoin !
- Comme tu voudras. »

Lionel sélectionna quelques baies, les réduisit en bouillie, les mélangea entre elles, - « Oké, ce n'est pas pour toi, vas t'en ! » - et ajouta des feuilles hachées avant de broyer à nouveau le tout. Il en fit un cataplasme qu'il répartit sur une gaze stérile, respira un grand coup - « Prête ? » - et sans attendre quelque protestation de ma part, l'apposa sur mon bras à moitié calciné.
Une violente piqûre traversa le membre endolori d'un bout à l'autre : j'attrapai la ceinture que je plaçai dans ma bouche : je la mordis le plus fort que je pus tandis que mes yeux pleuraient. Toute la zone en contact avec le produit s'engourdit. Les montagnes russes de la douleur. Puis ce fut fini, et je soupirai un grand coup.

« Tout va bien ?
- Moui... Tiens, marmonnai-je en lui tendant la ceinture.
- Ouch ! Mais t'as vu la marque ? Ce ne sont pas des dents que tu as, ma parole, ce sont de véritables crocs !
- Tu sais ce qu'elle te dit, la fille aux crocs ? Maugréai-je, vexée.
- Je te soigne et tu me hurles dessus... Quelle éducation ! Dit Lionel en riant.
- ...
- Tu vas garder un petit souvenir de cet adorable pokémon, je pense. Tiens, je t'ai ramené du thé chaud.
- J'en ai dans mon sac.
- Peut-être, mais celui que tu prépares toi-même est absolument infecte. »

On se mit à rire. Cela nous détendit et on resta assis dans l'herbe haute quelques minutes sans rien dire avant que Lionel ne rompît le délicieux silence.

« Je m'en vais ranger la cuisine, tes parents sont partis vers quatre heures ce matin et on a pas mal de pain sur la planche. Préparer les petits déjeuner des clients entre autres. Je t'aiderai !
- C'est sympa mais ce n'est pas nécessaire, tu es un pensionnaire pas un gérant.
- Même si je ne le voulais pas, j'y serais contraint. T'auras du mal à faire certains trucs avec ton bras bionique. »


***

Lionel quitta les lieux, Oké sur les talons et ferma la porte de la cuisine dans laquelle il entra, me laissant seule.

« Ca picooooote... »

Je me relevai péniblement en m'appuyant sur mon bras valide. Le vent s'engouffrait parmi mes longs cheveux emmêlés et me fit frissonner. Quant au cheval de feu, il se trouvait toujours étalé par terre, ses frêles flancs se soulevant par à coups : la respiration se faisait difficilement et je ne savais pas ce qu'il avait. Ponyta était en réalité extrêmement maigre, l'on voyait apparaître ses côtes, une partie des os du rachis et ceux de ses hanches, ses jambes n'étaient pas bien robustes et son encolure peu musclée. Cela pouvait aisément s'expliquer à la simple observation de la mangeoire du pokémon. Constamment pleine, car jamais vidée, alors que Ponyta galopait tout la journée d'un bout à l'autre de l'enclos, et n'absorbait comme seul élément vital que l'eau de la rivière, c'était comme si elle se livrait à un rituel de jeûne, un régime fatal qui l'amènerait à coup à quitter notre monde. Peut-être était-ce pour cela qu'elle tentait par conséquent de faire le plus de mal possible autour d'elle. Elle voulait transmettre, faire comprendre quelque chose, qu'on ne l'oublie pas. Et rester dans cette pension ne l'aidait en aucun cas à accomplir ce à quoi elle se destinait. J'avais entendu Phil raconter une histoire à propos des pokémon légendaires et la lier avec Ponyta. « Elle se prend pour les fondateurs de notre Terre, elle aspire à faire de grandes choses, elle n'est pas comme les autres. Je ne peux pas la sonder, je sais juste qu'elle veut aller loin ou mourir.. » Telles avaient été ses paroles avant qu'il ne se rende compte que j'écoutais à la porte.

Je fouillai dans le sac roussi et en sortit un petit calepin où j'entrepris de noter mes observations. Je me prenais d'affection pour la jument malgré son attitude belliqueuse, son caractère de cochon, son regard de tueur et cette espèce de pouvoir, d'emprise qu'elle exerçait sur moi. Au bout d'une vingtaine de minutes, elle ne s'était toujours pas relevée. Par défaut, je jetai un regard vers l'escouade de Marill, somnolent à demi. Un muscle de Ponyta tressaillit. Immédiatement, la plus grosse des souris aquatique ouvrit les yeux et prépara une attaque Pistolet à O qu'elle lança sur le pauvre pokémon, à ce moment sans défense. Elle fut immédiatement imitée par les membres de la troupe de surveillance et je vis Ponyta hennir... Mes oreilles souffrirent..

« Mais qu'est-ce que vous faites ?! ARRÊTEZ !! » Hurlai-je.

Les pokémon firent volte face nonchalamment. J'allais de surprise en surprise, il me semblait évident qu'une hiérarchie s'était mise en place dans ce groupe la. Je pris mon courage à deux mains et avançai vers les grosses souris.

« C'est bon, elle est déjà assez mal en point, vous allez la tuer ! Vous pensez que votre dresseuse sera fière de vous ? Que vous allez grimpez dans son estime si vous vous amusez à mettre à mort les pokémon qu'elle soigne ?!
- Maaaamaaa riiill maaaa ! Riiil mamaaaaaaaaaaariil !
- Je ne te comprends pas la bestiole ! Palabrer devant moi ne sert à rien ! Je veux que vous arrêtiez de faire mu muse immédiatement. Je jure qui si vous n'obéissez pas, vous en subirez de lourdes conséquences... C'est clair ?! »