Chapitre unique
J'adore ma maitresse, je serais prêt à tout pour elle…même à être quelqu'un d'autre…
Ma dresseuse est sans doute la meilleure amie que je n'ai jamais eue, et c'est grâce à elle que je suis aujourd'hui le plus heureux des évolis…Quand j'étais jeune, j'avais choisi de quitter le terrier familial afin de découvrir le monde, mais ma faiblesse m'a hélas freiné net dans mon élan…
J'ai depuis erré de ville en ville, de forêt en forêt, me réfugiant là où je le pouvais, ne cherchant plus à voyager, mais simplement à survivre…
Puis, alors que je cherchais désespérément un nouvel abri pour la nuit, je l'ai rencontrée …
Cette fille, qui se promenait apparemment, m'a vu, m'a pris dans ses bras, puis m'a conduit chez elle. J'ai bien sûr d'abord cherché à me débattre, à m'échapper, le humains étant nos ennemis mortels selon mon père, mais j'étais trop faible…
Il faisait bon dans son terrier, et le sol était très moelleux, bien qu'un peu trop en hauteur à mon goût. Et pendant qu'elle pansait les blessures que je m'étais fait au cours de mon voyage, je la regardais fixement dans les yeux, et sans que j'arrive à dire pourquoi, la méfiance qui m'habitait s'estompait lentement…Elle me donna ensuite de quoi manger, puis plus tard, elle me prit dans ses bras, me glissa sous le sol moelleux avec elle, puis je m'endormis sans même m'en rendre compte…
Quelques jours plus tard, la fille me fit ressortir, me disant qu'elle n'avait pas le droit de garder de Pokémons chez elle et que je devais m'en aller…
Mais je me sentais mal de la quitter sans avoir remboursé la dette que j'avais envers elle, je m'installais donc dans la forêt voisine pour veiller sur elle…
La fille découvrit très vite mon nouvel habitat, et revint ainsi très souvent pour que nous jouions pendant des heures…
Cela dura 2 ans…
Puis, un jour, elle vint me rendre visite, mais quelque chose était différent chez elle…Elle vint me dire qu'elle allait partir en voyage, et qu'elle aimerait que je me joigne à elle…
Je ne comprenais pas vraiment ce qu'elle voulait dire, mais j'avais cependant compris qu'elle allait s'en aller, et que je ne la reverrais sans doute plus si je ne la suivais pas…Le choix s'imposait donc de lui-même…
Nous avons donc voyagé pendant des mois, traversant de nombreuses villes, se faisant de nouveaux amis pokémons…La maîtresse s'était spécialisée dans ce qu'elle appelle des « concours pokémons », où la beauté passait avant tout…
Elle me rendit donc plus beau, et plus fort aussi…je fus d'ailleurs fier de lui rapporter sa première victoire, mais j'étais avant tout heureux…qu'elle soit heureuse…
Puis, un jour, alors que nous nous dirigions vers une ville appelée « Frimapic », nous avons fait une halte pour la nuit dans un centre pokémon.
La maîtresse a passé la soirée à regarder à la télé un concours se déroulant dans une lointaine région, tout en brossant ma fourrure délicatement, alors que je me détendais…
Puis, soudain, je l'entendis pousser une exclamation de surprise et d'émerveillement. Je levais les yeux vers l'écran, me demandant ce qui pouvait bien la mettre dans un tel état, et fus assez stupéfait de voir un garçon dirigeant un givrali, une des nombreuses formes que nous autres les évolis pouvions prendre…
Je regardais à nouveau la maîtresse, et en voyant son regard rempli de bonheur et d'émerveillement en réponse au spectacle que ce pokémon offrait, je pris une importante décision :
Si la maitresse aimait tant ce Givrali, alors je serai ce Givrali…
Le lendemain, dès l'instant où la maîtresse mit le nez dehors, je sortis de ma pokéball, et me mis à courir, m'arrêtant régulièrement pour l'obliger à me suivre…
Je continuais ce petit jeu jusqu'à ce que nous arrivions dans les routes enneigées qui conduisaient à Frimapic…En tant qu'évoli, je ressentais vaguement au loin la présence de l'objet qui m'aiderait à devenir ce givrali que la maîtresse aimait tant : Le rocher gelé.
Je me mis alors à courir vers cette source d'énergie qui m'appelait, tout en m'assurant que la maîtresse continuait à me suivre. Je l'entendais d'ailleurs régulièrement me dire de l'attendre, me demander où je courrais comme ça, mais je n'avais pas le temps de répondre, faire son bonheur passait avant tout !!!
Plus nous progressions, plus il devenait difficile de progresser à cause de la couche de neige qui devenait de plus en plus épaisse…Mais je m'en fichais, même la mort ne m'empêchera pas de rendre ma maîtresse heureuse, je deviendrai un givrali, même si c'est la dernière chose que je dois faire !
Je ressentais maintenant très fortement la présence du rocher gelé, il était tout proche…Je commençais également à ressentir un petit pincement à la poitrine, mais je n'y fis pas attention immédiatement, pensant que c'était tout simplement l'excitation.
Une tempête de neige s'était levée, mais je m'en moquais, mon objectif était à présent tout proche. Ma maîtresse me suivait toujours, difficilement, mais tenait heureusement le coup grâce aux vêtements chauds qu'elle avait mis en prévision de traverser cette route.
Quant à moi, j'avais un peu froid malgré ma fourrure chaude, mais une fois que je me serai transformé en Givrali, ce ne serait plus un problème.
Plus j'approchais de mon but, plus l'excitation en moi grandissait. Puis, enfin je le vis au loin : un énorme rocher couvert d'une fine pellicule de glace.
J'entendis ma maîtresse derrière moi, essoufflée, mais un simple coup d'œil me fit constater avec satisfaction qu'elle semblait hypnotisée par ce rocher qui scintillait d'une façon presque magique.
Je fonçais alors vers lui malgré le blizzard. Ca y est, j'allais enfin devenir un Givrali, j'allais enfin porter le bonheur de ma maîtresse, et donc le mien, à son comble !!!!!
J'étais le plus heureux des évolis du monde !!!!! Le rocher n'était plus qu'à quelques mètres…Jamais avant aujourd'hui je ne m'étais senti aussi heureux, j'avais envie de crier ma joie à la terre entière !!!!
J'ETAIS HEUREUX !!!!!!!!!
Puis soudain, le pincement que j'avais à la poitrine s'accentua, et la douleur que j'éprouvais me força à m'arrêter net.
D'abord surpris, j'essayais de comprendre ce qui m'arrivait, puis je vis avec horreur un halo blanc commencer à entourer mes pattes.
Non, non, non…je ne veux pas évoluer…je ne veux pas devenir autre chose qu'un Givrali…
Je me concentrai de toutes mes forces pour retenir cette puissance qui essayait de s'emparer de moi, et je vis avec soulagement le halo blanc s'estomper au bout de quelques secondes…
Cependant retenir cette puissance me demandait un énorme effort, il fallait que je touche le rocher gelé avant qu'il ne soit trop tard…
Je regardais ma maîtresse, et je pouvais sans difficulté lire l'inquiétude dans ses yeux. Elle avait sans doute compris que je n'étais pas dans mon état normal, peut être même m'avait elle vu briller pendant quelques secondes…
Malgré la douleur qui me transperçait, comme si elle cherchait à me faire abandonner la résistance que j'opposais à mon évolution, je continuais à avancer, lentement, chaque pas que je faisais me faisait souffrir le martyr…
Ca y était presque, le rocher était à portée…je tendis une patte et…
VLAM !! Je reçus un violent coup sur la tête qui me catapulta plusieurs mètres au loin.
Je me relevais tant bien que mal, et aperçus mon, ou plutôt mes agresseurs : Un Blizzaroi, accompagné d'un groupe de Blizzis.
Ils s'étaient probablement approprié ce territoire, et me considéraient donc tout naturellement comme un intrus…Je tentais une nouvelle fois de m'approcher du rocher, ce qui provoqua une riposte du groupe via des éclats glace. J'esquivais tant bien que mal en roulant sur le côté, puis tentais de lancer une Ball'ombre sur leur chef. Mais j'étais tellement affaibli que Blizzaroi n'essaya même pas de l'éviter, et s'en sortit sans la moindre égratignure.
Je tentais de m'approcher une nouvelle fois, mais je fus repoussé encore et encore, jusqu'à ce que je ne puisse même plus bouger…
J'entendis soudain avec horreur un hurlement strident, et relevais la tête : ma maîtresse avait tenté de me rejoindre, et était donc devenue la nouvelle cible de Blizzaroi et de sa bande. J'eus l'impression de me voir dans un miroir : ma maitresse essayait encore et encore de me rejoindre, même si elle se faisait rejeter à chaque tentative.
Les larmes me montaient à présent aux yeux : Non seulement je n'avais pas réussi à rendre ma maîtresse heureuse, mais en plus je l'avais mise en danger.
J'étais tellement pitoyable…
Je ne sais pas comment je m'y suis pris, mais je trouvai la force de lancer une nouvelle Ball'ombre qui toucha Blizzaroi dans le dos. Enervé, il oublia ma dresseuse pour s'attaquer une nouvelle fois à moi.
Mais retenir l'évolution drainait mes dernières forces, et je ne pouvais qu'encaisser les coups…
Finalement, alors que je heurtais le sol pour la énième fois, je sentis la maîtresse me prendre dans ses bras et me serrer de toutes ses forces. Je sentais ses larmes courir sur mes poils, et l'entendre sangloter en me disant d'arrêter, qu'elle ne voulait pas me perdre, déclencha en moi une sorte de réaction qui brisa le peu de résistance que j'opposais encore à l'évolution.
C'est donc finalement la mort dans l'âme que je laissai la lumière m'emporter, me transformer…
Je n'ouvris les yeux que lorsque je sentis que mon corps avait fini de changer. Je jetai un coup d'œil à ma queue qui avait désormais la forme d'un Y…
J'étais devenu un Mentali…pas un Givrali…
Je sautai des bras de ma maîtresse. Ma tristesse avait disparu. Le Blizzard rugissant reflétait bien ma nouvelle humeur…J'étais à la fois froid et furieux…furieux qu'ils aient osé voler le bonheur de ma maîtresse, furieux qu'ils aient osé voler mon bonheur…
Et je ne pensais plus qu'à les écraser.
Le combat qui s'en suivit fut très bref et très violent.
Les Blizzis volaient dans tous les sens grâce à mes nouveaux pouvoirs psychiques…et même Blizzaroi, qui me malmenait pourtant il y a à peine quelques secondes, ne faisait pas le poids face à moi…
Il finit par s'enfuir, terrorisé, à la suite de ses comparses vaincus.
La tempête s'était calmée, mais à défaut de flocons de neige, c'était désormais mes larmes qui frappaient le sol.
J'avais échoué dans ma tentative de la rendre heureuse, je n'étais pas devenu un Givrali…elle allait sans doute me détester maintenant, elle ne voudra plus de moi…
Puis je l'entendis s'approcher de moi. Je fermai les yeux, me préparant à ma punition…mais au lieu de ça, elle me prit à nouveau dans ses bras. Je la regardais, perplexe. Son visage, au même titre que son corps, était couvert d'égratignures. Des blessures qu'elle s'était faite en tentant de me protéger…
Elle avait les larmes aux yeux, et pourtant, elle souriait.
Puis, comme si elle avait compris mon problème, elle me dit : « Je te trouve très beau. ».
Les nuages noirs dans le ciel, et ceux de mon cœur, disparurent alors pour laisser place à un soleil radieux.