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Gigantomachia de Raidemo



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Informations

» Auteur : Raidemo - Voir le profil
» Créé le 22/10/2008 à 21:52
» Dernière mise à jour le 22/10/2008 à 21:52

» Mots-clés :   Aventure   Présence de personnages du jeu vidéo   Sinnoh

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Chapitre 4 - Voilaroc
Chapitre 4 : Voilaroc

De nombreuses petites villes se dressaient sur la côte nord, toutes plus différentes les-unes des autres. Eve et Akira comprirent rapidement pourquoi les dresseurs raffolaient de chacune de ces escales ; formant une petite communauté d'aventuriers qui lorsqu'ils se croisaient agissaient comme s'ils revoyaient de vieux amis, demandant des nouvelles de telle ou telle région, de telle ou telle ville, chaque nouveau lieu à découvrir était pour eux une véritable mine de connaissances. Et ils avaient soif de connaissances, débordant d'une fougue impétueuse et d'une sagesse propre à tous les voyageurs qui impressionna les deux enfants.
Laurent, le jeune homme noir au pijako, semblait préférer la terre ferme à la mer, et se précipitait à chaque escale pour visiter la ville dans sa totalité ou simplement, poussé par le confinement du bateau, aller galoper autant qu'il le pouvait dans les plaines qui jouxtaient le port. Elfa, la jeune femme blonde au macronium, était un fin gourmet, et ramenait de chaque étape quelques sucreries ou recettes qu'elle allait dénicher les dieux seuls savaient où.
Le jeune homme aux longs cheveux azurés qui avait combattu Eve s'appelait Soen, et comme les autres le goût du voyage se reflétait dans son regard saphir. Mais l'océan, plus que toute terre, était son champ de pérégrination favoris, et à chaque arrêt il se contentait de longer la côte sur le dos de ses monstres marins. Très vite, ce garçon à l'allure calme et souriante se prit d'affection pour les deux enfants, et ses derniers furent par ailleurs presque aussitôt adoptés par le groupe de dresseurs formé d'une petite dizaine d'adolescents. A partir de ce moment, la petite communauté passa ses journées à apprendre et à entraîner les jeunes novices de Frimapic. Eve et Akira, d'abord intimidés, s'étaient très vite attachés à la présence de leurs aînés, et la fillette reprit bien vite ses vieilles habitudes qui consistaient à tenir tête aux jeunes adultes.
Higuma et Fukuko intriguaient beaucoup les dresseurs, mais lorsqu'ils demandèrent d'où ils venaient, les enfants durent remarquer en rougissant qu'ils ne se rappelaient pas du nom de la région dont leur avait parlé le professeur. En outre, le nom de Zora ne disait rien à aucun des adolescents.

Quand le vent était trop fort ou que la pluie battait le pont, le groupe se retrouvait dans l'un des luxueux petits salons du paquebot. Dans ces conditions, Laurent, que sa vitalité débordante empêchait de rester en place bien longtemps, amusait la galerie par des pitreries acrobatiques ou des récits épouvantables qui lui étaient soit disant arrivés. Toujours perché sur son épaule, son pijako appuyait les aventures de son maître par des onomatopées enrouées. Puis, tous les autres dresseurs s'y mettaient, racontant maints évènements fabuleux en grignotant avec délice les derniers plats qu'Elfa avait amenés à bord.
Eve et Akira constatèrent rapidement que chacun des adolescents avait un don particulier pour raconter les histoires. Ils avaient aussi un goût démesuré pour le spectacle, et leurs récits étaient toujours un enchantement pour l'imagination des deux enfants.
En les voyant ainsi, ils comprirent que tous ces gens vivaient dans le même monde que leurs parents, des parents qu'ils n'avaient jamais connus qu'au travers de leurs lettres.

Le paquebot jeta l'ancre à Voilaroc un matin gris et humide. Les larges cheminées hurlèrent, et les passagers commencèrent à débarquer sur le pavé froid et détrempé du port. Sitôt qu'ils eurent posé le pied à terre, comme si un appel inaudible leur était lancé, les quelques dresseurs du petit groupe se dispersèrent, lançant un dernier geste en arrière avant de se noyer dans une foule animée.
Eve et son ami restèrent un moment sur le port, accrochés à un ponton en acier. Ils observaient avec nervosité le flux de personnes qui allaient et venaient dans la rue, et derrière eux les énormes entrepôts dans lequel on déchargeait les bateaux, et encore derrière, les surplombant de leur taille affolante, les immenses bâtiments de pierre grise aux tuiles pâles et tristes.
- Ah ! Vous êtes là !
Les deux enfants se tournèrent avec soulagement vers le jeune hommes qui marchait vers eux. Soen s'agenouilla et leur tendit un papier sur lequel étaient griffonnés deux séries de chiffres. Eve le prit et ils écoutèrent les explications du dresseur.
- Le premier, c'est le numéro de mon navigateur portable. Vous pourrez utiliser les bornes des Centres pour me joindre, ou bien vous acheter votre propre navigateur quand vous en aurez les moyens. Si vous avez besoin de me contacter en urgence et que vous n'avez pas accès à ces bornes, essayez de trouver une oisellerie, il y en a un peu partout dans le pays. Là, il vous suffira de leur remettre votre message ainsi que le deuxième numéro que je vous ai donné, et ils me l'enverront.
Le regard bleu pâle de Soen s'adoucit, et il caressa tendrement les cheveux des enfants.
- Désolé de ne pas pouvoir rester avec vous plus longtemps, mais je suis appelé ailleurs. Voilaroc est une grande ville, mais dites-vous que vous aurez d'autant plus de choses à y découvrir.
Ceci dit, et sans ajouter un mot de plus, le dresseur tourna les talons, lança son sac sur son épaule, et disparut à son tour dans une foule qui s'était encore épaissie.

Une grande ville, à n'en pas douter. Plus grande que ce que les deux enfants avaient pu imaginer. Comment ces gens pouvaient-ils s'y retrouver dans un endroit pareil ? Les mêmes rues aux pavés glissants et fumants sous la chaleur humaine, les mêmes maisons dont la hauteur dépassait la largeur, et ces interminables avenues de commerces qui étalaient leurs vitrines contre tous les murs.
Eve et Akira avaient eu bien de la peine à se convaincre de quitter le port. Soucieux de ne pas paraître trop perdus et sans défense, ils avaient appelé la présence de leurs pokémons, et Higuma marchait à présent aux côtés de sa dresseuse, humant les parfums forts et divers qui s'entremêlaient, ne sachant plus où donner de la tête. Akira retenait Fukuko dans ses bras, et l'oiseau hochait de la tête en observant le ciel pâle cisaillé par les toitures lointaines.
Soudain, Eve se précipita vers un grand panneau de bois. Le garçon courut pour ne pas la perdre au milieu du brouhaha. Elle fixa sa trouvaille avec attention, avant de se tourner vers son ami, un grand sourire aux lèvres.
- C'est un plan de la ville, lui dit-elle.
- Et où est-ce qu'on doit aller ? demanda Akira en s'approchant pour déchiffrer les noms de rues à moitié effacés.
- Au Centre Pokémon, affirma Eve. Le professeur Zora a dit qu'ils étaient obligés d'accueillir gratuitement les dresseurs là-bas.
Akira fit la moue, et resserra le col de son manteau brun. Il ne faisait pas aussi froid qu'à Frimapic, mais l'air était humide, et sentait l'essence, bien qu'ils aient pris soin de rester dans les rues piétonnes, loin du tintamarre des voitures qui s'exprimait quelques rues au sud. L'idée d'un endroit chaud et propre était plus qu'alléchante, mais le jeune asiatique sentait peser sur ses épaules le poids de son statut d'étranger, statut qui ne serait qu'appuyé par leur présence dans ce Centre.
Ne faisant rien pour briser le silence de son ami, Eve se tourna à nouveau vers le panneau pour essayer de se repérer par rapport à l'auberge de soins, et Higuma posa son museau sur le plan, comme pour chercher lui-aussi. Plusieurs personnes les bousculèrent sans s'excuser, ne se souciant pas de la présence d'enfants sur leur route. Un homme à l'allure noble percuta Akira sans s'en rendre compte, faisant trébucher ce dernier qui se rapprocha piteusement de la fillette pour se coller à elle. Il libéra l'une de ses mains de l'étreinte de Fukuko, et attrapa péniblement la manche de la petite aux cheveux roux. Celle-ci lui jeta un regard surpris.
- Si… si on rentrait ?
Un début de sanglot hachait sa voix étouffée, et ses yeux baissés menaçaient de libérer des larmes à tout instant. Eve tenta de le réconforter en lui disant que sitôt arrivés au Centre ils enverraient une lettre à l'oncle et à Ridley, mais un nouveau flux de personnes les secoua, et ils durent bientôt se résoudre à suivre leur route pour ne pas être écrasés sur place. Akira s'accrochait du mieux qu'il pouvait au manteau de son amie, et cette dernière se tenait fermement à la fourrure du cou d'Higuma pour ne pas le perdre dans les remous humains. Engloutis par cette masses d'hommes, de femmes et de quelques pokémons, ils durent avancer dans leur sens, entraînés vers ils ne savaient quelle destination.
Enfin, ils réussirent à se dégager au niveau d'une échoppe de souvenirs. Ils s'assirent sur les marches pour reprendre leur souffle. Fukuko, sentant son maître greloter sans dire un mot, se pelotonna un peu plus contre lui, émettant un faible roucoulement pour chasser sa tristesse. Eve était elle-même bien déçue et même profondément peinée ; elle n'avait jamais imaginé une telle arrivé. Elle avait pensé que tout serait simple, et que par leur seule volonté ils parviendraient à contourner tous les obstacles, mais le doute s'était déjà ancré en elle, même si elle tentait pour l'instant de s'en détourner.
- Eve, regarde.
Akira semblait avoir repris contenance, et pointait du doigt un panneau en fer forgé. La fillette leva les yeux vers l'objet qui portait l'inscription "arène". Un faible sourire lui échappa et elle se releva. Fukuko sauta des bras de son dresseur pour l'inciter à faire de même, et le jeune garçon se redressa dans un soupir entendu. Ils prirent la route indiquée par la pancarte, s'enfonçant un peu plus dans cette fourmilière gigantesque qu'était Voilaroc.

En traversant la ville pour rejoindre l'arène, Eve et Akira purent remarquer à quel point la disposition de Voilaroc était étrange ; le sol accidenté formait en plusieurs endroits des plateaux rocheux dont les bordures avaient été couvertes de terre et de goudron séché. Ils croisèrent plusieurs groupes d'adolescents léthargiques qui avaient investis ces surfaces à l'équilibre douteux, cigarette au bout des lèvres, écouteurs dans les oreilles ou pendant mollement sur leur torse. Ils semblaient complètement détachés de la réalité, et les deux enfants préférèrent s'offrir quelques détours pour éviter de croiser ces groupes de jeunes gens aux regards embrumés.
Au loin, les grues immenses faisaient grincer leurs carcasses usées. Au nord de la ville se dressait un très grand bâtiment qui surplombait le port. Il était entouré de deux antennes paraboliques gigantesques, d'un blanc sale et jauni. En suivant les grandes routes bétonnées, on s'enfonçait vers le sud, là où magasins, salles de jeux, casino se suivaient derrière une foule massée et étouffante. Le centre commercial aux briques couleurs terre s'élançait vers le ciel au centre de la ville, et ses portes vitrées étaient sans arrêt en mouvement, s'ouvrant et se fermant sur un flux continu d'hommes, de femmes et d'enfants. Sur le flot de voitures qui s'écoulait sans cesse s'étendait une tension constante, exprimée par des coups de klaxons furieux qui se déversaient dans toutes les allées.
Eve et Akira sentaient la douleur s'infiltrer dans leur cou à force de détailler les bâtiments à la hauteur imposante. Leurs yeux les piquaient, et ils avaient du mal à respirer, parce qu'ils étaient habitués à l'air vivifiant de Frimapic et que la fumée des pots d'échappements leur irritait la gorge. Fukuko avait profité de sa petite taille pour se blottir sous le manteau du jeune asiatique. Higuma grognait régulièrement, complètement désorienté au milieu de ces odeurs et de ces sons. Les deux enfants se sentaient comme leurs pokémons : perdus, vulnérables, à mille lieux de leur terre natale, comme s'ils avaient franchi la porte d'un autre univers.
Ils espéraient sincèrement que le simple fait de se rendre à l'arène leur redonnerait confiance, que rencontrer le champion de cette ville leur offrirait une illumination, et qu'ils pourraient enfin prendre un nouveau départ. Mais à la vérité, chacun d'eux ne pensait déjà qu'à rentrer, à retrouver leur foyer, l'oncle et Ridley. Les dresseurs qu'ils avaient rencontré faisaient partie d'un autre monde ; eux n'avaient aucun mal à se familiariser avec tous les nouveaux endroits qu'il découvraient, ils n'avaient pas peur de ces villes monumentales, de croiser tant de personnes inconnues.
« Peut-être qu'il était trop tôt… » songea Eve en se mordant la lèvre inférieure, les yeux rivés sur le trottoir inégal. Peut-être auraient-ils dû attendre encore un peu. Ils seraient parti tous les trois, Akira, Ridley et elle, si seulement elle avait su attendre encore quelques mois, quelques années peut-être. Ce monde immense lui faisait peur, et Frimapic lui paraissait à présent tellement petite, tellement loin, comme un rêve auquel on s'arrache pour retourner à la réalité. Elle n'avait jamais vu les choses ainsi ; devant tous les autres, enfants et adultes, elle s'était toujours vantée du jour où elle quitterait la petite ville pour vivre de grandes aventures. Dans ses aventures, Eve traversait des pays entiers, rencontrait des peuples lointains et des créatures dont elle ne soupçonnait pas l'existence. Dans ses aventures elle n'avait jamais peur, n'était jamais soumise au doute, car le doute ne l'avait jamais touchée tant qu'elle vivait à Frimapic.
Aujourd'hui, et à cet instant précis, ces aventures parurent à la fillette bien ridicules, et aussi lointaines que ces pays imaginaires. La langue râpeuse d'Higuma qui frôla sa main la ramena à la réalité, la secouant d'un frisson réticent. Devant eux se dressait un lourd bâtiment au mur blancs, solidement attaché au sol rocheux. Le béton avait laissé place à la pierre pure, et Eve put remarquer qu'ils étaient à présent sur les hauteurs qui longeaient les grandes avenues. Les premiers talus qu'ils avaient croisés près du port s'étaient élevé pour prendre ici l'apparence d'une petite falaise au bas de laquelle la circulation ne cessait d'affluer.
Eve et Akira, enfin sortis de leurs pensés, observèrent les environs. Le soleil avait finalement réussi à percer les nuages gris, et quelques rayons livides se déversaient sur eux. Devant la façade de l'arène s'étendait un parc miniature ; peu de végétation, mais une dizaine de bancs en pierre, et un chemin pavé qui menait aux portes vitrées. Ils se trouvaient visiblement à la frontière de la ville, car les arbres s'amassaient à la gauche de l'arène, en bas de leur promontoire de roche. Cette dernière paraissait moins austère que les autres bâtiments de Voilaroc, mais peut-être n'était-ce que l'effet du soleil bienvenu ou du fait qu'elle soit isolée du reste de la ville. De longues vitres translucides formaient l'avant de l'édifice, et au-dessus, un toit brun et luisant.
Les deux enfants allèrent s'assoir sur un banc, silencieux. Higuma grimpa aux côtés de Eve et celle-ci le caressa lentement. Ils restèrent ainsi pendant de longues minutes, observant l'arène et les quelques personnes qui traversèrent le parc. Les pensées de chacun étaient parfaitement claires pour l'autre ; et s'ils ne parvenaient pas à reprendre confiance après être entrés dans cette arène ? Ils étaient en sueur sous leurs lourds vêtements, fatigués parce qu'ils venaient de marcher pendant deux bonnes heures avant de trouver leur route, et qu'ils n'avaient pas mangé depuis qu'ils avaient quitté le bateau. Voilaroc avait tout fait pour les démoraliser, se disaient-ils.
Finalement, à la surprise de la fillette, le jeune asiatique se leva le premier et lui tendit la main. A ses pieds, Fukuko les observait. Sur le visage pâle du garçon un sourire timide prit naissance, et ses yeux noirs, encore emprunts d'hésitation, s'adoucirent comme pour tenter d'amadouer son amie. Eve lui sourit en retour, prit sa main et se redressa. Higuma sauta du banc et vint se placer contre sa dresseuse. Prenant une grande inspiration, les deux enfants se dirigèrent vers les portes vitrées.