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Smirnoff, 2ème recueil de Domino



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Informations

» Auteur : Domino - Voir le profil
» Créé le 02/10/2008 à 16:36
» Dernière mise à jour le 11/06/2009 à 06:45

» Mots-clés :   Humour   Johto   Romance   Sinnoh

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072 - Quand je ris au loup...
« C'est dans le besoin qu'on reconnait ses amis »
(Maxime populaire)

Il regarda la vallée.
Lui avait vécu assez longtemps pour connaître la suite de la vie.
Lui avait survécu à celui qui ne voulait pas vivre.
La mythologie comportait des pages blanches, des encarts, des pages détachables, rattachables à volonté. Il en faisait partie à sa manière, lui, l'être.
N'étant pas unique, il savait que sa condition n'était pas précaire. Lui avait rencontré des gens, s'était construit un avenir malgré la douleur, malgré la perte. Malgré le sang.
Malgré la douleur de n'avoir pu sauver celui qu'il considérait comme un père.
Recommencer sa vie alors que les débris sont encore à vue de nez. Encore en présence terrestre. Encore en vue.
Il n'arrivait pas à quitter les environs. Pourtant ça faisait déjà trois semaines. Trois semaines qu'il était mort. Impossible de vivre avec l'expectative d'être sans lui. Et il se nourrissait à peine. Il pouvait bien dépérir.
On lui apporta une baie.
Il la prit, regarda la donatrice et sourit à peine.
Devant eux, le Mont Memoria, dressé au milieu des mers.


-Tu-tu-tudu-tu…
-Etienne, il faudrait faire les courses…
Le prof releva la tête.
-Tu peux pas t'en charger, toi ?
Estelle soupira.
-Toi tu n'es pas sorti depuis trois jours. Vacances de la Toussaint c'est bien, en profiter pour s'aérer c'est mieux !
Etienne hocha la tête, l'air malheureux et songeur. Kenneth le regarda tout en faisant des œufs brouillés.
-Elle a pas tort. Ca te ferait du bien.
-J'y vais, j'y vais… mais pendant que je suis parti, évitez de vous reproduire !
Etienne sortit. Estelle soupira. Kenneth semblait peu enclin à sourire aux blagues d'Etienne.
-L'humour comme épée, le cynisme comme bouclier… soupira le CPE.
-Ouais… Tu lui as toujours rien dit pour toi et Judith ?
-Non… marmonna Kenneth. J'hésite à trouver une excuse pour sortir avec elle ce soir ou demain.
-C'est horrible, on essaie d'arrêter de se le coltiner !
-Je vois ça oui… soupira Kenneth. Et toi, avec Jonathan…
Estelle regarda Kenneth, surprise.
-Quoi, moi et Jonathan ?
-Tout le service ne parle que de ça, il n'y a que Linus qui -apparemment, parce qu'avec lui on ne sait jamais- ne soit pas au courant.
Estelle garda le silence. Kenneth s'étonna.
-Tu ne veux pas en parler ?
-Tu t'appelles Jonathan ?
-Non…
-Dommage pour toi ! Ca signifie que tu n'es pas concerné.
Kenneth s'étonna encore.
-Tu veux pas m'en parler ? On... T'es la sœur de mon meilleur ami !
-Ce qui fait de nous… des proches, mais certainement pas des amis ou des confidents.
Estelle continua à lire son magazine face à Kenneth qui hésitait à jeter tout ce qui restait de poivre dans les œufs brouillés. « Non, Kenny, résiste à la tentation d'étouffer la sœur de ton meilleur pote ! »

Etienne était avec Erwan, en pleines courses au marché de Doublonville.
-Sont lourds avec leur obsession des produits frais… Bonjour madame…
-MONSIEUR, UN BON GROS KILO DE POMMES DE TERRE POUR SEULEMENT….
Etienne partit au stand d'à côté.
-Salut…
-AH IL EST BON LE MONSIEUR LA ! IL EST BON IL EST BON IL EST BON !
Etienne soupira.
-Pour la 150ème fois : J'ai des sentiments, je ne suis pas une pute !
Il s'éloigna promptement vers le stand voisin sous le regard abasourdi de la marchande.
-Bonjour, un sac de poivrons verts… Et si vous criez je pars ! C'est comme les violeurs.
Le marchand s'abstint de toute parole tandis que les marchands voisins s'étonnaient. Etienne fit ses achats et regarda Erwan.
-Payé Cash. Certains vont criser. Pour le reste il y a Eurocard.
Erwan soupira. Il désigna le stand des bananes.
-Tu vas lâcher ton estomac un peu, oui ? C'est pas vrai, quel gros sac, tu vas finir obèse !!
Erwan frappa son maître qui lui donna une petite claque.
-EH !!! REVIENS ICI !!!
Etienne et Erwan tournèrent la tête vers le fond du marché.
-AU VOLEUR !
-Oh-ho, Robin… On dirait bien que la Bat-Lampe s'est allumée sur la lune de Gotham City… ou Gotham Project, c'est tout comme !
Etienne et son Pokémon coururent vers le lieu du saccage. La marchande semblait effondrée. C'est tout un cageot qu'on lui avait pris.
-C'était une espèce de gamin qui l'a pris ! J'ai à peine pu me retourner que mon cageot de patates était déjà parti !!
-Des patates, hm… De bonne qualité ?
-Excellente, pourquoi ?
-Vous m'en faites un sachet moitié prix si je vous retrouve le voleur ?!
Erwan se frappa le visage d'une paume. Etienne regarda son Capidextre.
-Quoiiiiiii !?
-Euh… Bah moi j'ai perdu de la marchandise ! J'peux pas vous faire de prix comme ça !
-Bon, c'est pas grave ! Nous nous contenterons de retrouver le voleur par nous même. Prêt, Erwan ?
Le Capidextre hocha la tête. Les deux compères scrutèrent le marché.

Toute sa vie on l'avait traité avec respect. Il voulait retrouver son dresseur. Chaque fois ce jour là repassait dans sa tête, indéfiniment.
Lui qui était aux côté de son maître.
Son maître qui lui disait « Reste là, avec mon frère. »
Puis il partait vers l'objet.
Et puis plus rien.
Plus de devenir, plus de combats avec le maître, plus de jeux, plus question d'être serviable.
Au lieu de ça, il fixait le Mont Memoria, persuadé que le maître allait revenir.
La femelle arriva. Cette fois elle semblait malheureuse. On l'avait attaquée. Il regarda la blessure. Le maître aussi arrivait parfois, blessé ou endolori, en ricanant.
Le Pokémon regarda la femelle, et il sourit.
Enfin il bougea de son emplacement et recommença à vivre.


-Bon, Erwan, t'as rien trouvé ?
Le Pokémon secoua la tête.
-HAN NON MES TOMATES !
Erwan se retourna mais Etienne le détourna.
-Nan ! Les tomates c'est dégueu, tant qu'à se faire récompenser, autant attendre qu'on vole un bon stand !
Erwan soupira, excédé par son maître, plus amer que jamais.
-OH NON, MES CHOUX-FLEURS !!!
-Tu vois, ce genre de vol sert l'humanité ! confirma Etienne à son Pokémon atterré.
-MES EPINARDS !
-Les télévangélistes sont sur le coup ou quoi ?
-MES BROCOLIS !!
-Ca se rapproche de l'œuvre divine en effet…
-EH, MES POMMES !
-Tu aimes les pommes, toi déjà ?!
Erwan soupira et courut. Il n'eu que le temps d'apercevoir une petite silhouette bleue.
-C'EST UN GAMIN EN BLEU !!!
-Il a une casquette noire je crois ! cria une marchande.
-Un gamin ?! soupira Etienne. C'est nul ! Si c'était un Pokémon, j'aurais pu en faire un cas stratégique. Encore que les cas de vol ne soient pas les plus intéressants… Les Pokémon voleurs le font pour se nourrir, rien de plus…
Erwan regarda son maître, lassé.
-Quoiiiiiiiii !
Le Capidextre chercha à flairer la piste de leur cible.
-T'as pas de flair !
Capidextre soupira et tenta de sentir.
-Tu n'as pas de flair ! Tu peux même pas sentir quand il y a une fuite de…
Erwan se releva et regarda son maître, dépité. Lequel s'aperçut de sa bêtise.
-Excuse-moi…
Erwan baissa la tête et partit dans une autre direction. Etienne soupira.
« Norbert avait raison… Je sème la misère autour de moi ! »
-E… Erwan ! Attends !
Le maître se mit à courir après son Pokémon qui s'arrêta à sembla menaçant à l'égard d'Etienne.
-P… Pardon, je ne voulais pas dire… que c'était de ta faute ou quoi…
Erwan sembla faire la tête à Etienne.
-Non Erwan… Je… Je ne voulais pas dire ça ! Pardon, vraiment !
Le Capidextre soupira et regarda son maître, l'air mauvais. Etienne baissa la tête, mal à l'aise.
-J'ai jamais pensé que c'était de ta faute. Je t'assure… Je ne mets pas la responsabilité sur toi !
On leur passa devant. La chose vola quelque chose à Etienne : Ses poivrons.
-Eeeeeh !!! J'en ai besoin pour mon barbecue !!!
Etienne courut vers le mystérieux voleur mais Erwan ne le suivit pas.
-E… Erwan ?
Le Pokémon refusait de bouger.
-Tu… Tu vas m'abandonner toi aussi ?!
Erwan regarda son maître, intrigué.
-Je… Je sens bien que Kenny et Estelle veulent partir… Linda est déjà partie… Mais… je veux pas que toi tu t'en ailles. Tu es important. Presque plus qu'eux tous réunis.
Erwan plissa les yeux. Ses mains virent serrer celle d'Etienne.
-Je sais que tu ne partiras pas mais… j'ai toujours peur que tu penses que je t'en veuille…
Le singe sauta dans les bras de son maître qui le serra affectueusement contre lui.
-On fait la paix ?
-Capi !
-Merci… Et je t'assure que je ne t'en veux de rien. Tu es parfait.
-IL EST LA !
-…pourquoi quand on fait une séquence émotion trop stylée, une foule en colère nous dérange ?!
Erwan haussa les épaules.
Etienne et Erwan suivent la foule en colère qui se dirigeait vers une ruelle.
-On va enfin découvrir l'identité de ce mystérieux voleur…
Etienne et Erwan passent à travers la foule menaçante et aperçoivent enfin le Pokémon en question. Surprise affichée.
-Ooooh….
-Capidextre !! jura le Pokémon.

Etienne, 1 an.
-Etienne, regarde papa ! Regarde papa, Etienne !
Erwan et Lucario réparaient un porche. Aux côtés de Coralie qui tenait Smirnoff, Frédo, encore trentenaire à l'époque.
-Merci bien, Erwan… C'est très gentil de votre part…
-C'est tout naturel, Fredo. La foudre avait salement amoché votre porche, on ne pouvait pas le laisser comme ça ! Hein, mon vieux Lucas ?!
Le Lucario hocha la tête.
-Vous m'avez déjà aidé pour tant de choses ! Ca me gêne presque !
-Mais non, il n'y a pas de quoi ! Je suis policier, pas inhumain ! Et puis…
Erwan se pencha vers son confrère dresseur.
-Il faut que j'impressionne ma femme, vous comprenez…
-Oh, Erwan !! soupira Coralie.

Estelle, 4 ans, était obligée de se coltiner Bébé Etienne dans un couffin à côté d'elle. Erwan vit sa fille tendre une cuiller vers Etienne.
-Non Estelle… Ton frère ne se mange pas !
La fillette retira sa cuiller, taquine, sous le sourire bienveillant de son père.
Lucario arriva pour mettre la table. Coralie soupira.
-Il va falloir que je renvoie la gouvernante si ça continue, tes Pokémon font tout le travail de la maison… soupira Coralie.
-Ah bah ça tu t'y attendais en m'épousant !
Coralie sourit et se plaça à côté de son mari qu'elle embrassa tendrement. Estelle poussa par inadvertance le couffin d'Etienne, rattrapé par Lucario qui regarda bébé Etienne. Le nourrisson ouvrit les yeux et aperçut les grands yeux fauves qui le fixaient. Il tendit les bras, cherchant à les attraper.

Erwan et son Lucario étaient présents dans la maisonnée durant les premières années de la vie d'Etienne et d'Estelle.
-Bon, Etienne, on t'emmène au parc avec Lucas ?
-Ok Papa !
Le gamin rejoignit son père, heureux de pouvoir faire ce genre de ballade.
-Et devine ce que j'ai vu ce matin : Un couple d'Heledelle. On arrivera peut-être à les voir s'installer dans un nid !
-Super, j'ai jamais vu !
-Je doute qu'on y arrive vraiment en fait, c'est rare qu'ils se laissent observer pendant qu'ils le font !
-J'espère au moins qu'on pourra…
-J'espère aussi, mon grand.

-Smirnoff…
Le patron d'Erwan, Gilles Plymouth, l'avait convoqué.
-Smirnoff, votre comportement est proprement IRRESPONSABLE et DANGEREUX.
Erwan baissa la tête, en faute.
-Vous déminez A MAINS NUES ! Sans protection ! Vous pensez que c'est un comportement à adopter ?!
Erwan soupira.
-J'ai pris l'habitude, monsieur, je suppose… J'ai… enfin j'ai constaté qu'avec les outils j'avais des difficultés à jauger mon aplomb sur les explosifs… A la main, je suis plus à même de…
-Je n'ai pas besoin d'entendre vos explications, Smirnoff ! Il en va de votre sécurité et de celle de vos collègues ! Dorénavant, je veux que vous utilisiez vos outils.
-Très bien, monsieur…
Erwan sortit, accompagné de Lucario. Erwan eut son sourire fatigué.
-Il a raison. Je me mets en danger les équipes de police en travaillant comme ça.
Lucario semblait peiné.
-Il va falloir changer nos façons de faire, mon vieux Lucas…

Le soir, Erwan, accompagné de son Pokémon fétiche, venait border Etienne.
-Allez, un bisou, bonhomme !
Etienne serra son père dans ses bras.
-Un gros dodo, et demain… Académie ! Ton premier jour en plus ! J'espère que je pourrais être là.
-Ouais. Moi aussi !
Erwan soupira.
-Je peux rien te garantir, bonhomme. Tu sais, le boulot…
-Je sais, papa.
-Quoi qu'il en soit… Je suis fier de toi, bonhomme.
-Merci, Papa !
Erwan sourit et sortit de la chambre de son fils, accompagné de Lucario.

Le lendemain, appel en urgence.
-Un sac à l'entrée du building Devon… Je dois y aller.
Coralie s'étonna.
-C'est le premier jour d'Etienne…
-Je sais… Ca me désole… Mais il faut que j'y aille !
-Sois prudent mon chéri…
Erwan embrassa sa femme.
-Tu sais bien que je vais revenir. Je reviens toujours.
Coralie sourit et laissa partir son mari.
Dans le couloir, Erwan passa devant la chambre de son fils qui laissait toujours la porte ouverte au cas où son père passerait alors qu'il serait encore réveillé. Le démineur entra dans la chambre, s'agenouilla et embrassa le front de son grand fils.
-A tout à l'heure, fiston.

-Qu'est-ce qu'on a, frangin ?
Simon regarda son frère.
-Le périmètre est sécurisé, Erwan. T'as plus qu'à y aller…
-Bon.
Erwan se saisit de sa boîte à outils.
-Euh… Erwan ?!
-C'est nouveau, je sais. Le patron.
-T'as pas l'habitude enfin…
-Je sais. Mais c'est pareil, en fait.
Lucario accompagnait son maître qui lui barra la route. Le maître regarda son Pokémon.
-Reste là. Avec mon frère.
Lucario s'étonna. Il s'en retourna vers Simon.
Erwan chercha à débloquer la bombe. Son manque d'aisance avec les outils ne manqua pas de lui donner des sueurs froides, mais…
-Voilà ! C'est fait !
Erwan souffla et s'essuya le front.
-Bon ! Bah je vais peut-être pouvoir

Et après ça plus rien.
Plus rien pour Erwan, du moins.
Il s'était trompé et avait accéléré le minutage de la bombe. En fait un seul mouvement avait scellé son destin, le moment ou il avait pris les outils.
Pour Erwan, la mort avait été directe et sans douleur. Autour, on a quand même vu un homme se faire souffler la moitié du corps. Une mort atroce, la mort qui attendait les démineurs de bombe un jour ou l'autre.

Lors de l'enterrement, Lucario fut relâché dans la nature en compagnie des autres Pokémon du policier. Lucario ne put jamais se résoudre à quitter l'endroit vers lequel était enterré son maître.


-Un… Riolu ?
Le chapardeur était donc un Riolu. Etienne resta abasourdi. Il connaissait la rareté de ces Pokémon. D'en voir un comme ça dans la nature, c'était assez exceptionnel pour être souligné.
-Le voilà !!
-C'est nos cageots !
-Et nos sacs !!
-Il a tout volé !
Etienne regarda Riolu qui était mort de peur. Le dresseur se mordilla les lèvres.
« Papa en avait un… Il en a eu un à un moment… C'était son premier Pokémon… »
-Qu'est-ce que tu as à dire pour ta défense ?! demanda une grosse marchande pas commode.
Etienne s'avança. Erwan prit le Pokémon entre ses pattes. Etienne tenait Erwan qui tenait Riolu.
-Euh… Il a à dire… « BYE-BYE ! »
Etienne se mit à courir à travers les rues de Doublonville, poursuivi par la foule.
-Génial !! Mes rêves se réalisent l'un après l'autre ! Maintenant, je suis poursuivi et détesté par une foule ! sourit Etienne alors qu'Erwan grimpait sur ses épaules et qu'il avait pris Riolu entre ses bras. Le Pokémon regarda son sauveur. Capidextre envoya des Météores vers la foule qui s'arrêta et se baissa pour esquiver. Etienne et Riolu en profitèrent pour s'échapper en compagnie de Capidextre. Ils se retrouvèrent dans une ruelle sombre.
-Ouf !! Bravo, Erwan ! Tu nous as sauvés !
Le singe sourit. Riolu était secoué. Etienne regarda le petit Pokémon, apeuré.
-Eh, ça va ? T'étais en train de chaparder pour manger ?
Le Pokémon sembla honteux. Etienne lui caressa la tête.
-Je te ramène chez-moi ?
Le Riolu se serra contre Etienne, heureux.

Estelle et Kenneth restaient hébétés.
-Euh…
-Hmm…
Etienne nourrissait le petit Riolu au biberon, en le tenant exactement comme un bébé. Kenneth se pencha vers Estelle.
-J'ai pas fait beaucoup de psycho mais il nous fait pas un transfert bizarre genre « Je fais une fixette sur mon bébé perdu et je prends ce Riolu pour mon enfant perdu » ?!
-En fait je crois qu'il se souvient surtout que notre père en avait un ! soupira Estelle devant le cynisme affiché de Kenny.
-On va te faire un coin sympa dans la maison. Dorénavant, tu es un des nôtres. Ok ? Un nain va grimper sur la table et servir une coupelle pleine de vin et on devra tous le boire… quand j'aurais trouvé un nain !
Le Pokémon chacal hocha la tête. Etienne le serra contre lui.
-Tu… es sur que ça va, Etienne ?
-Oui oui… Je suis content de l'avoir trouvé. J'ai l'impression que c'est la réincarnation de Papa.
Estelle soupira. « Kenny avait raison, il est timbré ! »
Et lui-même de se pencher vers Estelle.
-J'avais raison ! Il est fêlé !
-Je suis pas fêlé, Kenny… soupira Etienne.
-Etienne, tu… tu es sur que tu veux adopter ce Riolu ?!
-Bien sur.
-Tu vas lui donner un surnom ? se demanda Kenny.
Etienne réfléchit.
-Euh… Papa ne surnommait pas son Lucario, il lui avait donné un diminutif, je ne surnommerais pas ce Riolu. Mais le seul fait qu'il chapardait et vivait dans la rue me fend le cœur… Pauvre petite chose…
Estelle soupira.
-Inutile de discuter, je suppose.
-Tout à fait, somma Etienne.
-Très bien…
-Tu veux en discuter quand même ? demanda Kenneth.
-Non. Je suis bien, là, avec Riolu.
Etienne regarda son nouveau Pokémon en souriant. Le Pokémon sourit aussi en retour.
-Je sors. Je vais promener mes Pokémon… soupira Estelle, lasse d'utiliser toujours la même excuse pour aller voir la même personne.

Une fois éloignés du Mont Memoria, Lucario et sa compagne, une femelle Lucario, parcoururent la région ensemble. Ils étaient heureux. En fait, elle était aussi le Lucario d'un dresseur mort qui était aussi restée près du Mont Memoria. Ils avaient tous les deux la même raison d'être malheureux, même si elle réussissait quand même à se détacher de la montagne. Le simple fait d'être près du Mont suffisait à cette femelle.
Bientôt, le Lucario d'Erwan et elle eurent des petits. C'était arrivé très vite et très naturellement, à force de passer du temps ensemble, les deux Pokémon avaient fini par trouver en l'autre le refuge émotionnel suffisant pour refaire leur vie sauvage. Ils élevaient des enfants qu'ils lâchaient ensuite dans la nature, se réjouissant parfois d'en voir certains capturés par des dresseurs aimants.
Il faudra dire un jour aux grands de ce monde que les Pokémon aussi ont un deuil à faire. Qu'ils auraient bien besoin de rester avec leur famille plutôt que d'être relâchés comme ça. Lucario se demandait parfois ce que devenaient l'épouse de son maître ou même les enfants. Est-ce que le petit Etienne supportait bien la mort de son papa ? Lucario soupira, incapable de répondre à ces questions. Et malgré leurs années de pérégrinations, jamais ils ne retrouvèrent la trace de la famille Smirnoff. Les Pokémon n'ont qu'un seul défaut : Ils ne savent pas lire les adresses.

Le crépuscule de leurs vies se faisait sentir. Ils avaient atteint Johto après de longues années nomades, tantôt à rester à un endroit, tantôt à un autre. Jamais le couple de Lucario n'avait trouvé de terre ou ils se sentaient bien. La mémoire de leurs maîtres n'arrivait pas à les quitter. Le Lucario d'Erwan, le poil blanchi par les décennies, tenait un dernier œuf. Le dernier enfant qu'ils avaient eu, lui et sa compagne.
Les deux Pokémon s'écroulèrent en même temps, morts de leur belle mort de vieillesse et d'épuisement. Mais un sourire les animait dans cette mort. Le sentiment d'avoir bien vécu. D'avoir compté.
L'œuf roula et s'échoua en bas de la colline. Là, il éclot en Riolu. Le Pokémon observa droit devant lui le Bois aux Chênes. Pour autant, pas de parents autour pour veiller sur lui. Qu'importe, sa vie à lui commençait, et elle n'était que le prolongement de celle de ses ancêtres…


Kenneth resta là à regarder Etienne s'occuper de Riolu…

…et Estelle se rendit chez Jonathan. Lequel ouvrit.
-Tiens… Salut.
Elle entra, la mine boudeuse.
-Ca va pas ?
Elle soupira.
-Mon frère nous fait un retour en arrière total… Il a ramené un Riolu à la maison, et notre père avait un Lucario, alors ça lui ramène des tas de souvenirs mélancoliques…
Jonathan hocha la tête.
-Entre, je te sers quelque chose ?
-Non, j'ai donné l'excuse habituelle…
-Oh…
-Excuse-moi, je… Je lui ai encore rien dit. Je lui ai pas dit que toi et moi on s'était rapprochés.
-C'est pas grave, je comprends… Mais il serait peut-être temps de lui donner un coup de pied au derche à ton frère. J'veux dire… sinon il va continuer à gamberger sans sa copine. C'est important qu'il se sente secoué.
-J'ai pas envie… J'ai beau être la fille de la fratrie, c'est lui le plus fragile.
-Alors il faut que quelqu'un s'en charge à ta place.
Estelle s'étonna.
-Toi ?!
-Nan… Ton frère, c'est ton frère, c'est à toi de t'en occuper.
Estelle hocha la tête.
-J'veux bien m'asseoir et prendre une petite mousse.
Jonathan sourit.
-J'vais te chercher ça.

Kenneth soupira.
-Etienne, Linda ne reviendra pas, tu le sais, hein ?
Etienne plissa les yeux.
-Etienne, c'est un Riolu. Tu ne dois pas… le traiter comme un enfant ! Il faut que tu te détaches de cette image ! Que tu le gardes, Ok… mais traite-le comme n'importe lequel de tes Pokémon !
Etienne soupira et se mit à pleurer. Kenneth lui tapota le dos.
-Allez… C'est rien… Tu dois accepter les choses telles qu'elles sont… Il ne remplace pas Linda ou le bébé. C'est un Riolu, ton père en avait un, eh bah… Garde-le ! Mais inutile de te persuader que c'est un enfant.
Etienne continua à pleurer. Il posa Riolu par terre et se serra contre Kenneth.
-C'est rien… C'est rien.
-Elle me manque ! Elle me manque beaucoup…
-Je sais. Moi aussi elle me manque.
-J'voudrais la revoir, au moins savoir comment elle va…
-Ca c'est pas possible, Etienne. On sait même pas ou elle est…
Kenneth regarda Riolu.
-Eh, Etienne, regarde !
Riolu semblait vouloir consoler Etienne aussi. Le Pokémon sauta au cou de son nouveau maître.
-Il a l'air de vouloir te consoler aussi ! Comme quoi…
-Je m'en veux de vous embêter toi et ma sœur…
Kenneth plissa les yeux.
-Si vous voulez partir…
-Non, Etienne ! Je t'assure. Je suis là, et elle est là, et on est là pour toi !
-D'accord.
-Juste sortir de temps en temps !
Etienne sourit.
-Pour aller voir une fille ?
Kenneth fit la moue.
-Elle est très bien… on a pas mal accroché.
-Fonce, Kenny.
-Ce soir, je peux ?
Etienne hocha la tête en souriant.
-De te savoir heureux, ça me rend heureux.
Kenneth sourit.

Estelle était à moitié assoupie contre Jonathan sur le canapé. Lui caressait ses cheveux, pris dans la torpeur du silence. Elle était bien, contre son corps, se serrait de plus en plus, cherchant à apprendre les contours. Plutôt que caresser ses cheveux, il commença à caresser son visage.
-Il va falloir que je rentre.
-Oh…
-J'aime bien passer du temps avec toi. C'est agréable.
-Hm.
-J'ai pas envie de partir. Je voudrais rester ici dans ton appartement, avec toi.
-J'ai pas trop envie que tu partes non plus. Mais ton frère a besoin de toi.
Estelle regarda Jonathan. Son visage était à quelques centimètres de celui de l'ancien prisonnier.
-Et toi ?
-Moi je n'ai pas besoin d'aide. Tu es juste là parce que tu as peur que je me sente seul.
-Exact. Et tu te sens seul.
Jonathan ne répondit pas. Estelle se releva.
-J'y vais…
Jonathan hocha la tête.
Estelle se saisit d'une Pokéball et elle sortit sa Caninos, Nelly. Le grand brun s'étonna.
-Comme ça tu ne seras pas seul et ça me fera une bonne raison pour revenir.
-Tu me la laisses ?
-Oui. Elle est très bien élevée, je l'ai depuis toute petite. Tu en prendras bien soin, hein ?
Jonathan hocha la tête.
-Si telle est la mission que vous me confiez, madame…
Estelle sourit.
-A plus tard, Johnny !
Jonathan regarda Estelle partir, laissant le Pokémon chien aux côtés de Jonathan. Lequel permit à la créature de venir se blottir contre lui tandis qu'il regarderait la télévision.

Elle rentra et aperçut Etienne qui travaillait avec Riolu sur ses genoux.
-Eh ben… C'est l'amour fou…
-C'est juste un nouveau Pokémon, je ne vois pas en quoi il te gêne ! soupira Etienne.
-Non, tu as raison, il ne me gêne pas…
Estelle soupira et vit Kenneth qui regardait la télé.
-Et toi tu ne dis rien ?
Kenneth souffla.
-Etienne va bien. Tu devrais être contente.
Estelle soupira.
-Oui, pour l'instant, il va bien. Mais quand l'effet « Hey, j'ai un Riolu ! » va s'estomper… gare à la crise !
Estelle s'assit sur le canapé tandis qu'Etienne gratouillait la tête de son nouveau Pokémon bien aimé.