Bon je profite de n'avoir rien d'intéressant à faire ce soir pour vous parler d'un jeu qui m'a particulièrement marquée ces derniers mois :
To the Moon. Je l'ai découvert sur steam pendant les soldes des jeux indépendants, il m'a surtout tapé dans l'œil par ses graphismes.

To the Moon est un petit jeu développé par le studio indépendant
Freebird Games. Son genre n'est, contrairement à ce qui est officiellement annoncé, pas un Aventure RPG mais un roman interactif. J'en reparlerai plus loin.
To the Moon raconte l'histoire de deux scientifiques, le Dr Eva Rosalene et le Dr Neil Watts qui ont un métier très particulier : ils changent la vie des gens. Et ce grâce à une technologie qui permet d'affecter la mémoire de leurs patients. Mais ce processus est très dangereux pour les patients et endommage gravement le cerveau, aussi est-ce la dernière chose que ces derniers font dans leur vie. C'est pourquoi cette technologie n'est utilisée que sur des mourants afin d'exaucer leur dernier vœu.
Et c'est le vœu de Jonhy qu'ils vont devoir exaucer lors de cet opus, avant que ce dernier ne rende son dernier soupir. Une course contre la montre s'engage donc pour ces deux étranges docteurs, qui vont devoir remonter le temps dans les souvenirs de leur patient afin d'exaucer son dernier vœu...
Voilà le postulat de base de To the Moon. A chaque nouveau « saut » dans le temps et les souvenirs, on en découvre un peu plus le passé de cet homme, avec ses joies et ses malheurs. (Et parfois, vous en saurez un peu plus sur les personnages du joueur).
Le fait de découvrir les conséquences avant de découvrir les causes crée une tension scénaristique tout au long du jeu, et si certains rebondissements sont prévisibles, d'autres en revanche sont bien pensés et plus inattendus et apportent parfois un nouveau regard sur la vie de cet homme, ou soulèvent de nouvelles interrogations de tout ordre (sur le scenario, mais oblige aussi le joueur à s'interroger sur sa morale et ses valeurs.). Un certain nombre de choses ne sont dites qu'implicitement et relèvent aussi de l'interprétation du joueur.
Ainsi, les personnages de ce jeu sont relativement peu nombreux, mais ils ont une vraie psychologie, une histoire, et certains sont particulièrement hauts en couleurs. (Mention spéciale pour le Dr Watts.) J'en profite pour signaler que vous contrôlez alternativement Neil Watts et Eva Rosalene, au cours des trois parties (assez inégales, il y en a concrètement que deux) du jeu.
On y trouve également quelques histoires à l'eau de rose (après tout, l'Amour joue une place importante dans la vie des gens), mais ne sombre pas non plus dans le gnangnan de chez les Feux de la Guimauve.
Mais on y trouve également des sujets assez graves, et le plus omniprésent de tous est bien sûr la mort.
Le tout pour aboutir à un final en demi teinte, puisque chacun est libre de décider de son interprétation, et l'apprécier selon ses propres valeurs.
( Et un « second final » avec un cliffanger digne d'Inception. )
Mais n'allez pas croire que To the Moon est un jeu à pleurer, qui en fait des tonnes pour amener le joueur à investir sur le marché du mouchoir en papier.
Le jeu permet quand même de prendre du recul sur les événements qu'il raconte, grâce à un humour solide que ce soit dans la répartie des personnages ou dans les situations. On passe ainsi du rire aux larmes en l'espace de quelques secondes. On y trouve également quelques références à la culture geek (Matrix, Street Fighter, Hulk...), médicale voire à la culture populaire qui sont assez explicites et réelles, ce qui ancre un peu plus le jeu dans notre réalité.
Je n'en dévoilerai pas plus pour ne pas spoiler.
Sachez également que ce jeu bénéficie d'une traduction française soignée et de qualité, les répliques et les piques sont parfaitement retranscrites.
Enfin, quoi de mieux pour servir un scénario riche et solide, qui donne matière à réfléchir et à rêver, qu'une ambiance digne de ce nom ?
Le jeu a été créé à partir de RPG Maker XP.
Graphiquement, il se présente en 2D old school, mais une 2D particulièrement soignée, détaillée et colorée, avec des effets de lumière et de transparence bien pensés. Il y a assez peu de lieux, mais ils ont été designé avec un soin du détail très appréciable. Autres points importants : ce style graphique n'enlève rien à la force de narration du jeu, les âmes les plus sensibles pleureront quand même face à certaine scènes.
Musicalement le jeu est superbe. La bande son a une grande importance dans le jeu, puisqu'elle est partiellement liée au scénario. Vous pouvez ainsi passer de musiques douces et nostalgiques à des musiques sombres façon invasion de zombie, ou des musiques plus joyeuses lorsqu'un personnage fait son mariole de chemin, ou à des silences qui viennent souligner l'intensité dramatique de l'action.
Les sons d'ambiances sont également très importants, certains étant eux aussi liés au scénario et aux événements qui se déroulent.
Petit exemple de musique :
To the Moon : for river.Vous pouvez écouter l'OST entière :
ici.Il se dégage donc de ce jeu une ambiance particulière, un petit peu douce et poétique, qui vient appuyer le scénario et les sujets traités.
Il me reste à parler du gameplay : et c'est en cela que le jeu est difficilement classable dans un genre bien défini. Vous déplacez vos personnages soit avec la souris en cliquant à divers endroits de l'écran, soit grâce aux flèches multidirectionnelles. Vous examinez les objets et les gens en cliquant dessus lorsqu'une loupe, un sablier apparaît ou une bulle apparaît.
Le jeu comporte énoooormément de cinématique (en 2D, mais certains sont faites en petites animations.) En cela, le jeu se rapproche d'un genre Point & Clic.
D'autres commandes (au clavier uniquement) peuvent s'ajouter lors de certains passages particuliers. Ces commandes particulières sont affichées en bas de l'écran.
Ne vous attendez pas non plus à affronter des hordes de monstres, à combattre les Forces du Mal comme dans un RPG. Ce jeu n'a pas de combat. (Et pour ceux qui évoqueront le screen plus haut du combat contre l'écureuil, je dirais que c'est l'un des fameux passages aux commandes spéciales).
Il y a quelques énigmes à résoudre lors de la première partie du jeu, mais qui sont d'une simplicité enfantine. (Mais le but des développeurs n'était pas de faire un jeu de puzzle).
Le menu (qui s'ouvre avec un clic droit) se présente en trois parties :
les personnages, avec leur apparence actuelle, et une petite description,
les notes, qui sont des témoignages des éléments importants du scénario et sont mises à jour au fur et à mesure que ce dernier avance (ou parfois lorsque vous contrôler un autre personnage).
les objets de quêtes. Qui n'ont d'autres fonction que d'être des objets de quêtes.
plus les boutons sauvegarder (à n'importe quel moment du jeu il y a aussi des sauvegardes automatiques), charger et quitter. Il ressemble plus à un menu de RPG que de Point&Clic, sans en être vraiment.
Globalement si je devais donner un genre défini à ce jeu, ce serait donc le genre «Roman interactif. » D'un point de vue négatif, ça peut donner un jeu barbant et ennuyeux, où le joueur est quasiment complètement passif, et il ne plaira sûrement pas à tout le monde. D'un point de vue positif, on peut trouver ça reposant, et apprécier une nouvelle expérience de jeu à mi chemin entre le jeu et le roman/film.
J'en arrive au point qui déçoit : la durée de vie.
Le jeu ne dure en effet que 4 à 5 heures. Ainsi les lieux visités sont peu nombreux, les personnages également. On aurait peut-être gagné à étoffer encore le scénario, maisn on aurait peut-être perdu en cohérence et en qualité. Difficile de juger.
Le jeu se focalise entièrement sur le scénario, sa richesse, ses détails, sa cohérence, et n'offre donc aucune résistance, aucun niveau de difficulté, et globalement, le jeu se fait en une traite (il est assez difficile de décrocher du scenario).
Ainsi la durée est courte, mais la qualité est au rendez-vous tout au long du jeu, qui ne souffre finalement d'aucun temps mort.
On regrette juste de ne pas pouvoir être plongé dans cette ambiance un peu plus longtemps.
A 8-9 euros le jeu, on peut se demander si le jeu en vaut la chandelle. Mais les développeurs avaient pour ambition de faire un beau jeu, qui marque les esprits, et de fournir au joueur un jeu de qualité, pas de faire du rapport quantité/prix, et en cela, ils ont parfaitement réussi.
Le mieux reste encore de tester grâce à la version démo disponible sur le site du développeur, ou d'attendre les soldes Steam.
La BO est également disponible pour une poignée d'euros, dont la moitié est reversée à des oeuvres charitatives de lutte contre l'autisme.
Et enfin, j'ai vaguement parlé d'un cliffanger lors de la «seconde fin » (après les crédits, quoi), sachez qu'un deuxième opus To the Moon 2 a été annoncé (maintenant que le jeu a trouvé son public), ainsi que « A bird's story» qui se revendique comme étant son successeur spirituel. (les deux se situent après To the Moon d'un point de vue chronologique, et on retrouve certains personnages).
Voici le joli petit trailer de lancement qui accompagne le jeu :
Trailer 1Et mon préféré :
Trailer 3J'ai déjà fait ce jeu 3 fois, et j'ai jamais autant pleuré devant un jeu, il est vraiment excellent mais que je ne recommande pas à tout le monde.
(Dragi, si tu passes par là, je pense que c'est un jeu que tu sauras apprécier pleinement pour son histoire et son questionnement philosophique et moral, mais je te souhaite du courage pour y jouer s'il t'intéresse.)
PS : ce test a été écrit à l'origine pour Square palace, je l'ai un peu adapté, mais vous trouverez tous les screens, et le détail de la notation
En cliquant sur ce lien.