Supprimé par inadvertance en voulant faire un peu de ménage dans le blog ; on saluera ma compétence légendaire avec les ordinateurs...
Dans la lignée du texte précédent, un court texte qui peut faire office de présentation pour « Monsieur le ministre de l'Intérieur, homme rigide mais droit dans ses bottes à mi-temps ». Même si le concept d'être « droit dans ses bottes à l'occasion » n'est pas vraiment exploité ici, c'est parce que la scène ne s'y prêtait pas.
Spoiler« Qu'est-ce que j'ai raté, bon sang ? »
Depuis des heures et des heures, la question sans réponse s'impose à son esprit. Monsieur le ministre de l'Intérieur n'en peut plus, à force, ça commence à faire beaucoup d'un seul coup. Il n'en a pas assez avec les problèmes de sécurité nationale, non, faut qu'elle s'y mette elle aussi, qu'elle lui rappelle à quel point il est minable et qu'il ferait mieux de tout laisser tomber. Y en a plein d'autres, des couillons prêts à signer pour son poste, ça oui. Il en croise tous les jours dans les couloirs, c'est dire.
Il a l'air de quoi, affalé sur son canapé de bureau en manches de chemise, cravate lâche et cheveux en désordre ? D'une épave au mieux, d'un cadavre au pire. Le teint est blanc comme de la cire de bougie, les yeux morts, la bouche entrouverte n'attend que de l'air, la respiration se fait erratique.
Pas dormi depuis quoi, deux jours ? Non, moins. Il ne sait plus, il ne sait rien, il est tout perdu il n'a plus rien. Aucun repère à part le foutu son de la foutue horloge, les étagères remplies de bouquins qu'il n'a pas le temps de toucher, la fenêtre entrouverte et l'odeur de café. Dure torpeur maintenant qu'elle lui a interdit formellement de fumer — mais maintenant ?
Elle a joué avec les règles du jeu elle aussi, alors il peut faire ce qui lui plaît. Qu'est-ce qu'il reste du contrat entre eux deux, puisqu'elle l'a brisé ? En même temps elle aurait pu choisir pire... Rudolph n'est pas le plus mauvais choix quand on y pense. Bel homme à belle situation, sûr que ça plaît bien.
« Pourquoi pas... qu'est-ce que ça change au fond ? » qu'il soupire, main abattue sur le front poisseux de sueur.
Il se lève en même temps que la porte s'ouvre ; mademoiselle la rouquine entre, dossiers à la main, les pose sur le bureau, fait à peine attention à lui. Monsieur rajuste sa cravate et attrape le poignet de la secrétaire. Elle s'arrête net et se retourne, sourcil haussé et lèvres tordues en un demi-sourire intrigant.
« Monsieur Schutz ? Tout va bien ? »
Le susnommé bat des paupières un instant, lâche le poignet hâlé, hoche la tête. A l'impression de retrouver un équilibre qu'il n'a pas perdu. Drôle de brûlure au fond de la gorge sèche ; il a peut-être besoin d'eau, qu'en sait-il. Il se sent comme à moitié mort, à moitié vivant. A moitié de tout, à la vérité.
La femme croise les bras, incline à peine la tête d'un côté, s'interrogeant.
« Monsieur, vous êtes sûr... »
Il la coupe d'un signe de la main, doigts un peu tremblants, peau trop laiteuse qui prend une teinte jaunâtre sous l'éclairage du plafond. Les prunelles brunes sont vacillantes, mais en même temps assurées. Les lèvres remuent faiblement, pour demander, comme une vaine supplique :
« Vous n'auriez pas une cigarette ? »
Article ajouté le Mardi 06 Juin 2017 à 18h03 |
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