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Le repaire aux mille et un manuscrits
de Suroh

                   



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Départ (texte)
Stress.

Celui de la plongée dans l'inconnu, de l'absence de sommeil du lendemain, de la compagnie de ces ados bruyants, que j'envie et méprise à la fois. Je n'y suis pas, me contente de préparer mes affaires. C'est fait. Il me reste pourtant une heure, longue et courte, avant de monter dans la voiture pour y aller. Il fait nuit. Bientôt, alors que je m'en irai vers cette culture espagnole, ce stress augmentera, changera de nature, deviendra el estreso. Différent de celui que je ressens habituellement, plus lié au contact de cette culture que je ne côtoie pas souvent.

Bien. Me voilà dans la voiture. Les phares éclairent la noirceur de la nuit, je cherche des yeux la Lune, cette belle amie. Elle illumine un rideau de nuage qui me sépare d'elle, "elle aussi me laisse seul avec l'inconnu", pensai-je. Comme une couette posée sur la ville, la nuit nous tient chaud, nous offre ce confort que j'aime tant. Il ne pleut pas.

Crissements de freins, voiture qui s'arrête. "Je vais le chercher", dit mon père, qui rejoint la nuit. J'attends. Dehors, de la brume me fait sourire, me rappelle mon esprit embrumé par la fatigue et le stress, que je dissimule dans mon mieux. Je regarde par la fenêtre, admire ce paysage. J'apprécie la vision de ces arbres frissonnant dans le froid, du vent marin qui déplace les cailloux sur la chaussée. J'aime la manière dont tout ce tableau se déforme sans cesse pour créer de nouveaux agencements. Une porte s'ouvre, puis claque. Une autre suit le même schéma.

"Bonsoir !", crie ce copain. Je lui réponds mollement de ce mot d'usage. La clé tourne, le moteur se met en branle, la voiture est parcourue de vibrations puis roule. Silence vite brisé par un début de conversation.

Premier pas vers ce qui provoquait en moi ce stress. L'effacement. Ses questions et remarques s'emparent de cette identité que je leur montre à tous, qui n'est pas moi. Elle prend le pas, pourtant. Je m'efface devant cette façade qui répond en automatique. Ce n'est qu'un début avant que je ne puisse plus rester tel que je suis. La conversation suit son cours.

Bien des minutes plus tard, les pneus rappent le sol, protestent alors que la voiture se stabilise. J'ouvre la portière, mets un pied dehors, dans la nuit ; nouveau pas vers les ténèbres de l'effacement. Un bref moment de bonheur alors que tout le monde est concentré ailleurs, je suis de nouveau seul, je croise le regard de la Lune. Puis on m'interpelle, et le masque revient à moi. Je l'enfile.

Nous prenons les bagages, faisons chemin ensemble. Quelques remarques jetées pour éviter le silence. Nous rejoignons le groupe qui nous attend, derrière l'immense silhouette du car. J'embrasse mon père, rejoins mon ami déjà là depuis quelques temps, sa famille, affiche un sourire factice. Je sais qu'avec lui, plus tard, je pourrai laisser tomber le masque, mais la foule de nos camarades sera trop présente pour que je puisse rester fidèle à moi-même trop longtemps.

Le chauffeur nous interpelle. Nos bagages rejoignent la soute de l'imposant car. Nous nous réunissons. Certains rient, d'autres se serrent la main. Ambiance gaie, fausse. Nous montons dans le car, je m'installe, mon ami s'assied à mon côté. Lorsque tous sont en place, l'air se charge en humidité, se réchauffe et devient inconfortable. Une vitre me sépare de la bienveillante fraicheur où je peux en d'autres lieux me réfugier ; la lumière factice des lampes électriques remplace celle de la Lune.

Puis le car démarre et nous emmène, alors qu'il s'installe durablement en moi.

El estreso
Article ajouté le Dimanche 01 Octobre 2017 à 22h10 | |

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