Chips aux crevettes
de Eliii

Encore un texte faisant partie de mon vieux projet de roman, je n'en ai pas énormément, mais puisque je l'ai retrouvé, autant le faire partager. Il est bien plus court que le précédent, et est placé à un tout autre moment de l'intrigue (oui, parce que je n'écrivais pas toutes les scènes dans l'ordre, là-dedans, allez savoir pourquoi).


* * *

Alma avance péniblement, traînant ses jambes fatiguées à travers le bois sombre. Qu'est-ce qu'elle fiche ici, bon sang ? Flash. L'image d'un bel homme en costume noir, cheveux bruns, yeux bleus, sourire avenant. Elle se souvient. Le pressentiment. Elle connaît cet endroit, elle a déjà vu cet homme quelque part, elle reconnaîtrait ce sourire entre mille, elle doit savoir. Sa carcasse chancelante avance encore, un pied devant l'autre, allez, tu peux le faire.

"A quoi bon ?" songe-t-elle, tandis que ses chaussures s'enfoncent à demi dans la boue luisante à la lueur de la lune.

Son mari et ses enfants l'attendent à la maison, et pourtant, elle ne peut aller contre sa volonté. Au diable le foyer accueillant, elle a choisi la forêt glaciale de cette nuit d'hiver. Encore un pas, courage.

"C'est stupide !" hurle-t-elle, perdant le contrôle d'elle-même.

Alma entend des oiseaux s'envoler à tire d'aile ; le cri les a effrayés. La mère de famille s'arrête, les bras ballants, le souffle court, les yeux exorbités. Une silhouette sombre, à quelques mètres, la dévisage. Fait un pas, puis un autre, jusqu'à se retrouver à une centaine de centimètres.

Elle reconnaît ces traits fins et ce sourire.

Flash.

L'image d'un enfant richement vêtu, arborant une expression énigmatique, et ce sourire joueur qu'elle lui connaît.

Les jambes ne supportent plus son poids. Alma s'écroule dans la terre humide recouverte de feuilles séchées.