Gillette, La pie qui hante la ville

La partie parlant de Pokémon est écrit en noir et surtout en gras.



Au Locle (NE, Suisse), l'oiseau fauche des Pokémon au kiosque et de l'argent au bistrot.

Quand «Gillette» s'est envolée d'une terrasse de restaurant du Locle (NE) avec un billet de 20 francs dans le bec, cette pie a dépassé les bornes. «Elle est plus qu'envahissante quand elle arrache une boucle d'oreille à un client», s'énerve le patron du Casino, Bernard Lehmann.

L'oiseau sans-gêne dispute volontiers un filet de perche à un client. Il boit dans une tasse à café ou un verre de bière, chipe des cigarettes dans un paquet, et s'envole avec la monnaie. L'autre jour, des rockers genevois l'ont laissé faire, à la terrasse du restaurant. Pas craintive pour un sou, la pie s'est posée sur l'épaule du batteur pour... nettoyer sa dentition après un steak!

En ville, chacun a son anecdote: «Elle a béqueté l'aiguille d'une dame qui tricotait», dit une passante, en regardant «Gillette» qui traverse la route en sautillant sur un passage pour piétons. Visiblement, les plumes qui manquent à sa queue refrènent ses envols.

Née en captivité

D'où vient cette pie qui n'a peur de rien? «Elle a grandi en captivité, mais quand elle est devenue trop bruyante, son propriétaire a ouvert la cage», croit savoir Gilles Payot, président du FC Le Locle.

Les joueurs du club de 2e ligue sont les premiers à avoir repéré la pie, qui sautillait sur le terrain pendant les matches de la saison dernière. «Elle amusait la galerie, mais on craignait qu'un joueur ne la piétine», rapporte Gilles Payot. Surnommée «Gillette», en hommage au président du club, l'oiseau a été nourri, principalement avec du riz. En élargissant son rayon d'action, «Gillette» a trouvé un meilleur garde-manger que la buvette du terrain de foot.

Attirée par ce qui brille

En pleine ville, tout ce qui brille l'intéresse: la cellophane d'un paquet, le spoiler d'une voiture, et, surtout, la devanture d'un kiosque. «Elle m'a fauché des sachets de Pokémon», s'emporte la gérante Mary-France Sandoz, dont la patience est à bout.

D'un coup de bec, «Gillette» a blessé une cliente du kiosque, qui voit sa plaie s'infecter. Pour Mary-France Sandoz, il faut en finir avec cet oiseau agressif «sorti du film de Hitchcock»: les clients passent leur chemin quand la pie est à la caisse. Pour l'empêcher de déchiqueter les magazines de sudoku, des sacs en plastique sont fixés à l'arrière du présentoir.

«Voilà ce qui arrive quand on nourrit un oiseau», constate François Turrian, directeur romand de l'Association suisse pour la protection des animaux. Comment se débarrasser de «Gillette»? Une villageoise l'a déjà emportée dans un carton pour la lâcher dans la forêt, mais la pie est revenue. «Dépendante de l'homme, elle ne retrouvera plus son instinct naturel», prévient François Turrian.

Le garde-faune est alerté. Faudra-t-il capturer ou abattre «Gillette»? «Si le couperet tombe, nous lancerons une initiative «Sauvez Gillette...», prévient Gilles Payot.